ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

RECHERCHE Accueil Mises en garde Documentation ATILF ARTFL Courriel

Previous page

"350"> teur. Il est bon d'en avertir les curieux, pour qu'ils n'y soient pas trompés.

Les jeux publics marqués ordinairement par des vases, d'où il sort des palmes ou des couronnes, ne se distinguent que par la légende, qui contient ou le nom de celui qui les a institués, ou de celui en l'honneur duquel on les célébroit. Ainsi l'on apprend que Néron fut l'auteur des jeux qui se devoient donner à Rome de cinq en cinq ans, par la médaille où l'on lit, Certamen Quinquennale Romoe Constitutum. Par la légende du revers de la médaille de Caracalla, *MHTROPOL. *ANKURAS2 *ASKLHPIA. *CWTHRIA *ISQ. PUQIA; on apprend qu'à Ancyre en Galatie on célébroit en l'honneur d'Esculape, dit le Sauveur, les mêmes jeux qui se célébroient dans l'isthme de Corinthe en l'honneur d'Apollon; qu'on consulte là - dessus les lettres de Spanheim, publiées par M. Morel dans le projet qu'il nous a donné du plus beau dessein qu'on ait jamais formé pour la satisfaction des curieux.

On trouvera dans ce projet, Specimen universa rei nummaria, les légendes qui expriment les principaux jeux des anciens, & les savantes remarques que M. de Spanheim a faites sur ce sujet; on nommoit *KABEIPIA, ceux qui se faisoient à Thessalonique en l'honneur des Cabires; *QEOTAMIA, ceux qui se célébroient principalement en Sicile, pour honorer le mariage de Proserpine & de Pluton; *CEOUHREIA, ceux qui avoient été institués par Septime Severe; *KOMODEIA, ceux qu'on faisoit par l'ordre de Commode, &c. On trouve aussi les jeux marqués sur les médailles latines avec le tems de leur célébration. Nous avons sur la médaille de Memmius, Ced. Cerialia primus fecit. Nous trouvons sur - tout des jeux séculaires qui se célébroient à la fin de chaque siecle, marqués avec grand soin sur les médailles, Ludos Soeculares Fecit, dans celles de Domitien; Soeculares Aug. ou Augg. dans Philippe, &c. Les types en sont différens; tantôt ils expriment des sacrifices, tantôt des combats, tantôt des animaux extraordinaires, dont on donnoit le spectacle au peuple dans ces jeux.

4°. Les voeux publics pour les empereurs, & qui sont marqués sur plusieurs médailles, soit en légende, soit en inscription, ont fait nommer ces sortes de médailles, médailles votives. Voyez Médailles Votives.

5°. L'une des choses les plus curieuses que les médailles nous apprennent par les légendes, ce sont les différens titres que les empereurs ont pris, selon qu'ils ont vu leur puissance plus ou moins affermie. Jules - César n'osa jamais revêtir ni le titre de roi, ni celui de seigneur, il se contenta de celui d'Imperator, Dictator perpetuus, Pater Patria. Ses successeurs réunirent insensiblement à leur dignité le pouvoir de toutes les charges. On les vit souverains pontifes, tribuns, consuls, proconsuls, censeurs, augures. Je ne parle que des magistratures; car, pour les qualités, elles devinrent arbitraires, & le peuple s'accoutumant peu - à - peu à la servitude, laissa prendre au souverain tel nom que bon lui sembla, même ceux des divinités qu'il adoroit: témoin Hercules Romanus, dans Commode; Sol Dominus Imperii Romani, dans Aurélien; si toutefois ce nom est donné au prince, & non pas au soleil même, qui se trouve si souvent sur les médailles, Soli invicto Comiti.

