ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS
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étoit une espece de prison magnifique, dont on ne
pouvoit s'évader.
J'ajoute ici que le labyrinthe de Crete, décrit par
M. de Tournefort dans ses voyages & dans les mémoires
de l'académie des Sciences, année 1702, n'est
point le fameux labyrinthe de Dédale; c'est un conduit
soûterrein naturel, en maniere de rues, qui par,
cent détours pris en tous sens, & sans aucune régularité,
parcourt tout l'intérieur d'une colline située
au pié du mont Ida, du côté du midi, à trois milles
de l'ahcienne ville de Gortyne: il ne sert de retraite
qu'à des chauve - souris.
3°. Le labyrinthe de l'île de Lemnos, selon Pline,
liv. XXXVI. >. xiij. étoit semblable aux précédens
pour l'embarras des routes. Ce qui le distinguoit,
c'étoit cent cinquante colonnes, si également ajustées
dans leurs pivots, qu'un enfant pouvoit les
faire mouvoir, pendant que l'ouvrier les travailloit.
Ce labyrinthe étoit l'ouvrage des architectes Zmilus,
Rholus, & Théodore de Lemnos: on en voyoit
encore des vestiges du tems de Pline.
4°. Le labyrinthe d'Italie fut bâti au - dessous de
Clusium, par Porsenna roi d'Etrurie, qui voulut se
faire un magnifique tombeau, & procurer à l'Italie la gloire d'avoir en ce genre surpassé la vanité
des rois étrangers. Ce qu'on en disoit, étoit si peu
croyable, que Pline n'a osé prendre sur soi le recit
qu'il en fait, & a mieux aimé employer les termes
de Varron. Le monument de Porsenna, dit ce dernier,
étoit de pierres de taille: chaque côté avoit
trois cens piés de largeur, & cinquante de hauteur.
Dans le milieu étoit le labyrinthe, dont on ne pouvoit
trouver la sortie, sans un peloton de fil. Audessus, il y avoit cinq pyramides de soixante &
quinze piés de largeur à leur base, & de cent cinquante
de hauteur, &c. Il ne restoit plus rien de ce
monument du tems de Pline. (D. J.)
Labyrinthe
(Page 9:150)
Labyrinthe, (Jardinage.) appellé autrefois
dédale, est un bois coupé de diverses allées pratiquées
avec tant d'art, qu'on peut s'y égarer facilement.
Les charn>illes, les bancs, les figures, les
fontaines, les berceaux qui en font l'ornement, en
corrigent la solitude, & semblent nous consoler de
l'embarras qu'il nous cause. Un labyrinthe doit être
un peu grand, afin cue la vûe ne puisse point percer
à - travers les petits quarrés de bois, ce qui en
ôteroit l'agrément. Il n'y faut qu'une entrée qui servira
aussi de sortie.
LAC
(Page 9:150)
LAC, lacus, s. m. (Hist. nat.) c'est le nom qu'on
donne à de grands amas d'eau, rassemblés au milieu
d'un continent, renfermés dans des cavités de la
terre, & qui occupent un espace fort étendu. En
général un lac ne differe d'un étang que parce que
l'étendue du premier est plus grande & son volume
d'eau plus considérable.
On compte des lacs de plusieurs especes; les uns
reçoivent des rivieres & ont un écoulement sensible;
tel est le lac Léman ou lac de Géneve, qui est
traversé par le Rhône, qui en ressort enfuite; d'autres
lacs reçoivent des rivieres & n'ont point d'écoulement
sensible: la mer Caspienne peut être regardée
comme un lac de cette espece; elle reçoit le Wolga
& plusieurs autres rivieres, sans que l'on remarque
par où ses eaux s'écoulent. Il est à présumer que les
eaux de ces sortes de lacs s'échappent par des conduits
souterreins. Il y a des lacs qui ont des écoulemens
sensibles sans qu'on s'apperçoive d'où l'eau peut leur
venir. Dans ces cas on doit présumer qu'il y a au
fond de ces lacs des sources qui leur fournissent sans
cesse des eaux dont ils sont obligés de se débarrasser,
faute de pouvoir les contenir. Enfin il y a
des lacs qui ne reçoivent point de rivieres & qui
n'ont point d'ecoulemens; ceux de cette derniere
espece ont ou perpétuellement de l'eau, ou n'en
ont qu'en de certains tems. Dans le premier cas, ils
sont formés par des amas d'eaux si considérables, qu'ils
ne peuvent point entierement s'évaporer; ou bien
cela vient de ce que les cavités dans lesquelles ces
eaux sont renfermées, sont trop profondes pour
que toutes leurs eaux puissent disparoître avant que
les pluies & les orages leur en aient rendu de nouvelles.
