ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"344"> dans quelque ville de sa légation, de lui faire une entrée solemnelle. Lorsque le cardinal d'Amboise entra à Paris comme légat, le corps - de - ville & les députes des cours souveraines allerent an - devant de lui; on lui donna le dais à la porte, comme on fit depuis en 1664 au cardinal Chigi, neveu d'Alexandre VII.

Les prétentions des légats vont jusqu'à soutenir que le roi doit les visiter avant qu'ils fassent leur entrée dans Paris. Cette prétention ne paroit appuyée que sur ce que Henri IV. alla à Chartres audevant du cardinal de Médicis; mais tout le monde sait que le roi sit ce voyage sur des chevaux de poste, sans être accompagné, & qu'il s'y trouva incognito; ce qu'il n'auroit pas fait si c'eût été un devoir de bienseance. Ce prince ne rendit point de pareille visite au cardinal Aldobrandin, neveu de Clément VIII. ni ses successeurs aux autres légats.

Henri IV. envoya le prince de Condé, encore enfant, au devant du cardinal de Médicis; ce qui pouvoit passer pour une aclion sans conséquence, & pour une simple curiosité d'enfant, que l'on veut faire paroitre dans une action d'éclat: cependant la cour de Rome, qui tire avantage de tout, a pris de - là occation d'exiger le même honneur pour les autres légats.

En esset, depuis ce tems il n'y a eu aueune entrée de légat qui n'ait été bonorée de la présence de quelque prince du sang Louis XIII. envoya le duc d'Orléans son frere au - devant du cardinal Barberin; le prince de Condé & le duc d'Enguien son fils furent envoyés au - devant du cardinal Chigi, qui est le dernier légat que l'on ait vù en France. Cette légation sut taite en exécution du traité conclu à Pise le 12 Janvier 1664; la mission du légat étoit de faire au roi des excuses de l'insulre qui avoit été faite par les Corses à M. de Créqui, son ambassadeur à Rome.

Les archevêques, les mats, & même ceux qui out le titre de legats nes du saint siége, ne portent point la croix haute en présence du légat à latere; ce qu'ils observent ainsi par respect pour celui qui représente la personne du pape.

Les légats prétendent que les évêques ne doivent point porter devant eux le camail & le rochet; cependaut les évêques qui accompagnoient le cardinal Chigi à sen entrée, postoient tous le rochet, le camail & le chapeau verd, que l'on regarde en Italie comme des ornemens épiscopaux.

Quoique le pape donne aux légats à latere une plénitude de puissance, ils sont néanmoins toujours regardes comme des vicaires du saint siége, & ne peuvent rien décider sur certaines affaires importantes sans un pouvoir spécial exprimé dans les bulles de leur légation; telles sont les translations des évêques, les suppressions, les érections, les unions des évêches, & les bulles des bénéfices consistoriaux dont la collation est expressément réservée à la persenne du pape par le concordat.

Lorsqu'une assaire, qui étoit de la compétence du légat, est portée au pape, soit que le légat l'ait luimeme envoyée, ou que les parties se soient adressées directement au saint siége, le légat ne peut plus en connoître, à peine de nullité.

Le pouvoir général que le pape donne à ses légats dans un pays, n'empêche pas qu'il ne puisse ensuite adresser à quelqu'autre personne une commission particuliere pour une certaine assaire.

La puissance du legat ne peut pas être plus étendue que celle du pape; ainsi il n'a aucun pouvoir direct ni indirect sur le tomporel des rois, & ne peut délier leurs sujets du serment de fidélité; il ne peut décider les conteslations d'entre les séculiers pour les assaires qui regardent leur bien ou leur honneur; juger le possessoire des bénéfices, donner des dis<cb-> penses aux batards pour les effets civils, connoître du crime de faux & d'usure entre les laics, de la séparation de biens d'entre mari & femme, ni de ce qui regarde la dot, le douaire, & autres reprises & conventions matrimoniales, faire payer des amendes pour les crimes & délits, même ecclésiastiques, accorder des lettres de restitution en entier, ni restituer contre l'infamie.

Son pouvoir, par rapport au spirituel, doit aussi être tempéré par les saints decrers qui sont reçus dans le royaume; d'où il suit qu'il ne peut constituer des pensions sur les bénéfices que pour le bien de la paix, en cas de permutation ou de résignation en faveur; permettre de réserver tous les fruits des bénéfices au lieu de pension; déroger à la regle de publicandi resignationibus, & à celle de verisimili notitia.

Il ne peut pareillement, lorsqu'il confere des bénéfices, ordonner que l'on ajoûtera foi à ses provisions sans que l'on soit obligé de rapporter les procurations pour résigner ou pour permuter; conférer les bénéfices électiss, dans l'élection desquels on suit la forme du chapitre quia propter; créer des chanoines avec attribution des premieres prébendes vacantes; déroger aux fondations des églises, &c.

