ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"651"> nefort, inst. rei herb. & élémens de Botanique. Voyez Flante. (I)

Les Botanistes comptent plusieurs especes de gesse, dont nous ne décrirons ici que la commune cultivée par - tout; lathyrus sativus, C. Bauh. Ses racines sont fibreuses; ses tiges sont branchues, applaties ou un peu anguleuses, hautes d'environ six pouces, garnies de feuilles longues, étroites, d'un verd pâle & posées deux à deux au bout d'une côte que termine une vrille ou main, par le moyen de laquelle la plante s'accroche aux corps voisins. Ses fleurs qui sont blanchâtres & tachées au milieu d'une couleur de pourpre brun, donnent des gousses composées de deux cosses qui renferment des semences anguleuses & blanchâtres qu'on mange, & qu'on nomme en françois gesses au pluriel. Cette plante fleurit au mois de Juin, & produit des graines mûres en Juillet & Août.

On cultive dans des jardins de curieux diverses especes de gesse, qu'on multiplie de graine ou de racine, & qu'on soûtient avec des rames. Elles sont très - propres à être plantées contre des haies mortes, qu'elles couvriront, si l'on veut, dans un été, donneront quantité de fleurs, & subsisteront plusieurs années; de plus, elles viennent dans toutes sortes de terreins & d'expositions.

La petite gesse à grande fleur, lathyrus minor flore majore, Boerh. ind. orne un jardin, parce qu'elle ne s'éleve pas au - dessus de cinq piés, & qu'elle produit des bouquets de larges fleurs & d'un beau rouge foncé. Mais la gesse, que les Anglois appellent the sweetscenter peas, mérite le plus d'être cultivée à cause de la beauté & de l'agréable odeur de ses larges fleurs pourpres.

La vraic méthode pour bonnifier toutes les variétés de gesse, est de les semer au mois d'Août près d'un mur ou d'une haie exposée au midi: alors les gesses poussent en automne, subsistent en hyver, commencent à fleurir en Mai, & continuent jusqu'à la fin de Juin. Ces sortes de plantes d'automne sont bien supérieures à celles qui sont semées au printems; elles produisent dix fois plus de fleurs & d'excellentes graines qui ne trompent point nos espérances. (D. J.)

Gesse (Page 7:651)

Gesse, (Diete.) on mange les semences de cotte plante, comme les pois, les féves, & les autres légumes; les gens de la campagne mangent fort communément celui - ci dans les provinces méridionales du royaume, où on le cultive dans les champs: c'est un aliment plus grossier que les pois, les petites féves, &c. d'ailleurs on ne lui connoît que les propriétés génériques des légumes. Voyez Légume. (b)

GESSORIACUM (Page 7:651)

GESSORIACUM, (Géog. anc.) le Gessoriacum de Suétone & de Ptolomée, ce fameux port des Romains d'où se faisoit le passage des Gaules dans la Grande - Brétagne; ce port décoré d'un phare magnifique bâti par Caligula, étoit Boulogne - sur - mer; on n'en peut pas douter par l'ancienne carte de Peutinger, qui dit Gessoriacum quod nunc Bononia. Ce port étoit dans le pays des Morins; & depuis Jules - César jusqu'au tems des derniers empereurs, tous ceux que l'Histoire dit avoir passé des Gaules dans la Grande - Bretagne, se sont embarqués à Gessoriacum, c'est - à - dire à Boulogne. Voyez la Martiniere, & les mémoires de l'acad des Inscrip. tom. IX. (D. J.)

GESTATION (Page 7:651)

GESTATION, s. f. gestatio, (Gymn. medic.) sorte d'exercice d'usage chez les Romains pour le rétablissement de la santé; il consistoit à se faire porter en litiere, en chaise, ou à se faire traîner rapidement, soit dans un charriot, soit dans un bateau sur l'eau, asin de donner au corps du mouvement & de la secousse. Celse vante beaucoup les avantages de cet exercice pour la guérison des maladies chroniques; longis, dit - il, & jam inclinatis morbis aptissima est gestatio, lib. II. cap. xjv. c'est Asclépiade qui mit le premier en pratique les frictions & la gestation; AEtius l'appelle A)IW/RA, & en a fait un petit traité dans son tetrab. 1. serm. 3. cap. vj. consultez le, il est méthodique & de bon sens. Nos medecins modernes recommandent aussi la gestation dans des voitures un peu rudes, & non pas dans celles qui mollement suspendues indiquent des Sybarites dans une nation guerriere: toute gestation où l'on se sent à peine mouvoir, ne peut produire aucun effet. La promenade à pié, qu'il ne faut pas confondre avec la gestation, s'appelloit à Rome ambulatio; & la plûpart des grands la préféroient à la gestation sur la fin de la république: constituimus inter nos, dit Cicéron, ut ambulationem pomeridianam conficeremus in academiâ; « Nous convinmes de faire notre promenade d'après diner » dans les allées solitaires de l'académie. Voyez donc Promenade. (D. J.)

