Dictionnaire de l'Académie Française,
6ème edition (1835)

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SANS RÉSERVE. loc. adv. Sans exception. Il lui a laissé tous ses biens sans réserve. J'ai en lui une confiance sans réserve. Parlez-moi sans réserve, sans nulle réserve, sans aucune réserve.

EN RÉSERVE. loc. adv. À part, de côté. Il a mis une forte somme en réserve. Il a toujours de l'argent en réserve. Cet avocat a toujours quelque argument en réserve.

RÉSERVÉ, ÉE. adj. Circonspect, discret, qui ne se hâte pas trop de dire ni de faire connaître ce qu'il pense. Il faut être fort réservé avec ces gens-là. On ne saurait être trop réservé à parler de soi, à critiquer les autres. Une autre fois je serai plus réservé à dire mon avis, à donner des conseils. Réservé en paroles. Cette femme est fort réservée. Une conduite réservée.

Il s'emploie quelquefois substantivement. Cet homme fait bien le réservé. Cette femme fait bien la réservée.

RÉSERVER. v. a. Garder, retenir quelque chose d'un tout, une chose entre plusieurs autres. Il a vendu la propriété de ce domaine, mais il s'en est réservé l'usufruit, la jouissance. Il a vendu les fruits de son jardin, mais il s'est réservé tant d'arbres. Il a cédé son établissement, mais il s'est réservé une pension. L'évêque se réserve le pouvoir d'absoudre de certains cas. Le ministre s'est réservé la connaissance de cette affaire. Dieu semble s'être réservé la punition de ce crime.

Il signifie aussi, Garder une chose pour un autre temps, pour un autre usage, la ménager pour une autre occasion. Réservez vos conseils pour un moment plus favorable. Il est bon de réserver quelque argent pour les besoins imprévus. Un homme sage réserve ses amis pour les occasions essentielles. Réservez-moi vos bontés pour une autre occasion. Le gouverneur de cette place ne veut point faire de sorties, il réserve ses troupes pour soutenir les attaques. Il réserve ce cheval pour un jour de bataille. La cour a jugé le principal, et a réservé à faire droit sur les intérêts. Il réserve le reste de l'explication à un autre temps.

Se réserver à faire quelque chose, ou de faire quelque chose, Attendre, remettre à faire cette chose quand on le trouvera à propos, en temps et lieu. Je me réserve à faire cela en tel temps. Je me réserve de lui en dire mon avis en temps et lieu. Je me réserve à parler quand j'aurai entendu vos raisons. On dit, dans un sens analogue, avec le pronom personnel régime direct: Je me réserve pour une autre occasion. Il se réserve pour de plus grandes choses. Un tel n'a pas parlé aujourd'hui dans la discussion de cette loi, il se réserve pour demain. Je ne danserai point de contredanse, je me réserve pour la valse. Se réserver pour le rôti, pour le second service, pour l'entremets.

Au Barreau, Se réserver la réplique, Déclarer qu'on veut répliquer. On dit de même, L'avocat a prié les juges de lui réserver la réplique, Il leur a demandé la permission, le droit de répliquer quand il en sera temps.

RÉSERVÉ, ÉE. participe Tout droit réservé. Toute prétention réservée. Tous dépens réservés.

Cas réservés, Les péchés dont on ne peut être absous que par le pape ou l'évêque, ou par les prêtres qui ont reçu d'eux un pouvoir spécial. Voyez aussi RÉSERVÉ, adjectif.

RÉSERVOIR. s. m. Lieu fait exprès pour y tenir certaines choses en réserve. Il se dit plus spécialement d'Un lieu où l'on amasse des eaux pour les distribuer, suivant le besoin, en divers endroits, et d'Un bassin rempli d'eau dans lequel on conserve du poisson. Il y a un réservoir au-dessus de la fontaine publique. Ce réservoir sert à alimenter les eaux du parc. Ce réservoir est celui de la cascade, du jet d'eau. Un réservoir de maçonnerie. Un réservoir de plomb, de tôle, etc. Un réservoir de cent muids d'eau. Il a toujours quantité de poisson dans son réservoir. Il a fait pêcher son grand étang, et a mis tout le beau poisson dans son réservoir. Il faut raccommoder ce réservoir, il ne tient pas l'eau.

RÉSERVOIR se dit, en termes d'Anatomie, de Toute cavité du corps humain, dans laquelle s'amasse un fluide. Le réservoir des larmes, Le sac lacrymal. Le réservoir de l'urine, La vessie. Le réservoir de la bile, La vésicule du fiel. Le réservoir de Pecquet, L'organe où le chyle est conduit par les veines lactées, et qui a été découvert par Pecquet. Etc.

RÉSIDANT, ANTE. adj. Qui réside, qui demeure. Le lieu où il est résidant, où elle était résidante. Voyez aussi RÉSIDENT.

RÉSIDENCE. s. f. Demeure ordinaire en quelque ville, en quelque lieu, en quelque pays. Il fait sa résidence en tel lieu. C'est le lieu de sa résidence. Il a depuis longtemps établi sa résidence en tel endroit.

