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Tel est le systême des anciens sur le pouls; telle est sur - tout la doctrine de Galien adoptée sur sa parole par un grand nombre de médecins illustres jusqu'au quinzieme & même au seizieme siecle, souvent commentée & prétendue prouvée par de longs & obscurs raisonnemens, jamais illustrée par aucune bonne observation. Comme Galien avoit poussé jusqu'au bout les divisions & subdivisions du pouls, aucun de ses sectateurs n'a pu enchérir sur lui. Struthius, un de ses commentateurs, dont l'ouvrage a resté douze cens ans perdu, ajoute seulement une description du pouls
Réflexions sur la doctrine de Galien. 1°. Sur les différences. Il est impossible de ne pas s'appercevoir que la plus grande partie des différences que Galien établit, ne soit plutôt le fruit de son imagination & de son calcul que de ses observations; l'esprit de division auquel il s'est laissé aller, l'a sans doute emporté trop loin, il a souvent donné ses idées pour des réalités, dé taillant plutôt ce que le pouls pouvoit être, que ce qu'il étoit en effet. Il ne dit pas j'ai observe un tel pouls, je l'ai vu varier de telle ou telle façon, il blâme au contraire ceux qui, comme Hérophile, n'ont donné que des observations sans ordre, sans méthode & sans raisonnement; mais voici comme il s'énonce: le pouls étant un mouvement, il doit donc varier de la même maniere que les autres especes de mouvement; mais ce mouvement peut se considérer dans un seul pouls, c'est - à - dire, une seule pulsation, ou bien dans plusieurs; de la double variation, de la distinction entre la vitesse & la fréquence, entre l'inegalité d'une seule pulsation, & l'inégalité collective, &c. Le pouls étant composé de deux mouvemens, l'un de systole ou de contraction, & l'autre de diastole ou de distension, doit fournir de nouvelles différences, par rapport à la promptitude avec laquelle ces mouvemens se succéderont, à la maniere dont ils se succéderont, à l'ordre, la proportion qu'ils observeront, à la quantité de distension ou de contraction, &c. Il peut arriver que ces caracteres se combinent ensemble; alors quel nombre prodigieux de différences n'en peut - il pas résulter? Galien a suivi ce détail avec la derniere exactitude, & une extrème subtilité, & a par ce moyen multiplié les caracteres du pouls; de façon, comme il dit lui - même, que la vie de l'homme suffit à peine pour en prendre une entiere connoissance. On conçoit bien la possibilité de toutes ces différences, mais on ne les observe pas; elles éludent le tact le plus fin & le plus habitué; Galien ne dit pas lui - même les avoir apperçues. Cependant il faut bien se garder d'englober dans la même condamnation toutes les différences qu'il a établies; mais comme on est assuré que la plûpart sont arbitraires, on ne doit les admettre que d'après sa propre expérience. Il y a lieu de penser, & il est même certain, que plusieurs pouls décrits par Galien, sont conformes à l'observation. On sait que la haute réputation qu'il avoit à Rome, lui venoit principalement de [p. 215]
3°. Sur les causes du pouls. La doctrine de Galien sur cette partie, est très - obscure, & paroît absurde & extraordinaire par l'ignorance où nous sommes de sa langue. Chaque âge, chaque pays, & chaque climat même non - seulement a un idiome différent, mais aussi une façon particuliere d'exprimer souvent les mêmes idées, un tour de phrase singulier; & c'est souvent faute d'entendre ce langage que nous condamnons légerement des choses que nous approuvons sous d'autres termes.
La faculté que Galien fait inhérente aux parois des arteres, paroît très - naturelle; elle eût été appellée par les Sthaliens, nature ou ame; élasticité simplement par les Méchaniciens, & irritabilité ou contractilité par d'autres. L'usage que Galien regarde comme une seconde cause de la génération du pouls, est un mot qui exprimeroit à merveille dans le langage des animistes, le motif qui détermine leur ame ouvriere à faire & à varier le pouls suivant le besoin. Quant à son excrément fuligineux né de l'adustion du sang qui choque d'abord les oreilles; lorsqu'on l'examine, on voit que ce n'est autre chose que ce que les modernes appellent matiere de secrétions, superflus de la nourriture, humeurs excrémentitielles, &c. noms aussi vagues & indéterminés. Et il ne s'éloigne pas de la vérité, lorsqu'il dit que l'usage de la contraction étant d'expulser, elle doit augmenter en fréquence, en vîtesse, en grandeur, lorsqu'il s'est accumulé. Les modernes ne disent - ils pas que la même chose arrive, ou qu'il y a fievre, lorsque les excrétions sont supprimées, lorsqu'elles ne se font pas bien, que le sang est altéré, que les extrémités artérielles sont obstruées? &c. Les explications qu'il donne des différens pouls, sont quelquefois assez naturelles; nous ne dissimulerons pas, que pour suivre les divisions qu'il a établies dans le premier livre, il est obligé d'entrer dans des détails aussi minutieux, & d'imaginer des causes qui ne sont pas moins chimériques. Pour ce qui regarde les changemens qui arrivent au pouls par l'action des causes extérieures ou accidentelles, ce sont des choses que l'observation seule peut décider. Nous ne nierons pas que quelques - uns paroissent évidemment une suite de son système, & plutôt imaginés qu'observés. Nous avertirons en même tems que nous avons fait quelques observations qui sont favorables, à ce qu'il avance, nous en avons rapporté une plus haut; c'est en suivant la même route qu'on pourroit vérifier entierement des points aussi importans.
