ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"91"> causer des maladíes populaires; d'autres visitoient les marchés publics, étoient chargés de procurer l'abondance, d'entretenir la bonne - foi dans le commerce; d'autres, enfin, avoient inspection sur les poids & mesures. On peut tirer de - là l'origine des juges d'attribution, c'est - à - dire de ceux auxquels la connoissance de certaines matieres est attribuée.

Les premiers juges ou magistrats des Romains furent les senatcurs qui rendirent la justice avec les rois, & ensuite avec les consuls qui succéderent aux rois. Ils ne connoissoient point des matieres criminelles; le roi ou les consuls les renvoyoient au peuple, qui les jugeoit dans ses assemblees. On les renvoyoit à des commissaires; le préfet de la vilie rendoit la justice en l'absence du roi ou des consuls.

On érablit ensuitc deux questeurs pour tenir la main à l'exécution des lois, faire la recherche des crimes, & toutes les instructions nécessaires pour les saire punir: & le peuple ayant demandé qu'il y eût aussi des magistrats de son ordre, on créa les tribuns & les édiles, qui furent chargés chacun de certaine partie de la police. Voyez Ediles & Tribuns. Quelque tems après on créa deux censeurs; mais tous ces ossiciers n'étoient point juges: le pouvoir de juger n'appartenoit qu'aux consuls, aux senateurs, au peuple, & à ceux qui étoient commis à cet esset.

Vers l'an 388 de Rome, les consuls firent créér un préteur pour rendre en leur place la justice dans la ville. Ce préteur connoissoit des affaires civiles & de police. Il commettoit quelquefois les édiles & autres personnes pour l'aider dans l'instruction ou dans le jugement; mais c'étoit toujours lui qui le prononçoit & au nom duquel on le faisoit exécuter.

Quelque tems après le préteur, pour être plus en état de juger les questions de droit, choisit dans chacune des trente - cinq tribus cinq hommes des plus versés dans l'étude des lois, ce qui fit en tout cent soixante - quinze personnes, qui néanmoins pour une plus facile prononciation, furent nommés centum viri, centumvirs, entre lesquels il prenoit des assesseurs ou conseillers pour les questions de droit, au lieu que pour les questions de fait, il en choisissoit indifferemment dans tous les ordres.

L'an 604 le peuple remit au préteur le soin de punir les crimes; &'les questeurs, qui furent rendus perpétuels, continuerent leurs fonctions sous les ordres du préteur.

Les édiles, dont le nombre fut augmenté, exerçoient aussi en son nom certaines parties de la police.

Il y avoit aussi un préteur dans chaque province, lequel avoit ses aides comme celui de Rome.

Sur la fin de la république, les tribuns & les édiles curules s'attribuerent une jurisdiction contentieuse, indépendante de celle du préteur.

L'autorité de celui - ci avoit dcja. été diminuée en lui donnant un collegue pour connoître des causes des étrangers, sous le titre de prator peregrinus; on lui adjoignit encore six autres préteurs pour les causes capitales. Les préteurs provinciaux prenoient aussi séance avec eux pendant un an, avant que de partir pour leurs provinces, sous prétexte de les instruire des affaires publiques. On institua aussi deux préteurs pour la police des vivres en particulier. Enfin, sous le triumvirat il y avoit jusqu'à soixante quatre préteurs dans Rome qui avoient tous leuis tribunaux particuliers, de même que les tribuns & les édiles.

Un des premiers soins d'Auguste, lorsqu'il se vit paisible possesseur de l'empire, fut de reformer la justice. Il réduisit d'abord le nombre des préteurs de la ville à seize, & établit au - dessus d'eux le préfet de la ville, dont la jurisdiction fut étendue jusqu'à cinquante stades autour de la ville. Il connoissoit scul des affaires où quelque sénateur se trouvoit in<cb-> téressé, & des crimes commis dans toute l'étendue de sa province. Il avoit seul la police dans la ville, & l'appel des sentences des préteurs se relevoit pardevant lui.

Les édiles surent d'abord réduits à six: on leur ôta la police & tout ce qu'ils avoient usurpé de jurisdiction sur le préteur; & dans la suite Constantin les supprima totalement; on donna au préfet de la ville d'autres aides au nombre de quatorze, qui furent nommés curatores urbis, ou adjutores proesecti urbis. Ils étoient magistrats du second ordre, magistratus minores. La ville sut divisée en autant de quartiers qu'il y avoit de curateurs, & chacun d'eux fut chargé de faire la police dans son quartier. On leur donna à chacun deux licteurs pour marcher devant eux, & faire exécuter leurs ordres. L'empereur Sévere créa encore quatorze autres curateurs; & pour les faire considérer davantage, il voulut qu'ils sussent choisis dans les familles consulaires.

