ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"334"> que dans ces petits réservoirs; il ne faut opérer aucune divulsion chimique pour l'en retirer; les opérations par lesquelles on l'obtient, sont tout aussi méchaniques, ou, si l'on veut, tout aussi physiques que l'action de vuider une bouteille; elles ne font point partie de l'analyse végétale. Voyez Distillation & Végétale analyse. Les baumes liquides fournissent aussi une pareille huile: quelques insectes, comme la fourmi, en contiennnent aussi.

Cette huile est appellée encore éthérée & aromatique. Le principe odorant dont elle est pénétrée, paroît étrange à sa composition: on peut retirer ce principe des végétaux chargés d'huile essentielle, pur, seul, au moins étendu seulement dans le principe aqueux, libre, volatil, de ces végétaux, & sans qu'un atome d'huile soit entrainé avec lui, en un mot, sous la forme d'eau essentielle, voyez l'art. Eaux distillées. Il paroît aussi que c'est à ce principe que les huiles essentielles doivent leur volatilité; car des qu'elles en ont été dépouillées, dès qu'un végétal a donné son eau essentielle, l'huile restée dans ses réservoirs a perdu sa volatilité, un végétal épuisé de sa partie aromatique par une opération qui n'a pas entraîné en même tems son huile essentielle, ne donne plus cette huile par la même opération qui l'enleve toute entiere, lorsqu'elle est chargée du principe aromatique.

La méthode la plus usitée & la plus générale, qu'on emploie pour obtenir les huiles essentielles, est précisément celle qui est décrite à l'art. Eaux distillées, sous le nom de second appareil ou second procédé; savoir, la distillation de ces matieres avec addition d'eau commune, ou mieux encore d'eau distillée de la même plante, toutes les fois qu'on en a; & au moins n'en manque - t - on point pour les opérations qui suivent la premiere, quand on fait plusieurs distillations de suite. Cette opération exécutée sur les plantes aromatiques, donne constamment ces deux produits, l'eau distillée, & l'huile essentielle. La seule manoeuvre particuliere qu'elle exige donc, relativement à ce dernier produit, c'est celle par laquelle on la sépare de l'eau: la voici. Si on reçoit l'eau mêlée de gouttes d'huile dans les matras ordinaires, on laisse rassembler ces gouttes par le repos, ce qui se fait en fort peu de tems. Si l'huile est plus légere que l'eau, on remplit le matras au point qu'elle s'éleve jusqu'au plus haut de son cou; alors on verse prestement toute l'huile, & une bonne partie de l'eau contenue sous elle, dans un entonnoir de verre à queue fort étroite, & dont on bouche la petite ouverture inférieure avec le doigt; on attend que l'huile se soit ramassée au - dessus de l'eau, alors on débouche une partie de l'ouverture inférieure, en retirant tout doucement le doigt. & on laisse échapper l'eau, par un petit filet, jusqu'à la derniere goutte; on referme l'ouverture dès que l'huile est parvenue sur le doigt, & on la laisse tomber ensuite dans le vaisseau où on veut la serrer. Si l'huile est plus pesante que l'eau, on sépare par inclination la plus grande partie de l'eau, & on verse l'huile, avec ce qui reste d'eau, dans l'entonnoir, &c. Il y a un récipient particulier, destiné à faciliter la séparation des huiles essentielles plus légeres que l'eau: c'est un matras, qui porte en - dehors une espece de chantepleure, ou de tuvau recourbé, qui part du fond du vaisseau, & dont la courbure s'éleve jusqu'à un pouce près de l'embouchure ou goulot du matras. Voyez les Planches de Chimie. Il est clair que lorsque la liqueur reçue dans un pareil vaisseau, s'est élevée dans le cou jusqu'au - dessus du niveau de la courbure du tuyau, la liqueur contenue dans ce vaisseau doit se répandre par le tuyau, & que c'est la couche inférieure de cette liqueur qui doit se vuider la pre<cb-> miere; ainsi, la liqueur provenue de la distillation, tendant continuellement à élever la liqueur du matras au - dessus de ce niveau, la partie aqueuse de cette liqueur, qui est la dominante, & qui gagne le fond du vaisseau, est vuidée à mesure que le produit de la distillation y est reçu; & l'huile, qui surnage, se ramasse dans la partie supérieure du vaisseau, en gagne peu - à - peu la partie moyenne, & peut parvenir enfin à le remplir presque tout entier. Quand l'opération, ou le nombre d'opérations qu'on se proposoit d'exécuter de suite est fini, on vuide par le même tuyau l'eau qui peut être restée dans le fond du matras, en l'inclinant doucement. Il est évident qu'un pareil instrument ne peut être employé à la séparation des huiles plus pesantes que l'eau, mais qu'on peut, pour la separation de celles là, en composer un sur le même principe, en renversant la disposition du tuyau, la faisant partir du haut du matras, & portant le bec de l'alembic, ou du serpentin, jusqu'au milieu du matras.

