ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

RECHERCHE Accueil Mises en garde Documentation ATILF ARTFL Courriel

Previous page

"1053"> augmente; & par conséquent un objet peut disparoître lorsqu'on le placera à une si grande distance de nos yeux, que la peinture qu'il fera sur la rétine, soit insensible à cause de sa petitesse; & plus l'objet sera petit, plûtôt il cessera d'être visible: de - là vient que les petites parties d'un objet ne seront pas apperçues à toutes les distances; car la partie la moins sensible sera toûjours plus petite ou plus grande, proportionnellement à la distance plus ou moins grande de l'objet même. Ainsi la plus petite partie visible à la distance d'un pié, deviendra invisible à celle de deux piés; la plus petite partie visible à deux piés, disparoîtra à trois, & ainsi de toute autre distance à l'infini. Il résulte évidemment de ce que nous venons de dire, que lorsque l'oeil peut voir distinctement les petites parties d'un objet, nous devons juger qu'il est plus proche qu'un autre dont nous ne voyons point du tout les mêmes petites parties, ou dont nous ne les voyons que confusément.

Enfin le sixieme & dernier moyen consiste en ce que l'oeil ne représente pas à notre ame un seul objet, mais qu'il nous fait voir en même tems tous ceux qui sont placés entre nous & l'objet principal dont nous considérons la distance. Par exemple, lorsque nous regardons quelqu objet éloigné, tel qu'un clocher, nous voyons pour l'ordinaire plusieurs terres & maisons entre nous & lui; or comme nous jugeons de la distance de ces terres & de ces bâtimens, & que nous apperçevons en même tems le clocher au - delà de tous ces objets, nous concluons qu'il est beaucoup plus éloigné, & même qu'il est bien plus grand que lorsque nous le voyons seul & sans l'interposition d'aucun autre objet visible. Il est cependant certain que l'image de ce clocher qui est peinte sur la rétine, est toûjours la même dans l'un & dans l'autre cas, pourvû qu'il soit à une égale distance; d'où l'on voit comment nous connoissons la grandeur des objets par leur distance apparente, & comment les corps placés entre nous & un objet, influent dans le jugement que nous portons au sujet de son éloignement. Il en est à - peu - près de ce jugement comme de celui que nous formons sur la grandeur de notre durée, par le souvenir confus de tout ce que nous avons fait & de toutes les pensées que nous avons eues, ou, ce qui est la même chose, de la grandeur & l'étendue du tems qui s'est écoule depuis telle action; car ce sont ces pensées & ces actions qui mettent notre ame à portée de juger du tems passé ou de l'étendue d'une partie de notre durée: ou plûtôt le souvenir confus de toutes ces pensées & de toutes ces actions, est la même chose que le jugement de notre durée, comme la vûe confuse des champs & des autres objets qui sont placés entre nous & le clocher, est la même chose que le jugement que nous formons sur le clocher. Voyez essais & observ. de Medec. de la soc. d'Edimb. tome IV. p. 323 & suiv. Article de M. Formey.

Ajoûtons à cet article, d'après plusieurs philosophes, que quoique le sens de la vûe nous serve à juger des distances, cependant nous n'en aurions jamais eu d'idée par ce sens seul, sans le secours de celui du toucher. Voyez l'article Aveugle, la lettre sur les aveugles à l'usage de ceux qui voyent, & les articles Vision, Toucher, & c. Voyez aussi l'essai de M. Jurin sur la vision distincte & non distincte, imprimé à la fin de l'Optique de M. Smith.

