ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"1001"> les tiges sont ordinairement grosses comme le doigt, dures, ligneuses, compactes, pesantes, de couleur rougeâtre en - dehors, blanche - jaunâtre en - dedans. Il pousse beaucoup de rameaux ligneux, plians, entrelacés souvent les uns dans les autres, & couverts d'une écorce verte.

Ses feuilles sont opposées deux - à - deux, oblongues, épaisses, dures, assez semblables, mais un peu plus longues que celles du grand buis, veineuses dans leur longueur, arrondies par le bout, de couleur verte - jaunâtre ou pâle. Ses fleurs naissent aux noeuds des branches, petites, jaunâtres, formées chacune en bassin à quatre crenelures.

Quelquefois ces fleurs ne laissent point de fruits après elles; mais quelquefois on trouve des fruits sur des piés différens qui ne portent point de fleurs. Ces fruits sont de petites baies rondes ou ovales, molles, blanches, luisantes, ressemblantes à nos petites groseilles blanches, remplies d'un suc visqueux, dont les anciens se servoient pour faire de la glu. Au milieu de ce fruit se rencontre une petite semence applatie, & ordinairement échancrée en coeur.

Il ne faut pas croire qu'on trouve communément des chênes qui portent du gui; c'est un phénomene en général assez rare; il l'est par exemple beaucoup en Angleterre.

Des semences du gui, & de leur germination. Théophraste (de caus. Plant. l. II. chap. xxjv.) & Pline (Hist. nat. l XVI. ch. xxxxjv.) avoient assûré contre le sent ment d'Aristote, que le gui venoit de semences, mais qui avoient besoin de passer par l'estomac des oiseaux, pour se dépouiller, disoient - ils, d'une qualité froide qui les empêchoit de germer. Cependant comme les semences du gui ne sont pas sort dures, on comprend avec peine, qu'elles ne soient pas digérées par l'estomac des oeaux. Il est vrai que Boccone assûre avoir observé que les oiseaux les rendoient entieres dans leurs excrémens; mais il saudroit savoir si Boccone a bien observé.

Quoiqu'il en soit, toutes les observations modernes prouvent que le gui se multiplie de semence, sans qu'il soit nécessaire qu'elles passent par l'estomac des oueaux. Ray dit qu'il a vû germer les semences du gui dans l'écorce même da chêne, & que depuis son observation, Doody apotiquaire de Londres, avoit mis la chose hors de doute, ayant élevé des piés de gui de graines qu'il avoit semées.

Léonhard Frédéric Hornung assûre dans une dissertation latine à ce sujet, avoir semé du gui sur un pommier, qu'il y germa en poussant deux cornes de la base du fruit, qu'il s'attacha à la branche, & qu'il y fructifia.

M. Edmond Barel, dans un mémoire qu'il a envoyé au chevalier Hans - Sloane, & qui est imprimé dans les Transactions philosophiques, témoigne aussi avoir élevé le gui de graine.

Enfin, M. Duhamel a répété toutes ces expériences sur un grand nombre d'arbres de différentes especes, & les graines du gui ont germé également bien sur tous, excepté sur le figuier, peut - être à cause du lait corrosif qui s'échappoit des plaies qu'il avoit fallu faire pour poser les semences, & qui les brûloit.

Il n'est pas surprenant que le gui germe à - peu - près également bien sur des arbres très - différens; il ne faut que de l'humidité pour faire germer toutes sortes de semences, & celle des pluies & des rosées suffit pour la germination du gui, puisque M. Duhamel en a vû germer sur des morceaux de bois mort, sur des tessons de pots, & sur des pierres seulement tenues à l'ombre du Soleil. De plus il a posé des semences de gui sur les vases de terre à demi-cuits, qui laissent échapper l'eau peu - à - peu, & fur lesquels on se fait quelquefois un plaisir d'élever de petites salades. Les semences de gui y ont germé plus promptement, & elles sont venues plus vigoureuses que sur les corps secs; la transpiration du vase favorise leur germination; probablement la transpiration des arbres ne leur est pas non plus inutile.

Il faut pourtant convenir que quoique le gui germe sur des pots, sur du bois mort, & qu'il s'attache également sur tous les arbres, il ne végete pas aussi heureusement sur tous ceux auxquels il s'attache. Il ne réussit pas si bien sur le chêne & sur le noyer que sur le poirier, le pommier, l'épine - blanche, & le tilleul. Il vient avec plus de peine sur le génevrier; mais après tout, il ne s'éleve bien que sur des arbres.

Les semences de gui mises sur des arbres en Février, commencent à germer à la fin de Juin. Alors on voit sortir de la graine du gui plusieurs radicules; & cette multiplicité de radicules est une singularité, qui n'est peut - être propre qu'à la seule semence du gui. Quand les radicules se sont alongées de deux à trois lignes, elles se recourbent, & elles continuent de s'alonger, jusqu'à ce qu'elles ayent atteint le corps sur lequel la graine est posée; & sitôt qu'elles y sont parvenues, elles cessent de s'alonger.

