ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"458"> de l'eau, du vin, du lait, de l'huile, du miel, sur le foyer ou dans le feu, en l'honneur de certains dieux, par exemple, en l'honneur des Lares qui avoient un soin particulier de la maison; en l'honneur du Génie, dieu tutélaire de chaque personne; & en l'honneur de Mercure, qui présidoit aux heureuses avantures. Plaute appelle assez plaisamment les dieux qu'on fêtoit ainsi, les dieux des plats, dii patellarii.

En effet on leur présentoit toujours quelque chose d'exquis, soit en viandes, soit en liqueurs. Horace peint spirituellement l'avarice d'Avidienus, en disant qu'il ne faisoit des libations de son vin, que lorsqu'il commençoit à se gâter.

Ac nisi mutatum parcit defundere vinum.

On n'osoit offrir aux dieux que de l'excellent vin, & même toujours pur, excepté à quelques divinités à qui, pour des raisons particulieres, on jugeoit à propos de le couper avec de l'eau. On en usoit ainsi à l'égard de Bacchus, peut - être pour abattre ses fumées, & vis - à - vis de Mercure, parce que ce dieu étoit en commerce avec les vivans & les morts.

Toutes les autres divinités vouloient qu'on leur servît du vin pur; aussi dans le Plutus d'Aristophane, un des dieux privilégiés se plaint amérement qu'on le triche, & que dans les coupes qu'on lui présente, il y a moitié vin & moitié eau. Les maîtres, & quelquefois les valets, faisoient ces tours de pages.

Dans les occasions solemnelles on ne se contentoit pas de remplir la coupe des libations de vin pur, on la couronnoit d'une couronne de fleurs; c'est pour cela que Virgile en parlant d'Anchise qui se préparoit à faire une libation d'apparat, n'oublie pas de dire:

Magnum cratera coronâ Induit, implevitque mero.

Avant que de faire les libations, on se lavoit les mains, & l'on récitoit certaines prieres. Ces prieres étoient une partie essentielle de la cérémonie des mariages & des festins des noces.

Outre l'eau & le vin, le miel s'offroit quelquefois aux dieux; & les Grecs le mêloient avec de l'eau pour leurs libations, en l'honneur du soleil, de la lune, & des nymphes.

Mais des libations fort fréquentes, auxquelles on ne manquoit guere dans les campagnes, étoient celles des premiers fruits de l'année, d'où vient qu'Ovide dit:

Et quodcunque mihi pomum novus educat annus, Libatum agricoloe ponitur antè deos.

Ces fruits étoient présentés dans des petits plats qu'on nommoit patelloe. Ciceron remarque qu'il y avoit des gens peu scrupuleux, qui mangeoient eux - mêmes les fruits réservés en libations pour les dieux: atque reperiemus asotos non ità religiosos, ut edant de patella, quoe diis libata sunt.

Enfin les Grecs & les Romains faisoient des libations sur les tombeaux, dans la cérémonie des funérailles. Virgile nous en fournit un exemple dans son troisieme livre de l'AEnéide.

Solemnes tùm forte dapes, & tristia dona Libabat cineri Andromache, manesque vocabat Hectoreum ad tumulum.

Anacréon n'approuve point ces libations sépulcrales. A quoi bon, dit - il, répandre des essences sur mon tombeau? Pourquoi y faire des sacrifices inutiles? Parfume - moi pendant que je suis en vie; mets des couronnes de roses sur ma tête....

Quelques empereurs romains partagerent les li - bations avec les dieux. Après la bataille d'Actium, le sénat ordonna des libations pour Auguste, dans les festins publics, aiusi que dans les repas particuliers; & pour completter la flatterie, ce même sénat ordonna l'année suivante, que dans les hymnes sacrés le nom d'Auguste seroit joint à celui des dieux. Mais en vain desira - t - il cette espece de déification, pour ne se trouver tous les matins à son réveil, que le foible, tremblant, & malheureux Octave. (D. J.)

LIBATTE, ou CHILONGI (Page 9:458)

LIBATTE, ou CHILONGI, (Géogr. historique.) terme usité dans quelques provinces d'Ethiopie, pour signifier un amas de maisons, de cases, ou plûtôt de basses chaumieres construites de branchages, enduites de terre grasse, & couvertes de chaume. Elles sont environnées d'une haie de grosses épines, laquelle haie est très - épaisse, pour empêcher les animaux carnassiers de la franchir ou de la forcer. Il n'y a dans chaque case qu'une porte, que l'on a soin de fermer avec des faisceaux de grosses épines: car sans toutes ces précautions les bêtes dévoreroient les habitans. Ces amas de cabanes sont faits en maniere de camp, & tracés par les officiers du prince, qui en ont le commandement & l'inspection. Voyezen les détails dans les relations de l'Ethiopie. Tout ce qui en résulte, c'est que ces misérables, comparés aux autres peuples, ne présentent que la pauvreté, l'horreur & le brigandage. (D. J.)