Quant aux lacs qui n'ont de l'eau que pendant
un certain tems, ils sont pour l'ordinaire produits
par des inondations passageres des rivieres qui
forment des amas d'eau qui ne subsistent qu'autant
qu'il revient de nouveaux débordemens qui leur
rendent ce qu'ils ont perdu par l'évaporation, ou
par la filtration au - travers des terres.
Les lacs varient pour la qualité des eaux qu'ils
contiennent; il y en a dont les eaux sont douces,
d'autres ont des eaux salées, d'autres sont mêlées
de bitume qui nage quelquefois à leur surface, comme
le lac de Sodome, que l'on appelle aussi mer
morte. D'autres ont des eaux plus ou moins chargées
de parties terreuses & propres à pétrifier, comme le
lac de Neagh en Irlande. Voyez Lough - Neagh &
Lough - Lene.
Différentes causes peuvent concourir à la formation
des lacs; telles sont sur - tout les inondations,
soit de la mer, soit des riviéres, dont les eaux, portées
avec violence par les vents sur des terres enfoncées,
ne peuvent plus se retirer. C'est ainsi que
paroit avoir été formé le lac connu en Hollande sous
le nom de mer de Harlem; la mer poussée avec force
par les vents, a rompu les obstacles que lui opposoient
les digues & les dunes; ayant une fois inondé
un pays, dont le niveau est au - dessous de celui de ses
eaux, le terrein submergé a dû rester an même état.
Les tremblemens de terre & les embrasemens souterrains
ont encore du produire un grand nombre de
lacs. Ces feux, en minant continuellement le terrein,
y forment des creux & des cavités plus ou moins
grandes, qui venant à se remplir d'eau, soit des
pluies, soit de l'intérieur même de la terre, montrent
des lacs dans des endroits où il n'y en avoit
point auparavant. Il est à présumer que c'est ainsi
qu'a pù se former la mer Morte, ou le lac de Sodome
en Judée. Il n'est point surprenant que les eaux de
ces lacs soient chargées de parties bitumineuses, sulfureuses
& salines, qui les rendent d'un goût & d'une
odeur desagréables; ces matieres sont dûes au terrein
qui les environne, ce sont les produits des embrasemens
qui ont formé ces sortes de lacs.
Toutes les parties de l'univers sont remplies de
lacs, soit d'eaux douces, soit d'eaux salées, de différentes
grandeurs; ils présentent quelquefois des
phénomènes très - dignes de l'attention des Physiciens. C'est ainsi qu'en Ecosse le lac de Ness ne gele
jamais, quelque rigoureux que soit l'hiver, dans un
pays déja très - froid par lui - même: ce lac est rempli
de sources, & dans les tems de la plus forte gelée
ses eaux ne perdent point leur fluidité, elles
coulent pendant que tout est gelé aux environs.
Voyez les Transactions philosophiques, n°. 253. On
voit dans le même pays un lac appellé Loch - Monar,
qui ne gele jamais avant le mois de Février, quelque
rigoureux que soit l'hiver; mais ce tems une fois
venu, la moindre gelée fait prendre ses eaux. La
même chose arrive à un autre petit lac d'Ecosse dans
le territoire de Straherrick. Voyez les Transactions
philosophiques, n°. 114.
De tous les phénomènes que présentent les différens
lacs de l'univers, il n'y en a point de plus singuliers,
ni de plus dignes de l'attention des Naturalistes que ceux du fameux lac de Cirknitz en Carniole; il a la propriété de se remplir & de se vuider
alternativement suivant que la saison est séche ou
pluvieuse. Les eaux de ce lac se perdent par dix huit
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trous ou entonnoirs qui sont au fond de son bassin.