Cette radicule prend indifféremment toutes sortes de directions, tant en - haut qu'en - bas, ce qui lui est encore particulier; car, suivant la remarque de M. Dodart, tous les germes tendent vers le bas.

Les radicules du gui sont formées d'une petite boule qui est seulement soûtenue par un pédicule qui part du corps de la semence. Elles s'alongent jusqu'à ce que la petite boule qui les termine, porte sur l'écorce des arbres; alors elles s'épanoüissent, & s'y appliquent fortement par une matiere visqueuse.

De la formation & du progrès des racines du gui. La jeune plante commence à introduire ses racines dans cette écorce; aussi - tôt la seve contenue dans l'écorce de l'arbre, s'extravase; il se forme à cet endroit une grosseur, une loupe, ou si l'on veut, une espece de gale, & cette gale augmente en grosseur à mesure que les racines de la plante parasite font du progres.

Entre les premieres racines du gui, il y en a qui rampent dans les couches les plus herbacées de l'écorce, & les autres en traversent les différens plans jusqu'au bois où elles se distribuent de côté & d'autre, se réfléchissant quand elles rencontrent quelques corps durs qui s'opposent à leur passage. Alors elles cheminent entre les lames de l'écorce, & y forment plusieurs entrelacemens; mais comme les lames intérieures de l'écorce sont destinées à faire dans la suite de nouvelles couches de bois, ces lames s'endurcissent; les racines du gui se trouvent donc engagées de l'épaisseur de ces lames dans le bois; d'autres lames de l'écorce deviennent bois à leur tour; voilà les racines du gui engagées encore plus avant dans le bois, & à la fin elles le sont beaucoup, sans que pour cela elles ayent pénétré le bois en aucune façon. On peut ajoûter que comme les racines du gui occasionnent une extravasation du suc ligneux, qui forme une loupe à l'endroit de l'insertion; cette loupe contribue beaucoup à engager plus promptement & plus avant les racines du gui dans le bois.

Quand elles y sont engagées à un certain point, le gui a besoin de ressources pour subsister, & il en a effectivement. 1°. Les racines nouvelles épanouies dans l'écorce, & celles qui sont engagées dans le bois, lui fournissent de la nourriture. 2°. Il se trouve souvent aux piés de gui une espece de bulbe charnuë de la consistance des racines, qui est engagée [p. 1002] dans l'écorce, & qui lui peut être d'un grand secours pour vivre.

Cependant ces ressources lui manquent quelquefois; par exemple, lorsque la branche sur laquelle est un pié de gui se trouve grosse & vigoureuse, & qu'il ne peut plus tirer de subsistance des écorces, alors il languit & meurt à la fin. Il n'en est pas de même quand la branche est menue, & les piés de gui vigoureux; car alors ce sont ces branches mêmes de l'arbre qui cessent de profiter. Pour que le gui coupe les vivres à l'extrémité de la branche sur laquelle il est enté, il faut que la force avec laquelle il tire la séve soit supérieure à celle que la branche avoit pour se la procurer. Le gui dans ce cas, peut être comparé à ces branches gourmandes, qui s'approprient toute la séve qui auroit dû passer aux branches circonvoisines.

Du progrès des tiges du gui. Le progrès des racines du gui est d'abord très - considérable en comparaison de celui des tiges; en effet, ce n'est que la premiere année, & quelquefois la seconde, que les jeunes tiges commencent à se redresser, & souvent elles ont bien de la peine à y parvenir. Quand cela arrive, on voit cette jeune tige terminée par un bouton, ou par une espece de petite houppe, qui semble être la naissance de quelques feuilles, & elle en reste - là pour la premiere année, & même quelquefois pour la seconde.

Le printems de l'année suivante, ou de la troisieme, il sort de ce bouton deux feuilles, & il se forme deux boutons dans les aisselles de ces deux feuilles: de chacun de ces boutons, il sort ensuite une ou plusieurs branches, qui sont terminées par deux, & quelquefois par trois feuilles. C'est - là la production de la troisieme ou de la quatrieme année. La cinquieme, la sixieme, & les années suivantes, il continue à sortir plusieurs branches, & quelquefois jusqu'à six des aisselles des feuilles. Le gui devient ainsi un petit arbrisseau très - branchu, formant une boule assez réguliere, qui peut avoir un pié & demi, ou deux piés de diametre.

Les vieilles feuilles jaunissent & tombent, sans qu'il en vienne de nouvelles à la place; ce qui fait que les tiges sont presque nues, & que l'arbrisseau n'est garni de feuilles qu'à l'extrémité de ses branches.

Il y a ici une chose bien digne d'être remarquée, & que M. Duhamel dit avoir observée avec M. Bernard de Jussieu, c'est que chaque bouton de gui contient presque toûjours le germe de trois branches, qu'on peut appercevoir par la dissection: ainsi chaque noeud devroit souvent être garni de six branches, & il le seroit en effet s'il n'en périssoit pas plusieurs, ou avant que d'être sorties du bouton, ou peu de tems après en être sorties; ce qui arrive fréquemment.

