ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"140"> donna le nom de Pendérachi, lequel même, suivant la prononciation, paroît un nom corrompu d'Héraclée du Pont. Théodore Lascaris l'enleva à David Commene empereur de Trébizonde. Les Génois se saisirent de Pendérachi dans leurs conquêtes d'orient, & la garderent jusqu'à ce que Mahomet II. les en chassa. Depuis elle est restée aux Turcs; ils l'appellent Eregri: un seul cadi y exerce la justice. Un waivode y exige la taille & la capitation des Grecs. Les Turcs y payent seulement les droits du prince, trop heureux de fumer tranquillement parmi ces belles masures, sans s'embarrasser de ce qui s'y est passé autrefois.

L'ancienne Héraclée, ou, si l'on aime mieux, Eregri, est située près de la mer à vingt lieues S. O. de Constantinople, 22 N. O. de Gallipoli, & 26 S. E. de Trajanopoli. Long. 45. 23. latit. 40. 57. (D. J.)

HÉRACLÉES (Page 8:140)

HÉRACLÉES, s. f. pl. (Antiq. greq.) fêtes qu'on célébroit en plusieurs lieux de la Grece, comme sur le mont OEta, à Athènes & ailleurs, en l'honneur d'Hercule que les Grecs nommoient Héraclès, nom par lequel ils ont voulu signifier la gloire dont il s'est couvert en exécutant les travaux que Junon lui fit entreprendre; car ce mot est composé de *H(\RA, Junon, & de KLE/OS2, gloire. Vous trouverez la description des fêtes nommées Héraclées dans Potter, Archoeol. Groec. liv. II. ch. xx. t. I. (D. J.)

HÉRACLÉONITES (Page 8:140)

HÉRACLÉONITES, s. m. pl. (Théolog.) hérétiques anciens de la secte des Gnostiques & appellés ainsi de leur chef Héracléon. Voyez Gnostique.

S. Epiphane, hoeres. 36. s'étend beaucoup sur cet article. Il représente Héracléon comme un homme qui avoit réformé la théologie des Gnostiques en plusieurs articles, mais qui dans le fond en avoit conservé les principaux. Il raffinoit sur les interprétations superflues des textes de l'Ecriture, & même il altéroit les paroles de quelques - uns pour les concilier avec ses notions particulieres. Il soutenoit, par exemple, que par ces paroles de S. Jean, toutes choses furent faites par lui, on ne devoit point entendre l'univers & tout ce qu'il contient: il prétendoit que l'univers qu'il appelloit AEon, n'avoit point été fait par le Verbe; mais qu'il avoit été fait avant le Verbe. Et pour appuyer cette construction, il ajoûtoit à ces paroles de S. Jean, sans lui rien ne fut fait, ces autres paroles, des choses qui sont dans le monde.

Il distinguoit deux sortes de mondes, l'un divin & l'autre corruptible; & il restraignoit le mot panta, toutes choses, au dernier monde. Il soûtenoit aussi que le Verbe n'avoit pas créé le monde immédiatement & par lui - même, mais qu'il avoit été seulement cause que le Demiurge l'avoit formé.

Les Héracléonites, à l'exemple de leur maître, détruisoient toute l'ancienne prophétie, & disoient que S. Jean étoit véritablement la voix qui avoit annoncé le Sauveur; mais que les prophéties n'étoient que des sons en l'air qui ne signifioient rien. Ils se croyoient supérieurs aux apôtres dans la connoissance de la religion; & sur ce fondement, ils avançoient d'étranges paradoxes, sous prétexte d'expliquer l'Ecriture d'une maniere sublime & relevée. Ils aimoient les interprétations mystiques, au point qu'Origène, qui étoit lui - même un grand mystique, fut obligé de reprocher à Héracleon qu'il abusoit de ces sortes d'explications. Voyez Prophétie, Allégorie, &c. Voyez le Dictionn. de Trév. (G)

HÉRACLIDES (Page 8:140)

HÉRACLIDES, s. m. pl. (Hist. anc.) ce sont les descendans d'Hercule, qui régnerent dans le Péloponnèse, après plusieurs tentatives inutiles depuis leur expulsion par Eurysthée.

