ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"915"> la navigation, qui recommençoit à l'entrée du printems.

Voulez - vous en savoir quelques détails? écoutez ce qu'Isis en apprit elle - même à Apulée, lorsqu'elle lui apparut dans toute sa majesté, comme le feint agréablement cet auteur. Mes prêtres, lui dit - elle, doivent m'offrir demain les prémices de la navigation, en me dédiant un navire tout neuf, & qui n'a pas encore servi: c'est aussi présentement le tems favorable, parce que les tempêtes qui regnent pendant l'hyver, ne sont plus à craindre, & que les flots qui sont devenus paisibles, permettent qu'on puisse se mettre en mer.

Apulée nous étale ensuite toute la grandeur de cette solemnité, & la pompe avec laquelle on se rendoit au bord de la mer, pour consacrer à la déesse un navire construit très - artistement, & sur lequel on voyoit de toutes parts des caracteres égyptiens. On purifioit ce bâtiment avec une torche ardente, des oeufs & du soufre; sur la voile qui étoit de couleur blanche, se lisoient en grosses lettres les voeux qu'on renouvelloit tous les ans pour recommencer une heureuse navigation.

Les prêtres & le peuple alloient ensuite porter avec zele dans ce vaisseau, des corbeilles remplies de parfums, & tout ce qui étoit propre aux sacrifices; & après avoir jetté dans la mer une composition faite avec du lait & autres matieres, on levoit l'ancre pour abandonner en apparence le vaisseau à la merci des vents.

Cette fête passa chez les Romains qui la solemniserent sous les empereurs avec une magnificence singuliere. L'on sait qu'il y avoit un jour marqué dans les fastes pour sa célébration; Ausone en parle en ces termes:

Adjiciam cultus, peregrinaque sacra, Natalem herculeum, vel ratis isiacae.

Le vaisseau d'Isis qu'on fêtoit pompeusement à Rome, s'appelloit navigium Isidis; après qu'il avoit été lancé à l'eau, on revenoit dans le temple d'Isis, où l'on faisoit des voeux pour la prospérite de l'empereur, de l'empire, & du peuple romain, ainsi que pour la conservation des navigateurs pendant le cours de l'année; le reste du jour se passoit en jeux, en processions, & en réjouissances.

Les Grecs si sensibles au retour du printems qui leur ouvroit la navigation, ne pouvoient pas manquer de mettre au nombre de leurs fêtes celle du vaisseau d'Isis, eux qui avoient consacré tant d'autels à cette divinité. Les Corinthiens étoient en particulier des adorateurs si dévoués à cette déesse, qu'au rapport de Pausanias, ils lui dédierent dans leur ville jusqu'à quatre temples, à l'un desquels ils donnerent le nom d'Isis pélasgienne, & à un autre le titre d'Isis égyptienne, pour faire connoître qu'ils ne la révéroient pas seulement comme la premiere divinité de l'Egypte, mais aussi comme la patrone de la navigation, & la reine de la mer. Voyez Isis.

Plusieurs autres peuples de la Grece célébrerent à l'exemple de Corinthe la fête du vaisseau d'Isis. Ce vaisseau nommé par les auteurs EW=SA/DRA, est encore plus connu sous le nom de BA/RIS2. Il est même assez vraisemblable que le vaisseau sacré de Minerve, qu'on faisoit paroître avec tant d'appareil aux grandes Panathénées, n'étoit qu'une représentation du navire sacré d'Isis. Voyez Navire sacré. (D. J.)

ISITÉRIES (Page 8:915)

ISITÉRIES, subst. fém. pl. (Antiq. Greq.) fête des Athéniens, qui tomboit au commencement de Juin; c'étoit le jour auquel les magistrats entroient en charge à Athènes, & par lequel ils commençoient leur année de magistrature. (D. J.)