Distance accourcie (Page 4:1053)

Distance accourcie, distantia curtata, signifie en Astronomie, la distance d'une planete au soleil réduite au plan de l'écliptique, ou l'intervalle qui est entre le soleil & le point du plan de l'écliptique où tombe la perpendiculaire menée de la planete sur ce plan. On l'appelle ainsi, parce que la distance réelle d'une planete au soleil est plus grande que sa distance réduite au plan de l'écliptique, puisque la premiere de ces distances est l'hypothénuse ou le grand côté d'un triangle rectangle, dont la distance accourcie est un des petits côtés. Voyez Lieu & Distange. (O)

Distance (Page 4:1053)

Distance, (Art milit.) c'est dans l'ordre de bataille, l'espace ou l'intervalle qu'on laisse entre les corps de troupes dont l'armée est composée, ou qui sont rangés en ordre de bataille ou en ligne. Voyez Armée. Les rangs des différens corps de troupes doivent avoir des distances reglées. M. le maréchal de Puysegur donne douze piés à la distance d'un rang à l'autre dans le bataillon; il prétend que c'est celle qui convient le mieux pour les marches & les différens mouvemens du bataillon. En bataille les files n'ont point de distance entr'elles, il faut au contraire qu'elles se touchent pour être plus en force: on leur donne deux piés d'épaisseur, pour l'espace occupé par le soldat. Dès que les distances des rangs & des files en bataille sont reglées, « il faut (dit l'illustre maréchal que nous venons de citer) que celle des files & des rangs en marchant, aussi - bien que pour tous les mouvemens, soient les mêmes qu'en bataille; car dès que ces distances sont reglées pour un bataillon en bataille, si on le fait marcher tout entier, il ne doit en marchant ni les étendre ni les resserrer, afin que par - tout où l'on peut l'arrêter dans sa marche, il soit toûjours en bataille; ce qui ne seroit pas s'il les changeoit ». Art de la guerre par M. le maréchal de Puysegur.

Des troupes qui combattent ne peuvent avoir trop d'attention à garder leur ordre de bataille & leurs disiances; il est impossible qu'elles se soûtiennent & qu'elles agissent, lorsqu'elles font une espece de masse sans ordre; c'est ce qui est bientôt remarqué de l'ennemi. « J'ai vû (dit M. le duc de Rohan dans son parfait capitaine)Henri le Grand poursuivant huit cents chevaux avec moins de deux cents, juger qu'ils ne rendroient point de combat, parce qu'ils se confondoient & n'observoient point leurs distances; ce qui arriva comme il l'avoit prédit ». (Q)

DISTENSION (Page 4:1053)

DISTENSION, s. f. Ce terme a en Medecine plusieurs significations.

Il sert quelquefois à exprimer la trop grande dilatation des arteres & des autres vaisseaux. Voyez Vaisseau.

On l'employe quelquefois pour signifier l'allong ment de tout le corps, qui accompagne le bâillement.

Il signifie aussi dans certains cas, une espece de convulsion qu'on appelle tetanos. (d)

DISTICHIASIS (Page 4:1053)

DISTICHIASIS, s. f. terme de Chirurgie, incommodité des paupieres, qui consiste à avoir deux rangs de cils. Voyez Cils.

Ce mot est formé de DI/S2, deux fois, & STI/XOS2 ou STI=XOS2, ordre, rang.

Dans le distichiasis, par - dessus les cils ordinaires & naturels, il en croît un autre rang extraordinaire, qui picotant la membrane de l'oeil, y cause de la douleur, & y attire des fluxions & inflammations accompagnées d'un écoulement continuel de larmes, & suivies fort souvent d'ulceres qui sont cause de la perte de la vûe. Voyez Paupieres.

On guérit le distichiasis en arrachant avec de petites pincettes le second rang de poils, & brûlant les pores par où ils sortent. (Y)

DISTILLATEUR (Page 4:1053)

DISTILLATEUR, s. f. (Art méch.) artiste qui a le droit de distiller toutes sortes d'eaux, d'esprits, d'huiles, d'essences, de liqueurs, & c. en qualité de membre d'une communauté de ce nom, établie en 1699. Cette communauté a deux jurés, dont l'un entre en charge & l'autre en sort tous les ans. L'apprentissage est de quatre ans, le compagnonage de deux: un maître ne peut faire qu'un apprenti à la [p. 1054] fois: il faut avoir vingt - quatre ans pour être admis au chef - d'oeuvre, dont il n'y a que les fils de maîtres qui soient dispensés: les veuves peuvent faire travailler, mais elles ne peuvent prendre apprenti.

