ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"932"> manquera une histoire générale des maladies, ont entrepris de tirer du recueil immense d'observations sur toute sortes de maladies, qui jusqu'à présent a resté sans ordre, une méthode qui indique la maniere d'en distinguer les différens caracteres, tant généraux que particuliers.

On a proposé plusieurs moyens d'établir cette méthode; on en connoit trois principaux, savoir l'ordre alphabétique, l'aithiologique & l'anatomique. Le premier, tel qu'est celui qu'ont adopté Burnet, Manget, consiste à ranger les maladies suivant les lettres initiales de leurs noms grecs, latins ou autres, par conséquent à en former un dictionnaire: mais ces noms étant des signes arbitaires & variables, ne présentent aucune idée qui puisse fixer celle qu'il s'agit d'établir, de la nature, du caractere de chaque maladie.

L'ordre des causes prochaines ou éloignées de chaque maladie, suivi par Juncker, Boerrhaave & d'autres, est sujet à de grands inconveniens & suppose la connoissance du système de l'auteur: ainsi un moyen aussi hypothétique ne paroît pas propre à fixer la maniere de connoître les maladies.

La plus suivie de toutes est l'ordre anatomique, qui range les maladies, suivant les différens siéges qu'elles ont dans le corps humain: tel est l'ordre suivi par Pison, par Sennert, Riviere, &c. dans lequel on trouve l'exposition des maladies, tant externes qu'internes, telles qu'elles peuvent affecter en particulier les différentes parties du corps, comme les inflammations, les douleurs de la tête, du cou, de la poitrine, du bas - ventre, des extrémités, & ensuite celles qui sont communes à toutes les parties ensemble, telles que la fiévre, & la vérole, le scorbut, &c. mais cette méthode ne paroît pas mieux fondée que les autres, & ne souffre pas moins d'inconvéniens, eu égard sur tout à la difficulté qu'il y a dans bien des maladies, de fixer le siége principal de la cause morbifique, dont les effets s'étendent à plusieurs parties en même - tems, comme la migraine, qui semble affecter autant l'estomac, que la tête; le flux hépatique dans lequel il est très - douteux si le foie est affecté, & qui, selon bien des auteurs, paroît plutôt être une maladie des intestins. Voyez Migraine, Flux hépatique

Il reste donc à donner la préférence à l'ordre symptomatique, qui est celui dans lequel on range les maladies, suivant leurs effets, leurs phénomenes essentiels, caractéristiques, les plus évidens & les plus constans; en formant des classes de tous les genres de maladies, dont les signes pathognomoniques ont un caractere commun entr'eux, & dont les différences qui les accompagnent constituent les différentes especes rangées sous chacun des genres, avec lequel elles ont le plus de rapport.

Suivant cette méthode, on doit distinguer en général les maladies en internes ou médicinales, & en externes ou chirurgicales; les médicinales sont ainsi désignées, parce qu'elles intéressent essentiellement l'oeconomie animale, dont la connoissance appartient spécialement au médecin proprement dit; c'est - à - dire, à celui qui ayant fait une etude particuliere de la Physique du corps humain, a acquis les connoissances nécessaires pour prescrire les moyens propres à procurer la conservation de la santé, & la guérison des maladies. Voyez Médecin. Les maladies chirurgicales sont celles, qui pour le traitement dont elles sont susceptibles, exigent principalement les secours de la main; par conséquent les soins du chirurgien pour faire des opérations, ou des applications de remedes. Voyez Chirurgien.

Les maladies sont dites internes, lorsque la cause morbifique occupe un siége, qui ne tombe pas sous les sens, par opposition aux maladies externes, dont les symptômes caractéristiques sont immédiatement sensibles à celui qui en recherche la nature: c'est ainsi, par exemple, que l'érésipele au visage se manifeste par la rougeur & la tension douloureuse que l'on y apperçoit; au lieu que la même affection inflammatoire qui a son siége dans la poitrine, ne se fait connoître que par la douleur vive de la partie, accompagnée de fiévre ardente, de toux séche, &c. qui sont des symptomes, dont la cause immédiate est placée dans l'intérieur de la poitrine.

Les maladies ont plusieurs rapports avec les plantes; c'est par cette considération, que Sydenham avec plusieurs autres auteurs célebres, desiroit une méthode pour la distribution des maladies, qui fût dirigée à l'imitation de celle que les botanistes employent pour les plantes: c'est ce qu'on se propose, en établissant l'ordre symptomatique, dans lequel la différence des symptomes qui peuvent être comparés aux différentes parties des plantes, d'où se tirent les différens caracteres de leurs familles, de leurs genres & de leurs especes, établit aussi les différences des classes, des genres & des especes des maladies.

Mais avant que de faire l'exposition de la méthode symptomatique, il est à - propos de faire connoître les distinctions générales des maladies, telles qu'on les présente communément dans les écoles & dans les traités ordinaires de pathologie.

