ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"902"> suivant laquelle il paroît qu'ils connoissoient des causes personnelles des gens de l'hôtel du roi. Présentement ces sortes d'offices sont presque sans fonction. Ils sont au nombre de quatre; ils jouissent de tous les privileges des commensaux. (A)

Maître en Chirurgie (Page 9:902)

Maître en Chirurgie, c'est le titre qu'on donne à ceux qui ont requis le droit d'exercer la Chirurgie par leur reception au corps des Chirurgiens, après les épreuves nécessaires qui justifient de leur capacité. C'est aux Chirurgiens seuls & exclusivement qu'il appartient d'apprécier le mérite & le savoir de ceux qui se destinent à l'exercice d'un art si important & si difficile. Les lois ont pris les plus sages précautions, & les mesures les plus justes, afin que les études, les travaux & les actes nécessaires, pour obtenir le grade de maître en Chirurgie, fussent suivis dans le meilleur ordre, relativement à l'utilité publique. Nous allons indiquer en quoi consistent ces différens exercices.

Par la déclaration du roi du 23 Avril 1743, les Chirurgiens de Paris sont tenus, pour parvenir à la maîtrise, de rapporter des lettres de maître - ès arts en bonne forme, avec le certificat du tems d'études. On y reconnoît qu'il est important que dans la capitale les Chirurgiens, par l'étude des lettres, puissent acquérir une connoissance plus parfaite des regles d'un art si nécessaire au genre humain; & cette loi regrette que les circonstances des tems ne permettent pas de l'établir de même dans les principales villes du royaume.

Une déclaration si favorable au progrès de la Chirurgie, & qui sera un monument éternel de l'amour du roi pour ses sujets, a trouvé des contradicteurs, & a été la source de disputes longues & vives, dont nous avons parlé au mot Chirurgien. Les vûes du bien public ont enfin prévalu, & les parlemens de Guyenne, de Normandie & de Bretagne, sans égard aux contestations qui se sont élevées à Paris, ont enregistré des statuts pour les principales villes de leur ressort, par lesquels les frais de réception à la maîtrise en Chirurgie sont moindres en faveur de ceux qui y aspireront, avec le grade de maître - ès - arts. La plûpart des cours souveraines du royaume, en enregistrant les lettres patentes du 10 Août 1756, qui donnent aux Chirurgiens de provinces, exerçans purement & simplement la Chirurgie, les privileges de citoyens notables, ont restreint la jouissance des honneurs & des prérogatives attachées à cette qualité aux seuls Chirurgiens gradués, & qui présenteront des lettres de maître - ès - arts en bonne forme.

Un arrêt du conseil d'état du roi du 4 Juillet 1750, qui fixe entre autres choses l'ordre qui doit être observé dans les cours de Chirurgie à Paris, établis par les bienfaits du roi en vertu des lettres - patentes du mois de Septembre 1724, ordonne que les éleves en Chirurgie seront tenus de prendre des inscriptions aux écoles de saint Côme, & de rapporter des certificats en bonne forme, comme ils ont fait le cours complet de trois années sous les professeurs royaux qui y enseignent pendant l'été; la premiere année, la Physiologie & l'Hygiene; la seconde année, la Pathologie générale & particuliere, qui comprend le traité des tumeurs, des plaies, des ulceres, des luxations & des fractures; & la troisieme, la Thérapeutique ou la méthode curative des maladies chirurgicales; l'on traite spécialement dans ces leçons de la matiere médicale externe, des saignées, des ventouses, des cauteres, des eaux minérales, considérées comme remedes extérieurs, &c. Pendant l'hiver de ces trois années d'études, les éleves doivent fréquenter assiduement l'école pratique: elle est tenue par les professeurs & démonstrateurs royaux d'anatomie & des opérations, qui tirent des hôpitaux ou de la basse - geole les cadavres dont ils ont besoin pour l'instruction publique. Il y a en outre un professeur & démonstrateur pour les accouchemens, fondé par feu M. de la Peyronie, premier chirurgien du roi, pour enseigner chaque année les principes de cette partie de la Chirurgie aux éleves séparément du pareil cours, qui, suivant la même fondation, se fait en faveur des sages - femmes & de leurs apprentisses.

Les professeurs des écoles de Chirurgie sont brevetés du roi, & nommés par Sa Majesté sur la présentation de son premier chirurgien. Ils sont permanens, & occupés par état & par honneur à mériter la confiance des éleves & l'applaudissement de leurs collegues. Cet avantage ne se trouveroit point, si l'emploi de professeur étoit passager comme dans d'autres écoles, où cette charge est donnée par le sort & pour un seul cours; ce qui fait qu'une des plus importantes fonctions peut tomber par le hasard sur ceux qui sont le moins capables de s'en bien acquitter.

Outre les cours publics, il y a des écoles d'Anatomie & de Chirurgie dans tous les hôpitaux, & des maîtres qui, dévoués par goût à l'instruction des éleves, leur font dissequer des sujets, & enseignent dans leurs maisons particulieres l'anatomie, & font pratiquer les opérations chirurgicales.

