ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"725"> me persuader que vous soyez si perdu d'esprit, que de le croire. Voici sans doute, ce qui vous a donné occasion de me faire ce reproche: c'est la coûtume des Philosophes & même des Théologiens, toutes les fois qu'ils veulent montrer, qu'il répugne tout - à - fait à la raison que quelque chose se fasse, de dire que Dieu même ne le sauroit faire: & parce que cette façon de parler m'a toûjours semblé trop hardie; pour me servir de termes plus modestes quand l'occasion s'en présente, où les autres diroient que Dieu ne peut faire une chose, je me contente seulement de dire qu'un ange ne la sauroit faire .... Je suis bien malheureux de n'avoir pû éviter le soupçon de vanité en une chose, où je puis dire que j'affectois une modestie particuliere ».

A l'égard de l'existence de Dieu, M. Descartes étoit si content de l'évidence de sa démonstration, qu'il ne faisoit point difficulté de la préférer à toutes celles des vérités mathématiques. Cependant le ministre Voetius son ennemi, au lieu de l'accuser d'avoir mal réfuté les Athées, jugea plus à propos de l'accuser d'Athéisme, sans en apporter d'autre preuve, sinon qu'il avoit écrit contre les Athées. Le tour étoit assûrément nouveau: mais afin qu'il ne parût pas tel, Voetius trouva assez à tems l'exemple de Vanini, pour montrer que M. Descartes n'auroit pas été le premier des Athées qui auroit écrit en apparence contre l'Athéisme. Ce fut surtout l'impertinence de cette comparaison, qui révolta M. Descartes, & qui le détermina à réfuter une si ridicule calomnie dans une lettre Latine qu'il lui écrivit. Quelques autres de ses ennemis entreprirent de l'augmenter en l'accusant outre cela d'un scepticisme ridicule. Leurs accusations se réduisoient à dire que M. Descartes sembloit insinuer, qu'il salloit nier (au moins pour quelque tems) qu'il y eût un Dieu; que Dieu pouvoit nous tromper; qu'il falloit révoquer toutes choses en doute; que l'on ne devoit donner aucune créance aux sens; que le sommeil ne pouvoit se distinguer de la veille. M. Descartes eut horreur de ces accusations; & ce ne fut pas sans quelque mouvement d'indignation, qu'il y répondit. « J'ai réfuté, dit - il, tome II. des Lettres, page 170, en paroles très - expresses toutes ces choses qui m'avoient été objectées par des calomniateurs ignorans. Je les al réfutées même par des argumens très - forts, & j'ose dire plus forts qu'aucun autre ait fait avant moi. Afin de pouvoir le faire plus commodément & plus efficacement, j'ai proposé toutes ces choses comme douteuses au commencement de mes Méditations. Mais je ne suis pas le premier qui les aye inventées; il y a long tems qu'on a les oreilles battues de semblables doutes proposés par les Sceptiques. Mais qu'y a - t - il de plus inique, que d'attribuer à un auteur des opinions, qu'il ne propose que pour les réfuter? Qu'y a - t - il de plus impertinent que de feindre qu'on les propose, & qu'elles ne sont pas encore réfutées, & par conséquent que celui qui rapporte les argumens des Athées, est lui - même un Athée pour un tems? Qu'y a - t - il de plus puérile que de dire que s'il vient à mourir avant que d'avoir écrit ou inventé la démonstration qu'il espere, il meurt comme un athée? Quelqu'un dira peut - être que je n'ai pas rapporté ces fausses opinions comme venant d'autrui, mais comme de moi: mais qu'importe? puisque dans le même livre où je les ai rapportées, je les ai aussi toutes réfutées ».