Le préfet de la ville ne pouvant connoître par luiméme de toutes choses, on lui donna deux subdélégués, l'un appellé proefectus annonoe, qui avoit la pollce des vivres; l'autre appellé proesectus vigilum, qui commandoit le guet. Celui - ci avoit une espece de jurisdiction sur les voleurs, filoux, malfaiteurs, & gens suspects qui commettoient quelque désordre pendant la nuit; il pouvoit les faire arrêter & constituer prisonniers, même les faire punir sur - le - champ s'il s'agissoit d'une faute légere; mais si le délit étoit grave ou que l'accusé fût une personne de quelque considération, il devoit en reférer au préfet de la ville.

Chaque province étoit gouvernée par un président ou proconsul, selon qu elle étoit du département de l'empéreur ou de celui du sénat. Ce magistrat étoit chargé de l'administration de la justice: les proconsuls avoient chacun près d'eux plusieurs subdélégués qu'on appelloit legati procon sulum, parce qu'ils les envoyoient dans les différens lieux de leurs gouvernemens. Ces subdélégués ayant été distribués dans les principales villes & y étant devenus sédentaires, furent appellés senatores loci, ou judices ordinarü, & quelquefois simplement ordinarü. Ceux des villes moins considérables furent nommés judices pedanei; & enfin les juges des bourgs & villages furent nommés magistri pagorum.

L'appel des juges des petites villes & des bourgs & villages, étoit porté au tribunal de la ville capitale de la province, de la capitale à la métropole, de la métropole à la primatie, d'où l'on pouvoit encore en certains cas appeller à l'empereur; mais comme cela engageoit dans des dépenses excessives pour ceux qui demeuroient dans les Gaules, Constantin y établit un préfet du prétoire pour juger en dernier ressort les affaires que l'on portoit auparavant à l'empereur.

Sous l'empire d'Adrien les magistrats romains qui étoient envoyés dans les provinces, furent appellés comites quasi de comitatu principis, parce qu'on les choisissoit ordinairement dans le conseil du prince. Ceux qui avoient le gouvernement des provinces frontieres furent nommés duces, parce qu'ils avoient le commandement des armées.

Lorsque les Francs eurent conquis les Gaules, ils y conserverent le même ordre que les Romains y avoient établi pour la division des gouvernemens & pour l'administration de la justice. Les officiers François prirent les titres de ducs & de comtes attachés aux gouvernemens qui leur furent distribués; mais les officiers d'un rang inférieur ne trouvant pas assez de dignité dans les titres de juges pedanei vet magistri pagorum, qui étoient usités chez les Romains, conserverent leurs titres de centeniers, de cinquanteniers & dixainiers, & sous ces mêmes titres ils ren<pb-> [p. 92] doient la justice dans les petites villes, bourgs & villages. Quelques - uns croient que c'est de - là qu'est venue la dictinction des trois degrés de haute, moyenne & basse justice.

Les centeniers auxquels étoient subordonnés les cinquanteniers & dixainiers, relevoient des comtes des villes capitales. Ces comtes relevoient eux - mêmes des comtes ou ducs des provinces ou villes métropolitaines; ceux - ci des patrices qui présidoient dans les villes primatiales, & les patrices relevoient du roi, lequel jugeoit souverainement & en dernier ressort les grandes affaires, soit dans son conseil particulier avec le comte ou maire du palais, qui prit la place du préfet du prétoire des Gaules, ou en public à la fête de son parlement, lorsqu'il étoit assemblé.

Les comtes avoient des vicaires ou vicomtes qui étoient comme leurs lieutenans.

Pour contenir tous ces officiers dans leur devoir, le roi envoyoit dans les provinces des commissaires appellés missi dominici, pour recevoir les plaintes que l'on avoit à faire contre les juges ordinaires des lieux.

Outre les juges royaux, il y avoit dès - lors deux autres sortes de justices en France; savoir les justices ecclésiastiques & les justices seigneuriales; la jurisdiction ecclésiastique étoit exercée par les évêques & les abbés, qui connoissoient chacun dans leur territoire des matieres spirituelles, des assaires ecclésiastiques & de celles qui étoient alors réputées telles. Voyez ci - devant Jurisdiction ecclésiastique.

Les vassaux & arriere - vassaux des comtes, & des évêques & abbés rendoient aussi la justice dans les terres qui leur étoient données à titre de bénéfice, ce qui fut le commencement des justices seigneuriales.

Quelque tems après tous les bénéfices des laïcs ayant été transformés en fiefs, les justices des comtes & des ducs devinrent elles - mêmes des justices seigneuriales, & il n'y avoit alors de justices royales que celles qui étoient exercées par les officiers du roi dans les terres de son domaine.

Lorsque les comtes & les ducs changerent leurs gouvernemens en seigneuries héréditaires, ils se déchargerent du soin de rendre la justice sur des vicomtes, viguiers ou prevôts; dans les lieux où il y avoit un château, leurs lieutenans furent nommés châtelains; dans les simples bourgs & villages, les juges qui prirent la place des centeniers furent appellés majores villarum, maires ou principaux des villages; titre qui revenoit assez à celui de magistri pagorum, qui étoit usité chez les Romains.