ISITES (Page 8:915)

ISITES, subst. mas. pl. (Hist. mod.) nom d'une secte de la religion des Turcs, ainsi appellée de leur premier docteur qui se nommoit Isamerdad, qui a soutenu que l'alcoran de Mahomet a été créé, & n'est pas éternel, ce qui parmi les Musulmans passe pour une horrible impiété. Lorsqu'on leur objecte cet anatheme de leur prophete, que celui - là soit estimé infidele, qui dit que l'alcoran a été créé, ils se sauvent par cette distinction subtile, que Mahomet parle en cet endroit de l'original & non pas de la copie; qu'il est vrai que ce original est dans le ciel, écrit de la main de Dieu même, mais que l'alcoran de Mahomet n'est qu'une copie de cet original, d'après lequel elle a été transcrite dans le tems. On sent que par cette réponse ils mettent leurs adversaires dans la nécessité de prouver que l'alcoran est incréé, & cela doit être fort embarrassant pour eux. Ricaut, de l'empire Ottom.

ISLAM (Page 8:915)

ISLAM, subst. fém. (Hist. turq.) Islam ou islamisme, est la même chose que le Musulmanisme ou le Mahométisme; car moslemin veut dire les Musulmans; c'est M. d'Herbelot qui a introduit ces mots dans notre langue, & ils méritoient d'être adoptés. Islam vient du verbe salama, se résigner à la volonté de Dieu, & à ce que Mahomet a révélé de sa part, dont le contenu se trouve dans le livre nommé Coran, c'est - à - dire, le livre par excellence. Ce livre qui fourmille de contradictions, d'absurdités, & d'anachronismes, renferme presque tous les préceptes de l'islamisme, ou de la religion musulmane. Nous l'appellons alcoran. Voyez Alcoran & Mahométisme. (D. J.)

ISLANDE (Page 8:915)

ISLANDE, (Géog.) Islandia, grande île de l'océan septentrional, située entre la Norwege & le Groenland, au nord de l'Ecosse, & appartenante au roi de Dannemarc. La plûpart des auteurs qui ont parlé de l'Islande, nous en ont donné des notions très - peu exactes: suivant la derniere carte qui a été levée de cette île par les ordres du roi de Dannemarc, sa partie méridionale commence au 63 dégré 15 minutes de latitude, & sa partie la plus septentrionale va jusqu'au 67 dégré 12 minutes. Quant à sa longitude, elle est de 25 degrés à l'ouest du méridien de Lunden en Scanie; par conséquent elle est plus orientale de quatre degrés, que toutes les cartes ne l'avoient placée jusqu'ici.

L'Islande est, à l'exception de la Grande - Bretagne, la plus grande des îles de l'Europe. Suivant M. Horrebow, sa longueur est de 120 mille danos; quant a sa largeur elle varie, étant dans quelques endroits de 40, dans d'autres de 50 à 60 milles.

Les habitans de l'Islande professent la religion luthérienne, comme les autres sujets du roi de Dannemarc; on compte deux évêchés dans cette île; l'un est à Holum, & l'autre à Skalholt. Il n'y a proprement point de villes en Islande; on donne ce nom aux endroits où l'on se rassemble pour le commerce: ce sont des villages sur le bord de la mer, composés de 40 ou 50 maisons. Bessested est le lieu où résident les officiers que la cour de Dannemarc envoye pour le gouvernement de l'île, & pour la perception de ses revenus; le pays est partagé en différens districts que l'on appelle Syssel. Les habitations des Islandois sont éparses & séparées les unes des autres; le commerce consiste en poissons secs, en viandes salées, en suif, en laine, en beurre, en peaux de brebis & de renards de différentes couleurs, en plumes, en aigledon, &c. C'est une compagnie privilégiée qui porte en Islande les marchandises dont on peut y avoir besoin.