Ceux qui ont l'esprit juste & le coeur droit, en lisant les Méditations & les Principes de M. Descartes, n'ont jamais hésité à tirer de leur lecture des conséquences tout opposées à ces calomnies. Ces ouvrages n'ont encore rendu Athée jusqu'aujourd'hui aucun de ceux qui croyoient en Dieu auparavant; au contraire, ils ont converti quelques Athées. C'est au moins le témoignage qu'un Peintre de Suede nommé Beek, a rendu publiquement de lui - même chez M. l'ambassadeur de France à Stockolm. Voyez tout cela plus au long dans la vie de Descartes, par A. Baillet. (C)

On peut voir dans un grand nombre d'articles de ce Dictionnaire, les obligations que les Sciences ont à Descartes, les erreurs où il est tombé, & ses principaux disciples. Voyez Algebre, Equation, Courbe, Mouvement, Idée, Ame, Percussion, Lumiere, Tourbillon, Matiere subtile , &c.

Ce grand homme a eu des sectateurs illustres: on peut mettre à leur tête le P. Malebranche, qui ne l'a pourtant pas suivi en tout. Voyez Maleeranchisme. Les autres ont été Rohaut, Regis, &c. dont nous avons les ouvrages. La nouvelle explication du mouvement des Planetes, par M. Villemot, curé de Lyon, imprimée à Paris en 1707, est le premier, & peut être le meilleur ouvrage qui ait été fait pour défendre les tourbillons. Voyez Tourbillons.

La Philosophie de Descartes a eu beaucoup de peine à être admise en France; le parlement pensa rendre un arrêt contre elle: mais il en fut empêché par la requête burlesque en faveur d'Aristote, qu'on lit dans les auvres de Despreaux, & où l'auteur sous prétexte de prendre la defense de la Philosophie péripatéticienne, la tourne en ridicule; tant il est vrai que ridiculum acri, &c. Enfin cette Philosophie a été reçûe parmi nous. Mais Newton avoit déjà démontré qu'on ne pouvoit la recevoir. N'importe: toutes nos universités & nos académies même y sont demeurées fort attachées. Ce n'est que depuis environ 18 ans, qu'il s'est élevé des Newtoniens en France: mais ce mal, si c'en est un (car il y a des gens pour qui c'en est un) a prodigieusement gagné; toutes nos académies maintenant sont Newtoniennes, & quelques professeurs de l'université de Paris enseignent aujourd'hui ouvertement la Philosophie Angloise. Voyez Attraction, &c. Voyez aussi sur Descartes & les Cartésiens, notre Discours préliminaire.

Quelque parti qu'on prenne sur la Philosophie de Descartes, on ne peut s'empêcher de regarder ce grand homme comme un génie sublime & un Philosophe très - conséquent. La plûpart de ses sectateurs n'ont pas été aussi conséquens que lui; ils ont adopté quelques - unes de ses opinions, & en ont admis d'autres, sans prendre garde à l'étroite liaison que presque toutes ont entre elles. Un Philosophe moderne, écrivain élégant & homme de beaucoup d'esprit, M. l'abbé de Gamaches, de l'Académie royale des Sciences, a démontré à la tête de son Astronomie physique, que pour un Cartésien, il ne doit point y avoir de mouvement absolu, & que c'est une conséquence nécessaire de l'opinion de Descartes, que l'étendue & la matiere sont la même chose. Cependant les Cartésiens croyent pour la plûpart le mouvement absolu, en confondant l'étendue avec la matiere. L'opinion de Descartes sur le machinisme des bêtes (Voyez Ame des Bêtes) est très - favorable au dogme de la spiritualité & de l'immortalité de l'ame; & ceux qui l'abandonnent sur ce point, doivent au moins avoüer que les difficultés contre l'ame des bêtes sont, sinon insolubles, du moins très - grandes pour un Philosophe chrétien. Il en est de même de plusieurs autres points de la Philosophie de ce grand homme. L'édifice est vaste, noble, & bien entendu: c'est dommage que le siecle où il vivoit, ne lui ait pas fourni de meilleurs matériaux. Il faut, dit M. de Fontenelle, admirer toujours Descartes, & le suivre quelquefois.

