ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

RECHERCHE Accueil Mises en garde Documentation ATILF ARTFL Courriel

Previous page

"624"> par les rochers & les bancs de pierre, il résulte de toutes ces dégradations des cavernes: c'est dans ces conduits soûterreins que certains fleuves disparoissent, comme le Niger, l'Euphrate, le Rhone. C'est dans ces cavernes formées dans le sein des montagnes, que sont les réservoirs des sources abondantes; & lorsque les voûtes de ces cavernes s'affaissent & les comblent, les eaux qu'elles contiennent se répandent au - dehors & produisent des inondations subites & imprévues.

Les eaux de pluie produisent aussi à la surface extérieure de grands changemens. Les montagnes diminuent de hauteur, & les plaines se remplissent par leur travail journalier; les cimes des montagnes se dégarnissent de terre, & il ne reste que les pics. Les terres entraînées par les torrens & par les fleuves dans les plaines, y ont formé des couches extraordinaires de gravier & de sable; on en trouve de larges amas le long des rivieres & dans les vallées qu'elles traversent. Ces couches ont cela de particulier, qu'elles éprouvent des interruptions; qu'elles n'annoncent aucun parallélisme ni la même épaisseur; & par l'examen des amas de gravier, on reconnoît qu'ils ont été lavés, arrondis, & déposés irrégulierement par les tournans d'eau, &c. Parmi ces sables & ces graviers, on trouve sans ordre, sans disposition réguliere, des coquilles fluviatiles, des coquilles marines brisées & isolées, des débris de cailloux, des pierres dures, des craies arrondies, des os d'animaux terrestres, des instrumens de fer, des morceaux de bois, des feuilles, des impressions de mousse; & les différentes parties de cet assemblage se lient quelquefois avec un ciment naturel produit par la décomposition de certains graviers.

Aux environs des étangs, des lacs, & des mers, le long des rivieres, ou près des torrens, on trouve des endroits bas, marécageux, dont le fond est un mélange de végétaux imbibés de bitume: des arbres entiers y sont renversés tous suivant une même direction. Certaines couches limoneuses durcies se sont moulées sur les roseaux des marais qu'elles ont recouverts: souvent ces couches de végétaux ou en nature ou en empreinte dans la pierre ou dans la terre durcies, sont recouvertes par des amas de matiere qui forment une épaisseur de cinquante, soixante, cent piés; ces additions & ces terres accumulées sont considérables, sur - tout au pié des hautes plaines ou des montagnes, & paroissent être des adossemens qui s'appu ent & tendent vers les montagnes plus élevées.

Les rivages de la mer annoncent de même des dégradations produites par les eaux. A l'embouchure des fleuves nous trouvons des îles, des amas de sables, ou des dépôts de terres dont les eaux des rivieres se chargent, & qu'elles déposent lorsque leur cours est ralenti. Quelques observateurs ont prétendu que certains fleuves charrient le tiers de terre, ce qui est exagéré; mais il suffit de faire en visager cette cause avec toutes les réductions qu'on jugera convenables, pour conclure l'étendue de ses effets. Certaines côtes sont minées par les flots de la mer; elle en recouvre d'autres de sable: elle abandonne certains rivages, se jette & fait des invasions sur d'autres ou petit - à - petit, ou par des inondations violentes & locales.

Un autre principe étendu de destruction est le feu. Certaines montagnes brûlent continuellement; elles éprouvent par reprises des accès violens, des éruptions dans lesquelles elles lancent au loin des tourbillons de flammes, de fumée, de cendres, de pierres calcinées; & dans la fureur de leur embrasement, les soufres, les minéraux en fusion se font jour autravers des flancs de la montagne entr'ouverts par l'expansion des vapeurs qui redoublent la fureur du feu. Je trouve tous les volcans dans des montagnes élevées; leur foyer est peu profond, & leur bouche est au sommet & dans le plan de l'horison. Certains volcans sont éteints, & on les reconnoît alors aux précipices énorines que des montagnes offrent à leurs sommets, qui sont comme des cones tronqués; & aux laves ou matieres calcinées qui sont dispersées sur les croupes.

Le fond de la mer n'est pas exempt de ces tourmentes violentes; il y a aussi de ces volcans dans les montagnes dont le sommet est sous les flots. Ils s'annoncent près des îles dont ils sont la continuation & les appendices. Ces volcans sou - marins élevent quelquefois des masses de terre énormes qui paroissent au - dessus des flots, & vont figurer parmi les îles; ou bien ces matieres enflammées ne trouvant pas dans leurs explosions des masses contre lesquelles elles puissent agir, élevent les flots, & forment des jets immenses, des Typhons ou trombes affreuses. La mer est alors dans une grande ébullition, couverte de pierres calcinées & legeres qui y flottent sur un espace très - étendu, & l'air est rempli d'exhalaisons sulphureuses.

