ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"210"> ce sel que nous propose notre auteur, & qui est celle qu'on pratique dans les Alpes du côté de la Suisse. On prépare dans ce pays deux especes de sucre de lait; l'une est en crystaux, l'autre se vend sous la forme de tablettes. La derniere espece se fait de cette maniere: on écrême le lait à l'ordinaire; on le fait prendre ensuite avec de la présure pour en tirer le petit lait que l'on filtre à travers un linge propre, & que l'on fait évaporer sur un feu lent, en le remuant doucement, jusqu'à ce qu'il soit réduit en consistence de miel. Quand il est épaissi de cette façon on le moule, on lui donne différentes figures & on le fait sécher au soleil; c'est ce qu'on appelle sucre de lait en tablettes.

L'autre espece se tire de la précédente. On fait dissoudre dans de l'eau le sucre de lait en tablettes, on le clarisie avec le blanc - d'oeuf, on le passe à la chausse, on le fait épaissir par l'évaporation jusqu'à ce qu'il ait la consistence d'un sirop, & on le met reposer pour que la crystallisation se fasse. Les crystaux se trouvent séparés formant des masses cubiques, brillantes & très - blanches; ils sont attachés aux parties du vase par couches. Si l'on veut encore faire épaissir la liqueur qui reste & la mettre en repos, on en retire de nouveaux crystaux; on peut répéter ce manuel trois fois. Les premiers crystaux sont d'un blanc éblouissant; les seconds sont paillés; les derniers sont d'une couleur brune. En les faisant dissoudre de nouveau dans de l'eau pure, & répétant la clarification, la filtration & la crystallisation, on peut porter les derniers au dégré de blancheur des premiers.

L'auteur prétend que, quoique le lait de tous les animaux soit propre à fournir du sel essentiel, cependant celui de la femme est le meilleur, ensuite ceux d'anesse, de chevre & de vache.

Le sel essentiel de lait est très - soluble dans l'eau; mais le différent degré de chaleur de ce menstrue fait varier considérablement la proportion dans laquelle se fait cette dissolution. Une once d'eau bouillante dissout parfaitement sept gros de sucre de lait, tandis que la même quantité a bien de la peine à fondre dans une livre d'eau qui n'étoit refroidie que jusqu'au 160 degré du thermomètre de Fareneith.

Quant aux vertus médicinales du sucre de lait, notre auteur remarque que s'il convient d'avoir égard aux éloges que Boerhaave & Hoffman ont donnés au sucre ordinaire, on doit les accorder à plus forte raison au sucre de lait. Le sel essentiel de lait produit le même effet que le petit - lait, qui n'est que le même remede plus étendu. On peut employer le premier avec avantage pour les estomacs paresseux qui ne sont pas en état de soutenir de grandes boissons. Lorsque le petit - lait est indique pour de pareils sujets, on peut y substituer du sucre de lait dissous dans une liqueur convenable à l'état & aux forces du malade. Testi, Aloysius Afabra, & beaucoup d'autres auteurs le croient merveilleux dans les affections gourteuses & rhumatismales; notre auteur ne croit pas beaucoup à cette propriété que son expérience a constamment démentie. Extrait d'un écrit de M. Vullyamoz, médecin de Lausane, inséré dans le receuil périodique d'observations de médecine, &c. pour le mois de Décembre 1756.

On distribue dans le royaume une espece de placard ou mémoire sur la nature & l'usage du sucre de lait de Suisse qui se vend dans plusieurs villes du royaume, & principalement à Lyon. Il est dit dans ce mémoire que ce précieux remede convient fort, lorsqu'on soupçonne d'avoir quelques restes de maux vénériens, & qu'il est très - propre pour les enfans qui peuvent avoir apporté cette maladie en naissant, ou qui ont sucé quelques nourrices infectées. Tout médecin raisonnable peut assurer très - positivement au contraire que le sucre de lait est un remede impuissant dans l'un & dans l'autre cas.

Tout ce qu'on sait de la nature du sucre de lait, c'est que c'est une matiere de la classe des corps muqueux du genre des corps doux, & de l'espece de ces corps qui est caractérisée par la propriété de prendre une forme concrete. Le sucre de lait est distingué dans cette division par la moindre pente à subir la fermentation spiritueuse, & par un degré de douceur beaucoup moindre que celle des sucres végétaux avec lesquels il a d'ailleurs beaucoup d'analogie. Voyez Doux, Muqueux & Sucre.

Lait distillé. Le petit - lait distillé au bain - marie qui a été mis au nombre des médicamens, doit être rejetté dans la classe des eaux distillées parfaitement inutiles. Celle - ci est recommandée principalement comme cosmétique; mais on peut avancer que la très - petite quantité & l'extrème subtilité des principes propres du lait qui s'élevent avec la partie aqueuse dans la distillation, & qui donnent à l'eau de lait distillée une odeur de lait très - reconnoissable, ne sauroit cependant lui communiquer aucune vertu médicamenteuse. On doit penser la même chose de l'eau distillée de limaçons avec le petit - lait, qui est décrite dans la plupart des dispensaires sous le nom d'eau de limacon, & d'une autre eau plus composée, connue sous le nom d'eau de lait aléxitere: du moins est - il certain que cette eau dont les autres ingrédiens sont de chardon - bénit, la scabieuse, la reine des prés, la mélisse, la menthe & l'angélique, ne doit sa vertu médicinale qu'à la plupart de ces plantes qui contiennent un principe actif & volatil, & plus généralement que l'eau de lait alexitere, est une préparation sort mal - entendue.