Auguste ne se nomma d'abord que Casar Divi Filius, & puis Imperator, ensuite Triumvir Reipublica Constituendoe, ensuite Augustus; enfin il y ajouta la puissance de tribun qui le faisoit souverain. Caligula garda les trois noms, Imp. Coes. Aug. Claude y ajouta le titre de Censor. Domitien se fit Censor Perpetuus, sans que depuis lui on puisse rencontrer cette qualité sur les médailles. Aurélien, ou, selon d'autres, OEmilien, s'arrogea le titre de Dominus, que les provinces accorderent à Septime Severe & à ses enfans. Après Carus, cette qualité devint commune à tous les empereurs, jusqu'à ce que ceux d'Orient prirent le nom de rois des Romains, *BASILEUS2 VWMAIWN. Il est bon d'apprendre ici que les Grecs donnerent quelquefois ce même nom aux Césars, quoiqu'ils n'ayent jamais souffert qu'ils prissent celui de Rex en latin. Le titre de Nobilissimus Casar donné au prince destiné à l'empire, ne se vit pas pour la premiere fois sur les médailles de Philippe le jeune, comme tous les antiquaires l'ont cru; M. l'abbé Belley prouve dans l'histoire de l'acad. des Inscrip. que ce titre parut dès le regne de Macrin sur les médailles de Diaduménien.

L'ambition des princes grecs & la flatterie de leurs sujets nous fournissent sur leurs médailles une grande quantité de titres, qui sont inconnus aux empereurs latins, *BASILEUS2, *BASILEWN, Nicator, Nicephorus, Evergetes, Eupator, Soter, Epiphanes, Cezaunus, Callinicus, Dionysius, Theopator. Ils ont été aussi bien moins scrupuleux que les Latins à se faire donner le nom de dieu. Démétrius s'étant appellé, *QEOS2 *NISATOR; Antiochus, *QEOS2 *EPIFANHS2 *NIKHFOROS2; un autre Démétrius, *QEOS2 *FILOPATOR *SOTHR. Ils ne faisoient pas non plus difficulté d'adopter les symboles des divinités, comme le foudre & les cornes de Jupiter Hammon, avec la peau de lion d'Hercule. Tous les successeurs d'Alexandre s'en firent même un point d'honneur.

Les princesses reçurent la qualité d'Augusta dès le haut empire, Julia Augusta, Antonia Agrip pina, &c. On la trouve même sur les médailles de celles qui ne furent jamais femmes d'empereurs, Julia Titi, Marciana, Matidia, &c. Le titre de Mater Senatûs & Mater Patrioe se voient sur les médailles d'or & d'argent, de grand & de moyen bronze de Julie, femme de Septime Severe, dont le revers représente une femme assise, ou une femme debout, tenant d'une main un rameau, & de l'autre un bâton ou une haste, avec ces mots en abrégé, Mat. Augg. Mat. Sen. Mat. Pat.

6°. Les alliances se trouvent aussi marquées dans les légendes à la suite des noms, & non seulement les alliances par adoption qui donnoient droit de porter le nom de fils, mais celles mêmes qui ne procuroient que le titre de neveu & de niece. Nous n'entrerons point dans ce détail assez connu, ce qui d'ailleurs seroit long & ennuyeux.

7°. Les legendes nous découvrent encore le peu de tems que duroit la reconnoissance de ceux qui ayant reçu l'empire de leur pere, de leur mere, ou de leur prédecesseur qui les avoit adoptés, quittoient bientôt après le nom & la qualité de fils qu'ils avoient pris d'abord avec empressement. Trajan joignit à son nom celui de Nerva qui l'avoit adopté, mais peu de tems après il ne porta plus que celui de Trajan. D'abord c'étoit Nerva Trajanus Hadrianus, bientôt ce fut Hadrianus tout seul: & le bon Antonin, qui s'appelloit au commencement de son regne Titus AElius Hadrianus Antoninus, s'appella peu après Antoninus Augustus Pius; cependant la vanité & l'ambition leur faisoit quelquefois garder des noms auxquels ils n'avoient aucun droit, ni par le sang, ni par le mérite. Ainsi celui d'Antonin a été porté par six empereurs jusqu'à Eliogabale: celui de Trajan par Dèce, &c.

