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Greffe à emporte piece. Autre pratique qui a beaucoup de rapport avec la greffe en fente; on ne s'en sert que pour greffer de gros arbres qu'on ne pourroit fendre sans les risquer: voici le procédé. On fait avec un ciseau de menuisier une entaille un peu profonde dans l'écorce & dans le bois, d'une branche moyenne, vive & saine de l'arbre dont on veut changer l'espece. On dispose la greffe à - peu - près comme pour la fente; mais il faut que le gros bout soit taillé & ajusté de maniere à pouvoir remplir exactement l'entaille qui aura été faite. On y fait entrer la greffe un peu à serre & de façon que les écorces se raccordent bien: on assûre cette greffe avec de l'osier, & on la couvre de mastic ou de glaise, à - peu - près comme pour la greffe en fente. On peut mettre ainsi plusieurs greffes sur une même branche, afin d'être plus certain du succès, le tems propre pour cette maniere de greffer est depuis le commencement de Février jusqu'à ce que le mouvement de la seve fasse détacher les écorces.
Greffe en flûte. C'est la plus difficile de toutes les méthodes de greffer; elle se fait au mois de Mai, lorsque les arbres sont en pleine seve: on choisit deux branches, l'une sur l'arbre qui doit servir de sujet, & l'autre sur l'arbre de bonne espece que l'on veut multiplier; ces deux branches, par la mesure que l'on en prend, doivent se trouver de même grosseur dans la partie qui doit servir de greffe, & dans celle que l'on veut greffer. On laisse sur pié la b>anche qui doit être greffée, on en coupe seulement le bout à trois ou quatre pouces au - dessus de l'endroit où l'on veut greffer. Après avoir fait une incision circulaire au - dessous, on enleve toute l'écorce sur cette longueur de trois ou quatre pouces; ensuite on détache la bonne branche de son arbre, on en coupe le bout au - dessus de l'endroit qui a été trouvé de grosseur convenable; on fait une incision circulaire à l'écorce pour avoir un tuyau de la longueur de deux ou trois travers de doigt, ensorte qu'il soit garni de deux bons yeux: on enleve adroitement ce tuyau en pressant & tournant l'écorce avec les doigts, sans pourtant offenser les yeux; puis on le passe dans le bois de la branche écorcée, de façon qu'il enveloppe exactement & qu'il se réunisse par le bas à l'écorce du sujet: s'il s'y trouve quelque inégalité, on y remédie avec la serpette. Enfin on couvre le dessus de la greffe avec un peu de mastic ou de glaise, & plus communément on rabat sur l'écorce de petits copeaux, en incisant tout - autour avec la serpette le bout du bois qui est resté nud en - dessus; on forme par là une espece de couronnement qui défend la greffe des injures de l'air. Cette méthode de greffer est peu usitée, si ce n'est pour le châtaignier, le figuier, l'olivier, le noyer, &c. qu'il seroit très - difficile de faire réussir en les greffant d'autre façon.
Greffe en approche. Cette méthode ne peut s'exécuter qu'avec deux arbres voisins l'un de l'autre,
Greffe en écusson. C'est la plus expéditive, la plus étendue, & la plus simple; la plus usitée, la plus naturelle, & la plus sûre de toutes les méthodes de greffes. Un jardinier peut faire par jour trois cents écussons, au lieu qu'à peine peut - il faire cent greffes en fente, quoique ce soit la méthode la moins longue après celle en écusson: on peut même pour celle - ci employer de jeunes gens, qui sont bien - tôt stilés à cette opération. Presque tous les arbres peuvent se greffer en écusson: on court les risques de la plus grande incertitude en greffant les fruits à noyau par une autre méthode; & c'est la meilleure dont on puisse se servir pour les arbres curieux & étrangers; rien de plus simple que l'attirail qu'elle exige. Un greffoir & de la filasse, voilà tout. La greffe en écusson réussit plus ordinairement qu'aucune autre sorte de greffe; & d'autant plus sûrement, que si la premiere opération manque, ce qui s'apperçoit en moins de quinze jours, on peut la répéter plusieurs fois pendant tout le tems de la durée de la seve. Aucune méthode n'est plus naturelle, puisqu'elle approche le plus qu'il est possible des voies de la nature; il suffit de la simple substitution d'un oeil faite à une branche: c'est, pour ainsi dire, tromper la nature. Aussi cette maniere de greffer a - t - elle si bien prévalu, qu'on n'en emploie presque pas d'autre àprésent, avec cette grande raison de plus, que les sujets n'en sont nullement deshonorés; vingt incisions manquées sur une branche, la laissent toûjours vive & entiere; quelques plaies causées à l'écorce se recouvrent aisément, & on peut recommencer l'année suivante. Enfin les arbres greffés de cette maniere donnent plûtôt des fleurs & des fruits, que lorsqu'ils sont greffés en fente.
