ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"636"> digestions dans des maladies essentiellement différentes, c'est ce qui fait redouter la saignée à quelques medecins dans les maladies aiguës, dans la crainte d'augmenter le repompement de ces impuretés; car tel est le danger de ces théories, qu'elles influent sur la pratique, & la rendent de plus en plus incertaine, au grand détriment de l'humanité.

Ces impuretés sont le plus souvent la suite & le résidu d'une mauvaise digestion; quelquefois aussi elles dépendent d'une altération générale des humeurs; elles sont la cause la plus fréquente des indigestions. Voyez ce mot. Pour les dissiper, il ne faut ordinairement que du régine, une diete sévere; car, remarque avec raison le divin Hippocrate, aphoris. 9. lib. XI. plus on nourrira un corps impur, & plus on augmentera le mal. Celse recommande aux personnes chargées d'impuretés, de ne pas se baigner, corpora impura non sunt balneanda. Si quelques jours de diete ne dissipoient pas ces mauvais sucs, il faut donner un purgatif doux, ou un émétique, suivant l'indication; mais il faut avoir soin de préparer à la purgation par beaucoup de lavages, de délayans, c'est un précepte du grand Hippocrate; lorsqu'il s'agit de purger les corps impurs, dit - il, aphor. 10. lib. XI. il faut rendre les matieres fluxiles; les purgatifs réussissent alors beaucoup mieux, & ne sont sujets à aucuns inconvéniens. On peut avant & après la purgation faire usage de quelque léger stomachique. On peut parmi ces remedes en choisir d'agréables, & qui n'en sont pas moins efficaces; tels sont les vins robustes d'Alicante, de Malaga, de Bordeaux, &c. Un mets ou un remede qui plaît, quoique moins bon, doit être préféré à ceux qui, avec plus de vertu, seroient desagréables. Hippoc. aphor. 38. lib. XI.

Impureté (Page 8:636)

Impureté, sub. fém. Impur, adj. (Morale.) le mot d'impureté est un terme générique qui comprend tous les déréglemens dans lesquels l'on peut tomber, relativement à la jonction charnelle des corps, ou aux parties naturelles qui l'operent. Ainsi la fornication, l'adultere, l'inceste, les péchés contre nature, les regards lascifs, les attouchemens deshonnêtes sur soi ou sur les autres, les pensées sales, les discours obscènes, sont autant de différentes especes d'impureté.

Il ne suffit pas d'être marié pour ne point commettre d'actions impures avec la personne que l'hymen semble avoir livrée entierement à nos desirs. Si la chasteté doit régner dans le lit nuptial, l'impureté peut aussi le souiller; on ne doit point, comme Onan, tromper les fins de la nature. Les plaisirs qu'elle nous offre sont assez grands, sans qu'un rafinement de volupté nous fasse chercher à les augmenter: il est même des tems où elle nous les défend par les obstacles qu'elle y apporte, & que nous devons respecter. L'ancienne loi ordonnoit la peine de mort contre le mari qui dans ces momens - là ne mettoit pas de frein à ses sales desirs, & contre la femme qui se prêtoit à ses honteuses caresses.

Au reste, nous ne prétendons pas suivre l'impureté dans toutes ses routes, ni entrer dans des détails que la décence ordonne de supprimer. Nous ne discuterons pas jusqu'à quel point peuvent aller les attouchemens voluptueux, sans devenir criminels; nous ne chercherons pas les circonstances où ils peuvent être permis ou même nécessaires; nous nous garderons bien de décider, comme l'a fait un honnête jesuite, que le mari a moins à se plaindre, lorsque sa femme s'abandonne à un étranger d'une maniere contraire à la nature, que quand elle commet simplement avec lui un adultere; parce que, dit - il, de la premiere façon on ne touche pas au vase légitime sur lequel seul l'époux a reçu des droits exclusifs. Il faut laisser toutes ces horreurs ensevelies sous les cendres des Filliutius, des Escobar, & des autres casuistes leurs confreres, dont le parlement de Paris par arrêt du six Août 1761, vient de faire brûler les ouvrages, pour une raison plus importante encore.