En hiver il est ordinairement rempli d'eau, à moins
que la saison ne fût tres - seche; mais en été, lorsque
la sécheresse a duré quelque tems, il se vuide entierement
en vingt - cinq jours; cependant, pour peu
qu'il pleuve sortement pendant deux ou trois jours
de suite, l'eau commence à y revenir. Lorsque le
lac de Cirknitz est à sec, les habitans du pays vont
y prendre, pour ainsi dire à la main, tout le poisson
qui s'y trouve privé de son élément; cela n'empêche
point que, lorsque l'eau y revient, l'on n'y retrouve
de nouveau une quantité prodigieuse de très grands
poissons, & entre autres des brochets qui
pesent depuis 50 jusqu'à 70 livres. Si la sécheresse
dure pendant long - tems, on peut y pêcher, y chasser,
& y faire la récolte dans une même année. Ce
lac n'a point de saison fixe pour se mettre à sec;
tout dépend uniquement de la sécheresse de la saison,
une pluie d'orage sufsit quelquefois pour le
remplir. Ce lac est fort élevé relativement au terrein
des environs; la terre y est remplie de trous; cela
peut donc aisément faire concevoir la raison pourquoi
il est sujet à se vuider, lorsqu'il ne va plus s'y
rendre d'eau; mais comme il est environné de montagnes
de tous côtés, pour peu qu'il tombe d'eau
de pluie, elle se ramasse dans les cavernes & cavités
dont ces montagnes sont remplies; alors ces eaux,
amoncelées dans ces creux, forcent par leur poids
les eaux renfermées dans le réservoir souterrein qui
est au - dessous du lac à remonter, & à s'élever par
les mêmes trous par lesquels elles s'étoient précédemment
écoulées. En effet, il faut nécessairement
supposer qu'au - dessous du bassin du lac de Cirknitz,
il y a un autre lac souterrein ou un réservoir immense,
dont les eaux s'élevent lorsque les cavernes qui
y communiquent par dessous terre ont été remplies
par les pluies. Ces nouvelles eaux, par leur pression
& leur poids, forcent les eaux du réservoir souterrein
à monter; cela se fait de la même maniere que
dans les jets d'eaux ordinaires qui sont dans nos jardins.
En effet, à la suite des grandes pluies, on voit
jaillir l'eau par quelques - uns des trous jusqu'à la hauteur
de 15 à 20 piés; & quand la pluie continue, le
bassin du lac se trouve rempli de nouveau quelquefois
en moins de vingt - quatre heures. C'est par ces
mêmes trous que revient le poisson que l'on y retrouve;
quelquefois même on a vû des canards sortir
par ces ouvertures, ce qui prouve d'une maniere
incontestable la présence du reservoir souterrein,
dont on a parlé, & qu'il doit communiquer à des
eaux qui aboutissent à la surface de la terre. Ce lac,
que les habitans du pays nomment Zirknisku - jeseru,
a environ deux lieues de longueur & une liene de
largeur, & sa plus grande profondeur, à l'exception
des trous, est d'environ 24 piés.
M. Gmelin, dans son voyage de Sibérie, dit que
fout le terrein qui se trouve entre les rivieres d'lrtisch
& de Jaik est rempli d'un grand nombre de lacs
d'eau douce & d'eau salée; quelques - uns contiennent
des poissons, & d'autres n'en contiennent point;
mais un phénomène très - singulier, c'est que quelques - uns de ces lacs qui contenoient autrefois de
l'eau douce, sont devenus amers & salés, & ont
pris une forte odeur de soufre, ce qui a fait mourir
tous les poissons qui s'y trouvoient. Quelques - uns
de ces lacs de Sibérie sont si chargés de sel qu'il le
dépose au fond en très - grande quantité, & il y en
a d'autres dont on obtient le sel par la cuisson; celui
qui s'appelle schimjale - kul est si salé, que deux
seaux de son eau donnent jusqu'à vingt livres de sel.
