ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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J'en pourrois dire presque autant des lunettes d'approche, depuis Métius, jusqu'à Dom Noël bénédictin.

Mais qui peut douter de la différence de la taille brute du diamant, trouvée par hasard depuis environ trois siecles par Louis de Berquen, & la beauté des formes faites en rose ou en brillant, que nos lapidaires exécutent aujourd'hui? L'usage & la grande pratique les ont instruits des différentes tailles imaginables, tandis que leurs yeux & leurs mains leur servent de compas. C'est d'après la 47° proposition du premier livre d'Euclide, qu'ils sont parvenus à la belle proportion de tailler cette pierre précieuse en losanges, triangles, facettes, & biseaux, pour la brillanter, en lui donnant tout ensemble autant d'éclat que de jeu.

Ainsi les hommes heureusement nés, qui ont eu une parfaite connoissance de la méchanique, ont profité des esquisses grossieres des premieres inventions, & les ont portées peu - à - peu par leur sagacité au degré de perfection où nous les voyons aujourd'hui.

Quoique le tems enfante les présens qu'il nous fait, l'industrie peut hâter, si j'ose parler ainsi, le terme de son accouchement. Combien de siecles se sont écoulés, pendant lesquels les hommes ont marché sur la soie, avant que d'en connoître l'usage, & en composer leur parure? La nature a sans doute dans ses magasins des trésors d'un aussi grand prix, qu'elle nous reserve au moment que nous l'attendrons le moins; soyons toûjours à portée d'en profiter.

Souvent une invention jette de grandes lumieres sur celle qui la précede, & quelques lueurs sur celle qui doit la suivre. Je ne dis pas que l'invention soit toûjours féconde en elle - même: les grands fleuves ne se forment pas toûjours les uns des autres; mais les inventions qui n'ont point d'analogie ensemble, ne sont pas pour cela stériles, parce qu'elles multiplient les secours, & se reproduisent sous mille moyens qui abregent les travaux de l'homme.

Mais il n'est rien de plus flatteur que l'invention, ou la perfection des Arts, qui rendent au bonheur du genre humain. De telles inventions ont cet avantage sur les entreprises de la politique, qu'elles font le bien commun, sans nuire à personne. Les plus belles conquêtes ne sont arrosées que de sueurs, de larmes, & de sang L'inventeur d'un secret utile à la vie, tel que seroit celui de la dissolution de la pierre dans la vessie, n'auroit point à redouter les remords inséparables d'une gloire mêlangée de crimes & de malheurs. Par l'invention de la boussolle & de l'Imprimerie, le monde s'est étendu, embelli, & éclairé. Qu'on parcoure l'histoire: les premieres apothéoses ont été faites pour les inventeurs: la terre les adora comme ses dieux visibles.

Il ne faut point s'étonner après cela, qu'ils soient sensibles à l'honneur de leurs découvertes; c'est la derniere chose dont l'homme puisse se dépouiller. Thalès, après avoir trouvé en quelle raison est le diametre du soleil au cercle décrit par cet astre autour de la terre, en fit part à un particulier, qui lui offrit pour récompense, tout ce qu'il exigeroit. Thalès lui demanda seulement de lui conserver l'honneur de sa découverte. Ce sage de la Grece pauvre, & comblé d'années, fut insensible à l'argent, au gain, à tout autre avantage, hormis à l'injustice qui pourroit s'emparer de la gloire qu'il méritoit.

Au reste, tous ceux qui par leur pénétration, leurs travaux, leurs talens, & leurs études, sauront joindre recherches à observations, théorie profonde à expériences, enrichiront sans cesse les inventions, les découvertes déja faites, & auront la gloire d'en préparer de nouvelles.

L'Encyclopédie, s'il m'est permis de répéter ici les paroles des éditeurs de cet ouvrage, (Avert. du tom. III.) « l'Encyclopédie fera l'histoire des richesses de notre siecle en ce genre; elle la fera & à ce siecle qui l'ignore, & aux siecles à venir qu'elle mettra sur la voie, pour aller plus loin. Les découvertes dans les Arts n'auront plus à craindre de se perdre dans l'oubli; les faits seront dévoilés au philosophe, & la refléxion pourra simplisier & éclairer une pratique aveugle ».

Mais pour le succès de cette entreprise, il est nécessaire que le gouvernement éclairé daigne lui accorder une protection puissante & soutenue, contre les injustices, les persécutions, & les calomnies de ses ennemis. (D. J.)

Invention (Page 8:849)

Invention, (Rhétor.) c'est la recherche & le choix des pensées, des raisons, dont l'orateur doit se servir, des lieux qu'il doit traiter. L'invention est le premier des devoirs de l'orateur: Ciceron qui la regardoit de cet oeil, avoit composé quatre livres sur ce sujet, dont il ne nous reste que deux, & peut - être les moins intéressans.