4°. Sur les présages. Ce que nous avons dit sur les différences, & sur les causes du pouls, est aussi appliquable aux présages qu'on doit ou qu'on peut en tirer dans le système de Galien: le même minutieux, le même arbitraire regne ici. On prétend des modifications du pouls données, remonter à la connoissance des causes, ou parvenir à déterminer l'état actuel ou futur de la maladie; & c'est toujours en conséquence des principes établis & censés vrais, & des différences supposées; mais un édifice construit sur des fondemens aussi peu certains, peut - il être solide? Il n'est souvent pas même brillant. Cependant par la raison qu'il y a des différences réelles & des causes assez naturelles, il doit y avoir des présages justes & assurés. Il est certain, par exemple, que le pouls languissant est un effet & un signe nullement équivoque de la foiblesse de la faculté. La dureté du pouls indique bien évidemment la dureté de l'artere, d'où l'on peut remonter assez surement à la connoissance d'une inflammation dans des parties membraneuses tendues, ou de quelque affection spasmodique, &c. La partie du pronostic semble n'être qu'un extrait de l'observation. Galien détaille avec beaucoup de justesse quelques pouls critiques, & dans ces chapitres il ne se permet aucun raisonnement; il ne pense pas à donner l'explication des différences de ces pouls, il ne donne que des faits, que des observations ultérieures ont étendu & confirmé; quelles lumieres n'aurions - nous pas tiré de ces ouvrages, s'il ne se fût jamais écarté de cette route; & même dans ce qu'il a fait, quel champ vaste & fécond n'a - t - il pas ouvert aux observateurs? Mais leur paresse, leur ignorance, ou leur mauvaise foi, l'a laissé inculte & sterile pendant plus de six cens ans. Encore est - ce le hasard, qui après un si long espace de tems, a réveillé l'attention des Médecins?
Doctrine des Méchaniciens sur le pouls. Bellini est un des premiers & des plus célebres auteurs qui ait consideré le pouls méchaniquement. (Laurent. Bellin. de urinâ pulsib. & opuscul. proectic). Hoffman a suivi son système, & a pretendu prouver dans une dissertation particuliere, que le pouls devoit être assujetti aux regles de la méchanique. (De puls. natur. & gemin. different. & usu in proest. tom. VI. vol. iv.) Boerhaave, & tous ses sectateurs, tous les médecins qui ont embrassé la théorie vulgaire, fondée sur la fameuse circulation du sang mal conçue & trop généralisée, & sur les lois insuffisantes de la méchanique inorganique; tous ces médecins, dis - je, qui font encore le parti le plus nombreux, & presque dominant dans les écoles, ont adopté leurs opinions sur le pouls. Ils font peu d'usage de ce signe, l'examinent sans attention, & n'en tirent que peu de connoissances & très - incertaines; mais en revanche ils en font un objet important de leurs dissertations, de leurs disputes & de leurs calculs. Ils le soumettent aux analyses mathématiques, & s'occupent beaucoup plus à en déterminer géométriquement & la force & les causes, qu'à saisir comme il faut ses différences, & en évaluer au juste les significations. Voici à quoi se réduit leur doctrine.
1°. Sur les différences. Ils appellent avec Galien,
pouls, le double mouvement de systole & de diastole
que l'on apperçoit au coeur, & principalement
aux arteres. Ils regardent comme le fruit d'une oisive
subtilité, toutes les divisions minutieuses que Galien
a détaillées avec tant d'exactitude; ils rejettent aussi
hardiment, mais avec moins de raison, les différentes
especes de pouls, désignées par les noms des choses
avec lesquelles on a cru leur trouver quelque ressemblance,
comme les myures, ondulans, discrotes,
caprisans, &c. ils se moquent de ces comparaisons
inexactes, de ces images grossieres & de ces
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