ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"840"> maladies, qui peuvent consumer la graisse la plus abondante en très - peu de tems: elle est forcée par les grands mouvemens musculaires, à parcourir ses cellules avec promptitude, & à se remêler dans le sang; & même Ruysch, (de gland. fabr. ad Boerrh.) rapporte avoir ouvert le corps d'un cheval très - gras, dont les cellules de l'épiploon furent trouvées rompues par l'effet d'une course forcée, au point qu'il s'étoit répandu plusieurs livres de graisse liquéfiée sous forme d'huile dans la capacité du bas - ventre; ce qui avoit causé subitement la mort de l'animal. Le même auteur, (loco citato) assûre aussi qu'il a eu occasion d'observer des malades dont la fievre avoit diminué en peu de jours le poids du corps de plus de trente livres.

La trop grande chaleur animale & l'agitation extraordinaire des humeurs, rendent la graisse plus fluide, la font rentrer plus promptement de ses cellules dans la masse des humeurs, & empêchent la réparation des sucs adipeux en les détournant de leurs couloirs secrétoires, en ne leur permettant pas d'y entrer à cause de la rapidité avec laquelle ils se presentent à leurs orifices, d'où ils sont comme entrainés par le torrent.

Malpighi prétend que le principal effet pour lequel la graisse est reportee dans la masse du sang, est d'en adoucir l'acrimonie que les circulations repétées lui font contracter, d'en envelopper les sels exaltés par la chaleur, le mouvement, & l'alkalescence qui s'en suit. Mais l'observation paroit contraire à ce sentiment, puisqu'on voit ordinairement que la fievre est plus ardente, & les humeurs plus disposées à rancir, à devenir acres dans les sujets gras, que dans les maigres, & que les animaux qui ont le plus de graisse, & dans lesquels elle est plus ferme, moins disposee à circuler, à être reportee dans le sang, sont d'un caractere plus doux & plus benin. Il est certain que la graisse ne peut pas être broyée par l'action des museles ou des vaisseaux, échauffée par le mouvement des humeurs au point d'être liquéfiée & remêlée dans la masse des humeurs, sans se corrompre & devenir extremement nuisible à l'économie animale. Mais n'est - il pas plus vraissemblable que les parties huileuses que fournit, que rend au sang la graisse par sa circulation naturelle, sans échauffement, sont destinées principalement à la formation de la bile & des autres humeurs, dans la composition desquelles il entre de ces parties? L'amas de graisse qui se fait dans l'épiploon, dont le sang veineux fourni à la veine - porte est abondamment chargé des parties huileuses qui s'y sont mêlees, ne semble - t - il pas prouver ce qui vient d'être avancé? Voyez Foie (Physiol.), Epiploon.

Quoi qu'il en soit, les usages de la graisse sur lesquels il n'y a pas de contestation, sont tous relatifs à des effets particuliers, topiques: ainsi celle qui est renfermée dans la membrane adipeuse sous la peau, contribue à defendre le corps des injures de l'air, & sur - tout du froid, en mettant à couvert un grand nombre de vaisseaux sanguins & de nerfs distribués sous les tégumens de toute l'habitude du corps. Elle sert aussi à tenir la peau tendue, égale dans sa surface pour l'arrondissement des formes dans les differentes parties ou il manqueroit sans ce moyen. C'est ainsi que la graisse contribue beaucoup à la beaute du corps, en empêchant que la peau ne se ride, en remplissant les vuides dans les intervalles des muscles, où il y auroit sans elle des entoncemens détectueux a la vûe, particulierement à l'égard du visage, sous la peau des joües, des tempes, où il se trouve dans l'embonpoint des pelotons de graisse qui soulevent les tegumens & les mettent de niveau avec les parties saillantes, dont les endroits qui seroient creux, se trouvent environnés. La même chose a lieu par rapport aux yeux, dont le globe est aussi enveloppé dans la graisse, excepté dans sa partie anterieure, pour qu'il soit d'un volume proportionné à la cavité de l'orbite, & comme pour mettre à couvert les muscles de ces organes des frotremens contre les parois osseuses qui les contiennent (attendu que toutes les membranes adipeuses sont insensibles par elles - mêmes), & pour faciliter le jeu des instrumens qui servent à les mouvoir. La graisse sert encore par la transudation huileuse qui s'en fait, à entretenir une certaine flexibilité, une mollesse convenable dans la peau, pour favoriser le jeu des vaisseaux & des nerfs de cette partie, & pour faciliter la transpiration cutanée, en conservant aux pores leur perméabilité. Elle est aussi d'une grande utilité aux muscles en général, en leur procurant la souplesse nécessaire à leur action, & en empêchant le frottement des fibres musculaires entr'elles & leur desséchement, qui contribue plus que la foiblesse à empêcher de se mouvoir les personnes qui sont dans le marasme.

