ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

RECHERCHE Accueil Mises en garde Documentation ATILF ARTFL Courriel

Previous page

"943"> & tous les autres visceres. La chair de ces animaux est assez bonne à manger; pour cela on les écorche, & on ne prend que la partic postérieure du corps avec les cuisses. Les grenouilles ont deux cris différens: l'un est le croassement que l'on entend dans le tems de pluie & dans les jours chauds aux heures où l'ardeur du soleil ne se fait pas sentir; l'autre cri est nommé par les Grecs & les Latins, ololo, parce que la prononciation de ce mot imite le cri dont il s'agit: comme il est propre aux mâles, les anciens les ont appellés ololyzontes. C'est au printems qu'ils crient ainsi en cherchant les femelles pour s'accoupler; ce qui se fait d'une maniere très - singuliere, de même que la naissance, l'accroissement, & les transformations des grenouilles. Rondelet, hist. anim. palustr. cap. j. Rai, synop. method. anim. quad. p. 245 & sequent.

Au mois de Mars les mâles font leur cri & courent après les femelles; dès que l'un des mâles en peut joindre une, il se jette sur son dos en l'assaillant par derriere, & la saisit à l'endroit de la poitrine, de sorte que les jambes de devant des mâles, passent de chaque côté derriere celles de la femelle, & se rejoignent sur le devant de sa poitrine. Le mâle se fixe dans cette situation, en entre - mêlant les doigts de l'un des pieds de devant avec ceux de l'autre, pour avoir un point d'appui qui l'empêche de glisser; il serre si étroitement la femelle, qu'il n'est presque pas possible de l'en séparer sans lui casser les bras: aussi quelque mouvement que la femelle puisse faire, quelque part qu'elle aille, le mâle reste inébranlable dans la même situation, avec une constance surprenante; car cet embrassement dure jusqu'à quarante jours consécutifs, selon que la saison est plus ou moins chaude.

Les oeufs de la femelle se détachent de l'ovaire qui est placé sur la matrice, se répandent dans l'abdomen, & entrent ensuite dans les trompes de la matrice. Chaque trompe est pelotonnée; mais lorsqu'elle est étendue, elle a jusqu'à deux piés de longueur; les oeufs parcourent cet espace & arrivent dans la matrice: lorsqu'ils y sont tous rassemblés, la femelle les pousse au - dehors par l'anus, car la matrice y aboutit; alors le mâle l'aide en la serrant plus fortement entre ses bras, & il répand sur les oeufs tandis qu'ils sortent, une liqueur prolisique qui coule de l'anus. Le mâle a des testicules placés près des reins, des vésieules séminales, & des canaux déférens qui aboutissent au rectum. Les oeufs que rend une grenouille sont au nombre d'environ onze mille, ils tombent tous à - la - fois au fond de l'eau, s'ils ne sont retenus par des herbes ou d'autres corps qu'ils rencontrent. Dès que la ponte est faite, le mâle quitte la femelle.

Comme les grenouilles n'ont aucune des parties de la génération placées à l'extérieur, il est assez difficile de distinguer leur sexe; cependant on peut reconnoitre le mâle par deux caracteres, l'un consiste en deux vésicules qui sont situées derriere les yeux, une de chaque côté, & qui se dilatent ou se contractent lorsque l'air y entre ou en sort; l'autre caractere se trouve sur le pouce des piés de devant, qui est fort épais, quelquefois très - noir & hérissé de plusieurs papilles assez semblables à celles qui sont sur la langue des boeufs: ces papilles se trouvent dirigées contre la poitrine de la femelle, dans le tems que le mâle la tient étroitement embrassée.