Quelquefois à très - peu de distance d'un de ces lacs
salés, il s'en trouve d'autres dont l'eau est très douce
& bonne à boire. Il se forme dans ce pays des
lacs nouveaux dans des endroits où il n'y en avoit
point auparavant; mais cet auteur remarque avec
raison que rien n'est plus singulier ni plus digne de
l'attention des Naturalistes, que ces changemens qui
se font d'un lac d'eau douce en un lac d'eau amere
& salée dans une partie du continent fort éloignée
de la mer. Il est aussi fort surprenant de voir que
quelques - uns de ces lacs se dessechent, tandis qu'il
s'en forme de nouveaux en d'autres endroits. Voyez
Gmelin, voyage de Sibérie.
Lac
(Page 9:151)
Lac, (Hist. anc.) le respect pour les lacs faisoit
partie de la religion des anciens Gaulois, qui les
regardoient comme autant de divinités, ou au moins
de lieux qu'elles choisissoient pour leur demeure; ils
donnoient même à ces lacs le nom de quoiques dieux
particuliers. Le plus célebre étoit celui de Toulouse, dans lequel ils jettoient, soit en especes, soit en
barres ou en lingots l'or & l'argent qu'ils avoient
pris sur les ennemis. Il y avoit aussi dans le Gevaudan, au pié d'une montagne, un grand lac consacré
à la Lune, où l'on s'assembloit tous les ans des pays
circonvoisins, pour y jetter les offrandes qu'on faisoit
à la déesse. Strabon parle d'un autre lac très célebre
dans les Gaules, qu'on nommoit le lac des
deux corbeaux, parce que deux de ces oiseaux y faisoient
leur séjour; & la principale cérémonie religieuse
qui s'y pratiquoit, avoit pour but de faire
décider par ces divins corbeaux les différends, soit
publics, soit particuliers. Au jour marqué, les deux
partis se rendoient sur les bords du lac, & jettoient
aux corbeaux chacun un gâteau; heureux celui dont
ces oiseaux mangeoient le gâteau de bon appétit, il
avoit gain de cause. Celui au contraire dont les corbeaux
ne faisoient que becqueter & éparpiller l'offrande,
étoit censé condamné par la bouche même
des dieux; superstition assez semblable à celle des
Romains pour leurs poulets sacrés.
Lac des Iroquois
(Page 9:151)
Lac des Iroquois, (Géog.) c'est le nom d'un
grand lac de l'Amérique septentrionale, au Canada,
dans le pays des Iroquois, au couchant de la Nouvelle Angleterre. Il est coupé dans sa pointe occidentale
par le 305e degré de longitude, & dans sa
partie septentrionale par le 45e degré de latitude.
(D. J.)
Lac - majeur
(Page 9:151)
Lac - majeur ou Lac - majour, (Géog.) ce lac,
que les Italiens appellent lago maggiore, parce qu'il
est le plus grand des trois lacs de la Lombardie, au
duché de Milan, a beaucoup de longueur sur peu de
largeur en général: c'est le Verbanus lacus des anciens.
Il s'étend du nord au sud; & dans l'étendue
de 10 à 12 milles il appartient à la Suisse, mais dans
tout le reste il dépend du duché de Milan. Il s'élargit
considérablement dans le milieu de sa longueur, &
forme un golfe à l'ouest, où sont les fameuses îles
Borromées. Plusieurs belles rivieres, le Tésin, la
Magia ou Madia & la Verzascha se jettent dans le
lac - majour. Sa longueur, du septentrion au midi, est
de 39 milles sur 5 ou 6 de large. (D. J.)
Lac - Maler
(Page 9:151)
Lac - Maler, (Géog.) grand lac de Suede, entre
le Westmanland & l'Upland au nord, & la Sudermanie au midi. Il s'étend d'occident en orient, recoit
un bon nombre de rivieres, & est coupé de
plusieurs îles. (D. J.)
Lac supérieur
(Page 9:151)
Lac supérieur, (Géog.) lac immense de l'Amérique septentrionale, au Canada. On l'a vraissemblablement
ainsi nommé, parce qu'il est le plus septentrional
des lacs de la Nouvelle France. C'est le
plus grand que l'on conncisse dans le monde. On
peut le considérer comme la source du fleuve de S.
Laurent. On lui donne 200 lieues de l'est à l'ouest,
environ 80 de large du nord au sud, & 500 de circuit.
Son embouchure dans le lac Huron, est au quarante - cinquieme degré 28 minutes de latitude; il se
décharge par un détroit de 22 lieues de longueur.
(D. J.)
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