La graisse facilite la sortie des excrémens & du fétus, en remplissant les intervalles qui se trouvent entre le rectum, le vagin, & les os du bassin: elle tient lieu de coussinet dans d'autres parties, & empêche qu'elles ne soient exposées à des pressions incommodes, douloureuses, & même à des contusions, comme aux fesses, au pubis, à la plante des piés. Elle n'est jamais abondante dans les parties où il n'y a que des muscles de peu de conséquence, comme au front, autour du crane; parce que la nature semble n'en avoir placé que dans les parties exposées à l'action, à l'agitation, au frottement; comme pour y servir de préservatif contre les mauvais effets de ces différens mouvemens. Elle ne paroît manquer que dans les parties où elle seroit nuisible, où elle generoit les fonctions, sans être d'ailleurs d'aucune utilité; comme dans le tissu cellulaire des membranes du cerveau. Il en est de même des parties où les mouvemens sont peu considérables, peu fréquens, par exemple, dans le tissu cellulaire, qui est sous la peau des paupieres, sous celle du prépuce, où elle seroit d'un poids, d'un volume incommode; dans la continuation de la membrane adipeuse, qui tapisse intérieurement la peau du scrotum. Dans ces différentes parties, les cellules analogues à celle de la membrane adipeuse, sont très petites, d'un tissu plus délié, & d'une structure qui ne permet pas aux arteres d'y déposer les parties huileuses, dont leur sang est chargé; d'autant plus qu'il y a peu de ces vaisseaux qui pénetrent dans les interstices de ces cellules: il n'y entre presque que des vaisseaux lymphatiques, qui rendent ces parties des tégumens plus susceptibles de bouffissure, de leucophlegmatie; lorsque la sérosité du sang est portée en trop grande abondance dans ces portions du tissu cellulaire, ce à quoi sont aussi sujettes celles de toutes les autres parties du corps; lorsque les cellules sont vuides de sucs adipeux, & qu'il n'y est porté au lieu de ces sues, que la partie aqueuse du sang, qui peut former des infiltrations de proche en proche, dans toute l'étendue de ce tissu, qui peut aussi dans certains cas, à défaut de graisse, se remplir d'air, & même avec de la graisse, être pénétre, distendu ultérieurement par le fluide aérien; ce qui forme des emphysemes de différente espece. Voyez Emphysème. Le même homme peut augmenter de volume du double par cette derniere cause, & il se peut faire une augmentation de poids aussi considérable par l'hydropisie de tout le tissu cellulaire (voyez Hydpopisie), comme par la trop grande réplétion de sucs adipeux qui forme une sorte d'exces d'embonpoint, qui est l'obésité, sans que les solides qui constituent essenriellement la masse du corps animal, acquierent rien de [p. 841] plus dans cet état. Voyez Nutrition. Et pour ce qui regarde les mauvais effets du trop de graisse, les moyens d'y remédier, voyez Corpulence, Obésité. (d)

Graisse (Page 7:841)

Graisse, (Diete, Pharmacie, & Mat. med.) la graisse prise intérieurement fatigue l'estomac, comme elle est fastidieuse à la bouche; les chairs pénétrées ou mêlées de gros morceaux de graisse, comme celles des oiseaux & des quadrupedes que l'on engraisse à dessein pour le service des bonnes tables, sont indigestes & rassasiantes. Les assaisonnemens aromatiques & piquans les corrigent cependant en partie; l'habitude & l'oisiveté des gens qui en font leur nourriture ordinaire, achevent de les leur rendre à - peu - près indifférentes. Un estomac peu habitué à ce genre d'alimens ne sauroit les supporter, & ils nuiroient plus infailliblement encore à celui d'un paysan vigoureux accoûtumé aux grosses viandes.

On employe quelquefois la graisse intérieurement à titre de remede; on donne des bouillons gras, par exemple, & du saindoux fondu contre l'action des poisons corrosiss.

On fait entrer les graisses fondues dans les lavemens adoucissans & relâchans; on les applique extérieurement comme résolutives, émollientes, & adoucissantes.

Les graisses sont la base la plus ordinaire des pomades, des onguens, des linimens; elles entrent dans quelques emplâtres.

On n'employe pas indifféremment les graisses de tous les animaux dans chacune de ces compositions pharmaceutiques; on demande au contraire toûjours une certaine graisse particuliere; & il y a du choix en effet quant à la perfection, à l'élégance, & surtout à la consistence du médicament, quoique ce choix soit assez indifférent par rapport à ses vertus medicinales.

On a cependant distingué les graisses de divers animaux par ces dernieres propriétés, & on a attribué à quelques - unes plusieurs vertus particulieres, à la graisse humaine, par exemple, à la graisse d'ours, des viperes, &c. Voyez les articles partieuliers.

La préparation des graisses qu'on veut conserver pour les usages medicinaux se fait ainsi. Prenez d'une graisse quelconque autant que vous voudrez, séparez - la des morceaux de peau, des gros vaisseaux, des tendons, &c. auxquels elle peut tenir; coupez - la par petits morceaux, battez - la dans un mortier de marbre, lavez - la plusieurs fois à froid avec de l'eau pure, faites - la fondre au bain - marie, passez - la à - travers un linge, & serrez - la dans un vaisseau convenable. (b)

Graisse de Verre (Page 7:841)

Graisse de Verre, ou Fiel & Sel de Verre, écume prise sur la surface de la matiere dont elle se forme avant que d'être vitrifiée. Voyez Verre.

