ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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M (Page 9:783)

M, Subs. fém. (Gram.) c'est la treizieme lettre & la dixieme consonne de notre alpha bet: nous la nommons emme; les Grecs la nommoient mu, MU=, & les Hébreux men. La facilité de l'épellation demande qu'on la prononce me avec un e muet; & ce nom alors n'est plus féminin, mais masculin.

L'articulation représentée par la lettre M est labiale & nasale: labiale, parce qu'elle exige l'approximation des deux levres, de la même maniere que pour l'articulation B; nasale, parce que l'effort des levres ainsi rapprochées, fait refluer par le nez une partie de l'air sonore que l'articulation modifie, comme on le remarque dans les personnes fort enrhumées qui prononcent b pour m, parce que le canal du nez est embarrassé, & que l'articulation alors est totalement orale.

Comme labiale, elle est commuable avec toutes les autres labiales b, p, v, f; c'est ainsi que scabellum vient de scamnum, selon le témoignage de Quintilien; que fors vient de MO\ROS2, que pulvinar vient de pluma: cette lettre attire aussi les deux labiales b & p, qui sont comme elle produites par la réunion des deux lettres; ainsi voit - on le b attiré par m dans tombeau dérivé de tumulus, dans flambeau formé de flamme, dans ambigo composé de am & ago; & p est introduit de même dans promptus formé de promotus, dans sumpsi & sumptum qui viennent de sumo.

Comme nasale, la lettre ou articulation M se change aussi avec N: c'est ainsi que signum vient de S2IGMH\, nappe de mappa, & natte de matta, en changeant m en n; au contraire amphora vient de A)NAFE/RW, amplus de A)NAPLEOS2, abstemius d'abstineo, sommeil de somnus, en changeant n en m.

M obscurum in extremitate, dit Priscien (lib. I. de accid. litt.) ut templum: apertum in principio, ut magnus: mediocre in mediis, ut umbra. Il nous est difficile de bien distinguer aujourd'hui ces trois prononciations différentes de m, marquées par Priscien: mais nous ne pouvons guere douter qu'outre sa valeur naturelle, telle que nous la démêlons dans manie, moeurs, &c. elle n'ait encore servi, à peu - près comme parmi nous, à indiquer la nasalité de la voyelle finale d'un mot; & c'est peut - être dans cet état que Priscien dit, M obscurum in extremitate, parce qu'en effet on n'y entendoit pas plus distinctement l'articulation m, que nous ne l'entendons dans nos mots françois nom, faim. Ce qui confirme ce raisonnement, c'est que dans les vers toute voyelle finale, accompagnée de la lettre m, étoit sujette à l'élision, si le mot suivant commençoit par une voyelle:

Divisum imperium cum Jove Coesar habet: dans ce tems - là même, si l'on en croit Quintilien, Inst. IX. 4. ce n'est pas que la lettre m f@t muette, mais c'est qu'elle avoit un son obscur: adeo ut penè cujusdam novoe litteroe sonum reddat; neque enim eximitur, sed obscuratur. C'est bien là le langage de Priscien.

« On ne sauroit nier, dit M. Harduin, Rem. div. sur la prononc. p. 40. que le son nasal n'ait été connu des anciens. Nicod ass@re, d'après Nigidius Figulus, auteur contemporain & ami de Cicéron, que les Grecs employoient des sons de ce genre devant les consonnes y, x». Mais Cicéron lui - même & Quintilien nous donnent assez à entendre que m à la fin étoit le signe de la nasalité. Voici comme parle le premier, Orat. XXII. p. 156. Quid? illud non det unde sit, quod dicitur cum illis, cum autem nobis non dicitur, sed nobiscum? Quia si ita diceretur, obscoenius concurrerent litteroe, ut etiam modò, nisi autem inter posuissem, concurrissent. Quintilien, Instit. VIII. 3. s'exprime ainsi dans les mêmes vûes, & d'apr#s le même principe: Vitanda est junctura deformiter sonans, ut si cum hominibus notis loqui nos dicimus, nisi hoc ipsum hominibus medium sit, in KAKO/FATON videmur incidere: quia ulitma prioris syllaboe littera (c'est la lettre m de cum) quoe exprimi nisi labris coëuntibus non potest, aut ut intersistere nos indecentissimè cogit, aut continuata cùm N insequente in naturam ejus corrumpitur. Cette derniere observation est remarquable. si on la compare avec une autre remarque de M. Harduin: ibid. « Le même Nigidius, dit - il, donne à entendre que chez les Latins n rendoit aussi la voyelie nasale dans anguis, increpat, & autres mots semblables: in his, dit - il, non verum n, sed adulterinum ponitur; nam si ea littera esset, lingua palatum tangeret». Si donc on avoit mis de suite cum nobis ou cum notis, il auroit fallu s'arrêter entre deux, ce qui étoit, selon la remarque de Quintilien, de tr#s - mauvaise grace; ou, en prononçant les deux mots de suite, vu que le premier étoit nasal, on auroit entendu la même chose que dans le mot obscène, cunno, où la premiere étoit apparemment nasale conformément à ce que nous venons d'apprendre de Nigidius.