L'eau employée dans la distillation des huiles essentielles, ne paroît servir qu'à ramollir les parois des vésicules qui la contiennent, à les disposer ainsi à être facilement rompues par l'huile rarefiée, tendant à l'état d'expansion vaporeuse ou de volatilité, & à borner, à déterminer, d'une maniere invariable, le degré de feu propre à les élever aussi inaltérées qu'il est possible; peut - être aussi que la vapeur de l'eau qui les accompagne favorise leur volatilité, soit en soutenant leur expansion, leur état de vapeur, par sa chaleur, soit en les entraînant dans son propre tourbillon. Il seroit démontré que l'eau ne concourt point à la distillation des huiles essentielles à ce dernier titre, si une huile essentielle, déja délivrée de ses petites prisons, s'élevoit presqu'entierement dans un appareil où elle seroit renfermée seule dans la cucurbite, & où on lui appliqueroit le même degré de chaleur qu'elle éprouve étant répandue dans de l'eau bouillante. Ce dégré est supérieur à la chaleur du bain - marie. Voyez l'article Feu.)

Les huiles essentielles de citron, de cédra, & de tous les fruits de cette classe, qu'on nous apporte de Toscane & de la côte de Gènes, sous le nom d'essences, sont retirées sans le secours du feu. Les écorces de ces fruits contiennent beaucoup d'huile, & elle est ramassée, en masses assez considérables, dans des vessies très - minces, pour qu'elle en découle abondamment, en perçant ou rompant ces vessies. Il n'est personne qui n'ait pressé entre ses doigts un zeste d'orange ou de citron; la liqueur qu'on en exprime est de l'huile essentielle. Les Toscans & les Génois expriment ces écorces contre des plateaux de verre, appliqués sur de la glace, ou bien roulent ces fruits sur l'embouchure hérissée de pointes d'un entonnoir, placé sur un vaisseau, où toutes les gouttes sorties des petites blessures infiniment multipliées, vont se ramasser. On retire encore des huiles essentielles de quelques substances aromatiques, des cloux de girofle, par exemple, en les distillant per descensum; mais cette méthode est imparfaite. Voyez Girofle & Descensum.

Propriétés chimiques des huiles essentielles. Elles sont solubles par l'esprit - de - vin, & d'autant plus qu'elles sont plus dures. Elles s'épaississent en vieillissant, & prennent la consistence de baume, & même de résine. Voyez Baume & Résine. On les préserve, autant qu'il est possible, de cet accident, en les gardant dans des vaisseaux exactement fermés, & mieux encore sous l'eau, & dans des lieux frais. Elles peuvent être ressuscitées, du moins en partie, c'est - à - dire rétablies en état d'huile fluide, par la distillation avec l'eau; elles ont perdu cependant. en s'épaississant, une partie de leur odeur, qui ne [p. 335] se rappelle point par la distillation, ou à la place de laquelle il ne s'en développe point de nouvelle qui la répare. Les huiles essentielles, retirées des divers végétaux, varient considérablement entr'elles, soit par la consistance, soit par la disposition plus ou moins grande à s'épaissir, soit par la gravité spécifique, soit par la couleur, &c. Une différence très - générale, est celle qui distingue les huiles qui sont naturellement concretes, comme le camphie, ou celles qui le deviennent, qui se gèlent à un très léger degré de froid, comme celle d'anis, &c. de celles qui sont très - fluides, & constamment fluides, comme celle de térébenthine, de citron, &c. ces caracteres particuliers, quand ils sont remarquables, sont exposés aux articles particuliers. Une distinction générale, assez singuliere encore, c'est celle qui divise les huiles essentielles en plus légeres que l'eau, & en plus pesantes que ce liquide. Celles qui sont fournies par les plantes de notre pays, de ces climats tempérés, sont toutes, sans exception, plus légeres que l'eau; & celles qui sont fournies par les végétaux des pays chauds, par tous les bois, écorces, fruits, racines exotiques, par les épiceries, les aromates des Indes, soit occidentales, soit orientales: en un mot, de tous les climats très - chauds, sont plus pesantes que l'eau, à l'exception du camphre. Il y a sur ce point quelques autres variétés, peut - être accidentelles, qui ne sont pas encore bien déterminées.

Toute l'huile qu'on retire des baumes, des résines & des bitumes, par la violence du feu, est très analogue aux huiles essentielles. Voyez Résine & Térébenthine.

Les parties aromatiques des plantes que nous avons exceptées plus haut, de l'observation générale qui attribue de l'huile essentielle à toutes ces substances, sont les fleurs de jasmin, de tubéreuse, de muguet, de jacinthe, de narcisse, & de lys, qui ont toutes entr'elles une analogie sensible. L'essence de jasmin, qu'on trouve communément chez les Parfumeurs, est une huile par expression, de l'excellente huile de ben, imprégnée du parfum du jasmin, par une manoeuvre fort simple. Voyez Jasmin.

