ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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Matrice (Page 10:200)

Matrice, se dit aussi des endroits propres à la génération des végétaux, des minéraux & des métaux.

Ainsi la terre est la matrice où les graines poussent. Les marcassites sont regardés comme les matrices des métaux. Voyez Fossile, Minéral, Marcassite , &c.

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Matrice, se dit figurément de différentes choses, où il paroît une espece de génération & où certaines choses semblent acquérir un nouvel être, ou du moins une nouvelle maniere d'être. De ce genre sont les moules où l'on met les caracteres d'Imprimerie, & ceux dont on se sert pour frapper les monnoies & les médailles, & qu'on appelle coins. Voyez Coin & Monnoyage.

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Matrice, maladies de la, (Médecine.) c'est bien avec raison qu'Hippocrate a dit, que la matrice étoit la source, la cause, & le siege d'une infinité de maladies: elle joue en effet un grand rôle dans l'oeconomie animale; le moindre dérangement de ce viscere est suivi d'un desordre universel dans toute la machine; on pourroit assurer qu'il n'est presque point de maladie chez les femmes où la matrice n'ait quelque part; parmi celles qui dépendent principalement de sa lésion, il y en a qui sont générales, connues sous les noms particuliers de fureur, suffocations utérines, vapeurs, passion hystérique & maladies, qui, quoiqu'elles ne soient pas excitées par un déplacement réel de la matrice, comme quelques anciens l'ont prétendu, sont le plus souvent occasionnées & entretenues par quelque vice considérable dans cette partie que les observations anatomiques démontrent, & qui donnent lieu à ce sentiment. Voyez tous ces articles séparés. Les autres maladies sont spécialement restreintes à cette partie, ou locales: le vice de la matrice qui les constitue est apparent, & forme le symptôme principal: dans cette classe nous pouvons ranger toutes celles qui regardent l'évacuation menstruelle, qui sont ou seront traitées à l'article Regles, voyez ce mot; ensuite la chute ou descente, l'hernie, l'hydropisie, l'inflammation, l'ulcere, le skirrhe, & enfin le cancer de la matrice; nous allons exposer en peu de mots ce qu'il y de particulier sur ces maladies, relativement à leur siege dans cette partie.

Chute ou descente de matrice, prolapsus uteri, USTER PROW=QWSIS2. La matrice dans l'état naturel est soutenue par plusieurs ligamens à l'extrémité du vagin, à une certaine distance qui varie dans différens sujets de l'entrée de la vulve; il arrive quelquefois que la matrice descend dans le vagin, en occupe tout l'espace, quelquefois même elle s'étend en dehors, & pend entre les cuisses. Quelques auteurs uniquement fondés sur leur inexpérience (tels sont Kerkringius, Van - Roonhuysen, Van - Meeckren, &c.) ont refusé de croire que la descente de matrice pût avoir lieu; on pourroit leur opposer une foule d'observations qui constatent évidemment ce fait: on peut consulter à ce sujet Fabrice de Hildan, Mauriceau, Deventer, Diemerbroek, Stalpart, Van - Derwiel, &c. & tous ceux qui ont traité des accouchemens & des maladies des femmes; il est vrai que quelquefois la descente du vagin peut en imposer; on peut même prendre des tumeurs polypeuses, attachées à l'orifice de la vulve, pour la chute de la matrice, comme Seger rapporte s'y être trompé lui - même. Meeckren a aussi une observation semblable; mais les ouvertures des cadavres confirment encore ce fait. Graaf, Blasius assurent avoir ouvert des femmes dans lesquelles ils trouverent effectivement la matrice déplacée, & presqu entierement contenue dans le vagin; & Jean Bauhin rapporte qu'il avoit pris une véritable descente de matrice pour un corps étranger, & qu'il ne connut sa mépsile que par l'ouverture dû cadavre; mais ce qui doit ôter tout sujet de doute, c'est qu'on a quelquefois emporté la matrice ainsi descendue; Ambroise Paré raconte avoir détaché une matrice qui pendoit dehors le vagin; cette opération rétablit la santé à la malade; mais étant morte d'une autre maladie quelques années après, on l'ouvrit, l'on ne trouva point de matrice; on peut voir des observations semblables dans Berenger, Langius, Mercurialis, Duret, & plusieurs autres, qui tous assurent avoir extirpé la matrice sans suite facheuse. Jai connu un chirurgien qui, en accouchant une dame, emporta la matrice, & la faisoit voir comme une piece curieuse, bien éloigné de penser que ce fût effectivement elle; cet accident couta cependant la vie à la malade.

