ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"497"> parce que la cause physique de cette affection a son siége là où se manifeste la lésion des fonctions.

Ainsi l'apoplexie est idiopathique lorsqu'elle dépend d'une hémorrhagie, d'un épanchement de sang qui se forme dans les ventricules du cerveau.

La pleurésie est une maladie idiopathique, lorsqu'elle a commencé par un engorgement inflammatoire dans la plevre même.

On entend ordinairement par idiopathie la même chose que par protopathie, primarius affectus, & on attache à ces deux termes un sens opposé à ceux de sympathie & de deutéropathie. Voyez Maladie, Sympathie.

IDIOPATHIQUE (Page 8:497)

IDIOPATHIQUE, (Patholog.) IDIOPAQIKOS2, mot dérivé du grec; il est formé de IDIOS2, qui signifie propre, & PAQOS2, passion, affection, maladie; c'est comme si on disoit maladie propre; son sens est parfaitement conforme à son étymologie; on l'ajoute comme épithete aux maladies dont la cause est propre à la partie où l'on observe le principal symptome. Il ne faut qu'un exemple pour éclaircir ceci; on appelle une phrénésie idiopathique lorsque la cause, le dérangement qui excite la phrénésie, est dans le cerveau; ces maladies sont par - là opposées à celles qu'on nomme sympathiques, qui sont entraînées par une espece de sympathie, de rapport qu'il y a entre les differentes parties; ainsi un délire phrénétique occasionné par la douleur vive d'un panaris, par l'inflammation du diaphragme, est censé sympathique; l'affection se communique dans ce dernier cas par les nerfs; on voit par - là qu'idiopathique ne doit point être confondu avec essentiel, & qu'il n'est point opposé à symptomatique, la même maladie pouvant être en même - tems symptomatique & idiopathique. Article de M. Menuret.

IDIOSYNCRASE (Page 8:497)

IDIOSYNCRASE, s. f. (Médec.) particularité de tempérament; I)DIOSUGKRASI/A, mot composé de I)DIOS2, propre, SU\N, avec, & KRA=SIS2, mêlange.

Comme il paroît que chaque homme a sa santé propre, & que tous les corps different entr'eux, tant dans les solides que dans les fluides, quoiqu'ils soient sains chacun; on a nommé cette constitution de chaque corps, qui le fait différer des autres corps aussi sains, idiosyncrase, & les vices qui en dépendent passoient quelquefois pour incurables, parce qu'on pensoit qu'ils existoient dès les premiers instans de la formation de ce corps; mais nous ne pouvons point attribuer toûjours à une disposition innée, ces maladies des vaisseaux & des visceres trop débiles.

Une fille de qualité élevée dans le luxe, la mollesse & le repos, a le corps foible & languissant; une paysanne en venant au monde, semblable à cette fille de condition, s'accoutume au travail dès sa plus tendre jeunesse, devient forte & vigoureuse; la débilité de la premiere, & les maladies qui en résultent, sont donc prises mal - à - propos pour des maladies innées, car on ne sauroit croire quels changemens on peut produire dès l'enfance dans ce qu'on appelle d'ordinaire tempérament particulier; cependant quand cette idiosyncrase existe, il faut y avoir un grand égard dans l'usage des remedes, sans quoi l'on risque de mettre la vie du malade en danger. Hippocrate en a fait l'observation, confirmée par l'expérience de tous les tems & de tous les lieux. (D. J.)

IDIOT (Page 8:497)

* IDIOT, adj. (Gramm.) il se dit de celui en qui un défaut naturel dans les organes qui servent aux opérations de l'entendement est si grand, qu'il est incapable de combiner aucune idée, ensorte que sa condition paroît à cet égard plus bornée que celle de la bête. La différence de l'idiot & de l'imbécille consiste, ce me semble, en ce qu'on naît idiot, & qu'on devient imbécille. Le mot idiot vient de EDIW/THS2, qui signifie homme particulier, qui s'est renfermé dans une vie retirée, loin des affaires du gouvernement; c'est - à - dire celui que nous appellerions aujourd'hui un sage. Il y a eu un célebre mystique qui prit par modestie la qualité d'idiot, qui lui convenoit beaucoup plus qu'il ne pensoit.

IDIOTISME (Page 8:497)

IDIOTISME, subst. masc. (Gramm.) c'est une façon de parler éloignée des usages ordinaires, ou des lois générales du langage, adaptée au génie propre d'une langue particuliere. R. I)/DIOS2, peculiaris, propre, particulier. C'est un terme général dont on peut faire usage à l'égard de toutes les langues; un idiotisme grec, latin, françois, &c. C'est le seul terme que l'on puisse employer dans bien des occasions; nous ne pouvons dire qu'idiotisme espagnol, portugais, turc, &c. Mais à l'égard de plusieurs langues, nous avons des mots spécifiques subordonnés à celui d'idiotisme, & nous disons anglicisme, arabisme, celticisme, gallicisme, germanisme, hébraïsme, hellénisme, latinisme, &c.

