ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"336"> articles particuliers Lin, Navette, Olive . Ce moyen de retirer les huiles grasses, a fait donner à l'espece, dont nous avons seulement parlé jusqu'à présent, le nom d'huiles par expression, en latin olea pressa ou expressa, & c'est - là leur dénomination spécifique & la plus ordinaire.

Il y a une autre espece d'huile grasse, caractérisée par la circonstance de se séparer des corps qui la renferment, par le moyen de l'eau bouillante, ou de la décoction de ces corps. Le cacao, le macis, la muscade, les baies de laurier, contiennent une pareille huile. Voyez ces articles particuliers. Le beurre de cacao est la plus connue de ces huiles, parce qu'elle est la plus employée en Medecine. Les huiles par expression n'abandonnent pas leurs loges, par l'action de l'eau bouillante; on n'en retire point des semences émulsives par la décoction.

Propriétés chimiques des huiles grasses. Elles sont insolubles par l'esprit - de - vin; elles contractent une espece d'union, quoique fort imparfaite, avec le vinaigre, & même avec l'eau (ce qui fait soupçonner que l'acide du vinaigre n'entre pour rien dans cette union), si on les bat long - tems ensemble. Elles rancissent facilement, si on les expose à un air chaud, & même quelques - unes, comme celle d'amandes douces, quelque précaution qu'on prenne. Voyez Rancir. Elles sont toutes plus légeres que l'eau; elles sont fixes, c'est - à - dire qu'elles ne peuvent être élevées par le feu, sans être considérablement altérées, sans passer à l'état d'huile empyreumatique. Il y a apparence que le caractere spécifique de ces huiles dépend d'une matiere de nature gommeuse ou mucilagineuse, avec laquelle est combiné le principe huileux.

Vertus médicinales, & usages diététiques des huiles grasses. Ce n'est presque que l'huile d'amandes douces qu'on emploie en Medecine pour l'usage intérieur. La bonne huile d'olives vaudroit bien pour le moins autant, & elle a, au - dessus de l'huile d'amandes douces, la faculté d'être peu sujette à rancir. Le beurre de cacao n'est pas employé pour des qualités assez génériques, pour devoir être rangé avec ces huiles par expression; & d'ailleurs, ce remede est plus magnifique qu'utile, du moins que nécessaire.

Les huiles par expression, représentées dans l'usage ordinaire par l'huile d'amandes douces, sont le souverain adoucissant, relâchant, lubréfiant, émollient, béchique, sédatif, le plus benin des purgatifs, en un mot, la suprême ressource, le grand cheval de bataille, comme on s'exprime vulgairement, de cette pratique de Medecine, appellée dans l'art, & par les gens du monde, anodine, tempérante, calmante, qui voit partout des spasmes, des éréthysmes, des incendies, &c. Cette drogue remplit quelquefois très - utilement, il est vrai, les indications d'adoucir, de relâcher, d'appaiser les douleurs des entrailles, de lâcher très - doucement le ventre; mais plus souvent encore, c'est un remede inutile, infidele, & même pernicieux.

Les huiles par expression, prises à très - haute dose sans mesure, fournissent une des ressources les plus assurées pour défendre l'estomac & les intestins contre l'action des poisons corrosifs.

L'huile d'olive est la seule huile par expression, que nous mêlons à nos alimens à titre d'assaisonnement. Voyez Olive.

L'usage extérieur des huiles grasses pures est fort rare. On emploie communément à leur place des huiles composées, dont nous parlerons à la fin de cet article. Ces huiles entrent dans la composition de plusieurs onguens, linimens, &c.

Les huiles par expression, unies à l'un & l'autre alkali fixe, forment des savons employés en Mede<cb-> cine & dans divers arts. Voyez Savon.

Huiles empyreumatiques. Le principe huileux est un des matériaux universels de la composition de tout végétal ou animal, de tout corps organisé, du tissu des Sthaliens. L'huile est aussi un des principes généraux de l'ancienne analyse, de celle qui s'exécute par la violence du feu sur tous ces corps; un des principes de Paracelse, ou plûtôt de Basile Valentin, ou d'Isaac le Hollandois, (Voyez dans l'historique du mot Chimie, les morceaux qui regardent ces auteurs); le soufre de ces Chimistes, de Willis, de Boyle, & de ceux de leurs sectateurs qui n'ont pas désigné par ce mot le phlogistique pur.

Toute huile qui ayant été réellement combinée dans un corps quelconque, en est extraite, dégagée par la violence du feu, est une huile empyreumatique. Nous avons excepté d'avance les huiles retirées par ce moyen des baumes, des résines & des bitumes. On l'appelle aussi foetide, parce que le corps à la décomposition duquel elle est dûe, a fourni en même - tems un principe salin, le plus souvent alkalivolatil, d'une odeur forte & desagréable, dont cette huile est empreinte, & auquel elle doit vraisemblablement sa mauvaise odeur. Les huiles empyreumatiques sont communément aussi noires & épaisses: elles doivent ces deux qualités, sur - tout la premiere, à une quantité considérable de matiere charbonneuse qu'elles ont entraînée avec elles. Voyez Végétale analyse & Substances animales.