Il ne suffit pas que l'éleve en chirurgie soit préparé par l'étude des humanités & de la philosophie qui ont dû l'occuper jusqu'à environ dix - huit ans, âge avant lequel on n'a pas ordinairement l'esprit assez formé pour une étude bien sérieuse; & que depuis il ait fait le cours complet de trois années dans les écoles de chirurgie, on exige que les jeunes Chirurgiens ayent demeuré en qualité d'éleve durant six ans consécutifs chez un maître de l'art, ou chez plusieurs pendant sept années. Dans d'autres écoles qui ont, comme celle de Chirurgie, la conservation & le rétablissement de la santé pour objet, on parvient à la maîtrise en l'art, où, pour parler le langage reçu, l'on est promu au doctorat après les seuls exercices scholastiques pendant le tems prescrit par les statuts. Mais en Chirurgie, on demande des éleves une application assidue à la pratique sous les yeux d'un ou de plusieurs maîtres pendant un tems assez long.

On a reproché aux jeunes Chirurgiens dans des disputes de corps, cette obligation de domicile, qu'on traitoit de servitude, ainsi que la dépendance où ils sont de leurs chefs dans les hôpitaux, employés aux fonctions ministérielles de leur art pour le service des malades. Mais le bien public est l'objet de cette obligation, & les éleves n'y trouvent pas moins d'utilité pour leur instruction, que pour leur avancement particulier. L'attachement à un maître, est un moyen d'être exercé à tout ce qui concerne l'art, & par degrés depuis ce qu'il y a de moindre, jusqu'aux opérations les plus délicates & les plus importantes. Tout le monde convient que, dans tous les arts, ce n'est qu'en pratiquant qu'on devient habile: l'éleve, en travaillant sous des maîtres, profite de leur habileté & de leur expérience; il en reçoit journellement des instructions de détail, dont l'application est déterminée; il ne néglige rien de ce qu'il faut savoir; il demande des éclaircissemens sur les choses qui passent la partie actuelle de ses lumieres; enfin il voit habituellement des malades. Quand on a passé ainsi quelques années à leur service sous la direction des maîtres de l'art, & qu'on est parvenu au même grade, on est moins exposé à l'inconvénient, fâcheux à plus d'un egard, de se trouver long - tems, après sa réception, ancien maître & jeune praticien, comme on en voit des exemples ailleurs. [p. 903]

Dans un art aussi important & qui ne demande pas moins de pratique que de théorie, ce seroit un grand défaut dans la constitution des choses, qu'un homme pût s'élever à la qualité de maître, sans avoir été l'éleve de personne en particulier. Les leçons publiques peuvent être excellentes, mais elles ne peuvent être ni assez détaillées, ni assez soutenues, ni avoir le mérite des instructions pratiques, personnelles, variables, suivant les différentes circonstances qui les exigent. Avant l'établissement des universités, la Medecine, de même que la Chirurgie, s'apprenoit sous des maîtres particuliers, dont les éleves étoient les enfans adoptifs. Le serment d'Hippocrate nous rappelle, à ce sujet, une disposition bien digne d'être proposée comme modele. « Je regarderai toujours comme mon pere celui qui m'a enseigné cet art; je lui aiderai à vivre, & lui donnerai toutes les choses dont il aura besoin. Je tiendrai lieu de frere à ses enfans, & s'ils veulent se donner à la medecine, je la leur enseignerai sans leur demander ni argent, ni promesse. Je les instruirai par des préceptes abrégés & par des explications étendues, & autrement avec tout le soin possible. J'instruirai de même mes enfans, & les disciples qu'on aura mis sous ma conduite, qui auront été immatriculés, & qui auront fait le serment ordinaire, & je ne communiquerai cette science à nul autre qu'à ceux - là ».

