ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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loient dans ce tems - là en grande quantité dans l'air. Cette découverte le porta à conclure que la pluie qui étoit tombée, n'étoit pas une pluie de sang, mais seulement d'eau; & que sa teinture ne venoit que des petits insectes en question. D'autres physiciens ont fait à - peu - près les mêmes observations; & toutes ces fameuses pluies de sang dépendent uniquement de pareilles causes naturelles.

Pour les pluies de fer, de laine, &c. on doit regarder presque tout cela comme de pures fictions; car il est absolument impossible que ces iortes de corps se forment dans l'air, ou s'y soutiennent long - tems. Le vent seul peut quelquefois par sa force enlever de certains lieux, & transporter dans d'autres assez éloignés, des corps qui tombent alors naturellement de l'air; mais sans y avoir été produits. Par exemple, lorsque ceux qui tondent les brebis viennent à rassembler leur laine, & à l'exposer à terre, un tourbillon peut en enlever quelques flocons en l'air, & les charrier loin de là. De même, un vent orageux élévera fort haut les eaux d'un lac poissonneux, & les brisant ensuite contre les côtes, les digues, les rochers, éparpillera dans l'air de petits poissons, ou des grenouilles, qui après avoir été emportés à quelque distance de - là, retombent enfin à terre; de sorte qu'on diroit qu'il pleut des poissons ou des grenouilles dans les endroits où cela tombe. On a fort parlé de pluies de pierres, & l'on ne sauroit nier qu'il ne soit effectivement tombé des pierres de l'air; mais on n'en sauroit conclure qu'elles y ayent été formées: car il arrive dans les tremblemens de terre que le feu souterrain la fait crever avec violence, & qu'il la fait sauter en l'air avec tout ce qui repose sur sa surface. Il en est comme d'un roc sous lequel on à creuseune grande mine, que l'on emplit de poudre canon; dès qu'on met le feu à cette poudre, on voit sauter le roc avec tout ce qui se trouve dessus, & il retombe ensuite par son propre poids; mais tout en pieces & en morceaux qui se dispersent cà & là. On ne peut guere rapporter rien de plus remarquable à ce sujet, que la naissance de la nouvelle île de Santorino, qui s'éleva de dessous terre dans l'Archipel en 1707. On entendit d'abord pendant quelques jours un bruit affreux, comme celui du tonnerre ou du canon, & l'on vit continuellement une quantité de pierres ardentes qui sortoient de la mer, & se lancoient en l'air comme des fusées à perte de vûe: ces pierres retomberent ensuite dans la mer à cinq milles de l'endroit d'où elles avoient été jettées. Pendant tout ce tems - là l'air se trouva rempli d'une épaisse vapeur sulfureuse mêlée de cendres; tout cela formoit un nuage affreux, entremêlé de petites pierres, qui retomberent si drues & en si grande quantité, que tout le pays d'alentour se trouva couvert. Le pere Montfaucon rapporte qu'il arriva quelque chose de semblable en 1538, proche du village de Tripergola en Italie. Cardan nous apprend qu'il tomba dans le voisinage d'Abdua environ 1200 pierres, qui étoient de couleur de fer, lisses & fort dures, & qui sentoient le soufre; elles tomberent avec un violent tourbillon de vent qui ressembloit à un globe de feu. Une de ces pierres pesoit 120 livres, & une autre 60. On conserve encore aujourd'hui dans la paroisse de d'Ensisheim en Alsace, une pierre de cette nature, qui tomba en 1630. Elle est noirâtre, du poids d'environ 300 livres; & on peut remarquer que le feu en a détaché tout - au - tour quelques éclats. Toutes ces pluies de pierres ne peuvent se rapporter qu'à la même cause, c'est - à - dire aux tremblemens de terre, qui sont produits par un feu souterrain.

Il tomba dans la partie occidentale de l'Angleterre, au mois de Décembre de l'année 1672, une espece de pluie fort singuliere. Nous avons plusieurs mémoires sur cette pluie dans les Transactions philosophiques.