Les uns, avec le P. Pétau, ne parlent que de deux tentatives des Héraclides pour rentrer dans leurs an<cb-> ciennes possessions: d'autres, avec Scaliger, en distinguent trois: d'autres en reconnoissent un plus grand nombre. Mais comme ils ne sont point d'accord ensemble sur les époques de ces tentatives, nous allons tâcher de les fixer.

L'an 1323 avant J. C. & quarante - un ans avant la prise de Troie, les Héraclides chassés de la Grece par Eurysthée, l'implacable ennemi d'Hercule & de toute sa race, se réfugierent à Athènes où Thésée les prit sous sa protection & marcha contre ce prince. Hyllus fils d'Hercule & de Déjanire, qui étoit à la tête de l'armée, vainquit Eurysthée, le tua, & passa dans le Péloponnèse avec ses troupes. Mais il fut obligé de se retirer promptement, à cause de la contagion qui desoloit le pays: alors Atrée fils de Pélops régnoit à Argos & à Mycènes.

Hyllus étant revenu dans le Péloponnèse, la troisieme année après sa retraite, fut tué en combat singulier, par Echémus roi de Tégée, & les Héraclides se retirerent.

L'an 1257 avant J. C. & trente - cinq ans après la prise de Troie, ils firent une nouvelle entreprise sur le Péloponnèse sous la banniere de Cléodaeus fils d'Hyllus. Cette entreprise ne réussit pas mieux que les deux précédentes; Cléodaeus fut repoussé par Oreste, établi sur le trône de son pere Agamemnon.

L'an 1222 avant J. C. & soixante ans après la prise de Troie, les descendans d'Hercule formerent sans se décourager une quatrieme tentative sur le Péloponnèse, ayant à leur tête Aristomachus fils de Cléodaeus; mais ils échouerent encore, & leur chef périt au passage de l'isthme.

Enfin 1202 ans avant J. C. & quatre - vingts ans après la prise de Troie, les Héraclides, sous la conduite des trois fils d'Aristomachus, firent une cinquieme entreprise, dans laquelle ils eurent la fortune aussi favorable qu'ils l'avoient jusqu'alors éprouvé contraire.

Ce ne fut néanmoins qu'au bout de plusieurs années qu'ils parvinrent à déposséder de divers royaumes les descendans de Pélops; ils s'emparerent premierement de Lacédémone & y formerent deux branches de rois régnans conjointement. Ensuite ils se rendirent maîtres d'Argos, de Mycènes, de l'Elide & de Corinthe.

Leur droit sur les royaumes de Mycènes & d'Argos étoit incontestable. Amphytrion, pere d'Hercule & petit - fils de Persée roi de ces deux pays, ayant eu le malheur de tuer par mégarde Electrion son oncle & pere de sa femme Alcmène, fut obligé de s'enfuir à Thèbes. Sthénélus, maître des états de son neveu fugitif, les transmit à son fils Eurysthée: celui - ci n'eut point d'enfans & institua pour héritier son oncle maternel Atrée fils de Pélops & pere d'Agamemnon. C'est de cette maniere que la couronne étoit passée aux Pélopides, qui donnerent leur nom au Péloponnèse, appellé auparavant Apie.

La révolution produite par le succès des Héraclides, changea presque toute la face de la Grece. Jusques - là, dit M. Tourreil, les habitans du Péloponnèse se divisoient proprement en Achéens & en Ioniens; les premiers possédoient les terres que les Héraclides assignerent aux Doriens & aux autres peuples qui les avoient accompagnés; les derniers habitoient la partie du Péloponnèse nommée depuis l'Achaïe; ceux des Achéens qui descendoient d'AEolus, & que l'on chassa de Lacédémone, se retirerent d'abord en Thrace, & allerent ensuite s'établir dans le canton de l'Asie mineure qu'ils appellerent AEolide, où ils fonderent Smyrne & onze autres colonies.