Le petit - lait entre dans la composition de la confection - hamec, & en est un ingrédient sort ridicule. (b)

Lait virginal (Page 9:210)

Lait virginal, (Chimie, Mat. méd.) les Pharmacopistes ont donné ce nom à plusieurs liqueurs rendues laiteuses, c'est à dire opaques & blanches, par un précipité blanc & tiès - léger, formé & suspendu dans leur sein.

Celle de ces liqueurs la plus connue est une teinture de benjoin précipitée par l'eau. Une résine quelconque, dissoute dans l'esprit - de - vin, & précipitée par l'eau, fourniroit un lait virginal parcil à celui - ci, qui n'a prévalu dans l'usage que par l'odeur agréable & l'âcreté modérée du benjoin. Le lait virginal du benjoin est un remede externe, recommandé contre les taches du visage; ce cosmétique n'a, dans la plupart de ces cas, qu'un succès fort médiocre. Voyez Benjoin, Résine & Teinture.

Une autre liqueur fort différente de la précédente, & qui porte le nom de lait virginal dans quelques livres classiques, dans la Chimie de Lemery, par exemple, c'est le vinaigre de Saturne précipité par l'eau. Ce remede est vanté contre les dartres, les éruptions érésipélateuses, & presque toutes les maladies de la peau. Son usage mérite quelque considération dans la pratique, à cause de sa qualité répercussive. Voyez Reper cussif & Plomb. (b)

Lait (Page 9:210)

Lait, maladies qui dépendent du, (Méd. Pathologie.) nous ne considérons le lait dans cet article que comme cause de maladie, comme contribuant à grossir le nombre de celles qui attaquent spécialement cette moitié aimable du genre humain, & qui lui font payer bien cher la beauté, les agrémens & toutes les prérogatives qu'elle a par - dessus l'autre. Les maladies les plus communes excitées par le lait, sont la fievre de lait, le lait répandu, le caillement de [p. 211] lait dans les mamelles, & le poil de lait. On pourroit encore ajouter aux maladies dont le lait est la source, celles qu'il occasionne dans les enfans lorsqu'il est altéré. Ces machines délicates, avides à recevoir les plus légeres impressions, faciles (cerei) à s'y plier, se ressentent d'abord des vices de cette liqueur leur seule nourriture, & elles en portent les funestes marques pendant tout le cours d'une vie languissante & maladive; quelquefois ils payent par une mort prompte les dérangemens d'une nourrice infectée ou trop emportée dans ses passions. C'est un fait confirmé par l'expérience de tous les jours, que le lait d'une femme en colere fait, dans les petits enfans qui le sucent, l'effet d'un poison actif; & personne n'ignore que l'obstruction des glandes du mésentere, l'atrophie, le rachitis, &c. ne doivent le plus souvent être imputés qu'à un lait vicieux, & sur - tout à celui qui est fourni par une nourrice enceinte, qui pour n'être pas privée d'un gain mercenaire, immole cruellement ces innocentes victimes à ses plaisirs & à sa cupidité. Nous ne poursuivrons pas cette matiere, parce qu'elle est traitée plus au long aux articles particuliers des Maladies des enfans; nous nous bornerons ici à l'exposition succinte des maladies produites immédiatement par le lait dans les femmes.