Lorsque cette pluie touchoit, en tombant, quelque chose d'élevé sur la terre, comme des branches, ou autre chose semblable, aussi - tôt elle se congeloit; & les petits glacons augmentant sensiblement, devenoient si pesants, qu'ils rompoient & entraînoient avec eux tout ce sur quoi ils étoient attachés. La pluie qui tomboit sur la neige ne s'y enfoncoit point, mais elle se congeloit à sa surface.

Il est presque incroyable quel nombre d'arbres elle a détruits, & si, à ce que rapporte une personne qui étoit sur les lieux, « elle avoit été accompagnée de vent, elle auroit produit des effets terribles.

J'ai pesé, dit cette personne, une branche de frêne qui pesoit exactement trois quarts de livres, la glace qui s'y étoit attachée pesoit seize livres. Quelques - uns furent fort effrayés du bruit qu'ils entendirent dans l'air, & leur terreur ne se dissipa que quand ils appercurent que ce n'étoit que le fracas des branches glacées qui se heurtoient les unes contre les autres ».

On remarque que pendant cette pluie, il n'y avoit pas de forte gelée sur la terre; d'où on conclut que la gelée peut être trés - violente & trés - dangereuse sur les sommets de quelques montagnes, & dans quelques plaines, tandis qu'en d'autres endroits elle se tient comme suspendue à la hauteur de 3 ou 4 piés, au - dessus de la superficie de la terre, des rivieres, des lacs, &c. Cette glace a été suivie de grandes chaleurs, & les fleurs & les fruits furent beaucoup plus précoces qu'à l'ordinaire. Chambers.

Pluie prodigieuse

Pluie prodigieuse, (Histoire.) nous nommons avec les anciens pluies prodigieuses, prodigia, toutes celles qui sont extraordinaires, & qu'ils attribuoient à des causes surnaturelles, parce qu'ils n'en appercevoient point les causes physiques. Leurs historiens parlent de plusieurs sortes de pluies prodigieuses, comme de pluie de pierres, de cendres, de terre, de fer, de briques, de chair, de sang & autres semblables.

La plus ancienne pluie de pierres dont il soit fait mention dans l'histoire romaine, est celle qui arriva sous le regne de Tullus Hostilius, après la ruine d'Albe. Nuntiatum regi, patribusque est, dit Tite - Live, livre I. chap. XXXj. in monte Albano lapidibus pluisse; quod cum credi vix posset, missis ad id videndum prodigium in conspectu, haud aliter quam cum grandinem venti glomeratam in terras agunt, crebri ccidere clo lapides. Et quelques lignes plus bas il ajoute: mansit solemne ut quandocumque idem prodigium nuntiaretur, ferice per novem dies agerentur. Les circonstances rapportées par Tite - Live semblent assurer la vérité de ce fait d'une maniere incontestable; & il s'est répété tant de fois aux environs du même mont Albanus, qu'il n'est guere possible de le révoquer en doute: il n'est pas même bien difficile d'en déterminer la cause physique, puisque l'on peut supposer avec beaucoup de vraissemblance, qu'il y a eu dans les premiers tems un volcan sur le mont Albanus, & cette conjecture est assez fortement appuyée pour la faire tourner en certitude. On sait que c'est un effet ordinaire aux volcans de jetter des pierres & de la cendre dans l'air, qui retombant ensuite sur terre, peuvent être pris par le peuple groslier, pour une pluie prodigieuse. Quoique le mont Alban ne jettât ordinairement ni flammes ni fumée, le foyer de ce volcan subsistoit toujours, & la fermentation des matieres sulphureuses & métailiques qui y étoient contenues, avoit assez de force pour jetter en l'air des pierres, de la terre & divers autres corps qui retomboient du ciel dans les campagnes voisines.

Le Vésuve & les autres volcans qui en sont proches, causoient un effet tout semblable dans l'Italie inférieure; mais comme leur embrasement étoit continuel, & ces évacuations assez fréquentes, les peuples qui s'étoient accoutumés à ce spectacle, n'é

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