Qu'il me soit permis, à cette occasion, de justifier notre ortographe usuelle, qui représente les voyelles nasales par la voyelle ordinaire suivie de l'une des consonnes m ou n. J'ai prouvé, article H, qu'il est de l'essence de toute articulation de précéder le son qu'elle modifie; c'est donc la même chose de toute consonne à l'égard de la voyelle. Donc une consonne à la fin d'un mot doit ou y être muette, ou y être suivie d'une voyelle prononcée, quoique non écrite: & c'est ainsi que nous prononçons le latiu même dominos, crepat, nequit, comme s'il y avoit dominose, crepate, nequite avec l'e muet françois; au contraire, nous prononçons il bat, il promet, il fit, il crut, sabot, &c. comme s'il y avoit il ba, il promè, il fi, il cru, sabo sans t. Il a donc pu être aussi raisonnable de placer m ou n à la fin d'une syllabe, pour y être des signes muets par rapport au mouvement explosif qu'ils représentent naturellement, mais sans cesser d'indiquer l'émission nasale de l'air qui est essentielle à ces articulations. Je dis plus: il étoit plus naturel de marquer la nasalité par un de ces caracteres à qui elle est essentielle, que d'introduire des voyelles nasales diversement caractérisées: le méchanisme de la parole m'en paroît mieux analysé; & l'on vient de voir, en effet, que les anciens Grecs & Latins ont adopté ce moyen suggére en quelque sorte par la nature.

Quoi qu'il en soit, la lettre m à la fin du mot est en fran$ois un simple signe de la nasalité de la voyelle précedente; comme dans nom, pronom, faim, thim, &c. il faut excepter l'interjection hem, & les noms propres étrangers, où l'm finale conserve sa véritable prononciation; comme Sem, Cham, Jérusalem, Krim, Stokolm, Salm, Surinam, Amsterdam, Rotterdam, Postdam, &c. Il y en a cependant quelques - uns où cette lettre n'est qu'un signe de nasalité, comme Adam, Absalom: & c'est de l'usage qu'il faut apprendre ces différences, puisque c'est l'usage seul qui les établit sans égard pour aucune analogie.

M au milieu des mots, mais à la fin d'une syllabe, est encore un signe de nasalité, quand cette lettre est [p. 784] suivie de l'une des trois lettres m, b, p; comme dans emmener, combler, comparer. On en excepte quelques mots qui commencent par imm, comme immodeste, immodestie, immodestement, immaculée conception, immédiat, immédiatement, immatriculé, immatriculation, immense, immensité, immodéré, immunité, &c. on y fait sentir la réduplication de l'articulation m.

On prononce aussi l'articulation m dans les mots où elle est suivie de n, comme indemniser, indemnité, amnistie, Agamemnon, Memnon, Mnémosine, &c. excepté damner, solemnel, & leurs dérivés où la lettre m est un signe de nasalité.

Elle l'est encore dans comte venu de comitis, dans compte venu de computum, dans prompt venu de promptus, & dans leurs dérivés.

M. l'abbé Regnier, Gramm. franç. in - 12. p. 37. propose un doute sur quatre mots, contemptible, qui n'est, dit - il, plus guere en usage, exemption, rédemption & rédempteur, dans lesquels il semble que le son entier de m se fasse entendre. A quoi il répond: « Peut - être aussi que ce n'est qu'une illusion que fait à l'oreille le son voisin du p rendu plus dur par le t suivant. Quoi qu'il en soit, la différence n'est pas assez distinctement marquée pour donner lieu de décider là - dessus ». Il me semble qu'aujourd'hui l'usage est très - décidé sur ces mots: on prononce avec le son nasal exemt, exemption, exemtes sans p; & plusieurs même l'écrivent ainsi, & entre autres le rédacteur qui a rendu portatif le dictionnaire de Richelet; le son nasal est suivi distinctement du p dans la prononciation & dans l'orthographe des mots contempteur, contemptible, rédemption, rédempteur.

M en chiffres romains signifient mille; une ligne horisontale au - dessus lui donne une valeur mille fois plus grande, M vaut mille fois mille ou un million.

M, dans les ordonnances des Médecins, veut dire misce, mêlez, ou manipulus, une poignée; les circonstances décident entre ces deux sens.

M, sur nos monnoies, indique celles qui sont frappées à Toulouse.

M (Page 9:784)

M, (Ecriture.) dans sa forme italienne, ce sont trois droites & trois courbes; la premiere est un I, sans courbe; la seconde est un I parfait, en le regardant du côté de sa courbe; la troisieme est la premiere, la huitieme, la troisieme, la quatrieme & la cinquieme partie de l'O. L'm coulée est faite de trois i liés ensemble. Il en est de même de l'm ronde.

Ces trois m se forment du mouvement composé des doigts & du poignet. Voyez les Planches d'Ecriture.

MA (Page 9:784)

MA, s. f. (Mythol.) nom que la fable donne à une femme qui suivit Rhéa, & à qui Jupiter confia l'éducation de Bacchus. Ce nom se donnoit encore quelquefois à Rhéa même, sur - tout en Lydie, où on lui sacrifioit un taureau sous ce nom. Diction. de Trévoux.