Le légat à latere peut conférer les bénéfices vacans par une démission pure & simple faite entre ses mains sur une permutation, & ceux qui vaquent par dévolution, par la négligence d'un collateur qui releve immédiatement du saint siége.

Ceux qui demandent au légat des provisions de quelque bénéfice, sont obligés d'énoncer dans leur supplique tous les bénéfices dont ils sont titulaires, à peine de nullité des provisions, de même que dans les signatures obtenues en cour de Rome.

Le légat doit, aussi - bien que le pape, conférer les bénéfices à ceux qui les requierent du jour qu'ils ont obtenu une date: en cas de refus de la part du légat, le parlement permet de prendre possession civille, même d'obtenir des provsions de l'évêque diocésain, qui ont la même date que la réquisition saite au légat.

Les expéditionnaires en cour de Rome ont aussi seuls droit de solliciter les expéditions des légations. Il faut que les dataires, registrateurs & autres expédit onnaires de la légation, soient nés françois, ou naturalisés.

La faculté de conférer les bénéfices par prévention dépouillant les collateurs ordinaires, & n'étant accordée qu'au pape par le concordat, on a rarement consenti en France que les légats usassent de ce droit; & quand les papes le leur ont accordé, les parlemens ont ordinairement modifié cet article, ou même l'ont absolument retranché. Le vicelégat d'Avignon prévient pourtant les collateurs ordinaires; c'est une tolérance que l'on a pour lui depuis long - tems dans les provinces de sa vice - légation.

Les résignations en faveur n'étant guere moins contraires au droit canonique que la prévention, on ne souffre pas non - plus ordinairement en France que les légats les admettent.

Les réserves générales & particulieres des bénéfices ne sont point permises au légat à latere non plus qu'au pape; il ne peut non - plus rien faire au préjudice du droit de régale, du patronage laïc, de l'indult du parlement, & des autres expectatives qui sont reçues dans le royaume.

Le légat à latere ne peut députer vicaires ou subdélégués pour l'exercice de sa légation, sans le consentement exprès du roi. Il est tenu d'exercer lui - même son pouvoir tant qu'il dure.

Il ne peut cependant, non - plus que le pape, connoître par lui - même des affaires contentieuses; mais il peut nommer des juges délégués in partibus pour [p. 345] décider les appellations des sentences rendues par les supérieurs ecclésiastiques qui relevent immédiatement du saint siége. Ces juges délégués ne doivent point connoître en premiere instance des assaires dont le jugement appartient aux ordinaires, ni des appellations, avant que l'on ait épuisé tous les degrés de la jurisdiction ecclésiastique qui sont au - dessous de celle du pape.

Les légats ne peuvent pas changer l'ordre de la jurisdiction ordinaire, ni adresser la commission pour donner le visa à d'autres qu'à l'évêque diocésain ou à son grand - vicaire, ni commettre la fulmination des bulles, & dispenser à d'autres qu'à l'official qui en doit connoître.

Les reglemens saits par un légat pendant le tems de sa légation, doivent continuer d'être exécutés, même après sa légation finie, pourvû qu'ils ayent été revêtus de lettres - patentes vérifiées par les parlemens.

Dès qu'un légat n'est plus dans le royaume, il ne peut plus conférer les bénéfices ni faire aucun autre acte de jurisdiction, quand même le tems de sa légation ne seroit pas encore expiré.

La légation finit par la mort du légat, ou avec le tems fixé pour l'exercice de sa légation par les lettres - patentes & arrêt d'enregistrement, ou quand le roi lui a fait signifier sa révocation, au cas que les lettres - patentes & arrêt d'enregistrement n'eussent pas sixé le tems de la légation. Les bulles du légat portent ordinairement que la légation durera tant qu'il plaira au pape; mais ces légations indéfinies ne sont point admises en France: c'est pourquoi l'on fait promettre aux légats, avant d'exercer leur légation, qu'ils ne se serviront de leur pouvoir qu'au ant qu'il plaira au roi.

C'est une question assez controversée de savoir si la légation finit par la mort du pape: cependant comme l'autorité des légats donne atteinte à celle des ordinaires qui est favorable, dans le doute on doit tenir que la légation est finie.

Quelquefois apres la légation finie, le pape accorde une prorogation; mais ces bulles sont sujettes aux mêmes formalités que les premieres, & les mêmes modifications y ont lieu de droit.

Lorsque le légat sort du royaume, il doit y laisser les registres de sa légation, & en remettre les sceaux à une personne nommée par le roi, qui en expédie les actes à ceux qui en ont besoin. Les deniers provenans de ces expéditions sont employés à des oeuvres de piété, suivant qu'il est reglé par le roi. Si le légat ne laissoit pas son sceau, le parlement commet une personne pour sceller les expéditions d'un sceau destiné à cet usage.

