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C'est la même syntaxe & la même construction
par - tout où l'on trouve un infinitif employé comme
sujet du verbe sum, lorsque ce verbe a le sens adjectif,
c'est - à - dire lorsqu'il n'est pas simplement verbe
substantif, mais qu'il renferme encore l'idée de l'existence
réelle comme attribut, & conséquemment
qu'il est équivalent à existo. Ce n'est que dans ce cas
qu'il y a latinisme; car il n'y a rien de si commun
dans la plûpart des langues, que de voir l'infinif sujet
du verbe substantif, quand on exprime ensuite un
attribut déterminé: ainsi dit - on en latin turpe est mentiri, & en françois, mentir est une chose honteuse. Mais
nous ne pouvons pas dire voir est pour on voit, voir
étoit pour on voyoit, voir sera, pour on verra, comme
les Latins disent videre est, videre erat, videre erit.
L'infinitif considéré comme nom, sert aussi à expliquer
une autre espece de latinisme qu'il me semble
qu'on n'a pas encore entendu comme il faut, & à
l'explication duquel les rudimens ont substitué les
difficultés ridicules & insolubles du redoutable que
retranché. Voyez
II. Pour ce qui regarde les idiotismes irréguliers, il faut, pour en pénétrer le sens, discerner avec soin l'espece d'écart qui les détermine, & remonter, s'il est possible, jusqu'à la cause qui a occasionné ou pû occasionner cet écart: c'est même le seul moyen qu'il y ait de reconnoître les caracteres précis du génie propre d'une langue, puisque ce génie ne consiste que dans la réunion des vues qu'il s'est proposées, & des moyens qu'il a autorisés.
Pour discerner exactement l'espece d'écart qui détermine
un idiotisme irrégulier, il faut se rappeller ce
que l'on a dit au mot
Si l'usage particulier d'une langue autorise l'altération du sens propre de quelques mots, & la substitution d'un sens étranger, c'est alors une figure de mots que l'on appelle trope. Voyez ce mot.
Si l'usage autorise une locution contraire aux lois
générales de la Syntaxe, c'est alors une figure que
l'on nomme ordinairement figure de construction, mais
que j'aimerois mieux que l'on désignât par la dénomination
plus générale de figure de Syntaxe, en réservant
le nom de figure de construction aux seules locutions
qui s'écartent des regles de la construction
proprement dite. Voyez
1°. Lorsqu'un trope est tellement dans le génie d'une langue, qu'il ne peut être rendu littéralement dans une autre, ou qu'y étant rendu littéralement il y exprime un tout autre sens, c'est un idiotisme de la langue originale qui l'a adopté; & cet idiotisme est irrégulier, parce que le sens propre des mots y est abandonne; ce qui est contraire à la premiere institution des mots. Ainsi le superstitieux euphémisme, qui dans la langue latine a donné le sens de sacrifier au verbe mactare, quoique ce mot signifie dans son étymologie augmenter davantage (magis auctare); cet euphémisme, dis - je, est tellement propre au génie
C'est pareillement un trope qui a introduit dans
notre langue ces idiotismes déja remarqués au mot
2°. Ce que l'on vient de dire des tropes, est également vrai des figures de Syntaxe: telle figure est
un idiotisme irrégulier, parce qu'elle ne peut être rendue
littéralement dans une autre langue, ou que la
version littérale qui en seroit faite, y auroit un autre
sens. Ainsi l'usage où nous sommes, dans la langue
françoise, d'employer l'adjectif possessif masculin,
mon, ton, son, avant un nom féminin qui commence
par une voyelle ou par une h muette, est un
idiotisme irrégulier de notre langue, un gallicisme;
parce que l'imitation littérale de cette figure dans
une autre langue n'y seroit qu'un solécisme. Nous
disons mon ame, & l'on ne diroit pas meus anima;
ton opinion, & l'on ne peut pas dire tuus opinio: c'est
que les Latins avoient pour éviter l'hiatus occasionné
par le concours des voyelles, des moyens qui nous
sont interdits par la constitution de notre langue, &
dont il étoit plus raisonnable de faire usage, que de
violer une loi aussi essentielle que celle de la concordance
que nous transgressons: ils pouvoient dire anima mea, opinio tua; & nous ne pouvons pas imiter
ce tour, & dire ame ma, opinion ta. Notre langue
sacrifie donc ici un principe raisonnable aux agrémens
de l'euphonie (voyez
Voici une ellipse qui est devenue une locution propre à notre langue, un gallicisme, parce que l'usage en a prévalu au point qu'il n'est plus permis de suivr en pareil cas la Syntaxe pleine: il ne laisse pas d'agir, notre langue ne laisse pas de se prêter à tous les genres d'écrire, on ne laisse pas d'abandonner la vertu en la louant, c'est - à - dire il ne laisse pas le soin d'agir, notre langue ne laisse pas la faculté de se prêter à tous les genres d'écrire, on ne laisse pas la foiblesse d'abandonner la vertu en la louant. Nous préférons dans ces [p. 500]
S'il est facile de ramener à un nombre fixe de chefs
principaux les écarts qui déterminent les différens
idiotismes, il n'en est pas de même de vues particulieres
qui peuvent y influer: la variété de ces causes
est trop grande, l'influence en est trop délicate, la
complication en est quelquefois trop embarrassante
pour pouvoir établir à ce sujet quelque chose de bien
certain. Mais il n'en est pas moins constant qu'elles
tiennent toutes, plus ou moins, au génie des diverses
langues, qu'elles en sont des émanations, & qu'elles
peuvent en devenir des indices.