Chaque oeuf de grenouille est composé d'un petit globule noir qui est posé au centre & entouré d'un mucilage blanchâtre & visqueux; le globule noir est le foetus dans ses enveloppes, & la liqueur épaisse qui l'environne fait sa nourriture. Lorsque le paquet d'oeufs est tombé au fond de l'eau, chaque oeuf se renfle, & quelques jours après ils s'élevent tous & nagent dans l'eau. Le quatrieme jour après la ponte, l'oeuf a déjà pris assez d'accroissement pour que l'on puisse voir tres distinctement le foetus avec ses enveloppes au milieu & la matiere mucilagineuse qui les environne; au sixieme jour, le foetus sort de ses enveloppes & du mucilage qui est autour, alors il nage & il paroît à découvert sous la forme de tétard. Le mucilage s'est en partie dissous chaque jour jusqu'à ce tems, de sorte qu'il se trouve, pour ainsi dire, rarésié dans un plus grand volume, & qu'il ressemble dans cet état à un nuage; le tétard y rentre de - tems - en - tems pour y prendre de la nourriture & pour s'y reposer, lorsqu'il s'est fatigué en nageant, car ce nuage le soûtient sans qu'il fasse aucun effort.

Le tétard au sortir de ces enveloppes, semble n'être composé que d'une tête & d'une queue, mais la partie ronde que l'on prend pour la tête, contient aussi la poitrine & le ventre: dans la suite, les jambes de derriere commencent à paroître au - dehors; mais celles de devant sont cachées sous la peau qui recouvre tout le corps, même les jambes de derriere: enfin il se dépouille de cette peau; alors ses quatre jambes sont à découvert, il prend la forme de grenouille, & il ne lui reste de celle de tétard que la queue qui se desseche peu - à peu & s'oblitere en entier: lorsqu'elle a disparu & que la transformation du tétard en grenouille est parachevée, la grenouille n'est pas encore en état de se reproduire, ce n'est qu'après deux ou trois ans qu'elle est propre à la géneration, au contraire des insectes, qui s'accouplent dès qu'ils ont subi leur derniere métamorphose. Swammerdam, biblia naturoe, p. 789 & sequent. (I)

Grenouille (Page 7:943)

Grenouille, (Diete & Mat. méd.) les grenouilles sont très - rarement employées en Medecine, dit Juncker, conspectus Therapeioe gener. quoique plusieurs ayent recommandé de les appliquer vivantes sur la tête contre le délire qui accompagne les fievres masignes, ou sur la langue pour prévenir les angines. Le foie de grenouille est recommandé depuis longtems, dit le même auteur, pour calmer les mouvemens épileptiques; & il avance que l'expérience est favorable à ce remede, pourvû, dit - il, qu'on l'employe assez récent, & après avoir fait préceder les remedes généraux. La grenouille séchée, tenue dans la main, arrête quelquefois l'hémorrhagie des narines dans les sujets très - sensibles: c'est encore Juncker qui rapporte cette vertu.

Cet auteur n'a pas seulement soupçonné qu'il y eût un pays au monde où l'on donnât des bouillons de grenouille à titre de remede dans la plûpart des maladies chroniques, & sur - tout dans les maladies de poitrine. Voyez l'article Écrevisse, & l'article Nourrissant.

On retire par la distillation du frai de grenouille, une eau qui a été très - vantée comme coismetique, comme excellente contre la brûlure, les érésypeles, la goutte, la douleur de tête, &c. emplovée extérieurement; Sydenham la fait entrer dans les gargarismes contre les angines.

Les grenouilles entrent dans un emplâtre très - composé & fort usité, auquel elles donnent leur nom, mais qui est plus connu encore sous le nom d'emplâtre de Vigo. Voyez Vigo (emplatre de).

On fait avec les cuisses de grenouille différens ragoûts que les personnes les plus délicates peuvent manger sans inconvément, malgré l'épithete de chair glaireuse qu'on leur a donnée, mais aussi dont les sujets qui sont accusés d'avoir les humeurs acres ne doivent pas se promettre plus de bien que des bouillons de grenouille auxquels nous ne croyons guere, comme nous l'avons déjà insinué. (b)

Grenouille (Page 7:943)

Grenouille, (Imprimerie.) c'est en général une [p. 944] espece de vase de fer rond ou quarré, plus ou moins grand, au fond duquel est enchâssé un grain d'acier sur lequel tourne le pivot ou extrémité d'un arbre, d'une vis, &c. La grenouille de la presse d'Imprimerie a sept à huit pouces de diametre sur environ un pouce & demi de haut: en - dessous est une sorte de pie ou d'allongement quarré de dix à douze lignes de long sur environ trois pouces de diametre, qui s'emboîre dans le milieu du sommet de la platine, si elle est de cuivre, ou dans le milieu du sommet de la crapaudine, quand la platine est de fer. Voyez Crapaudine.