Ces noms propres devenus communs à plusieurs, ont causé beaucoup d'embarras aux antiquaires; parce que ces sortes de médailles ne portent aucune époque, au lieu que les médailles grecques, beaucoup plus exactes, portent les surnoms, & marquent les années, & par - là facilitent extrèmement la connoissance de certains rois, dont on n'auroit jamais bien débrouillé l'histoire sans ce secours, comme les Antiochus, les Ptolomées, & les autres.

8°. N'oublions pas d'ajouter que dans les légendes [p. 351] des médailles, on trouve souvent le nom du magistrat sous lequel elles ont été frappées. M. Vaillant s'est donné la peine de faire le recueil des divers noms de magistrature grecque énoncés sur les médailles, & d'expliquer les fonctions de ces différentes charges. Dans les médailles de colonies latines, on voit les noms des duumvirs à l'ablatif.

Il est tems de parler de la position de la légende. L'ordre naturel qui la distingue de l'inscription est qu'elle soit posée sur le tour de la médaille, au - dedans du grenetis, en commençant de la gauche à la droite, & cela généralement dans toutes depuis Nerva. Mais, dans les médailles des douze Césars, il est assez ordinaire de les trouver marquées de la droite à la gauche, ou même partie à gauche, partie à droite.

Il y en a qui ne sont que dans l'exergue, De Germanis, De Sarmatis, &c. Il y en a qui sont en deux lignes paralleles, l'une au - dessus du type, & l'autre au - dessous, comme dans Jules. Il y en a dans le même empereur posées en - travers, & comme en sautoir. Il y en a en pal, comme dans une médaille de Jules, où la tête de Marc - Antoine sert de revers. Il y en a au milieu du champ, coupées par la figure comme dans un revers de Marc - Antoine, qui représente un fort beau trophée. On voit un autre revers du même, où un grand palmier au milieu d'une couronne de lierre coupe ces mots, Alexand. AEgyp. Enfin il y en a en baudrier, comme dans Jules; tout cela prouve que la chose a toujours dépendu de la fantaisie de l'ouvrier.

C'est particulierement sur les grandes médailles grecques qu'on trouve les positions de légendes les plus bisarres, sur - tout quand il y a plus d'un cercle. Il n'est point de maniere de placer, de trancher, de partager les mots & de séparer les lettres que l'on n'y rencontre: ce qui donne bien de la peine à ceux qui ne sont pas assez intelligens pour les bien démêler.

On pourroit être trompé à certaines médailles où la légende est écrite à la maniere des Hébreux, les lettres posées de la droite à gauche. Celle du roi Gelas est de cette sorte . Quelques - unes de Palerme & d'autres de Césarée, c'est ce qui a fait croire à quelques - uns que l'on avoit autrefois nommé Césarée, *A*L*FoeA, au lieu de Flavia, *F*L*A. La médaille de Lipari est du même genre; on a été longtems sans l'entendre, parce qu'on y lit *P*I*L pour *L*I*P.

Il ne paroît donc pas que les anciens ayent suivi de regles fixes dans la maniere de placer les légendes sur les médailles, & de plus toutes leurs médailles n'ont pas des légendes; car encore qu'il soit vrai que la légende est l'ame de la médaille, il se trouve cependant quelques corps sans ames, non seulement dans les consulaires, mais aussi dans les impériales, c'est - à - dire, des médailles sans légende, ni du côté de la tête, ni du côté du revers; par exemple, dans la famille Julia, la tête de Jules se trouve souvent sans légende. On voit aussi des revers sans légende, & sur - tout dans cette même famille. Une medaille qui porte d'un côté la tête de la Piété avec la cigogne, & de l'autre une couronne qui enferme un bâton augural & un vase de sacrificateur, est sans aucune légende.