Les ducs & les comtes s'étoient néanmoins réservé une jurisdiction supérieure au - dessus de toutes ces justices, qu'ils continuerent encore pendant quelque tems d'exercer avec leurs pairs ou principaux vassaux qui étoient pares inter se: ils tenoient leurs audiences ou assises avec eux quatre fois l'année & même plus souvent, lorsque cela étoit nécessaire, on y traitoit des affaires concernant le domaine & autres droits du seigneur, de celles où quelque noble ou ecclésiastique étoit intéressé, de crimes qui méritoient la mort naturelle ou civile, enfin des appellations des juges inférieurs.

Cette portion de jurisdiction que les ducs & les comtes s'étoient réservée, fut encore abandonnée par eux à des officiers qu'on nomma baillifs, & en d'autres endroits, sénéchaux.

Les prelats, les chapitrcs & les abbayes de fondation royale s'étant plaint des entreprises que les juges royaux faisoient sur leurs privileges, nos rois les mirent sous leur protection & sauve - garde, leur donnant pour juge le prevôt de Paris; c'est ce que l'on appelle le droit de garde gardienne.

D'un autre côté, les seigneurs supportant impatiemment l'inspection des commissaires du roi, appellés missi dominici, qui les rappelloient à leur devoir; on cessa pendant quelque tems d'en envoyer, mais au lieu de ces commissaires, le roi établit quatre baillifs pour juger les appellations des juges royaux inférieurs; le siege de ces baillages fut placé à Vermand, aujourd'hui Saint - Quentin, à Sens, à Mâcon & à Saint Pierre - le - Moutier.

Philippe Auguste établit en 1190 de semblables bailliages dans toutes les principales villes de son domaine, & dans la suite les anciens duchés & comtés ayant été réunis par divers voies à la couronne, les prevôtés, baillages, sénéchaussées & autres justices, qui étoient établies dans ces seigneuries, devinrent toutes des justices royales.

Les simples justices seigneuriales sont demeuré subordonnées aux prévôtés & autres justices royales du premier degré; elles ont aussi été appellées en quelques endroits prevôtés, & châtellenies en d'autres bailliages; mais pour distinguer les juges de ces bailliages seigneuriaux de ceux des bailliages royaux, ces derniers furent appellés baillivi majores, & les autres baillivi minores.

Les justices royales inférieures sont subordonnées aux bailliages & sénéchaussées, & ces tribunaux de leur part ressortissent par appel au parlement, dont l'origine remonte jusqu'au commencement de la monarchie, ainsi qu'on le dira ci - après au mot Parlement.

Sous les deux premieres races de nos rois, & encore assez avant sous la troisieme, il ne connoissoit que des affaires d'état & autres affaires majeures; la voie d'appel au parlement ne devint guere usitée que depuis que cette cour eut été rendue sédentaire à Paris.

Les autres parlemens ont été établis peu - à - peu à mesure que les affaires se sont multipliées.

Pour décharger les parlemens de plusieurs petites affaires, on a établi les présidiaux qui jugent en dernier ressort jusqu'à 250 liv. de principal ou 10 l. de rente.

Outre les jurisdictions ordinaires, nos rois en ont etabli plusieurs autres extraordinaires, les unes qu'on appelle jurisdictions d'attribution, les autres jurisdictions de privilege; quelques - unes de ces jurisdictions ressortissent par appel au parlement comme les requêtes de l'hôtel & du palais, les tables de marbre; d'autres ressortissent aux cours des aides, telles que les élections & greniers à sel, &c.

Quant à la maniere de rendre la justice dans les tribunaux de France, anciennement il n'étoit pas permis de plaider par procureur; il falloit se présenter en personne même dans les affaires civiles, à moins d'en avoir obtenu dispense; mais depuis longtems les parties ont été admises à se servir du ministere des procureurs, il est même devenu nécessaire, excepté dans les petites justices où les parties peuvent défendre elles - mêmes leur cause.

On dit néanmoins encore qu'il n'y a que le roi & la reine qui plaident par procureur; mais cela veut dire qu'ils ne plaident pas on leur nom, & que c'est leur procureur général qui est on qualité pour eux; à quoi il faut ajouter les seigneurs qui plaident dans leur justice sous le nom de leur procureurfiscal.

Les affaires civiles s'intentent par une demande & sur les exceptions, défenses & autres procédures; on en vient à l'audience, où la cause se juge sur la plaidoirie des avocats ou des procureurs des parties; lorsqu'il s'agit d'un appel ou de questions de droit, la cause doit être plaidée par des avocats.

Quand l'assaire ne peut être vuidée à l'audience,

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