Les persécutions que ce Philosophe a essuyées pour avoir déclaré la guerre aux préjugés & à l'ignoran<pb-> [p. 726] ce, doivent être la consolation de ceux qui ayant le même courage, éprouveront les mêmes traverses. Il est honoré aujourd'hui dans cette même patrie, où peut - être il eût vécu plus malheureux qu'en Hollande. (O)

CARTESIENS (Page 2:726)

CARTESIENS, s. m. pl. est le nom qu'on donne aux partisans de la philosophie de Descartes. On appelle par cette raison cette philosophie, philosophie Cartésienne, ou Cartésianisme. Il n'est presque plus aujourd'hui de Cartésiens rigides, c'est - à - dire qui suivent Descartes éxactement en tout; sur quoi voyez la fin de l'article Cartésianisme.

CARTHAGE (Page 2:726)

CARTHAGE, dite la grande, (Géog.) fut autrefois capitale d'un puissant empire, & la principale ville d'Afrique près de Tunis. Scipion le jeune la prit & la ruina 146 ans avant J. C. Elle fut rebâtie sous C. Gracchus, 123 ans avant J. C. & les Arabes la ruinerent environ l'an 685. Elle étoit située dans une langue de terre qui formoit une presqu'île, jointe à l'Afrique par un isthme de vingt - cinq stades, entre Utique & Tunis. Toute la presqu'ile avoit trois cents soixante stades de tour. Il ne reste de Carthage que quelques vestiges. La presqu'île a retenu le nom de promontoire de Carthage.

CARTHAGENE (Page 2:726)

CARTHAGENE, (Géog.) ville forte & port d'Espagne au royaume de Murcie, capitale du pays de méme nom. Long. 17. 6. lat. 27d. 36'. 7".

Carthagene (Page 2:726)

Carthagene, (Géog.) grande ville de l'Amérique méridionale, capitale de la province de même nom. Il s'y fait un commerce très - considérable. Son port passe pour le meilleur du Nouveau - monde. Lon. 302. 10. lat. 10d. 30'. 25".

CARTHAGO (Page 2:726)

CARTHAGO, (Géog.) ville considérable de l'Amérique septentrionale, dans le Mexique. Lon. 296. 15. lat. 9. 5.

Carthago, ou la nouvelle Carthagene, (Géog.) ville d'Amérique dans l'audience de Santafé, en terre ferme.

CARTHAME (Page 2:726)

CARTHAME, s. m. ou SAFRAN BATARD, carthamus, (Hist. nat. bot.) genre de plante dont la fleur est un bouquet à plusieurs fleurons découpés en lanieres, portés chacun sur un embryon, & soûtenus par un calice écailleux garni de feuilles. Lorsque la fleur est passée, chaque embryon devient une semence sans aigrette. Tournefort, Inst. rei herb. Voy. Plante. (I)

Le carthamus officinarum flore croceo, Tourn. Inst. 457, est d'usage en Medecine. Sa semence passe pour un violent purgatif; elle évacue la pituite par haut & par bas.

Etmuller dit qu'elle est propre dans les cas où les premieres voies sont sur chargées d'une mucosité épaisse & visqueuse, dans les maladies de la poitrine, dans l'asthme, & dans la toux, occasionnée par une matiere épaisse & ténace: il la compte par cette raison parmi les remedes qui évacuent le phlegme.

La meilleure façon de s'en servir est de la donner en émulsion purgative, avec quelqu'eau aromatique, telle que celle de fenouil ou d'anis; on la mêle ensuite avec un lait d'amande. La dose est jusqu'à trois gros. On fait avec cette semence des tablettes.

Tablettes diacarthami. Prenez du turbith choisi une once & demie; de la moelle de semence de carthame, de la poudre diatraganth froid, des hermodactes, du diagrede, de chacun une once; du gingembre demi - once; de la manne deux onces & demie; du miel rosat, de la chair de coin confite, de chacun deux gros; du sucre blanc dissous dans l'eau, & cuit en électuaire solide, une livre six onces. Faites - en selon l'art un électuaire solide & en tablettes.