L'Islande est remplie de montagnes fort élevées, qu'on nomme Joeklar ou Joekul en langage du pays. Voyez l'article Glacier. Elles sont perpétuellement couvertes de neiges, & leurs sommets sont glacés; c'est ce qui, joint au froid rigoureux qu'on y sent, [p. 916] a fait donner à cette île le nom qu'elle porte, qui signifie pays de glace. Quelques - unes de ces montagnes sont des volcans, & jettent des flammes en de certains tems; le mont Hecla est sur - tout fameux par ses éruptions. Voyez Hecla. (Géogr.) L'Islande porte par - tout des marques indubitables des ravages que les éruptions des volcans y ont causés, par les laves, les pierres - ponces, les cendres & le soufre que l'on y rencontre à chaque pas. Les tremblemens de terre y sont très - fréquens, & tout semble annoncer que ce pays a souffert de terribles révolutions.

Un seigneur Norwégien nommé Ingolphe, s'étant mis à la tête de plusieurs de ses compatriotes, mécontens comme lui de la tyrannie de Harald roi de Norvége, passa en l'an 874 dans l'île d'Islande, & s'y établit avec sa colonie composée de fugitifs. Leur exemple fut bien - tôt suivi par un grand nombre d'autres Norwégiens, & depuis ce tems les Islandois ont conserve une histoire très - complette de leur île. Nous voyons que ces fugitifs y établirent une république qui se soutint vigoureusement contre les efforts de Harald & de ses successeurs; elle ne fut soumise au royaume de Norwége, que quatre cent ans après, avec lequel l'Islande fut enfin réunie à la couronne de Dannemarc.

On a toûjours crû que l'Islande étoit l'ultima Thule des Romains; mais un grand nombre de circonstances semblent prouver que jamais les anciens n'ont poussé leur navigation si loin dans le Nord.

L'Islande n'a reçû que fort tard la lumiere de l'Evangile; Jonas fixe cette époque à l'an 1000. de l'ére chrétienne. Cette île a produit plusieurs auteurs célebres, dont les écrits ont jetté un très - grand jour sur l'histoire des peuples du Nord, & sur la religion des anciens Celtes qui habitoient la Scandinavie. De ce nombre sont Saemund Sigfusson, qui naquit en 1057; Arc Frode, Snorro Sturleson, qui naquit en 1179, & qui après avoir rempli deux fois la dignité de juge suprème d'Islande, fut assassiné par une faction en 1241. C'est à lui qu'on est redevable de Ledda, ou de la mythologie islandoise, dont nous allons parler. Parmi les historiens on compte aussi Jonas Arngrim, Torfaeus, &c. La description qui nous a été donnée de l'Islande par M. Anderson, est très - peu fidele, elle n'a été faite, de l'aveu de l'auteur même, que sur les relations de personnes qui ne connoissoient ce pays que très - imparfaitement; la description la plus moderne & la plus exacte, est celle qui a été publiée à Coppenhague en 1752, par M. Horrebow islandois de nation, & témoin oculaire de tout ce qu'il rapporte. ( - )

De l'Edda, ou de la Mythologie des Islandois. L'Edda est un livre qui renferme la Théologie, la Théogonie, & la Cosmologie des anciens Celtes Scandinaves, c'est - à - dire des peuples qui habitoient la Norwege, la Suede, le Danemarck, &c. Le mot d'Edda, signifie en langue gothique ayeule; on l'appelle Edda des Islandois, parce que ce sont des auteurs islandois qui nous ont conservé ce morceau curieux de la Mythologie commune à toutes les nations septentrionales de l'Europe. Dès l'antiquité la plus reculée, les Celtes ont connu la Poésie; leurs poëtes, qui s'appelloient Scaldes, faisoient des hymnes pour célébrer les dieux & les héros; ces hymnes s'apprenoient par coeur; c'étoit - là la seule maniere de transmettre à leur postérité les exploits de leurs ayeux & les dogmes de leur religion; il n'étoit point permis de les écrire; ce ne fut qu'après que l'Islande eût embrassé le Christianisme, qu'un auteur islandois, nommé Soemund Sigfusson, écrivit l'Edda, pour conserver parmi ses compatriotes l'intelligence d'un grand nombre de poésies qui avoient été faites d'après une religion qu'ils venoient d'abandonner, mais dont les hymnes étoient encore dans la bouche de tout le monde. Il paroît que ce recueil de Saemund s'est perdu; il ne nous en reste que trois morceaux qui sont parvenus jusqu'à nous. 120 ans après Saemund, un savant islandois, nommé Snorro Sturleson, d'une des familles les plus illustres de son pays, dont il remplit deux fois la premiere magistrature, donna une nouvelle Edda, moins étendue que la premiere; dans laquelle il ne fit qu'extraire ce qu'il y avoit de plus important dans la Mythologie ancienne; il en forma un système abrégé, où l'on pût trouver toutes les fables propres à expliquer les expressions figurées, rapportées dans les poésies de son pays. Il donna à son ouvrage la forme d'un dialogue ou entretien d'un roi de Suede à la cour des dieux. Les principaux dogmes de la Théologie des Celtes, y sont exposés, non d'après leurs philosophes, mais d'après leurs scaldes ou poëtes; ce livre fait connoître les dieux que tout le Nord a adorés avant le Christianisme.