La descente de matrice est accompagnée de différens symptômes, suivant qu'elle est plus ou moins complette, qui servent à nous la faire reconnoître; lorsque la matrice n'est descendue que dans le vagin, on s'en apperçoit en y introduisant les doigts, on sent l'orifice interne de la matrice se présenter d'abord à l'ouverture; le devoit & les plaisirs du mariage sont à charge, insipides, douloureux, difficiles ou impossibles à remplir. Il y a outre cela une difficulté d'uriner, d'aller à la selle, la matrice déplacée comprimant la vessie & le rectum; on sent aussi pour l'ordinaire des douleurs, des tiraillemens aux lombes, partie où vont s'implanter les ligamens larges; ces douleurs se terminent aussi quelquefois à l'extérieur de la vulve, aux aînes; & lorsque la matrice est entierement tombée, on peut par la vûe se convaincre de l'état de la maladie; il faut, pour ne pas se tromper, être bien instruit de la figure de la matrice; il arrive quelquefois que la matrice en tombant ainsi se renverse, c'est - à - dire, que l'orifice reste en - dedans du vagin, tandis que la partie intérieure du fond se présente au - dehors; dans ces circonstances, on pourroit, comme il est arrivé plus d'une fois, la confondre avec quelque tumeur, quelque concrétion polypeuse; mais un bon anatomiste ne risque pas de tomber dans cette erreur, sur - tout s'il fait attention que les tumeurs augmentent insensiblement, au - lieu que cette descente se fait subitement toujours à la suite d'un accouchement laberieux, & par la faute d'un mauvais chirurgien, ou d'une sage - femme inhabile. D'ailleurs, il suinte continuellement de la matrice quelque sérosité jaunâtre ou sanguinolente. Plusieurs auteurs ont pensé que cette maladie étoit spécialement affectée aux femmes mariées, qu'on ne l'observoit jamais chez les jeunes filles, parce que, disent - ils, les ligamens sont trop forts, la matrice trop serrée & trop ferme; mais ce mauvais raisonnement est démontré faux par quelques observations: Mauriceau dit avoir vû la matrice pendre entre les cuisses de la grosseur de la tête d'un enfant dans deux filles, qui portoient cette incommodité depuis sept ans; il vint à bout malgré cela de la remettre heureusement. Observation xcvj. Il y a même dans quelque auteur un exemple d'une jeune enfant de trois ou quatre ans atteinte de cette maladie. Pour ce qui regarde le renversement de la matrice, il est très - certain qu'il est particulier aux femmes nouvellement accouchées.

Les causes de cet accident consistent dans un relâchement, ou dans la distraction, & même le déchirement & la rupture totale des ligamens qui retiennent la matrice attachée & suspendue; le relâchement est principalement occasionnée par l'état cachectique, chlorétique, par les fleurs - blanches, par l'hydropisie; c'est pourquoi Bartholin remarque que les femmes hydropiques sont très - sujettes à la chute de matrice. Ces causes sont favorisées par la grossesse; l'enfant qui est alors dans la matrice en [p. 201] augmente le poids, & la sait tendre nécessairement vers les parties inférieures; les personnes enceintes risquent cette maladie lorsqu'elles font des exercices violens, qu'elles sont de grands essorts pour lever des fardeaux pesans, pour aller à la selle, pour vomir, tousser, éternuer, &c. lorsqu'elles dansent & sautent beaucoup, lorsqu'elles font des voyages un peu longs dans des voitures mal suspendues qui cahotent beaucoup, &c. Mais de toutes les causes, celle qui est la plus fréquente & la plus dangereuse, c'est l'accouchement laborieux & opéré par un chirurgien mal - adroit, qui ébranlera, secouera vivement la matrice, tirera sans ménagement les vaisseaux ombilicaux, & voudra détacher par force l'arriere - faix; par - là il entraînera la matrice en bas, tiraillant ou déchirant ses ligamens, ou il la renversera, & même, ce qui est le plus fâcheux, il emportera tout - à - fait la matrice.

Lorsque la descente est incomplette, cette maladie est plus incommode que dangereuse; elle est, outre cela, un obstacle au coit, & par conséquent à la génération; elle trouble par - là une des fonctions les plus intéressantes & la plus agréable; on a cependant vû quelquetois des femmes concevoir dans cet état. Lorsque la matrice est tout - à - fait tombée, il est à craindre qu'il ne se forme un étranglement qui amene l'inflammation & la gangrene; l'action de l'air sur des parties qui n'y sont point accoutumées peut être facheuse; néanmoins les deux filles dont Moriceau nous a laissé l'histoire, gardoient depuis sept ans cette descente sans autre incommodité, étoient très - bien reglées, & il n'en est pas de même lorsque la matrice est renversée; l'inflammation & la gangrene suivent de pres l'accident, & la mort est ordinairement prochaine: les descentes qu'occasionne un défaut dans l'accouchement, sont accompagnées d'un danger beaucoup plus prompt & plus pressant que les autres; enfin, lorsqu'elle a lieu dans les filles qui le sont réellement, elle est plus opiniâtre & plus difficile à réduire, à cause que les parties par lesquelles on doit faire rentrer la matrice, naturellement fort étroites, n'ont pas encore été élargies.