LIBATTO (Page 9:458)

LIBATTO, s. m. (Hist. mod.) c'est le nom que les habitans du royaume d'Angola donnent à des especes de hameaux ou de petits villages qui ne sont que des assemblages de cabanes chétives bâties de bois & de terre grasse, & entourées d'une haie fort épaisse & assez haute pour garantir les habitans des bêtes féroces, dont le pays abonde. Il n'y a qu'une seule porte à cette haie, que l'on a grand soin de fermer la nuit, sans quoi les habitans courroient risque d'être dévorés.

LIBAU (Page 9:458)

LIBAU, Liba, (Géog.) place de Curlande, avec un port sur la mer Baltique & aux frontieres de la Samogitie. Cette place appartient au duc de Curlande, & est à 18 milles germaniques N. O. de Mémel, 25 O. de Mittau, 16 S. O. de Goldingen. Long. 39. 2. lat. 56. 27.

LIBBI (Page 9:458)

LIBBI, s. m. (Hist. nat. Bot.) arbre des Indes orientales qui ressemble beaucoup à un palmier; il croît sur le bord des rivieres: les pauvres gens en tirent de quoi faire une espece de pain semblable à celui que fournit le sagou. La substance qui fournit ce pain est une moëlle blanche, semblable à celle du sureau; elle est environnée de l'écorce & du bois de l'arbre, qui sont durs quoique très - menus. On fend le tronc pour en tirer cette moelle: on la bat avec un pilon de bois dans une cuve ou dans un mortier: on la met ensuite dans un linge que l'on tient au - dessus d'une cuve: on verse de l'eau par - dessus, en observant de remuer pour que la partie la plus déliée de cette substance se filtre avec l'eau au - travers du linge; cette eau, après avoir séjourné dans la cuve, y dépose une fécule épaisse dont on fait un pain d'assez bon goût. On en fait encore, comme avec le sagou, une espece de dragées séches, propres à être transportées; on prétend que, mangées avec du lait d'amandes, elles sont un remede spécifique contre les diarrhées.

LIBBI (Page 9:458)

LIBBI, s. m. (Commerce.) sorte de lin que l'on cultive à Mindanao, plus pour en tirer l'huile que pour en employer l'écorce.

LIBELLATIQUES (Page 9:458)

LIBELLATIQUES, s. m. pl. (Théolog.) Dans la perlécution de Decius, il y eut des chrétiens qui, pour n'être point obligés de renier la foi & de sacrifier aux dieux en public, selon les édits de l'empereur, alloient trouver les magistrats, renonçoient à la foi en particulier, & obtenoient d'eux, par [p. 459] grace ou à force d'argent, des certificats par lesquels on leur donnoit acte de leur obéissance aux ordres de l'empereur, & on défendoit de les inquiéter davantage sur le fait de la religion.

Ces certificats se nommoient en latin libelli, libelles, d'où l'on fit les noms de libellatiques.

Les centuriateurs prétendent cependant que l'on appelloit libellatiques ceux qui donnoient de l'argent aux magistrats pour n'être point inquiétés sur la religion, & n'être point obligés de renoncer au Christianisme.

Les libellatiques, selon M. Tillemont, étoient ceux qui, sachant qu'il étoit défendu de sacrifier, ou alloient trouver les magistrats, ou y envoyoient seulement, & leur témoignoient qu'ils étoient chretiens, qu'il ne leur étoit pas permis de sacrifier ni d'approcher des autels du diable; qu'ils les prioient de recevoir d'eux de l'argent, & de les exempter de faire ce qui leur étoit défendu. Ils recevoient ensuite du magistrat ou lui donnoient un billet qui portoit qu'ils avoient renoncé à J. C. & qu'ils avoient sacrifié aux idoles, quoiqu'ils n'en eussent rien fait, & ces billets se lisoient publiquement.

Ce crime, quoique caché, ne laissoit pas que d'être très - grave. Aussi l'église d'Afrique ne recevoit à la communion ceux qui y étoient tombés, qu'après une longue pénitence: la rigueur des satisfactions qu'elle exigeoit, engagea les libellatiques à s'adresser aux confesseurs & aux martyrs qui étoient en prison ou qui alloientà la mort, pour obtenir par leur intercession la relaxation des peines canoniques qui leur restoient à subir, ce qui s'appelloit demander la paix. L'abus qu'on fit de ces dons de la paix causa un schisme dans l'eglise de Carthage du tems de S. Cyprien, ce saint docteur s'étant élevé avec autant de force que d'éloquence contre cette facilité à remettre de telles prévarications, comme on le peut voir dans ses épitres 31. 52. & 68, & dans son livre de lapsis. L'onzieme canon du concile de Nicée regarde en partie les libellatiques.

LIBELLE (Page 9:459)

LIBELLE, s. m. libellus, (Jurisprud.) signifie différentes choses.

Libelle de divorce, libellus repudii, est l'acte par lequel un mari notifie à sa femme qu'il entend la répudier. Voyez Divorce, Répudiation & Séparation.