Il y avoit dans l'ancienne loi une impureté légale qui se contractoit de différentes façons, comme par l'attouchement d'un mort, &c. on alloit s'en purifier par certaines cérémonies. C'est encore une des choses que Mahomet a prises chez les Juifs, & qu'il a transportées dans son alcoran.

La religion des Payens étoit remplie de divinités qui favorisoient l'impureté. Vénus en étoit la déesse, & les bois sacrés qu'on trouvoit ordinairement autour de ses temples, étoient les théatres de sa débauche. Il y avoit même des pays où toutes les femmes étoient obligées de se prostituer une fois en l'honneur de la déesse; & l'on peut juger si la dévotion naturelle à leur sexe, leur permettoit de s'en tenirlà. S. Augustin, dans sa cité de Dieu, rapporte que l'on voyoit au capitole des femmes impudiques qui se destinoient à satisfaire les besoins amoureux de la divinité, dont elles ne manquoient guere de devenir enceintes. Il est à croire que les prêtres s'en aidoient un peu, & desservoient alors plus d'un autel. Le même pere dit qu'en Italie, & sur - tout à Lavinium, dans les fêtes de Bacchus, on portoit en procession des membres virils, sur lesquels la matrone la plus respectable mettoit une couronne. Les fêtes d'Isis en d'autres pays étoient semblables à celles - là: c'étoit même relique & mêmes cérémonies.

On trouve encore dans la cité de Dieu, (lib. VI. cap. ix.) l'énumération des divinités que les Payens avoient créées pour le mariage, & auxquelles ils avoient donné des fonctions assez deshonnêtes, & qui présentoient des images fort impures. Lorsque la fille avoit engagé sa foi à son époux, les matrones la conduisoient au dieu Priape, qui avoit toûjours un membre d'une grosseur monstrueuse, sur lequel on faisoit asseoir la nouvelle mariée. On lui ôtoit sa ceinture, en invoquant la déesse appellée Virginiensis; le dieu Subigus soumettoit la femme aux transports de son mari; la déesse Préma la tenoit sous lui pour empêcher qu'elle ne se remuât trop; & venoit enfin la déesse Sertunda, comme qui diroit perforatrice. Son emploi étoit d'ouvrir à l'homme le sentier de la volupté: heureusement que cette fonction avoit été donnée à une divinité femelle; car, comme le remarque très - bien S. Augustin, le mari n'eût pas souffert volontiers qu'un dieu lui rendît ce service; & (pourroit - on ajouter encore) qu'il lui donnât du secours dans un endroit où trop souvent il n'a guere besoin d'aide.

IMPUTABILITÉ (Page 8:636)

IMPUTABILITÉ, s. f. (Droit naturel.) c'est la qualité de l'action imputable en bien, ou en mal; l'imputation est l'acte du législateur, du juge, du magistrat, ou de tout autre, qui met actuellement sur le compte de quelqu'un une action de nature à lui être imputée. Voyez Imputation. (D. J.)

IMPUTATION (Page 8:636)

IMPUTATION, s. f. (Droit politiq. & Moral.) Une qualité essentielle des actions humaines est d'être susceptible d'imputation; c'est - à - dire, que l'agent en peut être regardé avec raison comme le véritable auteur, que l'on peut les mettre sur son compte; tellement que les effets bons ou mauvais qui en proviennent, lui seront justement attribués, & retomberont sur lui comme en étant la cause.

Il ne faut pas confondre l'imputabilité des actions humaines avec leur imputation actuelle. La premiere est une qualité de l'action; la seconde est un acte du législateur, du juge, &c. qui met actuellement sur le compte de quelqu'un une action qui de sa nature peut être imputée.