Les différences principales des maladies sont essentielles, ou accidentelles: commençons par cellesci, qui n'ont rien de relatif à notre méthode en particulier, & dont on peut faire l'application à toute sorte de maladies dans quelqu'ordre que l'on les distribue: les différences essentielles dont il sera traité ensuite, nous rameneron t à celui que nous adopterons ici.

Les différences, qui ne dépendent que des circonstances accidentelles des maladies, quoiqu'elles ne puissent point servir à en faire connoître la nature, ne laissent pas d'être utiles à savoir dans la pratique de la Médecine, pour diriger dans le jugement qu'il convient d'en porter & dans la recherche des indications qui se présentent à remplir pour leur traitement.

Comme les circonstances accidentelles des maladies sont fort variées & sont en grand nombre, elles donnent lieu à ce que leurs différences soient variées & multipliées à proportion; on peut cependant, d'après M. Astruc, dans sa pathologie, cap. ij. de accidentalib. morbor. different. les réduire à huit sortes; savoir, par rapport au mouvement, à la durée, à l'intensité, au caractere, à l'événement, au sujet, à la cause & au lieu.

1°. On appelle mouvement de la maladie, la maniere dont elle parcourt ses différens tems, qui sont le principe ou commencement lorsque les symptomes s'établissent; l'accroissement, lorsqu'ils augmentent en nombre & en intensité; l'état, lorsqu'ils sont fixés; le déclin, lorsque leur nombre & leur intensité diminuent; & la fin, lorsqu'ils cessent; ce qui peut arriver dans tous les tems de la maladie, lorsque c'est par la mort. Voyez Tems, Principe, &c.

2°. La durée de la maladie est différente par rapport à l'étendue, ou à la continuité. Ainsi, on distingue des maladies longues, chroniques, dont le mouvement se fait lentement, comme l'hydropisie; d'autres courtes, sans danger, comme la fiévre éphemere, ou avec danger, comme l'angine, l'apopléxie: celles - ci sont appellées aiguës, dont il n'a pas été fait mention dans l'ordre alphabétique de ce dictionnaire; elles sont encore de différente espece: celles qui font les progrès les plus prompts & les plus violens, avec le plus grand danger, morbi peracuti, se terminent le plus souvent par la mort [p. 933] dans l'espace de quatre jours, quelquefois dans un jour, ou même ne durent que quelques heures, ou qu'une heure; ou tuent sur le champ, comme il arrive quelquefois à l'égard de l'apopléxie, & comme on l'a vû à l'égard de certaines pestes, qui faisoient cesser tout à coup le mouvement du coeur. Il y a d'autres maladies fort aiguës qui ne passent pas sept jours, morbi peracuti. D'autres encore qui sont moins courtes, qu'on appelle simplement aiguës. Morbi acuti qui durent quatorze jours, & s'étendent même quelquefois jusqu'à vingt; telles sont les fiévres inflammatoires, les fiévres putrides, malignes. En général, plus le progrès de la maladie est rapide & excessif, plus elle est funeste & plus il y a à craindre qu'elle ne devienne mortelle; une partie de la durée de la maladie est souvent retranchée par la mort. A l'égard de la continuité des maladies, il y en a qui, lorsqu'elles ont commencé affectent sans intervalle, pendant toute leur durée: ce sont les continues, proprement dites, comme la fiévre ardente. D'autres, dont les symptomes cessent & reviennent par intervalles; ce sont les maladies intermittentes que l'on appelle périodiques, lorsque leur retour est reglé comme la fiévre tierce, quarte; & erratiques, lorsque leur retour ne suit aucun ordre, comme l'asthme, l'épilepsie: le retour des périodiques continues se nomme redoublement, & dans les intermittentes, accès; le relâche dans les premieres est connu sous le nom de rémission, & dans les autres sous celui d'intermission. L'ordre des redoublemens ou des accès est appellé le type de la maladie. Voyez Intermittente.

3°. L'intensité des maladies est déterminé, suivant que les lésions des fonctions qui les constituent, sont plus ou moins considérables; ce qui établit les maladies grandes, ou petites, violentes ou foibles, comme on le dit, de la douleur, d'une attaque de goutte, &c.