GRENOUILLETTE (Page 7:944)

GRENOUILLETTE, s. f. terme de Chirurgie, tumeur qui se forme sous la langue par l'amas de la salive dans ses reservoirs. Tous ceux qui ont parlé de cette maladie avant la découverte des organes qui servent à la secrétion de la salive, n'ont pû avoir des idées précises sur la nature de cette tumeur: on croit que Celse en parle dans le xij. chap. du VII. liv. qui a pour titre, de abscessu sub linguâ. Ambroise Paré dit que la grenouillette est formée de matiere pituiteuse, froide, humide, grosse & visqueuse, tombant du cerveau sur la langue. Fabrice d'Aquapendente met cette tumeur au nombre des enkistées, & ajoûte qu'elle est de la nature du melliceris; Dionis est aussi de ce sentiment, & il estime que la grenouillette tient un peu de la nature des loupes. Munnick instruit par les découvertes de l'anatomie moderne, ne s'est pas mépris sur la nature de cette maladie; il dit positivement qu'elle vient d'une salive trop acre & trop épaisse, laquelle ne pouvant sortir par les canaux salivaires inférieurs, s'amasse sous la langue & y produit une tumeur. Une idée si conforme à la raison & à la nature des choses, n'a pas été suivie par M. Heister; il a emprunté d'Aquapendente tout ce qu'il dit sur la grenouillette; & M. Col de Villars, medecin de Paris, dans son cours de Chirurgie, dicté aux écoles de Medecine, dit que la ranule est causée par le séjour & l'épaississement de la lymphe qui s'accumule sous la membrane dont les veines ranules sont couvertes. Enfin M. de la Faye, dans ses notes sur Dionis, reconnoit deux especes de grenouillette, les unes rondes placées sous la langue, qu'il dit produites par la dilatation du canal excrétoire de la glande sublinguale, les autres sont plus longues que rondes, placées à la partie latérale de la langue, & formées, dit - il, par la dilatation du canal excrétoire de la glande maxillaire inférieure; il ajoûte que la salive est la cause matérielle de ces tumeurs, par son épaississement & l'atonie du canal. Voilà le précis des diverses opinions qu'on a eues sur la nature & le siége de la grenouillette.