L'imputation est donc proprement un jugement par [p. 637] lequel on déclare que quelqu'un étant l'auteur ou la cause morale d'une action commandée ou défendue par les lois, les effets bons ou mauvais qui s'ensuivent, doivent actuellement lui être attribués; qu'en conséquence il en est responsable, & qu'il doit en être loué ou blâmé, récompensé ou puni.

Ce jugement d'imputation, aussi - bien que celui de la conscience, se fait en appliquant la loi à l'action dont il s'agit, en comparant l'une avec l'autre, pour prononcer ensuite sur le mérite du fait, & faire ressentir en conséquence à celui qui en est l'auteur, le bien ou le mal, la peine ou la récompense que la loi y a attachée. Tout cela suppose nécessairement une connoissance exacte de la loi & de son véritable sens, aussi - bien que du fait en question & de ses circonstances. Le défaut de ces circonstances ne pourroit que rendre l'application fausse & le jugement vicieux.

Pour bien établir les principes & les fondemens de cette matiere, il faut d'abord remarquer que l'on ne doit pas conclure de la seule imputabilité d'une action à son imputation actuelle. Afin qu'une action mérite d'être actuellement imputée, il faut le concours de ces deux conditions, 1°. qu'elle soit de nature à pouvoir l'être, & 2°. que l'agent soit dans quelque obligation de la faire ou de s'en abstenir. Un exemple rendra la chose sensible. De deux jeunes hommes que rien n'oblige d'ailleurs à savoir les Mathématiques, l'un s'applique à cette science, & l'autre ne le fait pas. Quoique l'action de l'un & l'omission de l'autre soient par elles - mêmes de nature à pouvoir être imputées, cependant elles ne le seront dans ce cas - ci, ni en bien, ni en mal. Mais si l'on suppose que ces deux jeunes hommes sont destinés, l'un à être conseiller d'état, l'autre à quelque emploi militaire: en ce cas, leur application ou leur négligence à s'instruire dans la Jurisprudence, ou dans les Mathématiques, leur seroit méritoirement imputée; d'où il paroît que l'imputation actuelle demande qu'on soit dans l'obligation de faire quelque chose ou de s'en abstenir.

2°. Quand on impute une action à quelqu'un, on le rend, comme on l'a dit, responsable des suites bonnes ou mauvaises de l'action qu'il a faite. Il suit de - là que pour rendre l'imputation juste, il faut qu'il y ait quelque liaison nécessaire ou accidentelle entre ce que l'on a sait ou omis, & les suites bonnes ou mauvaises de l'action ou de l'omission; & que d'ailleurs l'agent ait eu connoissance de cette liaison, ou que du moins il ait pû prévoir les effets de son action avec quelque vraissemblance. Sans cela, l'imputation ne sauroit avoir lieu, comme on le sentira par quelques exemples. Un armurier vend des armes à un homme fait qui lui paroît en son bon sens, de sang froid, & n'avoir aucun mauvais dessein. Cependant cet homme va sur le champ attaquer quelqu'un injustement, & il le tue. On ne sauroit rien imputer à l'armurier, qui n'a fait que ce qu'il avoit droit de faire, & qui d'ailleurs ne pouvoit ni ne devoit prévoir ce qui est arrivé. Mais si quelqu'un laissoit par négligence des pistolets chargés sur sa table, dans un lieu exposé à tout le monde; & qu'un enfant qui ne connoît pas le danger, se blesse ou se tue; le premier est certainement responsable du malheur qui est arrivé; car c'étoit une suite claire & prochaine de ce qu'il a fait, & il pouvoit & devoit le prévoir.

Il faut raisonner de la même maniere à l'égard d'une action qui a produit quelque bien: ce bien ne peut nous être attribué, lorsqu'on en a été la cause sans le savoir & sans y penser; mais aussi il n'est pas nécessaire, pour qu'on nous en sache quelque gré, que nous eussions une certitude entiere du succès: il suffit que l'on ait eu lieu de le présumer raisonnablement; & quand l'effet manqueroit absolument, l'intention n'en seroit pas moins louable.