Il se dit aussi Du séjour actuel et obligé d'un évêque, d'un magistrat, d'un préposé, etc., dans le lieu où ils exercent leurs fonctions. Ce magistrat ne peut faire un voyage, à cause de la résidence à laquelle ses fonctions l'obligent. Les évêques, les curés sont obligés à résidence, à la résidence. Cet emploi oblige à la résidence, à résidence, exige, demande résidence.

Il signifie également, Le lieu de la résidence ordinaire d'un prince, d'un seigneur. Cette ville est la résidence du prince. Il l'a choisie pour sa résidence. On enjoignit à un tel de sortir de la résidence.

RÉSIDENCE se dit encore de L'emploi d'un résident auprès d'un prince. Au retour de sa résidence. Je demande telle résidence.

RÉSIDENT. s. m. Celui qui est envoyé de la part d'un souverain vers un autre pour résider auprès de lui, et qui est moins qu'un ambassadeur, mais plus qu'un agent. Le résident de France à Genève. Le résident de tel prince à la cour de France. Il n'a pas la qualité d'ambassadeur, il n'a que celle de résident. La femme du résident s'appelle Madame la résidente.

RÉSIDER. v. n. Faire sa demeure en quelque endroit. Résider dans un lieu. Il est de telle ville, mais il réside ordinairement à Paris. On l'a imposé au lieu où il résidait. Il résidait presque toujours à sa terre, sur sa terre, dans sa terre. Il réside sur son domaine, dans son domaine.

Il s'emploie figurément. Là résident l'innocence et la paix.

Toute l'autorité réside dans la personne d'un tel, Il a toute l'autorité.

Cet homme croit que toute la sagesse, toute la science, tout le bon sens réside dans sa tête, Il croit être le seul sage, le seul savant, et avoir tout le bon sens en partage.

RÉSIDER signifie aussi figurément, Consister. La question, la difficulté réside en ceci. Voilà où réside la question, la difficulté. C'est en lui seul que notre espoir réside.

RÉSIDER se dit absolument D'un évêque, d'un bénéficier qui demeure dans le lieu de son diocèse, de son bénéfice. Les évêques doivent résider. Il y a des bénéfices qui obligent à résider.

RÉSIDU. s. m. T. de Commerce. Le restant. Résidu du compte. Pour le résidu, nous en composerons. Il m'a fait son billet du résidu. Les dépenses prélevées, il s'est trouvé un faible résidu. Il a vieilli: on dit, Reliquat.

Il se dit, en Arithmétique, Du nombre qui reste d'une division. Le résidu de cette division est treize. On dit plus ordinairement, Le reste.

Il se dit, en Chimie, de Ce qui reste d'une ou de plusieurs substances soumises à l'action de divers agents. Les cendres, traitées par l'eau bouillante, abandonnent la potasse et laissent un résidu qui sert d'engrais. Quinze litres d'eau de Seine, évaporée jusqu'à siccité, ne donnent qu'un résidu de deux grammes et demi.

RÉSIGNANT. s. m. Celui qui résigne un office ou un bénéfice à quelqu'un. La résignation n'eut pas lieu, parce que le résignant mourut avant qu'elle fût admise.

RÉSIGNATAIRE. s. m. Celui à qui on a résigné un office ou un bénéfice. Le résignant et le résignataire. Le résignataire n'avait pas encore pris possession.

RÉSIGNATION. s. f. T. de Jurispr. Abandon en faveur de quelqu'un. Il a fait cession et résignation de tous ses droits à son frère.

Il se dit aussi de La démission d'un office, d'une charge; mais, en ce sens, il a vieilli.

Il signifie, en Jurisprudence canonique, La démission d'un bénéfice dans les mains du collateur ou du pape. Résignation pure et simple. Résignation forcée. Résignation en faveur de quelqu'un. Faire résignation. Donner sa résignation. Retirer sa résignation.

RÉSIGNATION s'emploie au sens moral, et signifie, Soumission à la providence, à la volonté de Dieu. Il est mort avec une résignation très-édifiante, avec une grande, une entière résignation aux volontés du ciel.

Il signifie aussi, Soumission à son sort, à son malheur. Il a subi sa disgrâce, son exil avec résignation. Il a montré une grande résignation, beaucoup de résignation.

RÉSIGNER. v. a. Se démettre d'un office, d'un bénéfice en faveur de quelqu'un. Résigner un office, un bénéfice, une cure à quelqu'un. Employé absolument, il s'entend ordinairement D'un bénéfice. Il est mort sans résigner, sans avoir résigné. Il n'a pas eu le temps de résigner.

Résigner son âme à Dieu, Remettre son âme entre les mains de Dieu.

RÉSIGNER s'emploie avec le pronom personnel, et signifie, S'abandonner, se soumettre. Je me résigne à la volonté de Dieu. Je me résigne aux ordres de la nature. Je me résigne à mon sort. Je me résigne à supporter cette incommodité. Je suis résigné à souffrir.

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