ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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toient plus effrayés que des évaporations qui vomissoient ces matieres en plus grande quantité, ou qui les poussoient à une plus grande distance.

C'est à cette derniere cause, c'est - à - dire aux embrasemens & aux évacuations du V ésuve, que l'on doit rapporter ces pluies de terre dont il est souvent fait mention dans Tite - Live, & dans la compilation de Julius Obsequens. Caio Martio III. & Tito Manlio Torq. coss. dit - il, lapidibus pluit, & nox visa est interdiu in urbe Româ. Cette pluie de pierres étoit donc accompagnée d'un nuage de cendres assez épais pour cacher la lumiere aux habitans de la ville de Rome.

Dans les embrasemens considérables du Vésuve & du mont Etna, les cendres & les pierres calcinées sont portées à une distance très - considérable. Dion Cassius rapporte que lors du fameux embrasement du Vésuve, arrivé sous l'empereur Vespasien, le vent porta les cendres & la fumée que vomissoit cette montagne, non seulement jusqu'à Rome, mais même jusqu'en Egypte.

La chronique du comte Marcellin observe à l'année 472, c'est - à - dire sous le consulat de Marcien & de Festus, que cette même montagne s'étant embrasée, les cendres qui en sortirent se répandirent par toute l'Europe, & causerent un si grand effroi à Constantinople, que l'on célebroit tous les ans la mémoire de cet événement, par une fête établie le viij. des ides de Novembre.

Dans l'embrasement du mont Etna, arrivé en 1537, & décrit dans la Sicile de Fazelli, & dans le dialogue latin du cardinal Bembo, la cendre fut portée à plus de 200 lieues de la Sicile.

L'histoire romaine n'est pas la seule qui nous fournisse des exemples de pierres tombées du ciel; on en trouve de semblables dans l'histoire grecque, & même dans les écrits des philosophes les plus exacts. Personne n'ignore que la seconde année de la lxxviij. olympiade, il tomba du ciel en plein jour, une pierre auprès du fleuve Egos dans la Thrace. Pline assure que l'on montroit encore de son tems cette pierre, & qu'elle étoit magnitudine vehis, colore adusto. Cet événement devint si fameux dans la Grece, que l'auteur de la chronique athénienne, publiée par Selden avec les marbres du comte d'Arondel, en a fait mention sur l'article 58, à l'année 1113 de l'ere attique ou de Cécrops.

Cette pierre qui tomba dans la Thrace, étoit apparement poussée par le volcan qui en fit tombertrois autres dans le même pays plusieurs siecles après, c'est - à - dire l'an de J. C. 452, l'année même de la ruine d'Aquilée par Attila. Hoc tempore, dit la chronique du comte Marcellin, tres magni lapides è clo in Thraciâ cecidere.

On pourroit peut - être attribuer à la même cause la chûte de cette pierre qui tomba du ciel au mois de Janvier 1706, auprès de Larisse en Macédoine; elle pesoit environ 72 livres, dit Paul Lucas qui étoit alors à Larisse. Elle sentoit le soufre, & avoit assez de l'air de machefer: on l'avoit vu venir du côté du nord avec un grand sifflement, & elle sembloit être au milieu d'un petit nuage qui se fendit avec un très grand bruit lorsqu'elle tomba.

Le fameux Gassendi dont l'exactitude est aussi reconnue que lesavoir, rapporte que le 27 Novembre 1627, le ciel étant très - serein, il vit tomber vers les 10 heures du matin, sur le mont Vaisien, entre les villes de Guillaumes & de Peine en Provence, une pierre enflammée qui paroissoit avoir 4 piésde diametre; elle étoit entourée d'un cercle lumineux de diverses couleurs, à - peu - près comme l'arc - en - ciel: sa chûte fut accompagnée d'un bruit semblable à celui de plusieurs canons que l'on tireroit à la fois. Cette pierre pesoit 59 livres; elle étoit de couleur obs<cb-> cure & métallique, d'une extreme dureté. La pesanteur étoit à celle du marbre ordinaire, comme 14 à 11. Si l'on examine ces différens exemples, on conviendra qu'il n'y a rien que de naturel dans ces pluies de pierres rapportées dans les anciens.