Quand je dis qu'un idiotisme est une façon de parler adaptée au génie propre d'un langue particuliere, c'est pour faire comprendre que c'est plutôt un effet marqué du génie caractéristique de cette langue, qu'une locution incommunicable à tout autre idiome, comme on a coutume de le faire entendre. Les richesses d'une langue peuvent passer aisément dans une autre qui a avec elle quelque affinité; & toutes les langues en ont plus ou moins, selon les différens degrés de liaison qu'il y a ou qu'il y a eu entre les peuples qui les parlent ou qui les ont parlées. Si l'italien, l'espagnol & le françois sont entés sur une même langue originelle, ces trois langues auront apparemment chacune à part leurs idiotismes particuliers, parce que ce sont des langues différentes; mais il est difficile qu'elles n'aient adopté toutes trois quelques idiotismes de la langue qui sera leur source commune, & il ne seroit pas étonnant de trouver dans toutes trois des celticismes. Il ne seroit pas plus merveilleux de trouver des idiotismes de l'une des trois dans l'autre, à cause des liaisons de voisinage, d'intérêts politiques, de commerce, de religion, qui subsistent depuis long - tems entre les peuples qui les parlent; comme on n'est pas surpris de rencontrer des arabismes dans l'espagnol, quand on sait l'histoire de la longue domination des Arabes en Espagne. Personne n'ignore que les meilleurs auteurs de la latinité sont pleins d'hellénismes: & si tous les littérateurs conviennent qu'il est plus facile de traduire du grec que du latin en françois, c'est que le génie de notre langue approche plus de celui de la langue greque que de celui de la langue latine, & que notre langage est presque un hellénisme continuel.

Mais une preuve remarquable de la communicabilité des langues qui paroissent avoir entre elles le moins d'affinité, c'est qu'en françois même nous hébraïsons. C'est un hébraïsme connu que la répétition d'un adjectif ou d'un adverbe, que l'on veut élever au sens que l'on nomme communément superlatif. Voyez Amen & Superlatif. Et le superlatif le plus énergique se marquoit en hébreu par la triple répétition du mot: de là le triple kirie eleison que nous chantons dans nos églises, pour donner plus de force à notre invocation; & le triple sanctus pour mieux peindre la profonde adoration des esprits célestes. Or il est vraissemblable que notre très, formé du latin tres, n'a été introduit dans notre langue, que comme le symbole de cette triple répétition, très - saint, ter sanctus, ou sanctus, sanctus, sanctus: & notre usage de lier très au mot positif par un tiret, est fondé sans doute sur l'intention de faire sentir que cette addition est purement matérielle, qu'elle n'empêche pas l'unité du mot, mais qu'il doit être répété trois fois, ou du - moins qu'il faut y attacher le sens [p. 498] qu'il auroit s'il étoit répété trois sois; & en effet les adverbes bien & fort qui expriment par eux - mêmes le sens superlatif dont il s'agit, ne sont jamais liés de même au mot positif auquel on les joint pour le lui communiquer. On rencontre dans le langage populaire des hébraïsmes d'une autre espece: un homme de Dieu, du vin de Dieu, une moisson de Dieu, pour dire un très - honnête homme, du vin très - bon, une moisson très - abondante; ou, en rendant par - tout le même sens par le même tour, un homme parfait, du vin parfait, une moisson parfaite: les Hébreux indiquant la perfection par le nom de Dieu, qui est le modele & la source de toute perfection. C'est cette espece d'hébraïsme qui se trouve au Ps. 35. v. 7. justitia tua sicut montes Dei, pour sicut montes altissimi; & au Ps. 64. v. 10. flumen Dei, pour flumen maximum.

Malgré les hellénismes reconnus dans le latin, on a cru assez légérement que les idiotismes étoient des locutions propres & incommunicables, & en conséquence on a pris & donné des idées fausses ou louches; & bien des gens croient encore qu'on ne désigne par ce nom général, ou par quelqu'un des noms spécifiques qui y sont analogues, que des locutions vicieuses imitées mal - adroitement de quelque autre langue. Voyez Gallicisme. C'est une erreur que je crois suffisamment détruite par les observations que je viens de mettre sous les yeux du lecteur: je passe à une autre qui est encore plus universelle, & qui n'est pas moins contraire à la véritable notion des idiotismes.

On donne communément à entendre que ce sont des manieres de parler contraires aux lois de la Grammaire générale. Il y a en effet des idiotismes qui sont dans ce cas; & comme ils sont par - là même les plus frappans & les plus aisés à distinguer, on a cru aisément que cette opposition aux lois immuables de la Grammaire, faisoit la nature commune de tous. Mais il y a encore une autre espece d'idiotismes qui sont des façons de parler éloignées seulement des usages ordinaires, mais qui ont avec les principes fondamentaux de la Grammaire générale toute la conformité exigible. On peut donner à ceux - ci le nom d'idiotismes réguliers, parce que les regles immuables de la parole y sont suivies, & qu'il n'y a de violé que les institutions arbitraires & usuelles: les autres au contraire prendront la dénomination d'idiotismes irréguliers, parce que les regles immuables de la parole y sont violées. Ces deux especes sont comprises dans la définition que j'ai donnée d'abord; & je vais bientôt les rendre sensibles par des exemples; mais en y appliquant les principes qu'il convient de suivre pour en pénétrer le sens, & pour y découvrir, s'il est possible, les caracteres du génie propre de la langue qui les a introduits.