Outre les légats à latere que le pape envoie extraordinairement, selon les différentes occurrences, il y en a toujours un pour Avignon, qui exerce sa jurisdiction sur cette ville & sur le comté qui en dépend, & sur les provinces ecclésiastiques qui en dépendent. Cette commission est ordinairement donnée à un cardinal, qui a un subdélégué, connu sous le nom de vice - légat, lequel fait toutes les fonctions de cette légation.

Les facuités de quelques légats d'Avignon se sont aussi étendues sur la province de Narbonne; mais ce n'a point été comme légats d'Avignon qu'ils y ont exercé leur pouvoir; ç'a été en vertu de lettres patentes, vérifiées au parlement de Toulouse, qui en contenoient une concession particuliere: cette distinction est expliquée dans les lettres - patentes de Charles IX, du 6 Juin 1565, sur les bulles de la légation du cardinal de Bourbon, dont les sacultés s'étendoient sur la province de Narbonne: elle se trouve aussi dans les lettres - patentes du 10 Mai 1624 sur les bulles du cardinal Barberin.

Ce légat est une espece de gouverneur, établi au nom du pape pour la ville d'Avignon & les terres en dépendantes, qui ont été engagées au saint siége par une comtesse de Provence. Ce n'est que par une grace spéciale que le roi consent que ce légat ou son vice légat exercent leur jurisdiction spitituelle sur les archevêchés des provinces voisines que l'on vient de nommer.

Les provinces ecclésiastiques de France qui dépendent du légat d'Avignon, sont les archevêchés de Vienne, d'Arles, d'Embrun & d'Aix.

Il ne paroît pas que les papes ayent eu en la ville d'Avignon leurs légats ni vice - légats avant que Clément V. eut transféré son siége en cette ville en 1348; mais depuis qu'Urbain VI. eut remis a Rome le siége apostolique, les papes établirent à Avignon leurs officiers pour le gouvernement spirituel & temporel de cette ville & de ses dépendances, & du comté venaissin dont ils étoient en possession.

Il est assez difficile de dire précisément quel étoit le pouvoir de ces ossiciers d'Avignon sous les premiers papes qui ont remis le saint siége à Rome, dans le gouvernement ecclésiastique de quelques provinces de France, & en quel tems leur autorite & qualité de légats & vice - légats y a été reconnue.

Quelques auteurs ont avancé qu'avant 1515 il n'y avoit point de légats à Avignon; que le cardinal de Clermont, archevêque d'Ausch, envoyé par le pape Léon X, est le premier qui ait eu cette qualité, & que le cardinal Farneze sut le second. Les lettres - patentes du roi François I, du 23 Fevrier 1515, données sur les bulles de légation du cardinal de Clermont, & l'atrêt d'enregistrement, paroissent savoriser cutte opinion: cependant cette époque de 1515 ne s'accorde pas avec les lettres patentes d'Henri II du mois de Septembre 1551, ni avec la requéte des états de Provence, qui y est énoncée, sur laquelle ces lettres - patentes ont été accordées. Par ces lettres, registrées au parlement d'Aix, sa majesté permet à ses sujets de Provence de recourir pardevers le légat ou vice - légat d'Avignon pour en obtenir, dans les matieres bénéficiales, les dispenses & dérogations à la regle des vingt jours.

Les légats & vice - légats d'Avignon sont obligés, avant que d'exercer leurs pouvoirs dans les provinces de France, d'obtenir des lettres - patentes sur les bulles de leur légation, & de les faire enregistrer dans tous les parlemens sur lesquels s'étend leur légation.

On leur fait ordinairement promettre par écrit de ne rien faire contre les libertés de l'église gallicane, & de se soumettre aux modifications qui ont été apposées à leurs facultés par l'arrêt de vérification: chaque parlement a ses formes & ses usages pour ces sortes d'enregistremens & de modifications.

Les decrets des papes rapportés dans les decretales au titre de officio legati, n'ont pas prévu toutes les questions qui se présentent sur l'étendue du pouvoir des légats & vice - légats d'Avignon.

L'étendue de leurs facultés, suivant les maximes du royaume, dépend 1°. des clauses des bulles de leur légation; 2°. de la disposition des lettres - patentes accordées par le roi sur ces bulles; 3°. des modifications apposées par les arrêts d'enregistrement.

Les bulles de la légation du cardinal Farneze, légat d'Avignon en 1542, lui donnant le pouvoir d'user dans sa légation des facultés du grand - pénitencier de Rome, & cette clause ayant paru insolite au parlement d'Aix, il ne les enregistra qu'à la charge de rapporter dans trois mois les facultés du grand - pénitencier de Rome.

Le parlement de Toulouse, en enregistrant le 20 Août 1565 les bulles de la légation d'Avignon, ac<pb->

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