GESTE (Page 7:651)

GESTE, s. m. mouvement extérieur du corps & du visage; une des premieres expressions du sentiment données à l'homme par la nature. V. Chant, Voix, Danse, Déclamation . L'homme a senti, dès qu'il a respiré; & les sons de la voix, les mouvemens divers du visage & du corps, ont été les expressions de ce qu'il a senti; ils furent la langue primitive de l'univers au berceau; ils le sont encore de tous les hommes dans leur enfance; le geste est & sera toûjours le langage de toutes les nations: on l'entend dans tous les climats; la nature, à quelques modifications près, fut & sera toûjours la même.

Les sons ont fait naître le chant, & sont par conséquent la cause premiere de toutes les especes de Musique possibles. Voyez Chant, Musique. Les gestes ont été de la même maniere la source primitive de ce que les anciens & nous avons appellé danse. Voyez l'article suivant.

Pour parler du geste d'une maniere utile aux Arts, il est nécessaire de le considérer dans ses points de vûe différens. Mais de quelque maniere qu'on l'envisage, il est indispensable de le voir toûjours comme expression: c'est - là sa fonction primitive; & c'est par cette attribution, établie par les lois de la nature, qu'il embellit l'art dont il est le tout, & celui auquel il s'unit, pour en devenir une principale partie. (B)

Geste (Page 7:651)

Geste, (Danse.) la Danse est l'art des gestes; on a expliqué à cet article dans les volumes précédens l'objet & l'origine de cet art. Voyez Danse. Il ne reste ici qu'une observation à faire pour aider ses progrès, & pour employer utilement les moyens qu'elle a sous sa main, & que cependant elle laisse oisifs depuis qu'elle existe.

Cette observation sera peu du goût de nos artistes; ils sont dans une routine contraire; & la routine est en général la boussole des artistes modernes qui ont acquis quelque réputation dans la danse du théatre.

Observer, réfléchir, lire, leur paroissent des distractions nuisibles aux mouvemens du corps, où ils se livrent par préférence; leurs bras, leurs positions croissent en agrément, & l'art reste sans progrès. C'est donc à l'amour de l'art à ne se point rebuter contre une ancienne obstination qui lui est très - nuisible. Le moment viendra peut - être où l'esprit de réflexion entrera en quelque société avec la facture méchanique des sauts & des pas. En attendant, la vérité se trouvera écrite.

Il est certain que les mouvemens extérieurs du visage sont les gestes les plus expressifs de l'homme: pourquoi done tous les danseurs se privent - ils sur nos théatres de l'avantage que leur procureroit cette expression supérieure à toutes les autres?

Les Grecs & les Romains avoient une raison très - puissante pour s'aider du secours du masque, non - seulement dans la Danse, mais encore dans [p. 652] la déclamation chantée de leurs représentations tragiques & comiques. Les places immenses où s'assembloient les spectateurs, formoient de si grands éloignemens, qu'on n'auroit entendu la voix ni distingué aucun des traits du visage, si on n'avoit eu recours à l'invention des masques qu'on changeoit dans la même représentation, selon les divers besoins de l'action théatrale.

Le masque ne leur fit rien perdre, & il leur procura les deux avantages dont l'éloignement les auroit privés. Nous sommes dans la situation contraire: le masque nous nuit toûjours, & n'est utile presque jamais.

1°. Malgré l'habitude qu'on a prise de s'en servir, il est impossible qu'il ne gêne pas la respiration; 2°. il diminue par conséquent les forces; & c'est un inconvénient considérable dans un pareil exercice, que la gêne & l'affoiblissement.

En considérant que le masque, quelque bien dessiné & peint qu'on puisse le faire, est toûjours inférieur à la teinte de la nature, ne peut avoir aucun mouvement, & ne peut être jamais que ce qu'il a paru d'abord; peut - on se refuser à l'abolition d'un abus si nuisible à la Danse? L'habitude dans les Arts doit - elle toûjours prévaloir sur les moyens sûrs d'un embellissement qu'on perd par indolence? quel honneur peut - on trouver à imiter servilement la conduite & la maniere des danseurs qui ont précédé? ne se convaincra - t - on jamais que tout leur savoir ne consistoit qu'en quelques traditions tyranniques que le talent véritable dédaigne, & que la médiocrité seule regarde comme des lois?

Les danseurs qui méritent qu'on leur réponde, m'ont opposé 1°. que la danse vive demande quelquefois des efforts qui influent d'une maniere desagréable sur le visage du danseur; 2°. que n'étant pas dans l'usage de danser à visage découvert, on n'a point pris d'enfance, comme les femmes, le soin d'en ajuster les traits avec les graces qu'elles ont naturellement, & que leur adresse sait proportionner aux différentes entrées de danse qu'elles exécutent.

Ces deux raisons ne sont que des prétextes; les graces du visage sont en proportion du sentiment; & l'expression marquée par les mouvemens de ses traits, sont les graces les plus desirables pour un homme de théatre. On convient qu'il y a quelques caracteres qui exigent le masque; mais ils sont en petit nombre; & ce n'est pas à cause des efforts prétendus qu'il faut faire pour les bien danser, que le masque devient nécessaire, mais seulement parce qu'un visage humain y seroit un contre - sens ridicule. Tels sont les vents, les satyres, les démons: tous les autres sont ou nobles ou tendres ou gais; ils gagneroient tous à l'expression que leur prêteroient les traits du visage.