I. Les idiotismes réguliers n'ont besoin d'aucune autre attention, que d'être expliqués littéralement pour être ramenés ensuite au tour de la langue naturelle que l'on parle.

Je trouve par exemple que les Allemands disent, diese gelehrten manner, comme en latin, hi docti viri, ou en françois, ces savans hommes; & l'adjectif gelehrten s'accorde en toutes manieres avec le nom manner, comme l'adjectif latin docti avec le nom viri, ou l'adjectif françois savans avec le nom hommes; ainsi les Allemans observent en cela, & les lois générales & les usages communs. Mais ils disent, diese manner sind gelehrt; & pour le rendre littéralement en latin, il faut dire hi viri sunt doctè, & en françois, ces hommes sont savamment, ce qui veut dire indubitablement ces hommes sont savans: gelehrt est donc un adverbe, & l'on doit reconnoître ici que les Allemands s'écartent des usages communs, qui donnent la préférence à l'adjectif en pareil cas. On voit donc en quoi consiste le germanisme lorsqu'il s'a git d'exprimer un attribut; mais quelle peut être la cause de cet idiotisme? le verbe exprime l'existence d'un sujet sous un attribut. Voyez Verbe. L'attribut n'est qu'une maniere particuliere d'être; & c'est aux adverbes à exprimer simplement les manieres d'être, & conséquemment les attributs: voilà le génie allemand. Mais comment pourra - t - on concilier ce raisonnement avec l'usage presque universel, d'exprimer l'attribut par un adjectif mis en concordance avec le sujet du verbe? Je réponds qu'il n'y a peut - être entre la maniere commune & la maniere allemande d'autre différence que celle qu'il y auroit entre deux tableaux, où l'on auroit saisi deux momens différens d'une même action: le germanisme saisit l'instant qui précede immédiatement l'acte de juger, où l'esprit considere encore l'attribut d'une maniere vague & sans application au sujet: la phrase commune présente le sujet tel qu'il paroît à l'esprit après le jugement, & lorsqu'il n'y a plus d'abstraction. L'Allemand doit donc exprimer l'attribut avec les apparences de l'indépendance; & c'est ce qu'il fait par l'adverbe qui n'a aucune terminaison dont la concordance puisse en désigner l'application à quelque sujet déterminé. Les autres langues doivent exprimer l'attribut avec les caracteres de l'application; ce qui est rempli par la concordance de l'adjectif attributif avec le sujet. Mais peut - être faut - il sous - entendre alors le nom avant l'adjectif, & dire que hi viri sunt docti, c'est la même chose que hi viri sunt viri docti; & que ego sum miser, c'est la même chose que ego sum homo miser: en effet la concordance de l'adjectif avec le nom, & l'identité du sujet exprimé par les deux especes, ne s'entendent clairement & d'une maniere satisfaisante, que dans le cas de l'apposition; & l'apposition ne peut avoir lieu ici qu'au moyen de l'ellipse. Je tirerois de tout ceci une conclusion surprenante: la phrase allemande est donc un idiotisme régulier, & la phrase commune un idiotisme irrégulier.

Voici un latinisme régulier dont le développement peut encore amener des vues utiles: neminem reperire est id qui velit. Il y a là quatre mots qui n'ont rien d'embarrassant: qui velit id (qui veuille cela) est une proposition incidente déterminative de l'antécédent neminem; neminem (ne personne) est le complément ou le régime objectif grammatical du verbe reperire; neminem qui velit id (ne trouver personne qui veuille cela); c'est une construction exacte & réguliere. Mais que faire du mot est? il est à la troisieme personne du singulier; quel en est le sujet? comment pourra - t - on lier à ce mot l'infinitif reperire avec ses dépendances? Consultons d'autres phrases plus claires dont la solution puisse nous diriger.

On trouve dans Horace (III. Od. 2.) dulce & decorum est pro patriâ mori; & encore (IV. Od. 12.) dulce est desipere in loco. Or la construction est facile: mori pro patriâ est dulce & decorum; desipere in loco est dulce: les infinitifs mori & desipere y sont traités comme des noms, & l'on peut les considérer comme tels: j'en trouve une preuve encore plus forte dans Perse, Sat. 1. scire tuum nihil est; l'adjectif tuum mis en concordance avec scire, désigne bien que scire est considéré comme nom. Voilà la difficulté levée dans notre premiere phrase: le verbe reperire est ce que l'on appelle communément le nominatif du verbe est; ou en termes plus justes, c'en est le sujet grammatical, qui seroit au nominatif, s'il étoit déclinable: reperire neminem qui velit id, en est donc le sujet logique. Ainsi il faut construire, reperire neminem qui velit id, est; ce qui signifie littéralement, ne trouver personne qui le veuille, est ou existe; ou en transposant la négation, trouver quelqu'un qui le veuille, n'est pas ou n'existe pas; ou enfin, en ramenant la même

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