On peut greffer en écusson pendant toute la belle saison, depuis le commencement du mois de Mai jusqu'à la fin de Septembre; si ce n'est qu'il en faut excepter les tems de pluie, les chaleurs trop vives & les grandes sécheresses. Il faut aussi le concours de deux circonstances; que le sujet soit en seve, ainsi que l'arbre sur lequel on prend l'écusson: le progrès des écussons que l'on peut faire pendant cinq mois de la belle saison, n'est pas le même, ceux que l'on fait avant la S. Jean poussent dès la même année; c'est ce qu'on appelle écusson à la pousse; ceux que l'on greffe après ce tems se nomment écusson à oeil dormant, parce qu'ils ne poussent qu'au printems de l'année suivante. Au surplus pour l'un & l'autre cas l'écusson se fait de la même maniere.
Ce qu'on appelle proprement l'écusson n'est autre chose qu'un oeil levé sur une branche de l'année; on choisit pour cet effet sur l'arbre dont on veut multiplier l'espece, une des premieres branches de l'année, dont les yeux soient bien nourris & bien for<pb-> [p. 924]
Pour lever l'écusson ou l'oeil de dessus la branche, on fait avec le greffoir trois incisions triangulaires dans l'écorce qui environne l'oeil; la premiere entravers à deux ou trois lignes au - dessus de l'oeil; la seconde à l'un des côtés, en descendant circulairement pour qu'elle se termine au dessus de l'oeil; & la troisieme de l'autre côté en sens contraire, de façon qu'elle vienne croiser la seconde à environ un demi - pouce au - dessous de l'oeil, & que ces trois traits fassent ensemble une espece de triangle dont la pointe soit en bas; puis en pressant & tirant adroitement avec ses doigts cette portion d'écorce, sans offenser l'oeil, elle se détache aisément si la seve est suffisante.
L'écusson étant levé, on le tient entre ses levres par la queue de la feuille qu'on doit y avoir laissée exprès; ensuite on choisit sur le sujet un endroit bien uni, où l'on fait avec le greffoir deux incisions comme si l'on figuroit la lettre majuscule T, & on en proportionne l'étendue à la grandeur de l'écusson que l'on y veut placer; puis on détache avec le manche du greffoir l'écorce des deux angles rentrans, & on fait entrer l'écusson entre ces deux écorces, en commençant par la pointe que l'on fait descendre peu - à - peu jusqu'à ce que le haut de l'écusson réponde exactement à l'écorce supérieure du sujet. On prend ensuite de la filasse de chanvre, ou encore mieux de la laine filée, dont on passe plusieurs tours sans couvrir l'oeil, & que l'on assûre par un noeud, pour maintenir les écorces & faciliter leur réunion.
Lorsque cette greffe a été faite à oeil poussant, c'est - à - dire avant la S. Jean, dès qu'on s'apperçoit au bout de huit ou dix jours que l'écusson est bien vif & qu'il est prêt à pousser, on coupe le sujet à quatre doigts au dessus de l'écusson, afin qu'en déterminant la seve à se porter avec plus d'abondance sur le nouvel oeil, il puisse pousser plus vîte & plus vigoureusement; ensuite on relâche peu - à - peu ou on coupe entierement la ligature par - derriere l'écusson, àmesure du progrès que l'on apperçoit: mais si c'est à oeil dormant que la greffe ait été faite, c'est - à - dire après la S. Jean, on ne dégage l'écusson & l'on ne coupe la tête du sujet qu'au printems suivant, lorsque l'écusson commence à pousser.
On connoît encore d'autres manieres de greffer, telles que la greffe sur les racines, la greffe en queue de verge de foüet, la greffe par térébration, &c. mais la trop grande incertitude de leur succès les a fait négliger.