Un gros de ces tablettes contient du turbith trois grains; des hermodactes & du diagrede, de chacun deux grains; de manne cinq grains. La dose est depuis un gros jusqu'à une once pour les tempéramens sorts.

Tous les purgatifs de cette espece sont très à craindre, & ne doivent être employés qu'avec de grandes précautions. (N)

CARTIER (Page 2:726)

CARTIER, s. m. artisan ou marchand qui a le droit de faire & vendre des cartes à joüer. Voyez Cartes.

Les Cartiers faiseurs de cartes à joüer, forment à Paris une communauté fort ancienne: on les nomme aujourd'hui Papetiers - Cartiers: mais dans leurs statuts ils ont le titre de maîtres du métier de Cartiers, faiseurs de cartes, tarots, feuillets, & cartons; ou Cartiers, Tarotiers, Feuilletiers, & Cartonniers.

Les statuts dont ils se servent encore à présent, & qui ne sont que des statuts renouvellés en conséquence de l'édit de Henri III. de 1581, ont éte confirmés & homologués en 1594 sous Henri IV. ils contiennent vingt - deux articles, auxquels Louis XIII. & Louis XIV. en ont encore ajoûté quelques autres.

Le premier & le quatrieme portent qu'aucun ne pourra faire le métier de Cartier s'il n'est reçû maître, & s'il ne tient ouvroir ouvert sur la rue.

Les deuxieme & troisieme fixent l'apprentissage à quatre années, suivies de trois autres de compagnonage, après lesquelles les aspirans sont obligés de faire le chef - d'oeuvre, qui consiste en une demi - grosse de cartes fines, & de payer les droits aux jurés pour être admis à la maîtrise.

Les cinquieme & sixieme fixent le nombre des apprentis à un, ou à deux si le maître tient chez lui cinq ou six compagnons; & défendent aux maîtres de se transporter leurs compagnons sans en avertir les jurés.

Les septieme, huitieme, neuvieme, dixieme, & dix - huitieme, fixent les droits des fils, filles, & veuves des maîtres.

Le seizieme enjoint aux maîtres d'avoir une marque différente les uns des autres, sur laquelle doit être détaillé leur nom, surnom, enseigne, & devise.

Les autres articles regardent l'élection des deux jurés, & contiennent des regles de discipline pour les maîtres & les compagnons. Voyez les réglemens des arts & métiers.

Cartier (Page 2:726)

Cartier, nom d'une sorte de papier qui est destiné à couvrir les jeux ou les sixains de cartes à joüer. Voyez Papier & Cartes.

CARTILAGE (Page 2:726)

CARTILAGE, en Anatomie, c'est une des parties solides du corps, blanche, polie, uniforme, flexible, & élastique, moins compacte qu'un os, mais plus dure qu'aucune autre partie.

Les cartilages paroissent être à peu près de même nature que les os, puisqu'ils ont été cartilages, & que d'ailleurs toutes les parties solides ne paroissent différer que par le plus ou moins de consistance. Voyez Os, Ossification, & Solide

Il y en a qui sont très - durs, & qui même deviennent osseux avec le tems; comme ceux qui unissent les côtes au sternum, ceux du larynx, &c. Voyez Sternum & Larynx.

D'autres sont plus tendres, & servent à donner à certaines parties leur configuration; comme ceux du nez, des oreilles, &c. qui doivent avoir un petit mouvement que produit l'élasticité de ces cartilages, laquelle leur fait faire l'office de muscles antagonistes. Voyez Nez, &c.

Il y en a d'autres plus mous encore, qui tiennent quelque chose de la nature des ligamens, & qui par cette raison sont appellés cartilages ligamenteux. Voy. Ligament.

Il y a des cartilages de différentes figures, auxquels on donne différens noms tirés de ceux des choses auxquelles ils ressemblent: l'un se nomme sémi - lunaire; un autre xiphoïde, parce qu'il ressemble à la pointe d'un poignard; un autre scutiforme, parce qu'il

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