4°. Le caractere des maladies se tire de la différente maniere dont les fonctions sont lésées: si les lésions ne portent pas grande atteinte au principe de la vie, que les forces ne soient pas fort abattues, que les coctions & les crises s'operent librement; elles forment des maladies bénignes. Si la disposi tion manque à la coction, aux crises par le trop grand abattement, par l'oppressior des forces; les maladies sont dites malignes. Voyez Malignité. Les maladies malignes sont aussi distinguées en vénéneuses, en pestilentielles & en contagieuses. Voyez Venin Peste, Contact, Contagieux

5°. Les maladies ne différent pas peu par l'événement; car les unes se terminent, non - seulement sans avoir causé aucun danger, mais encore de maniere à avoir corrigé de mauvaises dispositions, ce qui les fait regarder comme salutaires; telles sont pour la plûpart les fiévres éphémeres qui guérissent des rhumes, & même quelques fiévres quartes, qui ont fait cesser des épilepsies habituelles. Les autres sont toujours mortelles, telles que la phthisie, la fiévre hectique confirmée. D'autres sont de nature à être toujours regardées comme dangereuses, & par conséquent douteuses, pour la maniere dont elles peuvent se terminer; telles sont la pleurésie, la fiévre maligne, &c. Voyez Salutaire, Mortel, Dangereux . Les maladies se terminent en général, par le retour de la santé ou par la mort, ou par quelqu'autre maladie, de trois manieres, ou par solution lente ou par crise, ou par métastase; ce qui établit encore la distinction des maladies guérissables, comme la fiévre tierce, & des incurables, comme la plûpart des paralysies. Voyez Terminaison, Solution, Crise, Métastase, Mort .

6°. Les différences des maladies qui se tirent du sujet ou de l'individu qui en est affecté, consistent, en ce qu'elles l'intéressent tout entier, ou seulement quelques - unes de ses parties, ce qui les fait appeller universelles ou particulieres; qu'elles ont leur siége au - dehors ou au - dedans du corps, ce qui les fait distinguer, comme on l'a déja dit, en externes & internes; qu'elles sont idiopathiques ou sympathiques, protopathiques ou déutéropathiques; lorsque la cause de la maladie réside primitivement dans la partie affectée, ou lorsque cette cause a son siége ailleurs que dans la partie affectée, ou lorsque la maladie ne dépend d'aucune autre qui ait précédé, ou lorsqu'elle est l'effet d'un vice qui avoit produit une premiere maladie. Voyez la plûpart de ces différens mots en leur lieu.

7°. Les maladies différent par rapport à leur cause, en ce que les unes sont simples, qui ne dépendent que d'une cause de lésion de fonctions; les autres composées qui dépendent de plusieurs, les unes sont produites par un vice antérieur à la génération du sujet, & qui en a infecté les principes, morbi congeniti; les autres sont contractées après la conception, pendant l'incubation utérine & avant la naissance, morbi connati; les unes & les autres sont établies lors de la naissance, comme la claudication, la gibbosité, qui viennent des parens ou de quelques accidens arrivés dans le sein maternel: les premieres sont héréditaires, les autres sont acquises ou adventices, telles que sont aussi toutes celles qui surviennent dans le cours de la vie. On distingue encore respectivement à la cause des maladies, les unes en vraies ou légitimes, qui sont celles qui ont réellement leur siége dans la partie qui paroît affectée; telle est la douleur de côté, qui provenant en effet d'une inflammation de la pleure, est appellée pleurésie; les autres en fausses ou bâtardes; telle est la douleur rhumatismale des muscles intercostaux externes, qui forme la fausse pleurésie avec bien des apparences de la vraie.

8°. Les maladies different enfin par rapport au lieu où elles paroissent, lorsqu'elles affectent un grand nombre de sujets en même tems, se répandent & dominent avec le même caractere dans un pays plutôt que dans un autre, avec un regne limité; elles sont appellées maladies épidémiques, c'est - à - dire populaires; telles sont la petite verole, la rougeole, la dysenterie, les fievres pestilentielles, &c. Lorsqu'elles affectent sans discontinuer un grand nombre de personnes dans un même pays, d'une maniere à - peu - près semblable, elles sont appellées endémiques; telles sont les écrouelles en Espagne, la peste dans le Levant, &c. Lorsqu'elles ne sont que vaguement répandues en petit nombre, & sans avoir rien de commun entr'elles, au - moins pour la plûpart, c'est ce qu'on appelle maladies sporadiques; telles sont la pleurésie, la fievre continue, la phthysie, l'hydropisie, la rage, qui peuvent se trouver en même tems dans un même espace de pays. Voyez Epidémique, Endémique, Sporadique

On peut ajoûter à toutes ces différences accidentelles des maladies, celles qui sont tirées des différentes saisons, où certaines maladies s'établissent, paroissent régner plutôt que d'autres; telles sont les fiévres intermittentes, dont les unes sont vernales, comme les tierces; les autres automnales, comme les quartes; distinction qui renferme toute l'année d'un solstice à l'autre, & qui est importante pour le prognostic & la curation. On ne laisse cependant pas de remarquer dans quelque cas, sur tout par rapport aux maladies aiguës, les maladies d'été & celles d'hiver.

Il y en a de propres aux différens âges, comme la dentition à l'égard des enfans, les croissans aux garçons de l'âge de puberté, les pâles - couleurs aux filles du même âge; les hémorrhoïdes aux personnes de

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