Quoi qu'il en soit, les maîtres de l'art conviennent que l'invention ne consiste pas à trouver facilement les pensées qui peuvent entrer dans un discours. Cette facilité manque à peu de personnes, pour peu qu'on ait l'esprit cultivé par la lecture, & l'on peche beaucoup plus souvent par excès, que par défaut d'abondance. Mais l'invention proprement dite, consiste à choisir entre les pensées qui se présentent, celles qui sont les plus convenables au sujet que l'on traite, les plus nobles, & les plus solides, à retrancher celles qui sont fausses ou frivoles, ou triviales; à considérer le tems, le lieu où l'on parle; ce qu'on se doit à soi - même, & ce qu'on doit à ceux qui nous écoutent. (D. J.)

INVERLOCHY (Page 8:849)

INVERLOCHY, (Géog.) petite ville d'Ecosse, fortifiée par Guillaume III. & où l'on entretient une garnison. On l'appelle autrement le Fort Guillaume; elle est située dans la province de Lochabir, au bord d'un grand lac, à 32 lieues d'Edinbourg, 120 lieues N. O. de Londres. Long. 12. 26. lat. 57. 8. (D. J.)

INVERNESS (Page 8:849)

INVERNESS, (Géog.) Voyez Innerness.

INVERSE, ou CONVERSE (Page 8:849)

INVERSE, ou CONVERSE, s. f. (Logique & Mathématiques.) C'est ainsi que les Logiciens nomment une proposition qui resulte d'un échange de fonctions entre le sujet, l'attribut d'une proposition quelconque qu'ils conçoivent comme directe.

Ils ont observé que la vérité de la directe n'emportoit pas toûjours celle de sa converse; & ils ont donne là - dessus quatre regles, relatives à autant d'especes de propositions. Je ne rapporterai & ne déveloperai ici, que celles qui concernent les propositions universelles affirmatives; parce qu'elles sont presque les seules qui ayent lieu dans les sciences exactes, & que les mêmes refléxions pourront s'appliquer aux trois autres especes, à l'aide de quelques changemens aisés à suppléer.

Cette regle porte: que de telles propositions ne peuvent se convertir uni versellement, que quand le sujet est aussi étendu que l'attribut.

On a élevé dans plusieurs livres élémentaires de Mathématiques, différentes questions sur les converses, suivies de décisions, souvent opposées, & appuyées de part & d'autre sur des exemples mal développés. La source de ces embarras dans une matiere aussi susceptible de clarté, est sans doute l'impatience avec laquelle les auteurs qui en ont traité occasionnellement, ont voulu tirer des conséquences avant que de s'être donné la peine de remonter aux principes, qui sont ici la nature & les parties des propositions de Mathématique pure. Ces propositions sont toutes conditionnelles; c'est - à - dire, que leur attribut ne convient au sujet que sous une [p. 850] certaine condition, différente de ce sujet envisagé plus abstraitement. Il y a donc trois parties tres distinctes dans l'énoncé de toute vérité mathématique: le sujet qui est un être exprimé d'une maniere trop universelle pour que l'attribut de la proposition puisse lui convenir dans tous les cas possibles; mais auquel il ne manque pour cet effet que d'être rendu plus particulier par une seule qualité déterminante: l'hypothèse, par où l'on doit entendre cette condition qui manquoit au sujet; & la thèse enfin, ou la qualité qu'on assûre convenir au sujet dès que l'hypothèse l'a rendu assez particulier pour cela.

Qu'il me soit permis d'illustrer cette sous - division que j'exige dans la premiere partie de toute proposition, par l'exemple de celle que mettent les Metaphysiciens dans la cause complete de tout effet. Un effet est toûjours exactement simultané à sa cause complete, c'est - à - dire à la collection de tout ce qui est requis pour qu'il parvienne à l'existence: & si l'on a accoûtumé de regarder l'effet comme postérieur à sa cause, c'est parce qu'on entend communément par ce dernier terme, une cause incomplete, à laquelle il manque encore, pour être accompagnée de son effet, une qualité qu'on nomme condition, ou occasion, & qu'on distingue expressément du reste. Cette comparaison est d'autant plus légitime, que, même dans la Géométrie, dont les objets sont des quantités co - existentes, on est en usage de commencer souvent l'hypothèse des théorèmes par des adverbes de tems, tels que ceux - ci, quand, ou lorsque; & de mettre quelquefois la thèse au futur, alors on aura, &c.

Mais voici une considération qui fera mieux sentir encore la nécessité de distinguer trois parties dans toute proposition hypothétique. Si l'on fait choix de deux pareilles propositions visiblement converses l'une de l'autre, & qu'on les distribue seulement en deux parties, l'hypothèse & la thèse, on ne pourra jamais obtenir l'une de ces propositions, à l'aide d'un simple renversement de l'autre; & il faudra toûjours conserver dans leurs deux hypothèses quelque chose qui leur est commun, & qui ne peut passer ni dans la thèse de l'une, ni dans celle de l'autre. Ce sont ces qualités communes aux deux hypothèses, que j'en détache, pour former ce que je nomme le sujet.