Non seulement les tissus, c'est - à - dire les végétaux & les animaux entiers, ou leurs parties entieres, mais encore les huiles grasses, les graisses, tous les sucs animaux, & toutes les substances végétales solubles par l'eau, excepté les sels purs, telles que la matiere extractive, le corps muqueux, le tartre, &c. tous ces sujets, dis - je, donnent dans la distillation analytique de l'huile empyreumatique, & une huile empyreumatique chargée d'alkali - volatil, excepté celle qui provient de la distillation du lait & du corps muqueux. Voyez Lait & Muqueux.

La théorie du dégagement de l'huile empyreumatique, celle de sa composition chimique, & celle des produits & des phénomenes de son analyse, appartiennent au traité général de l'analyse des corps, dont elle est un principe si essentiel. Voyez Substances animales & végétale Analyse, surtout ce dernier article.

Les huiles empyreumatiques sont considérablement atténuées, deviennent limpides, volatiles, perdent en très - grande partie, & même absolument leur odeur étrangere & desagréable, par des rectifications répetées, qu'on exécute communément à seu nud & sans intermede: les premieres distillations demandent en effet un degré de feu assez fort, mais les huilles empyreumatiques parviennent enfin par ces opérations répetées, à un état de volatilité qui les rend capables de s'élever, du moins en grande partie, avec l'eau bouillante, & même par la chaleur du bain - marie. Dans cet état, elles ont toutes les propriétés chimiques des huiles essentielles. La rectification des huilles empyreumatiques est considérablement hâtée par l'addition de la chaux - vive ou de l'alkali - fixe; mais ces intermedes, sur - tout le premier, en détruisent une partie très - considérable. Voyez Chaux (Chymie.)

Usages médicinaux des huiles empyreumatiques; huiles animale de Dippelius, huile de cade; huile de tartre; huile des philosophes; huile de papier. Ce sontà peu près toutes les huiles empyreumatiques employées, ou du moins le plus employées en Medecine; la premiere, destinée à l'usage intérieur, est une huile empyreumatique animale, communément celle de corne de cerf, rectifiée par quarante ou cinquante distillations successives, & vantée comme un [p. 337] spécifique éprouvé contre l'épilepsie. Si cette vertu est confirmée par des observations décisives, ces observations ne sont pas encore publiques. Les quatre autres s'emploient extérieurement, quoiqu'assez rarement, à titre de très - puissant résolutif. L'huile de cade est retirée de l'oxycedre, ou grand genevrier. Voyez Genevrier, (Chimie & Mat. méd.) L'huile des philosophes, ou de briques, de l'huile d'olive. Voyez Olive.

Rapport (habitus) des huiles en général avec quelques autres substances.

L'huile est immiscible à l'eau, aux sels neutres & aux acides végétaux & animaux vulgaires, tels que le tartre, le vinaigre & l'esprit de fourmi; aux sucs aqueux végétaux, à la gomme, au mucilage, au corps doux (excepté qu'il ne soit dans un état éminemment concret, comme le sucre), à la lymphe & à la gelée animale.

L'huile est miscible au soufre, aux baumes, aux résines, aux graisses, aux bitumes, au phosphore de Kunckel; elle s'unit au sucre & au jaune d'oeuf, & devient miscible aux liqueurs aqueuses par l'intermede de ces substances; elle dissout le cuivre & le plomb, principalement les chaux de ces métaux, & sur - tout celles de plomb; elle se combine avec les sels alkalis sous la forme de savon. Voyez Savon. Les acides minéraux agissent puissamment sur elle, principalement le vitriolique & le nitreux; car l'acide du sel marin les attaque à peine, du moins dans les mélanges ordinaires. L'acide vitriolique, médiocrement concentré & aidé d'une foible chaleur, se combine avec l'huile la plus pure, c'est - à - dire l'huile essentielle, ou l'huile empyreumatique rectifiée. Ce mélange produit un corps concret de nature résineuse, & d'un rouge brun plus ou moins foncé. L'acide vitriolique concentré éprouve même à froid avec la même huile une violente effervescence, accompagnée d'épaisses fumées & de chaleur considérable, & se combine avec en un corps noirâtre, résineux, cassant. L'effervescence est plus prompte & plus violente, si on a exposé le mélange à l'action du feu. Voyez Résine artificielle à l'article Résine. L'acide nitreux produit rvec l'huile dans les mêmes circonstances des effets semblables. Le phénomene le plus remarquable de l'action mutuelle des acides vitrioliques ou nitreux, & des huiles, c'est l'inflammation spontanée, ou excitée sans le concours d'aucune chaleur étrangere. Ce phénomene singulier mérite d'être considéré avec quelque détail.