Usages médicinaux, thérapeutiques & diététiques des huiles essentielles. Les huiles essentielles, récentes, subtiles, très - aromatiques, ont un goût amer, acre, vif, brûlant, qui annonce les vertus suivantes, qu'elles possedent en effet: elles sont, dans l'usage intérieur, cordiales, toniques, échauffantes, diurétiques, sudorifiques, stomachiques, aphrodisiaques; utiles pour corriger la mauvaise odeur de la bouche, gravem spiritum. On doit les donner toujours sous la forme d'eleosaccharum (Voyez Eleosaccharum), soit pour les rendre miscibles aux humeurs digestives aqueuses, soit pour châtrer leur trop grande activite, par laquelle elles pourroient irriter & même enflammer l'estomac & les intestins. Malgré ce correctif, on ne doit les donner encore qu'aux sujets d'une constitution lâche, peu mobile, peu inflammable. Leur usage externe est plus général; ces huiles, sur - tout celle qu'on retire de la térébenthine, sous le nom d'esprit, sont éminemment résolutives, antiseptiques, brûlantes, cathoeretica; ces vertus les rendent très - efficaces, pour résoudre les tumeurs molles, indolentes, lymphatiques, & pour dissiper les douleurs des membres. La dissolution de ces huiles dans l'esprit de vin, le baume spiritueux de Fioravanti, par exemple, qui n'est autre chose qu'une pareille dissolution, remplit les mêmes vûes d'une maniere encore plus assurée. Les huiles essentielles, vives, sont employées, presque à titre de spécifique, dans les plaies des membranes, des nerfs, des tendons; c'est sur - tout dans ces cas qu'on emploie communément l'huile très - subtile, ou esprit de térébenthine. On emploie encore cette huile dans le traitement de la carie; un brin de coton, imbibé de quelques gouttes d'une huile essentielle très - aromatique, de celle de girofle, par exemple, & introduit dans le creux d'une dent cariée, suspend puissamment la douleur qui accompagne quelquefois la carie des dents.

Une huile essentielle, unie chimiquement au soufre, forme avec lui un composé, connu sous le nom de baume de soufre. Ce composé est un remede, qui doit principalement ses qualités médicamenteuses au soufre. Voyez Soufre.

Une huile essentielle, combinée avec l'alkali fixe ordinaire, forme une espece de savon, appellé par les gens de l'art savon de Starkey. Voyez Savon.

Les esprits volatils, aromatiques, huileux, de Sylvius, doivent leur qualité d'huileux & d'aromatique à des huiles essentielles. Voyez Esprit Volatil, Aromatique, Huileux .

Les huiles essentielles fournissent aux Apoticaires une des matieres avec lesquelles ils aromatisent plusieurs préparations pharmaceutiques, comme potions, syrops, gelées, juleps, emplâtres même. Il faut toûjours les employer, sous la forme d'éleosaccharum, dans les liqueurs aqueuses destinées à l'usage intérieur.

C'est encore à des huiles essentielles que plusieurs liqueurs spiritueuses, destinées à l'usage de nos tables, doivent leur parfum. Celles qui joignent à la saveur connue de l'esprit de vin, un goût vif, brûlant, passager, momentané, telles que la bonne eau de cannelle, & l'anis rouge de Bologne, doivent ce piquant à un peu d'huile essentielle: la même saveur est dûe à la même cause dans les diabolini d'Italie.

On parfume la limonade avec l'huile essentielle de l'écorce des citrons même qu'on emploie, dont on forme sur - le - champ un éleosaccharum. Voyez Eleosaccharum.

Huiles grasses. Celles - ci sont encore libres, nues, isolées, ramassées à part dans des petits réservoirs, & elles appartiennent proprement au regne végétal. Les graisses animales ont à la vérité la plus grande analogie avec ces substances, mais elles ne sont pas, dans le langage de l'art, comprises sous la même dénomination. Les huiles grasses sont répandues dans toute la substance des sujets qui les contiennent, au lieu que les cellules des huiles essentielles ne sont placées qu'à la surface, dans l'enveloppe ou membrane extérieure des végétaux pourvus de cette substance.

Les semences appellées émulsives (Voyez Semences émulsives), c'est - à - dire celles qui étant pilées avec de l'eau donnent une liqueur laiteuse, ou une émulsion (Voyez Emulsion), contiennent de l'huile grasse. La semence, proprement dite, de tous les fruits à noyau, ou à coque, de notre pays, tels que celle de noix, d'amande, de pignon, de noisette, de pêche, d'olive, &c. celle de tous les fruits à pepin, c'est - à - dire tous les pepins; les semences appellées froides, les semences de lin, de toutes les especes de chou, de rave, de navet, de pavot, &c. contiennent une pareille huile. La chair ou pulpe qui recouvre le noyau de l'olive, en contient beaucoup aussi; c'est une substance jusqu'à présent unique à cet égard. Le jaune d'oeuf fournit aussi une huile très - analogue à celles - ci.

On retire l'huile grasse de tous ces sujets en les écrasant, les pilant, les réduisant en pâte, & en exprimant cette pâte, par le moyen d'une presse, ou d'un fort pressoir, pour l'opération en grand. Cette manoeuvre est variée, sur les divers sujets, par quelques circonstances de manuel. Voyez les

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