Nous sommes à présent en état de rectifier la définition qui est à la tête de cet article, & de dire, que quand deux propositions ont un même sujet, mais que l'hypothèse & la thèse de l'une font un échange mutuel de leurs fonctions pour former l'autre proposition, elles sont dites converses l'une de l'autre; & que la plus importante des deux, ou bien celle que l'on met la premiere, parce qu'elle peut se démontrer plus aisément sans le secours de l'autre; que celle - ci ne peut être prouvée indépendamment de celle - là, se nomme quelquefois la directe. Voici donc la forme à laquelle je réduis les énoncés de toutes les propositions & de leurs converses.

Sujet commun. Tout ce qui a les qualités A, B, C, &c.

Directe.       Hyp. S'il possede encore la qualité R.
                        Thèse. Il possédera aussi la qualité S.
Converse.      Hyp. S'il possede encore la qualité S.
                        Thèse. Il possedera aussi la qualité R.

Je serai à présent beaucoup plus aisément compris dans ce que j'avois à observer sur les différentes questions dont on a embrouillé cette matiere, & sur quelques autres regles contre lesquelles péchent la plûpart des élémens qu'on met entre les mains des jeunes gens.

Premiere question. Tout théorème a - t - il une converse?

Je me croirois dispensé d'une réponse, si des au<cb-> teurs très - applaudis d'ailleurs, n'avoient pas prétendu le contraire, en s'appuyant par exemple de la 32e d'Euclide; que par cette raison, je vais exprimer ici à ma maniere: dans toute figure rectiligne, où il y a précisément trois côtés, la somme des angles vaut deux droits. La converse en est à présent aisée à trouver: dans toute figure rectiligne, où la somme des angles vaut deux droits, il y a précisément trois côtés.

On voit ici, que pour avoir mes trois parties, j'ai été obligé de substituer la définition au défini, parce que ce dernier renfermoit sous un seul mot, les qualités qui devoient appartenir au sujet, avec celle qui constituoit l'hypothese. C'est ce que l'on est souvent obligé de faire; & c'est - là sans doute ce qui a empêche jusqu'à présent les auteurs d'appercevoir cette distinction.

Seconde question. Tout théorème universellement vrai, a - t - il une converse universellement vraie?

Oui, pourvu que l'hypothese soit aussi étendue que la these. Un des principaux auteurs qui ont soutenu la négative, s'étant fait fort sur - tout de l'exemple d'une diagonale qui coupe en deux également son parallélogramme, sans que pour cela toute droite qui coupe un parallélogramme en deux également en soit la diagonale: je ferai peut - être plaisir à ses lecteurs, en leur indiquant trois manieres de rendre ce théorème universellement convertible. Premierement en généralisant l'hypothèse, c'est - à - dire, en l'étendant à toutes les droites qui passent par le point d'intersection des deux diagonales, ou en particularisant la thèse, ce qui auroit lieu si on disoit que le parallélogramme est coupé en deux parties égales & semblables, ou seulement en deux triangles; ou enfin en décomposant l'idée de diagonale, comme nous avons décomposé dans la premiere question l'idée de triangle, ce qui donneroit l'énoncé que voici: Toute droite qui passe par le sommet d'un des angles d'un parallélogramme, si elle passe aussi par le sommet de l'angle opposé, elle coupera ce parallélogramme en deux parties égales. On me proposa une fois l'exemple suivant à convertir: Tout polygone inscriptible au cercle, s'il est équilatéral, il est aussi équiangle; & je la rendis convertible en généralisant l'hypothèse, c'est - à - dire, en disant: si ces côtés alternatifs sont égaux. On remarquera en passant, que c'est seulement dans les théorèmes dont la thèse n'est pas plus étendue que l'hypothèse, qu'on peut donner le nom de propriété à la qualité que renferme cette thèse.

Je dois aussi un mot à ceux qui donnent dans l'excès opposé, & qui répondent a la question présente par l'affirmative, sans y mettre aucune restriction sur l'étendue de la thèse relativement à l'hypothèse; mais qui croient y suppléer en distinguant les vérités mathématiques de celles qui ont un autre objet que la quantité. Les Savans de tous les siecles ayant pris plaisir à rendre leurs propositions aussi universelles qu'il leur étoit possible, & ayant trouvé plus de facilité à le faire dans les mathématiques que dans quelque autre science que ce fût, il en est arrivé que presque toutes les propositions de cette science ont eu des hypothèses aussi étendues que leurs thèses, & par conséquent des converses aussi vraies qu'elles; ce qui a porté quelques esprits peu profonds à conclure par une induction précipitée, qu'il suffisoit qu'une proposition certaine eût pour objet quelque branche des Mathématiques pour que sa converse fût certaine aussi; & quand ils ont rencontré dans leurs lectures géométriques des théorèmes dont la converse étoit fausse, où ils n'y ont pas fait attention, où ils ont attribué cette fausseté à la malhabileté de l'auteur, qui avoit pris pour converse d'une proposition ce qui ne l'étoit pas précisément. Une conséquence naturelle de leur opinion a été,

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