Inflammation des huiles. Les expériences successives de Glauber, de Beccher, de Borrichius, de Boyle, de Tournefort, de Homberg, de Rouviere, de François Hoffman, de Geoffroy le cadet, & enfin de M. Rouelle, nous ont appris que toutes les huiles sans exception, aussi bien qùe les baumes liquides, étoient inflammables lorsqu'on les mêloit à froid au double de leur poids d'un acide, composé de parties égales d'esprit de nitre bien concentré, & d'huile de vitriol.

Ces proportions varient dans les expériences de ces auteurs. Ils augmentent la dose de l'acide composé, & la proportion de l'acide nitreux dans l'acide composé à mesure que l'huile, mise en expérience, est plus difficile à enflammer. La proportion que nous venons d'assigner est pourtant assez géneralement efficace; car les huiles d'une médiocre inflammabilité prennent feu mêlées à partie égale d'acide nitreux, & à une demi - partie d'acide vitriolique.

Cet acide composé est l'instrument général de l'inflammation de toutes les huiles, & des substances éminemment huileuses, telles que les baumes liquides; mais il n'est nécessaire que pour produire ce phénomene dans les plus rebelles de ces substances. Beccher a dit (Physica subterranea, sect. V, cap. iij, n°. 106.) que l'huile de vitriol & l'esprit de vin, l'un & l'autre très - rectifiés, prenoient feu dès l'instant qu'ils étoient mêlés; & même que si on éteignoit ce feu en bouchant le vaisseau qui contenoit le mélange, il se rallumoit dès qu'on le débouchoit. Homberg assure avoir enflammé par l'huile de vitriol déphlegmée autant qu'il est possible, l'huile de térébenthine, épaisse comme du syrop, & de couleur rousse, qui passe la derniere dans la distillation. Mém. de l'Acad. royale des Scien. 1701. Borrichius rapporte, Acta medica & philosophica Hafnienasium ann. 1761. que l'esprit de nitre récent enflamme l'huile de térébenthine nouvellement tirée.

L'inflammation de l'esprit - de - vin par l'huile de vitriol est aujour d'hui généralement contestée; & beaucoup de chimistes doutent de celle de l'huile épaisse de térébeuthine par l'acide du vitriol seul.

Tous les chimistes qui avoient répété le procédé de Borrichius, l'avoient fait sans succès, lorsqu'enfin M. Rouelle publia en 1747, dans les Mémoires de l'académie des Sciences, des expériences, par lesquelles non - seulement il prouve la réalité du phénomene annoncé par Borrichius, mais même fixe le succès de cette expérience par un manuel fondé sur des observations très - ingénieuses, & sur la meilleure théorie chimique. Ce manuel consiste à appliquer à un charbon rare, spongieux, sec, embrasé, qui s'éleve au sein du mélange pendant la plus vive effervescence, quelques gouttes d'acide nitreux. Cette application se fait quelquefois par hasard, & presque toûjours dans les huiles les plus propres à s'enflammer; & alors l'inflammation se fait d'elle - même: c'est pour cela que les arbitres, qui n'avoient découvert ni cette cause ni le moyen de l'appliquer a volonté, ont réussi assez constamment sur les huiles de cette derniere classe.

Nous avons déja parlé plusieurs fois d'une différence observée entre les différentes huiles, relativement à des degrés d'inflammabilité. Les éminemment inflammables sont les huiles essentielles pesantes, denses, des substances végétales aromatiques des Indes; certaines huiles empyreumatiques, & les baumes liquides viennent ensuite; les huiles essentielles très - subtiles, telles que l'huile de térébenthine, de cédra, de lavande, sont plus difficiles à s'enflammer que toutes les précédentes; enfin, les plus difficiles absolument, les plus difficiles de toutes les huiles, sont les huiles par expression; & les éminemment difficiles dans cette classe, sont les plus douces ou les plus mucilagineuses, telles que celles d'amandes douces, d'olive, de fêne & de navette.

Ce sont ces dernieres huiles seulement que M. Rouelle n'a pu enflammer par l'acide nitreux seul, lors même qu'il l'a porté jusqu'à un degré de concentration auquel il est vraisemblable qu'on ne l'avoit pas porté avant lui. Il a été obligé de concentrer encore davantage l'acide nitreux qu'il a employé, en le mêlant, à parties égales de bon acide vitriolique; car il est connu en Chimie que l'acide vitriolique a plus de rapport avec l'eau que l'acide nitreux: le premier doit donc l'enlever au dernier, lorsqu'on les applique intimement l'un à l'autre en les mêlant. Voilà du moins la théorie qu'adopte M. Rouelle. Il prétend que l'acide vitriolique ne contribue d'ailleurs en rien à la production de la flamme; d'où il est aisé de conclure qu'il regarde comme impossible l'inflammation des huiles par l'acide vitriolique seul. Pour moi je doute peu de la vérité du phénomene rapporté par Homberg, & je n'apperçois dans la bonne théorie, dans l'ensemble des faits chimiques fondamentaux, rien qui puisse justifier le doute qu'on pourroit concevoir sur le fait,

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