Une autre chose singuliere, c'est que les branches du gui n'ont point cette affectation à monter vers le ciel, qui est propre à presque toutes les plantes, surtout aux arbres & aux arbustes. Si le gui est implanté sur une branche d'arbre, ses rameaux s'éleveront à l'ordinaire; s'il part de dessous la branche, il pousse ses rameaux vers la terre; ainsi il végete en sens contraire, sans qu'il paroisse en souffrir.

Le gui garde ses feuilles pendant l'hyver, & même pendant les hyvers les plus rudes. Théophraste se trompe donc, lorsqu'il dit que le gui ne conserve ses feuilles que quand il tient à un arbre qui ne les quitte point l'hyver, & qu'il se dépouille quand il est sur un arbre qui perd ses feuilles. Mais qui est - ce qui n'a pas vû l'hyver, sur des arbres dépouillés de leurs feuilles, des piés de gui qui en étoient tous garnis? Et ce fait est - il plus singulier que de voir le chêne verd conserver ses feuilles lorsqu'il est greffé sur le chêne ordinaire?

De l'écorce, du bois, des tiges & des feuilles du gui. L'écorce extérieure des feuilles & des tiges du gui est d'un verd terne & foncé, sur - tout lorsqu'elles sont vieilles, car les jeunes feuilles & les nouveaux bourgeons sont d'un verd jaunâtre. Cette écorce extérieure est un peu inégale & comme grenue. Sous cette écorce il y en a une autre plus épaisse, d'un verd moins foncé, grenue & pâteuse comme l'écorce des racines, & elle est traversée par des fibres ligneuses qui s'étendent suivant la longueur des branches. Sous cette derniere écorce est le bois, qui est à - peu - près de sa couleur; il est assez dur quand il est sec, mais il n'a presque point de fils, & se coupe presque aussi facilement de travers qu'en long.

Les tiges sont droites d'un noeud à l'autre, où elles font de grandes inflections. Les noeuds du gui sont de vraies articulations par engrenement, & les pousses de chaque année se joignent les unes aux autres, comme les épiphy ses se joignent au corps des os.

Les feuilles du gui sont épaisses & charnues, sans être succulentes. En les examinant avec un peu d'attention, on découvre cinq à six nervures saillantes qui partent du pédicule, & qui s'étendent jusqu'à l'extrémité sans fournir beaucoup de ramifications. Leur figure est un ovale fort alongé; les feuilles & l'écorce des branches ont un goût legerement amer & astringent: leur odeur est foible à la vérité, mais desagréable.

Le gui étant vivace & ligneux, il faut le mettre au nombre des arbrisseaux, entre lesquels il y en a de mâles & de femelles.

Il y a un gui mâle, & un gui femelle. Pline n'en doutoit point, car il a distingué un gui mâle qui ne porte point de fruit, & un gui femelle qui en porte. Cependant MM. de Tournefort, Boerhaave & Linnaeus dont le sentiment est d'un plus grand poids que celui de Pline, pensent que les deux sexes se trouvent sur les mêmes individus dans des endroits séparés. Des autorités si respectables ont engagé d'autres botanistes à éplucher ce fait avec une grande attention; & c'est d'après cet examen qu'ils se sont cru en droit de décider comme Pline.

Edmond Barel, dans le mémoire que nous avons déjà cité, dit qu'il a élevé quatre piés de gui, dont deux produisirent du fruit, & les deux autres fleurirent sans fructifier.

M. Duhamel assûre aussi avoir constamment remarqué des piés de gui mâle qui ne produisoient jamais de fruit, & d'autres femelles qui presque tous les ans en étoient chargés. Il va bien plus loin; il prétend que les piés de gui de différens sexes ont chacun un port assez différent pour qu'on les puisse distinguer les uns des autres, indépendamment de leurs fruits & de leurs fleurs.

Voici en quoi consiste cette différence, suivant notre académicien.

Les boutons qui contiennent les fleurs mâles sont plus arrondis, & trois fois plus gros que les boutons qui contiennent les fleurs femelles, ou les embryons des fruits. On distingue assez bien en Décembre ces boutons les uns des autres, quoiqu'ils ne soient point encore ouverts, & que les piés femelles soient encore chargés du fruit de l'année précédente.

Les boutons mâles viennent ordinairement trois - à - trois sur un pédicule commun, & ils commencent à s'ouvrir dans le mois de Mars. Leur fleur est d'une seule piece irréguliere, formant une cloche ouverte, échancrée par les bords en quatre jusque vers le milieu de la fleur. Ces fleurs sont ramassées par bouquets: chaque bouton mâle contient depuis deux jusqu'à sept fleurs, & ces bouquets sont placés dans les aisselles des branches, ou à leur extrémité: dans le mois de Mai toutes ces fleurs tombent, & il ne reste

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