Les Achéens de Mycènes & d'Argos étant contraints d'abandonner leur pays, s'emparerent de celui des Ioniens. Ceux - ci, après s'être réfugiés à [p. 141] Athènes, vinrent au bout de quelques années occuper cette côte de l'Asie mineure, qui prit d'eux le nom d'Ionie. Ils bâtirent avec le tems Ephèse, Clazomène, Samos & plusieurs autres villes.

Le retour des Héraclides est le commencement de l'histoire de Grece, dont elle fait une des principales époques; & ce qui précede leur rétablissement doit être regardé comme les tems fabuleux que les Poëtes ont embelli. (D. J.)

HERACLION, ou PIERRE D'HÉRACLÉE (Page 8:141)

HERACLION, ou PIERRE D'HÉRACLÉE, (Hist. nat.) nom donné par les anciens à la pierre de touche & quelquefois à l'aimant. Il s'en trouvoit beaucoup près de la ville d'Héraclée en Lydie. Voy. Lydius Lapis.

HÉRACLITISME (Page 8:141)

* HÉRACLITISME, ou Philosophie d'Héraclite, (Hist. de la Philos.) Héraclite naquit à Ephèse; il connut le bonheur, puisqu'il aima la vie retirée; dès son enfance il donna des marques d'une pénétration singuliere; il sentit la nécessité de s'étudier lui - même, de revenir sur les notions qu'on lui avoit inspirées ou qu'il avoit fortuitement acquises, & il ne tarda pas à s'en avouer la vanité.

Ce premier pas lui fut commun avec la plûpart de ceux qui se sont distingués dans la recherche de la vérité; & il suppose plus de courage qu'on ne pense.

L'homme indolent, foible & distrait aime mieux demeurer tel que la nature, l'éducation & les circonstances diverses l'ont fait, & flotter incertain pendant toute sa vie, que d'en employer quelques instans à se familiariser avec des principes qui le fixeroient. Aussi le voit - on mécontent au milieu des avantages les plus précieux, parce qu'il a négligé d'apprendre l'art d'en jouir. Arrivé au moment d'un repos qu'il a poursuivi avec l'opiniâtreté la plus continue & le travail le plus assidu, un germe de tourment qu'il portoit en lui - même secrettement, s'y développe peu à peu & flétrit entre ses mains le bonheur.

Héraclite convaincu de cette vérité, se rendit dans l'école de Xénophane & suivit les leçons d'Hippase qui enseignoit alors la philosophie de Pythagore dépouillée des voiles dont elle étoit enveloppée. Voyez Pythagoricienne (Philosophie).

Après avoir écouté les hommes les plus célebres de son tems, il s'éloigna de la société, & il alla dans la solitude s'approprier par la méditation les connoissances qu'il en avoit reçûes.

De retour dans sa patrie, on lui conféra la premiere magistrature; mais il se dégoûta bientôt d'une autorité qu'il exerçoit sans fruit. Un jour il se retira aux environs du temple de Diane, & se mit à jouer aux osselets avec les enfans qui s'y rassembloient. Quelques Ephésiens l'ayant apperçu, trouverent mauvais qu'un personnage aussi grave s'occupât d'une maniere si peu conforme à son caractere, & le lui témoignerent. O Ephésiens, leur dit - il, ne vaut - il pas mieux s'amuser avec ces innocens, que de gouverner des hommes corrompus? Il étoit irrité contre ses compatriotes qui venoient d'exiler Hermodore, homme sage & son ami; & il ne manquoit aucune occasion de leur reprocher cette injustice.