GRAISSER (Page 7:841)

GRAISSER, v. act. (Art méch.) c'est enduire de graisse ou même d'huile. Ainsi les Cardeurs disent graisser la laine; c'est l'action de la rendre plus douce, plus sorte, & plus facile à être filée, en répandant de l'huile d'olive dessus.

GRAMEN PARNASSI (Page 7:841)

GRAMEN PARNASSI, Parnassia, que l'on rend en françois par la sieur du Parnasse, est une plante annuelle dont la tige d'un demi - pié de haut, est menue & chargée de feuilles presque rondes attachées à de longues queues rougeâtres, semblables à celles de la violette ou du lierre, & embrassées vers le bas d'une feuille sans queue. La fleur est rosacée ou blanche, composée de dix feuilles, cinq grandes & cinq petites, qui sont frangées: il succede à cette fleur un fruit ovale rempli de semence.

Cette plante vient ordinairement dans les prés & dans des lieux humides; on la seme sur couche. Quand on la veut placet dans les jardins, elle se peut élever en pots, & fait assez bien. (K)

GRAMINÉES (Page 7:841)

GRAMINÉES, (semences des plantes) Diete. Voyez Farine & Farineux.

GRAMMAIRE (Page 7:841)

GRAMMAIRE, s. f. terme abstrait. R. *GRA/MMA, littera, lettre; les Latins l'appellerent quelquefois Litteratura. C'est la science de la parole prononcée ou écrite. La parole est une sorte de tableau dont la pensée est l'original; elle doit en être une fidele imitation, autant que cette fidélité peut se trouver dans la représentation sensible d'une chose purement spirituelle. La Logique, par le secours de l'abstraction, vient à bout d'analyser en quelque sorte la pensée, toute indivisible qu'elle est, en considérant séparément les idées différentes qui en sont l'objet, & la relation que l'esprit apperçoit entre elles. C'est cette analyse qui est l'objet immédiat de la parole; & c'est pour cela que l'art d'analyser la pensée, est le premier fondement de l'art de parler, ou en d'autres termes, qu'une saine Logique est le fondement de la Grammaire.

En effet, de quelques termes qu'il plaise aux différens peuples de la terre de faire usage, de quelque maniere qu'ils s'avisent de les modifier, quelque disposition qu'ils leur donnent: ils auront toûjours à rendre des perceptions, des jugemens, des raisonnemens; il leur faudra des mots pour exprimer les objets de leurs idées, leurs modifications, leurs corrélations; ils auront à rendre sensibles les différens points de vûe sous lesquels ils auront envisagé toutes ces choses; souvent le besoin les obligera d'employer des termes appellatifs & généraux, même pour exprimer des individus; & conséquemment ils ne pourront se passer de mots déterminatifs pour restraindre la signification trop vague des premiers. Dans toutes les langues on trouvera des propositions qui auront leurs sujets & leurs attributs; des termes dont le sens incomplet exigera un complément, un régime: en un mot, toutes les langues assujettiront indispensablement leur marche aux lois de l'analyse logique de la pensée; & ces lois sont invariablement les mêmes partout & dans tous les tems, parce que la nature & la maniere de proceder de l'esprit humain sont essentiellement immuables. Sans cette uniformité & cette immutabilité absolue, il ne pourroit y avoir aucune communication entre les hommes de différens siecles ou de différens lieux, pas même entre deux individus quelconques, parce qu'il n'y auroit pas une regle commune pour comparer leurs procédes respectifs.

Il doit donc y avoir des principes fondamentaux communs à toutes les langues, dont la verite indestructible est antérieure à toutes les conventions arbitraires ou fortuites qui ont donné naissance aux différens idiomes qui divisent le genre humain.

Mais on sent bien qu'aucun mot ne peut être le type essentiel d'aucune idce; il n'en devient le signe que par une convention tacite, mais libre; on auroit pu lui donner un sens tout contraire. Il y a une égale liberté sur le choix des moyens que l'on peut employer, pour exprimer la correlation des mots dans l'ordre de l'énonciation, & celle de leurs idées dans l'ordre analytique de la pensee. Mais les conventions une fois adoptées, c'est une obligation indispensable de les suivre dans tous les cas pareils; & il n'est plus permis de s'en départir que pour se conformer à quelque autre convention également autentique, qui déroge aux premieres dans quelque point particulier, ou qui les abroge entierement. De - là la possibilité & l'origine des différentes langues qui ont été, qui sont, & qui seront parlees sur la terre.

La Grammaire admet donc deux sortes de principes. Les uns sont d'une verité immuable & d'un usage universel; ils tiennent à la nature de la pensee même; ils en suivent l'analyse; ils n'en sont que le résultat. Les autres n'ont qu'une vérité hypothétique

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