Libelle d'un exploit ou d'une demande est ce qui explique l'objet de l'ajournement; quelquefois ce libelle est un acte séparé qui est en tête de l'exploit; quelquefois le libelle de l'exploit est inséré dans l'exploit même, cela dépend du style de l'huissier & de l'usage du pays, car au fond cela revient au même.

Libelle diffamatoire est un livre, écrit ou chanson, soit imprimé ou manuscrit, fait & répandu dans le public exprès pour attaquer l'honneur & la réputation de quelqu'un.

Il est également défendu, & sous les mêmes peines, de composer, écrire, imprimer & de répandre des libelles diffamatoires.

L'injure résultant de ces sortes de libelles est beaucoup plus grave que les injures verbales, soit parce qu'elle est ordinairement plus méditée, soit parce qu'elle se perpétue bien davantage: une telle injure qui attaque l'honneur est plus sensible à un homme de bien que quelques excès commis en sa personne.

La peine de ce crime dépend des circonstances & de la qualité des personnes. Quand la diffamation est accompagnée de calomnie, l'auteur est puni de peine afflictive, quelquefois même de mort.

Voyez l'édit de Janvier 1561, article 13; l'édit de Moulins, article 77; & celui de 1571, article 10. Voyez l'article suivant. (A)

Libelle (Page 9:459)

Libelle, (Gouvern. politiq.) écrit satyrique, injurieux contre la probité, l'honneur & la réputa<cb-> tion de quelqu'un. La composition & la publication de pareils écrits méritent l'opprobre des sages; mais laissant aux libelles toute leur flétrissure en morale, il s'agit ici de les considérer en politique.

Les libelles sont inconnus dans les états despotiques de l'Orient, où l'abattement d'un côté, & l'ignorance de l'autre, ne donnent ni le talent ni la volonté d'en faire. D'ailleurs, comme il n'y a point d'imprimeries, il n'y a point par conséquent de publication de libelles; mais aussi il n'y a ni liberté, ni propriété, ni arts, ni sciences: l'état des peuples de ces tristes contrées n'est pas au - dessus de celui des bêtes, & leur condition est pire. En général, tout pays où il n'est pas permis de penser & d'écrire ses pensées, doit nécessairement tomber dans la stupipidité, la superstition & la barbarie.

Les libelles se trouvent séverement punis dans le gouvernement aristocratique, parce que les magistrats s'y voyent de petits souverains qui ne sont pas assez grands pour mépriser les injures. Voilà pourquoi les décemvirs, qui formoient une aristocratie, décernerent une punition capitale contre les auteurs de libelles.

Dans la démocratie, il ne convient pas de sévir contre les libelles, par les raisons qui les punissent criminellement dans les gouvernemens absolus & aristocratiques.

Dans les monarchies éclairées les libelles sont moins regardés comme un crime que comme un objet de police. Les Anglois abandonnent les libelles à leur destinée, & les regardent comme un inconvénient d'un gouvernement libre qu'il n'est pas dans la nature des choses humaines d'éviter. Ils croient qu'il faut laisser aller, non la licence effrénée de la satyre, mais la liberté des discours & des écrits, comme des gages de la liberté civile & politique d'un état, parce qu'il est moins dangereux que quelques gens d'honneur soient mal - à - propos diffamés, que si l'on n'osoit éclairer son pays sur la conduite des gens puissans en autorité. Le pouvoir a de si grandes ressources pour jetter l'effroi & la servitude dans les ames, il a tant de pente à s'accroître injustement, qu'on doit beaucoup plus craindre l'adulation qui le suit, que la hardiesse de démasquer ses allures. Quand les gouverneurs d'un état ne donnent aucun sujet réel à la censure de leur conduite, ils n'ont rien à redouter de la calomnie & du mensonge. Libres de tout reproche, ils marchent avec confiance, & n'appréhendent point de rendre compte de leur administration: les traits de la satyre passent sur leurs têtes & tombent à leurs piés. Les honnêtes gens embrassent le parti de la vertu, & punissent la calomnie par le mépris.

Les libelles sont encore moins redoutables, par rapport aux opinions spéculatives. La vérité a un ascendant si victorieux sur l'erreur! elle n'a qu'à se montrer pour s'attirer l'estime & l'admiration. Nous la voyons tous les jours briser les chaînes de la fraude & de la tyrannie, ou percer au - travers des nuages de la superstition & de l'ignorance. Que ne produiroit - elle point si l'on ouvroit toutes les barrieres qu'on oppose à ses pas!

On auroit tort de conclure de l'abus d'une chose à la nécessité de sa destruction. Les peuples ont souffert de grands maux de leurs rois & de leurs magistrats; faut - il pour cette raison abolir la royauté & les magistratures? Tout bien est d'ordinaire accompagné de quelque inconvénient, & n'en peut être séparé. Il s'agit de considérer qui doit l'emporter, & déterminer notre choix en faveur du plus grand avantage.

Enfin, disent ces mêmes politiques, toutes les méthodes employées jusqu'à ce jour, pour prévenir ou proscrire les libelles dans les gouvernemens mo<pb->

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