Né mélancolique, porté à la retraite, ennemi du tumulte & des embarras, il revint des affaires publiques à l'étude de la Philosophie. Darius desira de l'avoir à sa cour: mais l'ame élevée du philosophe rejetta avec dédain les promesses du monarque. Il aima mieux s'occuper de la vérité, jouir de lui - même, habiter le creux d'une roche & vivre de légumes. Les Athéniens auprès desquels il avoit la plus haute considération, ne purent l'arracher à ce genre de vie dont l'austérité lui devint funeste. Il fut attaqué d'hydropisie; sa mauvaise santé le ramena dans Ephèse où il travailla lui - même à sa guérison. Per<cb-> suadé qu'une transpiration violente dissiperoit le volume d'eau dont son corps étoit distendu, il se renferma dans une étable où il se fit couvrir de fumier: ce remede ne lui réussit pas; il mourut le second jour de cette espece de bain, âgé de soixante ans.

La méchanceté des hommes l'affligeoit, mais ne l'irritoit pas. Il voyoit combien le vice les rendoit malheureux, & l'on a dit qu'il en versoit des larmes. Cette espece de commisération est d'une ame indulgente & sensible. Et comment ne le seroit - on pas, quand on sçait combien l'usage de la liberté est affoibli dans celui qu'une violente passion entraîne ou qu'un grand intérêt sollicite?

Il avoit écrit de la matiere, de l'univers, de la république & de la Théologie; il ne nous a passé que quelques fragmens de ces différens traités. Il n'ambitionnoit pas les applaudissemens du vulgaire; & il croyoit avoir parlé assez clairement, lorsqu'il s'étoit mis à la portée d'un petit nombre de lecteurs instruits & pénétrans. Les autres l'appelloient le ténébreux, SKOTEINOS2, & il s'en soucioit peu.

Il déposa ses ouvrages dans le temple de Diane. Comme ses opinions sur la nature des dieux n'étoient pas conformes à celles du peuple, & qu'il craignoit la persécution des prêtres, il avoit eu dirai - je la prudence ou la foiblesse de se couvrir d'un nuage d'expressions obscures & figurées. Il n'est pas étonnant qu'il ait été négligé des Grammairiens & oublié des Philosophes mêmes pendant un assez long intervalle de tems: ils ne l'entendoient pas. Ce fut un Cratès qui publia le premier les ouvrages de notre philosophe.

Héraclite florissoit dans la soixante - neuvieme olympiade. Voici les principes fondamentaux de sa philosophie, autant qu'il nous est possible d'en juger d'après ce que Sextus Empyricus & d'autres auteurs nous en ont transmis.

Logique d'Héraclite. Les sens sont des juges trompeurs: ce n'est point à leur décision qu'il faut s'en rapporter, mais à celle de la raison.

Quand je parle de la raison, j'entens cette raison universelle, commune & divine, répandue dans tout ce qui nous environne; elle est en nous, nous sommes en elle, & nous la respirons.

C'est la respiration qui nous lie pendant le sommeil avec la raison nniverselle, commune & divine que nous recevons dans la veille par l'entremise des sens qui lui sont ouverts comme autant de portes ou de canaux: elle suit ces portes ou canaux, & nous en sommes pénétrés.

C'est par la cessation ou la continuité de cette influence qu'Héraclite expliquoit la réminiscence & l'oubli.

Il disoit: ce qui naît d'un homme seul n'obtient & ne mérite aucune croyance, puisqu'il ne peut être l'objet de la raison universelle, commune & divine, le seul criterium que nous ayons de la vérité.

D'où l'on voit qu'Héraclite admettoit l'ame du monde, mais sans y attacher l'idée de spiritualité.

Le mépris assez général qu'il faisoit des hommes prouve assez qu'il ne les croyoit pas également partagés du principe raisonnable, commun, universel & divin.

Physique d'Héraclite. Le petit nombre d'axiomes auxquels on peut la réduire, ne nous en donne pas une haute opinion. C'est un enchaînement de visions assez singulieres.

Il ne se fait rien de rien, disoit - il.

Le feu est le principe de tout: c'est ce qui se remarque d'abord dans les êtres.

L'ame est une particule ignée.

Chaque particule ignée est simple, éternelle, inaltérable & indivisible.

Le mouvement est essentiel à la collection des

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