DISTILLATION (Page 4:1054)

DISTILLATION, (Chim.) La distillation est une opération chimique qui consiste à détacher par le moyen du feu, de certaines matieres renfermées dans des vaifseaux, des vapeurs ou des liqueurs, & à retenir ces dernieres substances dans un vaisseau particulier destiné à les recevoir.

Les substances séparées du corps soûmis à la distillation, sont connues dans l'art sous le nom de produits; & la partie la plus fixe de ce corps, celle qui n'a pas été déplacée par le feu, sous celui de résidu: c'est celle - ci que les anciens Chimistes désignoient par le nom de caput mortuum (voyez Caput mortuum). Il paroît qu'on se feroit une idée plus exacte des effets de la distillation, si on mettoit le résidu au rang de ses produits: je le considere toûjours sous ce point de vûe, & je l'appelle produit fixe; j'appelle les premiers produits mobiles. Au reste il n'est pas essentiel à une distillation de laisser un résidu, elle peut séparer un corps en divers produits tous volatils; c'est ce qui arrive dans la distillation d'une résine pure. Voyez Résine.

Les produits mobiles de la distillation peuvent être portés par la disposition de l'appareil, en - haut, à côté ou en - bas: c'est pour cela que la distillation a été divisée en trois especes; savoir la distillation per ascensum, ou droite (recta); la distillation oblique ou latérale, per latus; & la distillation vers le bas, per descensum.

C'est toûjours sous la forme de vapeur que les produits mobiles se séparent du corps à distiller, dans les deux premieres especes de distillation; car un corps ne peut s'élever par le feu que sous cette forme: & l'appareil de la distillation latérale même est disposé de façon, que les matieres séparées sont obligées de s'élever (voyez Cornue, la Planche & la suite de cet article.) Aussi ces deux premieres especes de distillation ne different - elles qu'en ce que dans la premiere les vapeurs se condensent dans le haut de l'appareil dans un chapiteau à gouttiere, & que dans la seconde elles ne se condensent utilement que dans le côté. Le produit mobile de la distillation per descensum, peut se séparer, & se sépare même dans tous les cas où cette distillation est pratiquée sous la forme d'un liquide.

Ces trois especes de distillation ne sont dans le fond, & quant à la maniere d'altérer les corps traités par leur moyen, qu'une même opération; & les seules raisons de préférence dans l'usage, sont des commodités de manuel, des vûes pratiques, oeconomiques, qui seront exposées dans la suite de cet article.

Tout appareil de distillation est composé nécessairement d'un vaisseau qui contient les matieres à distiller, & d'un vaisseau destiné à recevoir les produits mobiles. Le premier peut être un vaisseau d'une seule piece, ou être formé de plusieurs: on multiplie quelquefois le second, pour divers motifs qui seront exposés plus bas.

Les vaisseaux employés à contenir les matieres à distiller, sont pour la distillation droite, l'alembic d'une ou de plusieurs pieces (voyez Alembic, Cucurbite, Chapiteau ); le matras recouvert d'un chapiteau, qui n'est proprement qu'un alembic trèsélevé (voyez Matras); pour la distillation latérale, la cornue ordinairement d'une seule piece, la cornue tubulée, & la cuine, qui est une cornue d'une forme particuliere (voyez Cornue); le tonneau armé d'un globe de cuivre à sa partie inférieure; invention ingénieuse, mais très - peu utile de Glauber (fourneaux philos. page 111. voyez l'article Feu); & l'alembic des distillateurs d'eau - de - vie, qui est recouvert de la tête de more au lieu du chapiteau à gouttiere (voyez Chapiteau); & enfin pour le descensum, l'entonnoir, le creuset à fond percé de plusieurs trous, & le descensoire, descensorium, de Geber (voyez Descensum.) Le vaisseau contenant peut encore n'être que le foyer même d'un fourneau, qui dans ce cas a le double usage de fourneau & de vaisseau, comme dans cette espece de distillation inventée par Glauber (fourneaux philosoph. page 1.), où le corps à distiller est immédiatement placé sur des charbons embrasés. Voyez Feu & Fourneau.