La pluie de fer qui tomba dans la Lucanie, l'année qui précéda la mort & la défaite de Crassus, fut regardée comme un prodige dans cette province; & peut être aux environs du Vésuve n'y eût - on fait aucune attention, ces peuples étant accoutumés dans ces cantons à voir souvent tomber des marcassites calcinées, semblables à ce que l'on nomme machefer; car le fer qui tomba en Lucanie étoit de cette espece: spongiarum ferè similis, dit Pline.

Quelquefois un ouragan a poussé des corps pesans du haut d'une montagne dans la plaine. Telle étoit cette pluie de tuiles ou de briques cuites, qui tomba l'année de la mort de T. Annius Milo, lateribus coctis pluisse.

A l'égard de cette pluie de chair dont Pline parle au même endroit, & qu'il dit être tombée plusieurs fois; il n'est pas facile de déterminer la nature des corps que l'on prit pour de la chair, n'ayant aucune relation circonstanciée: on peut cependant assurer que ces corps n'étoient pas de la chair, puisque ce qui resta exposé à l'air ne se corrompit pas, comme Pline l'observe au même lieu.

Quant aux pluies de sang, on est aujourd'hui bien convaincu qu'il n'y a jamais eu de pluie de sang; & que ce phénomène ne vient d'ordinaire que d'une grande quantité de certaines especes de papillons qui ont répandu des gouttes d'un suc rouge sur les endroits où ils ont passé, ou que ce sont seulement de petits pucerons aquatiques qui se multiplient pendant l'été dans les canaux & fossés bourbeux, en si grande quantité qu'ils rendent la surface de l'eau toute rouge. On a bien raison de penser qu'il n'en a pas fallu davantage pour donner lieu au vulgaire ignorant de croire qu'il a plu du sang; & pour en tirer toutes sortes de présages sinistres. Mais ces généralités quoique très - vraies, ne suffisent pas aux naturalistes; ils ont examiné tous ces faits attentivement, & ont communiqué au public le détail de leurs découvertes, dont voici le résultat.

Il est très - ordinaire aux mouches, & à toutes sortes de papillons, tant diurnes que nocturnes, qu'après s'être dégagés de leurs enveloppes de nymphes & de chrysalides, & que leurs aîles se sont déployées & affermies, au moment qu'ils se disposent à voler pour la premiere fois, ils jettent par la partie postérieure quantité d'humeurs surabondantes, dont la secrétion s'est faite lorsqu'ils étoient encore en nymphes & en chrysalides. Ces humeurs ne ressemblent en rien aux excrémens de ces insectes; elles sont de différentes couleurs, & il y en a très - souvent de rouges parmi les papillons diurnes: telles sont, par exemple, celles de la petite chenille épineuse qui vit en société sur l'ortie.

Les chenilles de ces papillons & d'autres, quand elles doivent subir leurs changemens, s'écartent de la plante qu'elles habitent, & se suspendent volontiers aux murailles lorsqu'il y en a dans le voisinage. C'est ce qui a fait qu'on a trouvé contre les murailles ces taches rouges qu'on a prises autrefois pour des gouttes de pluie de sang.

M. de Peirese est, si je ne me trompe, le premier qui s'est donné la peine d'examiner ce phénomène; & au mois de Juillet de l'an 1608, on assura qu'il étoit tombé une pluie de sang. Ce récit le frappa & l'engagea à ne rien négliger pour l'éclaircissement d'une chose aussi singuliere. Il se fit montrer ces grosses gouttes de sang à la muraille du cimetiere de la grande église d'Aix, & à celle des maisons des bourgeois & des paysans de tout le district, à un mille à

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