Dès qu'on s'apperçoit de la descente de matrice, il faut tâcher de la réduire; mais on doit auparavant examiner si elle est bien saine, sans inflammation & gangrene: car si on en appercevoit quelques traces, il faudroit, avant de la remettre, y faire quelques légeres scarifications avec la pointe de la lancette, & la fomenter avec des décoctions de quinquina, de scordium, l'eau - de - vie camphrée, ou autres anti - septiques, ce qu'on pourra continuer quand elle sera resserrée: avant d'essayer la réduction, il faut avoir attention, pour la faciliter, de faire uriner la femme, de la faire aller du ventre par un leger lavement s'il est nécessaire; après quoi on la fait coucher sur le dos, la tête sort basse, & les sesses élevées; on prend la matrice, qu'on envelope d'un linge fort souple, & l'on tâche, par des legeres secousses de côté & d'autres, de la repousser en - dedans; on a soin auparavant d'oindre ces parties d'huile d'amandes douces, de beurre, ou de graisse bien fraîche, &c. Roderic à Castro, auteur connu par un excellent Traité sur maladies des femmes, conseille, pour faire rentrer la matrice, d'en approcher un fer rouge, comme si on vouloit la brûler; il assure qu'alors la matrice se retire avec impétuosité; & pour prouver l'efficacité de ce remede, il cite le succès qu'il a eu dans une descente de boyau, qui fut reduit tout de suite par cet ingénieux artifice. Quand la matrice est bien réduite, il faut en prévenir la rechute, & la contenir par un pessaire qu'on introduira simplement dans le vagin, & non pas dans la matrice, comme le prétend ridiculement Rousset: ces pessaires seront percés pour laisser passer les exerétions de la matrice, & pour laisser le moyen d'injecter quelque liqueur astringente, comme la décoction de plantin, de grenades, les eaux de forge, &c. pour fortifier la matrice; d'ailleurs la femme peut alors user du coït, quoiqu'elle doive s'en abstenir, & même engendrer, comme il conste par des observations. Si la descente est une suite d'un relâchement occasionné par un état chlorétique, cachectique, d'hydropisie, &c. il faut user des remedes qui sont convenables dans ces maladies, & sur - tout insister sur les martiaux. On peut même fortifier les reins par des fomentations astringentes, &c. Si une femme enceinte est sujette à cet accident, il faut qu'elle agisse très - peu, qu'elle reste presque toujours au lit, ou couchée dans une bergere; & lorsqu'on les accouche, il faut que le chirurgien, ou la sage - femme à chaque douleur soutienne l'orifice de la matrice, en même tems qu'elle tâche d'attirer en - dehors la tête de l'enfant; sans cette précaution on risque d'entrainer la matrice avec l'enfant. Il arrive quelquefois que la matrice ayant resté trop long - tems dehors, est étranglée dans quelque partie; l'inflammation se forme, le volume augmente, la gangrene survient; alors ou la réduction est impossible, ou elle est dangereuse; il n'y a pas d'autre parti à prendre que de couper éntierement la matrice; il ne manque pas d'observations qui font voir qu'on peut faire cette opération, sans mettre la vie de la malade dans un danger évident. On a quelquefois pris la matrice pour une tumeur, on l'a extirpée en conséquence, sans qu'il en soit resulté aucun accident fâcheux; l'art peut imiter & suivre ces heureux hasards; mais il ne doit le faire que dans une extreme nécessité; & lorsqu'elle est bien décidée, il ne faut pas balancer à recourir à ce remede, le seul qui puisse avoir quelque heureux succès, sans examiner scrupuleusement s'il est infaillible. Nihil interest, dit Celse, an satis tutum proesidium sit, quod unicum est.

Hernie de la matrice, hystérocele, USEROKHLH. La plus légere teinture d'anatomie suffir pour faire sentir combien il est difficile que la matrice soit portée hors du péritoine, & sur - tout par les anneaux des museles du bas - ventre, pour y former une hernie; mars les raisonnemens les plus plausibles ne sauroient détruire un fait, & quelqu'impossible que paroisse un tel déplacement de la matrice, il est certain qu'on en a vû quelques exemples. Sennert raconte que la femme d'un tonnelier, dans les premiers mois de sa grossesse, aidant à son mari à courber des perches, reçut un violent coup à l'aîne gauche de cette perche, qui, étant lâchée, se remettoit par son élasticité; il survint immédiatement après une tumeur, qui augmenta tous les jours, de façon à mettre un obstacle à sa réduction. Lorsque le terme de l'accouchement arriva, il ne fut pas possible de tirer l'enfant par les voies ordinaires; on fut obligé d'en venir à l'opération césarienne, qu'on pratiqua sur la tumeur. Cette opération fut avantageuse à l'enfant, & préjudiciable à la mere, dont elle accélera la mort d'ailleurs inévitable. Institut. medic. lib. II. part. I. cap. ix. Moriceau dit avoir vû dans une femme grosse de six mois & demi, une hernie ventraie si considérable, que la matrice & l'enfant étoient presqu'entierement contenus dans cette tumeur, qui s'élevoit prodigieusement par - dessus le ventre. Liv. III. ch. xv.

Pour concevoir comment cette hernie peut se former, il faut faire attention que cette maladie est particuliere aux femmes enceintes, qu'alors la matrice augmentant en volume, force les enveloppes extérieures du bas - ventre, les contraint de se dilater; il peut arriver alors que le péritoine, peu sus<pb->

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