Ce n'est point une maladie rare, il n'y a point de praticien qui n'ait eu occasion de voir un grand nombre de tumeurs de cette espece: quand elles ne sont pas invétérées, la liqueur qui en sort ressemble parfaitement par sa couleur & sa consistance, à du blanc d'oeuf; la matiere est plus épaisse si elle a séjourné plus long - tems; elle devient quelquefois plâtreuse, & peut même acquérir une dureté pierreuse. Il sembleroit donc plus naturel de penser que l'épaississement de la salive n'est point la cause de la grenouillette, puisque l'épaississement de cette humeur est l'effet de son séjour. Cette maladie vient de la disposition viciée des solides; elle dépend de l'oblitération du canal excréteur: en effet on guérit toûjours ces tumeurs sans avoir recours à aucun moyen capable de délayer la salive, & de changer le vice qu'on suppose dans cette humeur; c'est une maladie purement locale; l'atonie du canal ne retiendroit pas la salive; & l'on n'a jamais obtenu la guérison de cette maladie que par le moyen d'un trou fistuleux resté pour l'excrétion de la salive dans un des points de l'ouverture qu'on a faite pour l'évacuation de la matiere renfermée dans la tumeur. J'en ai ouvert plusieurs; & il est presque toùjours arrivé, lorsque l'incision n'avoit pas assez d'étendue, que les levres de la plaie se réunissoient, & la tumeur se reproduisoit quelque tems après: les anciens ont fait la même observation. C'est la raison pour laquelle Paré préfere le cautere actuel à la lancette, dans ces sortes de cas. Dionis dit aussi qu'il a vû des grenouillettes qui revenoient, parce qu'on s'étoit contenté d'une simple ouverture avec la lancette. Pour prévenir cet inconvénient, il prescrit de tremper dans un mêlange de miel rosat & d'esprit de vitriol, un petit linge attaché au bout d'un brin de balai, avec lequel on frottera rudement le dedans du kiste, pour le faire exfolier ou se consumer. Il n'y a point d'auteur qui ne semble regretter que la situation de la tumeur ne permette pas la dissection totale du kiste. Les succès que Fabrice d'Aquapendente a eus en incisant seulement la tumeur dans toute son étendue, ne lui ont point ôté cette prévention; & M. Heister conseilleroit l'extirpation, si la nature des parties voisines qu'on pourroit blesser, n'y apportoit, dit - il, le plus grand obstacle; mais si ce prétendu kiste, si cette poche n'est autre chose que la glande même ou son canal excréteur dilaté par la rétention de l'humeur salivaire, on conviendra qu'il seroit dangereux d'irriter le fond de la tumeur, pour en détruire les parois, au défaut de l'extirpation qu'on estime nécessaire, & qu'on est fâché de ne pas trouver possible. Toutes les fois qu'on a fait une assez grande incision qui a permis l'affaissement des levres de la plaie, il n'y a point de récidive: Munnick recommande expressément cette incision; & Rossius met la petite ouverture qu'on fait dans ce cas, au nombre des fautes principales qu'on peut commettre dans la méthode de traiter cette maladie, & d'où dépend le renouvellement de la tumeur. Il ne faut pas dissimuler qu'il recommande aussi la destruction du kiste: mais pour parvenir à ce but, il ne propose que des remedes astringens & dessicatifs, dont l'effet est borné à donner du ressort aux parties qui ont souffert une trop grande extension, & à les réduire, autant qu'il est possible, à leur état naturel: c'est donc par pure prévention que cet autear croyoit dissoudre & consumer insensiblement le kiste avec des remedes de cette espece.

Les tumeurs salivaires sont les glandes même, & leurs tuyaux excrétoires dilatés par la matiere de l'excrétion retenue. Ainsi le nom de tumeur enkistée ne convient qu'improprement à la grenouillette, au moins est - il certain que si l'on appelle ces sortes de dilatations, tumeurs enkistées, elles ne sont pas du genre de celles dont on doive détruire & extirper le kiste; c'est bien assez de les ouvrir dans toute leur longueur, l'on peut même retrancher les levres de l'incision, dans le cas où ces bords seroient tumesies, durs, ou incapables de se rétablir à - peu - près dans l'état naturel, à cause de la grande extension que ces parties auroient soufferte par le volume considérable de la tumeur. J'ai observé que la guérison radicale dépendoit toûjours d'un trou fistuleux qui restoit pour l'excrétion de la salive; & lorsqu'il se trouve inférieurement derriere les dents incisives, il y a dans certains mouvemens de la langue, une éjaculation de salive très incommode. On peut prévenir cet inconvénient, puisque pour la guérison parfaite, il suffit de procurer à l'humeur salivaire retenue une issue qui ne puisse pas se consolider; il semble que la perforation de la tumeur avec le cautere actuel, comme Paré l'avoit proposée, seroit un moyen aussi efficace que l'incision, mais moins douloureux, & présérable en ce que l'on seroit assaré de former l'ouverture de la tumeur pour l'exerétion permanente de la salive, dans la partie la plus éloignée du devant de la bouche; & de mettre les ma<pb->

Next page


The Project for American and French Research on the Treasury of the French Language (ARTFL) is a cooperative enterprise of Analyse et Traitement Informatique de la Langue Française (ATILF) of the Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS), the Division of the Humanities, the Division of the Social Sciences, and Electronic Text Services (ETS) of the University of Chicago.

PhiloLogic Software, Copyright © 2001 The University of Chicago.