MAAMETER (Page 9:784)

MAAMETER, (Géog.) ville de Perse, autrement nommée Bafrouche. Elle est située, selon Tavernier, à 77. 35. de long. & à 36. 50. de latitude. (D. J.)

MAAYPOOSTEN (Page 9:784)

MAAYPOOSTEN, s. m. (Comm.) sorte d'étoffe de soie qui nous vient de la compagnie des Indes orientales hollandoise. Les cavelins ou lots sont de cinquante pieces. En 1720, chaque piece revenoit à 8 florins ½. Voyez le Diction. de Commerce.

MABOUJA (Page 9:784)

MABOUJA, s. m. (Botan. exot.) nom donné par les sauvages d'Amérique à une racine, dont ils font leurs massues. Biron, dans ses curiosités de l'art & de la nature, dit que cette racine est extrèmement compacte, dure, pesante, noire, & toute garnie de noeuds gros comme des châtaignes. On trouve l'ar<cb-> bre qui la produit sur le haut de la montagne de la Souffriere dans la Guadaloupe, mais personne n'a décrit cet arbre. (D. J.)

MABOUYAS (Page 9:784)

MABOUYAS, s. m. (Hist. nat.) lézard des Antilles ainsi appellé par les sauvages, parce qu'il est très laid, & qu'ils donnent communément le nom de mabouyas à tout ce qui leur fait horreur. Ce lézard n'est pas des plus grands, il n'a jamais la longueur d'un pié. Ses doigts sont plats, larges, arrondis par le bout, & terminés par un petit ongle semblable à l'aiguillon d'une guêpe. On le trouve ordinairement sur les arbres & sur le faite des cases. Lorsque cet animal est irrité, il se jette sur les hommes, & s'y attache opiniâtrement; mais il ne mord, ni n'est dangereux; cependant on le craint; ce n'est sans doute qu'à cause de sa laideur. Pendant la nuit, il jette de tems en tems un cri effrayant, qui est un pronostic du changement de tems. Hist. nat. des Ant. par le P. du Tertre, tome Il. page 315.

Maboya (Page 9:784)

Maboya ou Mabouya, s. m. (Théolog. caraïbe.) nom que les Caraaïbes sauvages des îles Antilles donnent au diable ou à l'esprit dont ils craignent le malin vouloir; c'est par cette raison qu'ils rendent au seul mabouya une espece de culte, fabriquant en son honneur de petites figures de bois bisarres & hideuses, qu'ils placent au - devant de leurs pirogues, & quelquefois dans leurs cases.

On trouve souvent en creusant la terre plusieurs de ces figures, formées de terre cuite, ou d'une pierre verdâtre, ou d'une résine qui ressemble à l'ambre jaune; c'est une espece de copal qui découle naturellement d'un grand arbre nommé courbaril. Voyez Courbaril.

Ces idoles anciennes ont différentes formes: les unes représentent des têtes de perroquet ou des grenouilles mal formées, d'autres ressemblent à des lézards à courte queue ou bien à des singes accroupis, toujours avec les parties qui désignent le sexe feminin. Il y en a qui ont du rapport à la figure d'une chauve - souris; d'autres enfin sont si difformes, qu'il est presqu'impossible de les comparer à quoi que ce soit. Le nombre de ces idoles, que l'on rencontre à certaines profondeurs parmi des vases de terre & autres ustensiles, peut faire conjecturer que les anciens sauvages les enterroient avec leurs morts.

Il est d'usage parmi les Caraïbes d'employer encore le mot mabouya pour exprimer tout ce qui est mauvais: aussi lorsqu'ils sentent une mauvaise odeur, ils s'écrient, en faisant la grimace, mabouya, caye, en en, comme en pareil cas nous disons quelquefois, c'est le diable. M. le Romain.

MABY (Page 9:784)

MABY, s. m. boisson rafraîchissante fort en usage aux îles d'Amérique; elle se fait avec de grosses racines nommées patates: celles dont l'intérieur est d'un rouge violet, sont préférables à celles qui sont ou jaunes ou blanches, à cause de la couleur qui donne une teinture très - agréable à l'oeil.

Après avoir bien nettoyé ou épluché ces racines, on les coupe par morceaux & on les met dans un vase propre pour les faire bouillir dans autant d'eau que l'on veut faire de maby; cette eau étant bien chargée de la substance & de la teinture des patates, on y verse une suffisante quantité de sirop de sucre clarifié, y ajoutant quelquefois des oranges aigres & un peu de gingembre: on continue quatre à cinq bouillons, on retire le vase de dessus le feu; & après avoir laissé fermenter le tout, on passe la liqueur fermentée au - travers d'une chausse de drap, en pressant fortement le marc. Il faut repasser deux ou trois fois la liqueur pour l'éclaircir, ensuite de quoi on la verse dans des bouteilles dans chacune desquelles on a eu soin de mettre un ou deux cloux de gérofle. Cette boisson est fort agréable à l'oeil & au goût lorsqu'elle est bien faite: elle fait sauter le bouchon

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