On pourroit objecter contre l'obligation du domicile, qu'un jeune homme trouve des ressources pour son instruction dans les leçons publiques, dans la fréquentation des hôpitaux, & qu'il se fera par l'étude l'éleve d'Hippocrate, d'Ambroise Paré, de Fabrice de Hilden & d'Aquapendente, comme les Médecins le sont d'Hippocrate, de Galien, de Sydenham & de Boerhaave. Mais ces grands maîtres ne sont plus, & ne peuvent par conséquent nous répondre de la capacité de leurs disciples. Il est de l'intérêt public qu'avant de se présenter sur les bancs, un candidat ait été attaché pendant plusieurs années à quelque praticien qui l'ait formé dans son art, introduit chez les malades, entretenu d'observations bien suivies sur les maladies, dans leurs différens états, dans leurs diverses complications, & dans leurs différentes terminaisons. Le grand fruit de l'assujettissement des éleves sous des maîtres n'est pas seulement relatif à l'instruction, les Chirurgiens y trouvent même un moyen d'avancement & de fortune. Menés dans les maisons, ils sont connus du public pour les éleves des maîtres en qui l'on a confiance; ils sont à portée de la mériter à un certain degré par leur application & leur bonne conduite. Ceux qui n'ont pas eu cet avantage, percent plus difficilement: c'est ce qu'on voit dans la Médecine, où ordinairement il faut veiller avant que d'atteindre à une certaine réputation qui procure une grande pratique. Il est rare que des circonstances heureuses favorisent un homme de mérite. C'est la mort ou la retraite des anciens médecins, comme celle des anciens avocats, qui poussent le plus chez les malades & au barreau. De cette maniere, on doit à son âge, plus encore qu'à ses talens, l'avantage d'être fort employé sur la fin de ses jours. Delà peut - être est né ce proverbe si commun, jeune chirurgien, vieux médecin, dont on peut faire de si fausses applications. Si les Chirurgiens sont plutôt formés, ils le doivent au grand exercice de leur art; & ceux même qu'on regarderoit comme médiocres, sont capables de rendre au public des services essentiels & très - utiles, par l'opération de la saignée & le traitement d'un grand nombre de maladies, qui n'exigent pas des lumieres supérieures, ni des opérations considérables, quoique l'art d'opérer, considéré du côté manuel, ne soit pas la partie la plus difficile de la Chirurgie, comme nous avons prouvé aux mots Chirurgie & Opération. Voyez Chirurgie & Operation.

L'éleve qui a toutes les qualités requises ne peut se mettre sur les bancs pour parvenir à la maîtrise que pendant le mois de Mars, & il subit le premier Lundi du mois d'Avril, dans une assemblée générale, un examen sommaire sur les principes de la Chirurgie: les quatre prevôts sont les seuls interrogateurs; & si le candidat est jugé suffisant & capable, il est immatriculé sur les registres. L'acte de tentative ne peut être différé plus de trois mois après l'immatricule. Dans cet exercice, l'aspirant est interrogé au moins par treize maîtres, à commencer par le dernier reçu; les douze autres examinateurs sont tirés au sort par le lieutenant du premier chirurgien du roi, immédiatement avant l'examen & en présence de l'assemblée. En tentative, on interroge ordinairement sur les principes de la Chirurgie, & principalement sur des points physiologiques. Le troisieme acte, nommé premier examen, a pour objet la Pathologie, tant générale que particuliere. Le candidat est interrogé par neuf maîtres, au choix du premier chirurgien du roi ou de son lieutenant: si le candidat est approuvé après cet acte, il entre en semaine. Il y en a quatre dans le cours de la licence: dans la premiere, nommée d'ostéologie, le candidat doit soutenir deux actes en deux jours séparés, dont l'un est sur la démonstration du squelete, & l'autre sur toutes les opérations nécessaires pour guérir les maladies des os. Après la semaine d'ostéologie vient celle d'anatomie, pour laquelle on ne peut se présenter que depuis le premier jour de Novembre, jusqu'au dernier jour de Mars, ou au plus jusqu'à la fin d'Avril, si la saison le permet.

La semaine d'anatomie se fait sur un cadavre humain: elle est composée de treize actes. L'aspirant devant travailler & répondre pendant six jours & demi consécutifs, soir & matin; savoir, le matin pour les opérations de la Chirurgie; & le soir, sur toutes les parties de l'Anatcmie.

La troisieme semaine est celle des saignées. L'aspirant y soutient deux actes à deux différens jours, l'un sur la théorie, & l'autre sur la pratique des saignées.

La quatrieme & derniere semaine est appellée des médicamens, pendant laquelle le candidat est oblige de soutenir encore deux actes à deux différens jours: le premier, sur les médicamens simples: le second, sur les médicamens composés. Les quatre prevôts sont les seuls interrogateurs dans les actes des quatre semaines, & c'est le lieutenant du premier chirurgien du roi qui recueille les voix de l'assemblée sur l'admission ou le refus de l'aspirant.

Après les quatre semaines, il y a un dernier examen, nommé de rigueur, qui a pour objet les méthodes curatives des différentes maladies chirurgicales, & l'explication raisonnée de faits de pratique. Dans cet acte, le candidat doit avoir au - moins douze interrogateurs, tirés au sort par le lieutenant du premier chirurgien du roi, en présence de l'assemblée.

Les candidats doivent ensuite soutenir une thèse ou acte public en latin. La faculté de Médecine y est invitée par le répondant; elle y députe avec son doyen deux autres docteurs, qui occupent trois fauteuils au côté droit du bureau du lieutenant du premier chirurgien du roi & des prevôts. Cet acte doit durer au moins quatre heures: pendant la premiere, les médecins députés proposent les difficultés qu'ils jugent à - propos sur les matieres de l'acte: les maîtres en Chirurgie argumentent pendant les trois autres heures; après quoi, si l'aspirant a été trouvé capable par la voie du scrutin au suffrage des seuls

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