C'est principalement pour la multiplication des bonnes especes d'arbres fruitiers, que l'on fait usage de la greffe, attendu qu'en les élevant de semence, on ne se procureroit que très - rarement la même sorte de fruit dont on auroit semé la graine: il est bien constant d'ailleurs que la greffe contribue à perfectionner les fruits par les circuits & les détours que cette opération occasionne à la seve, en la forçant de traverser les inflexions & les replis qui se forment toûjours à l'endroit où la greffe s'unit au sujet. Mais on ne peut par le moyen de la greffe changer l'espece des arbres, ni même produire de nouvelles variétés; ce grand oeuvre est reservé à la seule nature: tout l'art se réduit à cet égard à donner aux fruits un fort petit degré de perfection. On se sert aussi de la greffe pour multiplier plusieurs arbrisseaux curieux, & même quelques arbres, tels que les belles especes d'érable, d'orme, de mûrier, &c. mais à ce dernier
On est bien revenu du merveilleux que les anciens
qui ont traité de l'Agriculture, & quantité de modernes
après eux, attribuoient à la greffe: à les en
croire, on pouvoit faire par cette voie les métamorphoses
les plus étonnantes & changer la propre nature
des choses, en faisant produire à la vigne de
l'huile au lieu de vin, & aux arbres des forêts les
fruits les plus délicieux, au lieu des graines seches
qu'ils rapportent. A les entendre, le platane pouvoit
devenir un arbre fruitier & produire des figues, des
cerises, ou des pommes: mais je me suis assûré par
plusieurs expériences, que le platane est peut - être
de tous les arbres celui qui est le moins propre à servir
de sujet pour la greffe; non - seulement les fruits
que l'on vient de citer n'y reprennent pas, mais même
un seul écusson de figuier fait mourir le platane; &
ce qu'il y a de plus surprenant, c'est que les écussons pris & appliqués sur le même arbre n'ont point
encore voulu réussir, quoique cette épreuve ait été
répétée quantité de fois. Les changemens que l'on
peut opérer par le moyen de la greffe, sont plus bornés
que l'on ne pense; il faut entre l'arbre que l'on
veut faire servir de sujet & celui que l'on veut y
greffer, un rapport & une analogie qui ne sont pas
toûjours indiqués sûrement par la ressemblance de
la fleur & du fruit: ce sont pourtant les caracteres
les plus capables d'annoncer le succès des greffes.
Voyez les
GREFFER (Page 7:924)
GREFFER, voyez
GREFFIER (Page 7:924)
GREFFIER, s. m. scriba, actuarius, notarius, amanuensis, (Jurisprud.) est un officier qui est préposé pour recevoir & expédier jugemens & autres actes qui émanent d'une jurisdiction; il est aussi chargé du dépôt de ces actes qu'on appelle le greffe.
Emilius Probus en la vie d'Eumenes, dit que chez les Grecs la fonction de greffier étoit plus honorable que chez les Romains; que les premiers n'y admettoient que des personnes d'une fidélité & d'une capacité reconnues.
Chez les Romains, les scribes ou greffiers, que l'on appelloit aussi notaires parce qu'ils écrivoient en note ou abregé, étoient d'abord des esclaves publics appartenans au corps de chaque ville qui les employoit à faire les expéditions des tribunaux, afin qu'elles fussent délivrées gratuitement; cela fit douter si l'esclave d'une ville ayant été affranchi, ne dérogeoit pas à sa liberté en continuant l'office de greffier ou notaire: mais la loi derniere, au code de servis reipubl. décida pour la liberté.
Dans la suite, Arcadius & Honorius défendirent de commettre des esclaves pour greffiers ou notaires; desorte qu'on les élisoit dans chaque ville comme les juges appellés dans chaque ville deffensores civitatum: c'est pourquoi la fonction de greffier fut mise au nombre des offices municipaux; de même qu'autrefois en France on mettoit aussi par élection les greffiers de ville & ceuxdes consuls des marchands.
Les présidens & autres gouverneurs des provinces
se servoient de leurs clercs, domestiques, pour
greffiers; ceux - ci étoient appellés cancellarii; cu bien
ils en choissoient un à leur volonté; ce qui leur fut
défendu par les empereurs Arcadius & Honorius,
lesquels ordonnerent que ces greffiers seroient dorénavant
tirés par élection de l'office ou compagnie
des officiers ministériels attachés à la suite du gouverneur,
à la charge que ce corps & compagnie répondroit
civilement des fautes de celui qu'il avoit
élu pour greffier. Justinien ordonna que les greffiers
des défenseurs des cités & des juges pédanées, seroient
pris dans ce même corps.
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