M. J. P. Resenius publia en 1665 à Coppenhague, le texte de l'Edda en ancien islandois; il y joignit une traduction latine & une autre traduction danoise. Enfin, M. Mallet, professeur des Belles - Lettres françoises à Coppenhague, a publié en 1756, une traduction françoise de l'Edda des Islandois; c'est un des monumens les plus curieux de l'antiquité; il est dépouillé d'inutilités, & rédigé par un homme judicieux, savant, & philosophe; l'Edda est à la suite de son introduction à l'histoire de Danemarck. Nous allons tirer de cet ouvrage intéressant les principaux points de la Mythologie des anciens Scandinaves.

Ils admettoient un dieu nommé Alfader ou Odin, qui vit toûjours, qui gouverne tout son royaume, & les grandes choses comme les petites; il a créé le ciel & la terre; il a fait les hommes, & leur a donné une ame qui doit vivre & qui ne se perdra jamais, même après que le corps se sera réduit en poussiere & en cendres. Tous les hommes justes doivent habiter avec ce dieu, d'abord dans un séjour appellé valhalla, & ensuite dans un lieu nommé gimle ou vingolf, palais d'amitié; mais les méchans iront vers nela, la mort; & de - là à niflheim, l'enfer, en - bas dans le neuvieme monde; & ensuite après la destruction de l'univers dans un séjour appellé nastrand. Ce dieu avant que de former le ciel & la terre vivoit avec les géants; un poeme ancien des peuples du Nord, appellé voluspa, dit de lui « au commencement du tems, lorsqu'il n'y avoit rien, ni rivage, ni mer, ni fondement au - dessous, on ne voyoit point de terre en - bas, ni de ciel en haut; un vaste abyme étoit tout; on ne voyoit de verdure nulle part ». Dieu créa niflheim, ou le séjour des scelérats, avant que de créer la terre. Au milieu de ce séjour funeste est une fontaine qui se nomme Huergelmar, d'où découlent les fleuves appellés l'angoisse, l'ennemi de la joie, le séjour de la mort, la perdition, le goufre, la tempête, le tourbillon, le rugissement, le hurlement, le vaste & le bruyant, qui coule près des grilles du séjour de la mort, qui s'appelloit Hela. Cette Hela avoit le gouvernement de neuf mondes, pour qu'elle y distribue des logemens à ceux qui lui sont envoyés, c'est - à - dire à tous ceux qui meurent de maladie ou de vieillesse; elle possede dans l'enfer de vastes appartemens, défendus par des grilles; sa salle est la douleur; sa table est la famine; son coûteau la faim; son valet le retard; sa servante la lenteur; sa porte le précipice; son vestibule la langueur; son lit la maigreur & la maladie; sa tente la malédiction: la moitié de son corps est bleue, l'autre moitié est revêtue de la peau & de la couleur humaine; elle a un regard effrayant: mais avant toutes choses existoit

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