Le vaisseau destiné à recevoir les produits mobiles, est connu sous le nom générique de récipient. Le balon & le matras sont les récipiens simples les plus ordinaires, quoique tout vaisseau à un seul orifice propre à recevoir le bec du vaisseau contenant, puisse être employé à cet usage. Les récipiens multipliés ou composés, sont le double balon, la file de balons, le balon de Glauber armé d'un second récipient à son bec ou ouverture inférieure, l'allonge jointe au balon (voyez Balon, voyez Matras), & un assemblage de certains vaisseaux particuliers, propres à la distillation de l'air. Voyez Récipient.

On exécute des distillations dans toute la latitude des degrés de feu employés par les Chimistes; & on applique le feu aux matieres à distiller, soit en exposant à son action immédiate les vaisseaux qui les contiennent, soit en interposant entre le feu & ces vaisseaux, différentes matieres connues dans l'art sous le nom de bain. Voyez Bain & Feu.

La distillation est une des opérations les plus anciennement connues dans l'art. Geber auteur du plus ancien traité général de Chimie qui soit parvenu jusqu'à nous (voy. la partie historique de l'article Chimie), a très - bien décrit la distillation droite & le descensum, les effets & les usages de ces opérations; il n'a pas connu la distillation latérale, invention postérieure de plusieurs siecles à ce chimiste, & il a fait une troisieme espece de distillation de la filtration à la languette (voy. Filtration). C'est sur quelques prétendus vestiges de la connoissance de la distillation, que quelques auteurs ont crû voir des traces de chimie dans les ouvrages de quelques medecins grecs & arabes. La Chimie a été appellée l'art distillatoire, & elle a mérité ce titre jusqu'à un certain point, tant que analyser & distiller à la violence du feu n'ont été qu'une même chose. Les distillateurs d'eau - de - vie, d'eau - forte, de parfums, de liqueurs, & c. se qualifient de chimistes; & il s'en est même trouvé de ces derniers qui se sont vûs placés comme chimistes dans la liste des hommes illustres d'une nation; tant la distillation, même pratiquée en simple manoeuvre, peut décorer celui qui s'en occupe. Mais quoi qu'il en soit de cet honneur singulier attaché à l'exercice de l'art distillatoire, il est sûr que la distillation est une opération chimique fondamentale, un moyen chimique dont l'usage est très - étendu & la théorie très - compliquée, soit qu'on la considere en soi & dans ses phénomenes propres, soit qu'on la regarde relativement aux changemens qu'elle opere sur les différens sujets.

Dans toute distillation on se propose de réduire un corps en deux ou en plusieurs substances différentes. Cette vûe suppose deux conditions essentielles générales dans les sujets de cette opération; la premiere, c'est qu'ils ne soient pas absolument simples, & la seconde, que la desunion de leurs principes puisse être operée par l'action du feu: ce ne seroit donc que dans une vûe très - chimérique qu'on pourroit soûmettre à la distillation l'eau parfaitement pure, le mercure exactement purifié, & en général tout mixte ou composé volatil, capable d'éluder par

Next page


The Project for American and French Research on the Treasury of the French Language (ARTFL) is a cooperative enterprise of Analyse et Traitement Informatique de la Langue Française (ATILF) of the Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS), the Division of the Humanities, the Division of the Social Sciences, and Electronic Text Services (ETS) of the University of Chicago.

PhiloLogic Software, Copyright © 2001 The University of Chicago.