Fievre de lait, febris lactea. D'abord que la matrice a été débarrassée par l'accouchement de l'enfant qu'elle contenoit, elle se resserre; les humeurs qui s'y étoient ramassées s'écoulent, les sucs nourriciers qui y abordoient, destinés à la nourriture de l'enfant, prennent une autre route; ils se portent aux mamelles, & concourent à y former le vrai lait alimenteux, bien différent de cette humeur tenue & blanchâtre qui y étoit contenue pendant la grossesse, & qui n'avoit rien que de désagréable au goût & de nuisible à l'estomac; les mamelles paroîtront alors gonflées, distendues, raffermies par le lait qui en remplit & dilate les vaisseaux. Sa quantité augmente à chaque instant, & si l'enfant en tetant ne vient la diminuer, ou si on ne l'exprime de quelqu'autre façcn, les mamelles se tendent, deviennent douloureuses, s'enflamment, le lait s'y épaissit, empêche l'abord de celui qui vient après, qui reflue ou reste sans être séparé dans les vaisseaux sanguins, & y forme une plethore de lait. Cette humeur pour lors étrangere dans le sang, trouble, gêne, dérange, & sans doute par - là même anime le mouvement intestin, & y excite la fievre qu'on appelle pour cela fievre de lait. Quelques auteurs ont prétendu qu'elle n'étoit qu'une suite du trouble, du désordre de l'accouchement & de l'agitation des humeurs, obligées dans ces circonstances à se frayer de nouvelles routes. C'est ainsi qu'Hoffman pense qu'elle est produite par les humeurs qui vont, dit - il, de la matrice aux mamelles, & qui en irritent les nerfs. (De sebrib. symptomat. sect. 11. capit. xiv. tom. II.) Mais pour faire appercevoir tout le faux & l'inconséquent de cette assertion, il suffit de remarquer, 1°. que cette fievre ne se maniseste que le trois ou quatrieme jour après l'accouchement; 2°. qu'elle ne s'observe bien sensible que chez les personnes qui ne veulent pas allaiter; les femmes qui nourrissent elles - mêmes leurs enfans, en sont presqu'entierement exemptes. Cette fievre n'a aucun symptome particulier que la douleur tensive des mamelles, qui se continue jusques sous les aisselles, au dos & aux épaules; il n'est pas rare de la voir compliquée avec la fievre miliaire. Elle se termine ordinairement en trois ou quatre jours sans accident fâcheux; bien plus, elle sert plus que tout autre remede à dissiper le lait, à le faire passer; elle en procure l'évacuation par les sueurs principalement qui sont assez abondantes. Lorsque la suppres<cb-> sion des vuidanges se joint à cette maladie, elle en augmente beaucoup le danger; & l'on a tout sujet de craindre une mort prochaine, si l'on observe en même tems pesanteur de tête & tintement d'oreille; si l'oppression est grande, le pouls foible, petit, resserré, &c. Si le délire esteconsidérable, &c. elle est alors une juste punition de la plupart des femmes, qui sous le spécieux prétexte d'une excessive délicatesse, d'une santé peu solide, d'une foible complexion, ou simplement pour éviter les peines attachées à l'état de nourrice, refusent d'allaiter elles - mêmes leurs enfans, se soustrayant par - là à une des lois les plus sacrées de la nature, & confient cet emploi important & périlleux à des nourrices mercénaires, à des domestiques, le plus souvent au grand préjudice des enfans.

Cette fievre n'exige aucun secours, lorsqu'elle est contenue dans les bornes ordinaires; il suffit d'astreindre la nouvelle accouchée à un régime exact; le moindre excès dans le manger peut avoir de très fâcheux inconvéniens; la diete un peu sévere a outre cela l'avantage réel d'empêcher une abondante secrétion du lait. Il faut avoir soin de tenir toujours les mamelles enveloppées de linges chauds; on peut même les humecter avec les décoctions d'anis, de fenouil, de menthe, de fleurs de sureau, plantes dont l'usage est presque consacré pour favoriser la dissipation du lait. Si la fievre miliaire se met de la partie, il faudra recourir aux légers cordiaux & diaphorétiques, quelquefois aux vesrcatoires. Voyez Fievre miliaire. Si le cours des vuidanges est dérangé, diminué ou suspendu totalement, il faut tourner principalement ses vûes de ce côté, & employer les secours propres à remettre cette excrétion dans son état naturel. Voyez Vuidanges.

Lait répandu. Le lait répandu ou épanché ne forme pas une maladie particuliere qui ait ses symptomes propres; il est plutôt la source d'une infinité de maladies différentes, d'autant plus funestes qu'elles restent plus long - tems cachées, & qu'elles tardent plus à se développer: c'est un levain vicieux qui altere sourdement le sang, & imprime aux humeurs un mauvais caractere, & qui prépare ainsi de loin, tantôt des ophtalmies, tantôt des ulceres, quelquefois des tumeurs dans différentes parties; chez quelques femmes des attaques de vapeurs, dans d'autres une suite d'indispositions souvent plus f<-> cheuses que des maladies décidées. Toutes ces maladies, effets du lait répandu, sont ordinairement rebelles, & cedent rarement aux remedes usités; c'est aussi une tradition qui se perpétue chez les femmes, que ces sortes d'accidens sont incurables; on voit que cette tradition n'est pas tout - à - fait sans fondement: au reste une des grandes causes d'incurabilité, est que dans le traitement on perd de vûe cet objet, on oublie, ou l'on ne fait pas attention que la maladie est produite, ou entretenue par un lait répandu; ce qui donne occasion au repompement & à l'épanchement du lait, c'est l'inattention & l'imprudence des nourrices, qui étant dans le dessein de ne plus nourrir, négligent tous les secours propres à faire perdre leur lait, ou se contentent de quelques applications exterieures, inéfficaces, ou trop actives, sans continuer pendant quelque tems de se faire teter, ou d'exprimer elles - mêmes leur lait surabondant. La même chose arrive aux nouvelles accouchées qui ne veulent pas allaiter, lorsque la fievre de lait est foible & de courte durée, & qu'elle n'est point suppléée par des vuidanges abondantes ou quelqu'autre excrétion augmentée: alors le lait repompé dans le sang, se mêle avec lui, & l'altere insensiblement.

Il est plus facile de prévenir les desordres du lait répandu, que de les réparer ou de les faire cesser;

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