Au surplus, l'art des Laval & des Marcel, qui ont senti l'un & l'autre ce que la Danse devoit être, est un aide sûr pour la belle nature; le geste qu'elle anime trouve dans leurs pratiques mille moyens de s'embellir; ils ont étudié les ressorts secrets de la nature humaine; ils en connoissent les forces, les possibilités, la liaison. Les routes que peut leur indiquer une pareille connoissance, sont plus que suffisantes pour rendre les différens mouvemens du corps, flexibles, rapides, brillans & moëlleux. C'est sous de tels maîtres que la danse françoise peut acquérir cette expression enchanteresse qui lui donne, sans parler, autant de charmes qu'en étalent la bonne poéfie & l'excellente musique. Les pas de deux, sur tout de galanterie ou de passion; les pas seuls de grace, les beaux développemens des bras & des autres parties du corps qui se font sous un masque insensible, receviont enfin quelque jour, par les soins de nos excellens maîtres, la vie qui leur manque, qui peut seule ranimer la Danse & satisfaire pleinement les viais amateurs. (B)

Geste (Page 7:652)

Geste, (Déclamation.) Le geste au théatre doit toûjours précéder la parole: on sent bien plutôt que la parole ne peut le dire; & le geste est beaucoup plus preste qu'elle; il faut des momens à la parole pour se former & pour frapper l'oreille; le geste que la sensibilité rend agile, part toûjours au moment même où l'ame éprouve le sentiment.

L'acteur qui ne sent point & qui voit des gestes dans les autres, croit les égaler au - moins par des mouvemens de bras, par des marches en avant & par de froids reculemens en - arriere; par ces tours oisifs enfin toûjours gauches au théatre, qui refroidissent l'action & rendent l'acteur insupport able. Jamais dans ces automates fatiguans l'ame ne fait agir les mouvemens; elle reste ensevelie dans un assoupissement profond: la routine & la mémoire sont les chevilles ouvrieres de la machine qui agit & qui parle.

Baron avoit le geste du rôle qu'il joüoit: voilà la seule bonne maniere de les adapter sur le théatre aux différens mouvemens du caractere & de la passion. Voyez Déclamation.

Nous voyons au théatre françois des gestes & des mouvemens qui nous entraînent; s'ils nous laissoient le tems de réfléchir, nous les trouverions desordonnés, sans grace, peut - être même desagréables: mais leur feu rapide échausse, émeut, ravit le spectateur; ils sont l'ouvrage du desordre de l'ame; elle se peint dans cette espece de dégingandage, plus beau, plus frappant que ne pourroit l'être toute l'adresse de l'art: osons le dire, c'est le sublime de l'agitation de l'actrice; c'est la passion elle même qui parle, qui me trouble, & qui fait passer dans mon ame tous les sentimens que son beau desordre me peint. (B)

Geste (Page 7:652)

Geste, (Chant du théatre.) l'opéra françois a pour objet de séduire l'esprit, de charmer les sens, de transporter l'ame dans des régions enchantées. Voy. Opéra: si les ressorts de cette aimable séduction sont rudes, gauches, grossiers, l'esprit ne peut être entrainé, le goût l'arrête; le froid & la distraction succedent rapidement aux premiers momens d'attention & de chaleur.

J'entens des sons mélodieux; je vois un lieu orné de tout ce qui peut flatter les regards d'un spectateur avide; le jour qui l'éclaire est celui que j'imagine dans les jardins délicieux de l'Olympe. Mes yeux tombent sur le personnage dont l'apparition, par sa majesté & par ses graces, doit remplir la premiere idée qui m'a séduit; je ne vois qu'une figure rude qui marche d'un pas apprêté, qui remue au hasard deux grands bras qu'un monvement monotone de pendule agite; mon attention cesse; le froid me gagne; le charme a disparu, & je ne vois plus qu'une charge ridicule d'un dieu ou d'une déesse, à la place de la figure imposante qu'un sibeau prélude m'avoit promis.

Le contre sens du geste passe rapidement au théatre de la comedie; l'attention y court de pensée en pensée, & l'acteur n'a pas le tems de s'appesantir sur la faute qui lui échappe quelquefois.

Il n'en est pas ainsi au théatre du chant; les détails y sont ralentis & répérés par la musique; & c'est là que le contre sens, quand il y est une fois amené, a tout le tems d'assommer le spectateur.

On a déjà dit, en parlant de la danse, que les traits du visage formoient les gestes les plus expressifs: ils sont en effet dans l'acteur, lorsqu'ils sont vrais, l'ouvrage sublime de l'art, parce qu'ils paroissent l'image vivante de la nature: mais l'art seul & sans elle, ne peut rien sur cette partie de la figure humaine; il n'a que l'avantage d'un masque dont l'oeil découvre bientôt l'imposture.

Il faut, pour peindre sur cette toile animée & changeante, un sentiment juste, le tact fin & prompt, le talent enfin qui seul peut peindre, parce qu'il

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