Tous ces effets sont ordinairement accompagnés de tremblemens de terre, phénomene qui porte au loin la desolation ou les alarmes. On peut en distinguer de deux sortes, des tremblemens locaux & des tremblemens étendus: les tremblemens locaux circonscrivent leurs commotions, s'étendent en tous sens autour d'un volcan ou de leur foyer. Les autres suivent certaines bandes de terrein, & sur - tout celles qui sont parsemées de montagnes ou composées de matieres solides; ils s'étendent beaucoup plus en longueur qu'en largeur: ces convulsions désastreuses s'annoncent par différens mouvemens. Les uns s'exécutent par un soulevement de haut en bas; les autres par une inclination telle que l'éprouveroit un plan incliné, soulevé par la partie la plus haute & fixé par le bas; enfin d'autres, par un balancement qui porte les objets agités vers les différens points de l'horison, & par des reprises marquées. De ces différentes agitations résultent les commotions meurtrieres, irrégulieres, brusquées, suivies de grands desastres, & ces secousses tranquilles qui balancent les objets sans les détruire. On peut mettre parmi les effets des tremblemens de terre, les affaissemens & les éboulemens de certaines montagnes, les fentes, les précipices & les abysmes.

Les secousses se propageant par les montagnes & les chaînes qui se ramifient dans le fond de la mer, se rendent sensibles aux navigateurs, & produisent par voie de retentissement des commotions violentes aux vaisseaux sur la surface de la mer unie & paisible: souvent la mer se déborde dans les terres, après que les côtes ont éprouvé des convulsions violentes. Enfin les côtes de la mer semblent plus exposées aux tremblemens de terre que les centres des continens.

Phénomenes dépendans de l'atmosphere & de l'aspect du soleil. Cette division nous offre beaucoup de faits & peu de résultats généraux; on peut réduire à trois points ce qui nous reste à y discuter. Le premier comprend la considération de la diverse température qui regne dans les différentes parties du globe: le second les agitations de l'atmosphere & leurs effets; le troisieme la circulation & les modifications des vapeurs & des exhalaisons qui flottent dans l'atmosphere.

La température qu'éprouvent les différentes portions de la terre peut se représenter avec assez de régularité par les zones comprises entre les degrés de latitude; cependant il faut y comprendre la considération du sol, du séjour plus ou moins long du soleil sur l'horison, & des vents. Toutes ces circons<pb-> [p. 625] tances modisient beaucoup l'effet de la direction plus ou moins inclinée des rayons du soleil dans les différens pays.

L'intervalle qui se trouve entre les limites du plus grand chaud & du plus grand froid dans chaque contrée, croit à - mesure qu'on s'éloigne de l'équateur, avec quelques exceptions toûjours dépendantes du sol, & sur - tout du voisinage de la mer. Un pays habité, cultivé, desséché est moins froid: un pays maritime est moins froid à même latitude, & peut - être aussi moins chaud.

A - mesure qu'on s'éleve au - dessus des plaines dans les hautes montagnes, la chaleur diminue & le froid même se fait sentir. Sur les montagnes des Cordelieres la neige, qui recouvre le sommet de quelquesunes, ne fond pas à la hauteur de 2440 soises au - dessus du niveau de la mer, & la chaleur respecte cette limite dans toute l'étendue de la Cordeliere. Dans les zones tempérées, les pays montagneux ont aussi des sommets couverts de neige, & même des amas monstrueux de glace que la chaleur des étés ne fond point entierement; seulement la ligne qui sert de limite à la neige qui ne fond point est moins élevée dans ces zones que sous la torride.

Mais le froid ne se répand jamais dans les plaines des zones torrides, comme il fait ressentir ses effets dans l'étendue des zones tempérées & glaciales. Les fleuves gelent à la surface des continens, ainsi que les lacs dans une partie des tempérées & dans toute l'étendue des zones glaciales; mais la salure en préserve les plaines mers à ces latitudes. Ce n'est que vers les côtes, dans les parages tranquilles, dans les golfes ou détroits des zones glaciales, que la mer gele; & les glaces ne s'étendent pas à une vingtaine de lieues des côtes. La mer gele sur - tout dans les endroits vers lesquels les fleuves versent une grande quantité d'eau douce, ou charrient de gros glaçons qui s'accumulant à leur embouchûre, contribuent à la formation de ces énormes montagnes de glaces qui voyagent ensuite dans les mers plus méridionales; en sorte que les glaces qu'on trouve dans les plaines mers indiquent de grands fleuves qui ont leurs embouchûres près de ces parages. Par rapport à la température des soûterreins & de la mer à différentes profondeurs, nous ne pouvons offrir aucuns résultats bien déterminés.