L'imputation est simple ou efficace. Quelquefois l'imputation se borne simplement à la louange ou au blâme; quelquefois elle va plus loin. C'est ce qui donne lieu de distinguer deux sortes d'imputation, l'une simple, l'autre efficace. La premiere est celle qui consiste seulement à approuver ou à desapprouver l'action, ensorte qu'il n'en résulte aucun autre effet par rapport à l'agent. Mais la seconde ne se borne pas au blâme ou à la louange; elle produit encore quelque effet bon ou mauvais à l'égard de l'agent, c'est - à - dire, quelque bien ou quelque mal réel qui retombe sur lui.

Effets de l'une & de l'autre. L'imputation simple peut être faite indifféremment par chacun, soit qu'il ait ou qu'il n'ait pas un intérêt particulier & personnel à ce que l'action fût faite ou non: il suffit d'y avoir un intérêt général & indirect. Et comme l'on peut dire que tous les membres de la société sont intéressés à ce que les lois naturelles soient bien observées, ils sont tous en droit de louer ou de blâmer les actions d'autrui, selon qu'elles sont conformes ou opposées à ces lois. Ils sont même dans une sorte d'obligation à cet égard; le respect qu'ils doivent au legislateur & à ses lois l'exige d'eux; & ils manqueroient à ce qu'ils doivent à la société & aux particuliers, s'ils ne témoignoient pas, du moins par leur approbation ou leur desaveu, l'estime qu'ils font de la probité & de la vertu, & l'aversion qu'ils ont au contraire pout la méchanceté & pour le crime.

Mais à l'égard de l'imputation efficace, il faut, pour la pouvoir faire légitimement, que l'on ait un intérêt particulier & direct à ce que l'action dont il s'agit se sasse ou ne se fasse pas. Or ceux qui ont un tel intérêt, ce sont 1°. ceux à qui il appartient de régler l'action; 2°. ceux qui en sont l'objet, c'est - à - dire, ceux envers lesquels on agit, & à l'avantage ou au desavantage desquels la chose peut tourner. Ainsi un souverain qui a établi des lois, qui ordonne certaines choses sous la promesse de quelque récompense, & qui en défend d'autres sous la menace de quelque peine, doit sans doute s'intéresser à l'observation de ses lois, & il est en droit d'imputer à ses sujets leurs actions d'une maniere efficace, c'est - à - dire, de les récompenser ou de les punir. Il en est de même de celui qui a reçû quelque injure ou quelque dommage par une action d'autrui.

Remarquons, enfin, qu'il y a quelque différence entre l'imputation des bonnes & des mauvaises actions. Lorsque le législateur a établi une certaine récompense pour une bonne action, il s'oblige par cela même à donner cette récompense, & il accorde le droit de l'exiger à ceux qui s'en sont rendus dignes par leur obéissance; mais à l'égard des peines décernées pour les actions mauvaises, le législateur peut effectivement les infliger, s'il le veut; mais il ne s'ensuit pas de - là que le souverain soit obligé de punir à la rigueur: il demeure toûjours le maître d'user de son droit ou de faire grace, & il peut avoir de bonnes raisons de faire l'un ou l'autre.

Application des principes précédens. 1°. Il suit de ce que nous avons dit, que l'on impute avec raison à quelqu'un toute action ou omission, dont il est l'auteur ou la cause, & qu'il pouvoit & devoit faire ou omettre.

2°. Les actions de ceux qui n'ont pas l'usage de la raison ne doivent point leur être imputées. Car ces personnes n'étant pas en état de savoir ce qu'elles font, ni de le comparer avec les lois, leurs actions ne sont pas proprement des actions humaines, & n'ont point de moralité. Si l'on gronde ou si l'on

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