Il s'en trouve qui ne sont que demi - animées, pour parler ainsi, parce que l'un des côtés est sans légende, tantôt celui de la tête & tantôt celui du revers. Nous avons plusieurs têtes d'Auguste sans inscription, comme celle qui porte au revers la statue équestre que le sénat fit ériger en son honneur, avec ce mot, Coesar Divi filius. Nous avons aussi une infinité de revers sans légende, quelquefois même des revers considérables pour la singularité du type, & pour le nombre des figures; je crois qu'on peut mettre dans ce nombre ceux qui ne portent que le nom du monétaire, ou le simple S. G. puisque ni ce nom, ni ces lettres ne contribuent en rien à expliquer le type. Telles que sont trois ou quatre belles médailles de Pompée, avec des revers très - curieux, qui n'ont que le nom de M. Minatius Sabinus proquestor. Deux de Jules César, dont l'une chargée d'un gobe, de faisceaux, d'une hache, d'un caducée & de deux mains jointes, n'a que le nom L. Buca. L'autre qui porte une aigle militaire, une figure assise tenant une branche de laurier ou d'olivier, couronnée par derriere par une Victoire en pié, n'a que ex S. C. Une de Galba, dont le revers est une allocution de six figures, que quelques - uns croyent marquer l'adoption de Pison, se trouve aussi sans aucune légende. Les savans disent que le coin est moderne, & que la véritable médaille porte Allocutio.

Pour celles qui se trouvent avec les seules légendes sans tête, on les met dans la classe des inconnues ou des médailles incertaines, & on les abandonne aux conjectures des savans. Voyez Médaille sans tête.

Il manqueroit quelque chose d'important à ce discours, si je ne disois rien des deux langues savantes, la latine & la greque, dans lesquelles sont écrites les légendes & les inscriptions des médailles antiques.

Mais je dois observer d'abord que la langue ne suit pas toujours le pays, puisque nous voyons quantité de médailles impériales frappées en Grece ou dans les Gaules, dont les légendes sont en latin; car le latin a toujours été la langue dominante dans tous les pays où les Romains ont été les maîtres; & depuis même que le latin est devenu une langue morte, par la destruction de la monarchie romaine, il ne laisse pas de se conserver pour tous les monumens publics & pour toutes les monnoies considérables dans tous les états de l'Empire chrétien.

Il y a des médailles frappées dans les colonies, dont la tête porte l'inscription en latin, & le revers l'inscription en grec. Le P. Jobert parle d'un Hosticien M. B. qui d'un côté porte *GAI/OSOUALEUS2 OSTILIANOS2 XOUINTOS2, avec la tête du prince rayonnée, & de l'autre côté Col. P. T. Coes. Metr. La tête du génie de la ville est surmonté d'un petit château tout entier; c'est Césarée de Palestine. Enfin, les médailles, dont les légendes sont en deux langues différentes, ne sont pas extrèmement rares; témoin celles d'Antioche, où l'on trouve des légendes latines du côté des têtes de Claude, de Néron & de Galba, & des légendes greques au revers.

Le grec est, comme je l'ai dit, l'autre langue savante dont on s'est servi le plus universellement sur les médailles. Les Romains ont toujours eu du respect pour cette langue, & se sont fait une gloire de l'entendre & de la parler. C'est pourquoi ils n'ont pas trouvé mauvais que non seulement les villes de l'Orient, mais toutes celles où il y avoit eu des Grecs, la conservassent sur leurs médailles. Ainsi les médailles de Sicile & de plusieurs villes d'Italie; celles des Provinces, & de tout le pays qu'on appelloit la grande Grèce, portent toutes des légendes greques, & ces sortes de médailles font une partie si considérable de la science des Antiquaires, qu'il est impossible d'être un parfait curieux, si l'on n'entend le grec comme le latin, & l'ancienne Géographie aussi - bien que la nouvelle.

Il ne nous reste plus, pour completter cet article, qu'à faire quelques observations sur les lettres initiales des légendes.

1°. Il paroît qu'à proprement parler, les lettres initiales sont celles qui étant uniques, signifient un mot entier. Dès qu'on en joint plusieurs, ce sont

Next page


The Project for American and French Research on the Treasury of the French Language (ARTFL) is a cooperative enterprise of Analyse et Traitement Informatique de la Langue Française (ATILF) of the Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS), the Division of the Humanities, the Division of the Social Sciences, and Electronic Text Services (ETS) of the University of Chicago.

PhiloLogic Software, Copyright © 2001 The University of Chicago.