Les principales agitations de l'air que nous considérons sont les vents; en général les courans d'air sont fort irréguliers & très - variables: cependant le vent d'est souffle continuellement dans la même direction, en conséquence de la raréfaction que le soleil produit successivement dans les différentes parties de l'atmosphere. Comme le courant d'air qui est la suite de cette dilatation doit suivre le soleil, il sournit un vent constant & général d'orient en occident, qui contribue par son action au mouvement général de la mer d'orient en occident, & qui regne à 25 ou 30 degrés de chaque côté de l'équateur.

Les vents polaires soufflent aussi assez constamment dans les zones glaciales; dans les zones tempérées il n'y a aucune uniformité reconnue. Le mouvement de l'air est un composé des vents qui regnent dans les zones collatérales, c'est - à - dire des vents d'est & de nord. A combien de modifications ces courans ne doivent - ils pas être assujettis, suivant que les vents d'est ou de nord dominent? Le vent d'oüest paroît être même un reflux du vent d'est modifié par quelques côtes.

Sur la mer ou sur les côtes les vents sont plus réguliers que sur terre; ils soufflent aussi avec plus de force & plus de continuité. Sur les continens, les montagnes, les forêts, les différentes bases de terreins changent, & alterent la direction des vents. Les vents réfléchis par les montagnes se font sentir dans toutes les provinces voisines; ils sont très - irréguliers, parce que leur direction dépend de celle du premier courant qui les produit, ainsi que des contours, de la situation & de l'ouverture même des montagnes. Enfin les vents de terre soufflent par reprises & par boutades.

Au printems & en automne les vents sont plus violens qu'en hyver & en été, tant sur mer que sur terre; ils sont aussi plus violens à - mesure qu'on s'éleve au - dessus des plaines & jusqu'au - dessus de la région des nuages.

Il y a des vents périodiques qui sont assujettis à certaines saisons, à certains jours, à certaines heures, à certains lieux; il y en a de reglés produits par la fonte des neiges, par le flux & reflux. Quelquefois les vents viennent de la terre pendant la nuit, & de la mer pendant le jour. Nous n'avons point encore assez d'observations pour connoître s'il y a quelque rapport entre les vicissitudes de l'air dans chaque pays. Nous savons seulement par les observations du barometre, qu'il y a plus de variations dans les zones tempérées, que dans les zones torrides & glaciales; qu'il y en a moins dans la région éle vée de l'atmosphere, que dans celle où nous vivons.

En vertu de la chaleur du soleil l'air ayant acquis une certaine température, dissout l'eau & s'en charge; c'est ce qui produit cette abondante évaporation des eaux de dessus les mers & les continens. Ces vapeurs une fois condensées forment les nuages que les vents sont circuler dans une certaine région de l'air dépendante de leur densité & de la sienne; ils les transportent dans tous les climats: les nuages ainsi voiturés ou s'élevent en se dilatant, ou s'abaissent en se condensant suivant la température de la base de l'atmosphere qui les soûtient; lorsqu'ils rencontrent dans leur course l'air plus froid des montagnes, ou bien ils y tombent en flocons de neige, en brouillards, en rosées, suivant leur état de densité & d'élevation; ou bien ils s'y fixent & s'y resolvent en pluies. Le vent d'est les disperse surtout entre les tropiques; ce qui cause & les pluies abondantes de la zone torride, & les inondations périodiques des fleuves qui ont leurs sources dans ces contrées.

Quelquefois les nuages condensés au sommet des montagnes s'en trouvent éloignés par des vents réflechis, ou autres qui les dispersent dans les plaines voisines.

Les montagnes contribuent tellement à cette distribution des eaux, qu'une seule chaîne de montagnes décide de l'été & de l'hyver entre deux parties d'une presqu'île qu'elle traverse. On conçoit aussi que le sol du terrein contribuant à l'état de l'atmosphere, il y aura des pays où il ne tombera aucune pluie, parce que les nuages s'éleveront au - dessus de ces contrées en se dilatant.

Enfin nous concevons maintenant pourquoi nous avons trouvé certains points de partage pour la distribution des eaux qui circulent sur la surface des continens: ces points de partage sont des endroits élevés & hérissés de montagnes & de pics qui raccrochent, condensent, fixent & resolvent les nuages en pluies, &c.

Lorsque des vents contraires soufflent contre une certaine masse de nuages condensés & prêts à se résoudre en pluie, ils produisent des especes de cylindres d'eau continués depuis les nuages d'où ils tombent jusque sur la mer ou la terre: ces vents donnent à l'eau la forme cylindrique en la resserrant & la comprimant par des actions contraires. On nomme ces cylindres d'eau trombes, qu'il ne faut pas confondre avec le typhon ou la trombe de mer. On peut rapporter à ces effets ceux que des vents violens & contraires

Next page


The Project for American and French Research on the Treasury of the French Language (ARTFL) is a cooperative enterprise of Analyse et Traitement Informatique de la Langue Française (ATILF) of the Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS), the Division of the Humanities, the Division of the Social Sciences, and Electronic Text Services (ETS) of the University of Chicago.

PhiloLogic Software, Copyright © 2001 The University of Chicago.