Mais si l'on veut démêler dans les idiotismes réguliers ou irréguliers, ce que le génie particulier de la langue peut y avoir con ribué, la premiere chose essentielle qu'il y ait à faire, c'est de s'assurer d'une bonne interpré ation littérale. Elle suppose deux choses; la traduction rigoureuse de chaque mot par sa signification propre, & la réduction de toute la phrase à la plénitude de la construction analytique, qui seule peut remplir les vuides de l'ellipse, corriger les rédondances du pléonasme, redresser les écarts de l'inversion, & faire rentrer tout dans le système invariable de la Grammaire générale.
Dans les premieres années de notre enfance,
nous lions certaines idées à certaines impressions;
l'habitude confirme cette liaison. Les esprits animaux
prennent une route déterminée pour chaque
idée particuliere; de sorte que lorsqu'on veut dans
la suite exciter la même idée d'une maniere différente,
on cause dans le cerveau un mouvement
contraire à celui auquel il est accoutumé, & ce
mouvement excite ou de la surprise ou de la risée,
& quelquefois même de la douleur: c'est pourquoi
chaque peuple différent trouve extraordinaire
l'habillement ou le langage d'un autre peuple. On
rit à Florence de la maniere dont un François prononce
le latin ou l'italien, & l'on se moque à Paris de la prononciation du Florentin. De même la
plûpart de ceux qui entendent traduire pater ejus,
le pere de lui, au lieu de son pere, sont d'abord portés
à se moquer de la traduction.
Cependant comme la maniere la plus courte
Au reste il n'y a pas lieu de craindre que cette
façon d'expliquer apprenne à mal parler françois.
1°. Plus on a l'esprit juste & net, mieux on écrit
& mieux on parle: or il n'y a rien qui soit plus
propre à donner aux jeunes gens de la netteté & de
la justesse d'esprit, que de les exercer à la traduction
littérale, parce qu'elle oblige à la précision,
à la propriété des termes, & à une certaine exactitude
qui empêche l'esprit de s'égarer à des idées
étrangeres.
2°. La traduction littérale fait sentir la différence
des deux langues. Plus le tour latin est éloigné du
tour françois, moins on doit craindre qu'on l'imite
dans le discours. Elle fait connoître le génie de la
langue latine; ensuite l'usage, mieux que le maître,
apprend le tour de la langue françoise.»
IDOLE, IDOLATRE, IDOLATRIE; (Page 8:500)
IDOLE, IDOLATRE, IDOLATRIE; idole vient
du grec
Il est utile de remarquer ici que le dictionnaire de Trévoux commence cet article par dire que tous les Payens étoient idolatres, & que les Indiens sont encore des peuples idolâtres: premierement, on n'appella personne payen avant Théodose le jeune; ce nom fut donné alors aux habitans des bourgs d'Italie, pagorum incoloe pagani, qui conserverent leur ancienne religion: secondement, l'Indoustan est mahométan, & les Mahométans sont les implacables ennemis des images & de l'idolatrie: troisiémement, on ne doit point appeller idolâtres beaucoup de peuples de l'Inde qui sont de l'ancienne religion des Perses, ni certaines côtes qui n'ont point d'idoles.
S'il y a jamais eu un gouvernement idolâtre. Il paroît que jamais il n'y a eu aucun peuple sur la terre qui ait pris le nom d'idolâtre. Ce mot est une injure que les Gentils, les Politéistes sembloient mériter; mais il est bien certain que si on avoit demandé au sénat de Rome, à l'aréopage d'Athènes, à la cour des rois de Perse, êtes - vous idolâtres? ils auroient à peine entendu cette question. Nul n'auroit répondu, nous adorons des images, des idoles. On ne trouve ce mot idolâtre, idolatrie, ni dans Homere, ni dans Hésiode, ni dans Hérodote, ni dans aucun auteur de la religion des Gentils. Il n'y a jamais eu aucun édit, aucune loi qui ordonnât qu'on adorât des idoles, qu'on les servît en dieux, qu'on les crût des dieux.
Quand les capitaines romains & carthaginois faisoient un traité, ils attestoient toutes les divinités; c'est en leur présence, disoient - ils, que nous jurons la paix: or les statues de tous ces dieux, dont le dénombrement étoit très long, n'étoit pas dans la tente des généraux; ils regardoient les dieux comme présens aux actions des hommes, comme témoins, comme juges, & ce n'étoit pas assurément le simulacre qui constituoit la divinité.
De quel oeil voyoient - ils donc les statues de leurs
fausses divinités dans les temples? du même oeil, s'il
étoit permis de s'exprimer ainsi, que nous voyons
les images des vrais objets de notre vénération. L'erreur n'étoit pas d'adorer un morceau de bois ou de
marbre, mais d'adorer une fausse divinité représentée
par ce bois & par ce marbre. La différence entre
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