ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"622"> tomose, en liant les lits des rivieres par des canaux. Que nous diront sur cela les sectateurs des causes finales?

La direction des fleuves dans tout leur cours est assujettie aux configurations des montagnes & des vallons où ils coulent; de sorte qu'une des montagnes qui borde un vallon ayant une pente moins rapide que l'autre qui lui est opposée, la riviere prend son cours plus près de celle qui a une croupe plus roide & plus escarpée, & ne garde point le milieu du vallon: elle n'occupe le milieu que lorsque la pente est égale. Les fleuves ne suivent les montagnes principales d'où ils tirent leur origine, que tant qu'ils sont resserrés entre deux chaînes; mais dès qu'ils se répandent dans les plaines collatérales, ils coulent perpendiculairement à la direction des chaînes, en suivant les vallons des montagnes de la seconde & troisieme grandeur, où ils trouvent différentes rivieres qui les enrichissent de leurs eaux. En conséquence de la plus grande pente que les fleuves trouvent en s'échappant des plaines montueuses qu'ils rencontrent ordinairement dans l'intérieur des terres, la direction de leur canal est ordinairement droite sur une certaine longueur, & leurs sinuosités ne se multiplient que lorsque l'on approche de leur embouchure dans la mer. On remarque que les grands fleuves coulent perpendiculairement à la côte où ils se jettent dans la mer, & qu'ils reçoivent de part & d'autre des rivieres qui s'y rendent, en indiquant une pente marquée des deux côtes. Dans l'arrondissement de certains golfes, vous observez un semblable arrondissement pour les rivieres qui s'y jettent en s'y portant comme vers un centre commun, leurs canaux s'épanoüissent dans tout le contour; ils indiquent le vallon qui a formé le golfe. Cette disposition est sensible dans les rivieres qui se jettent à l'extrémité du golfe de Bothnie.

Un phénomene régulier & constant, est cet accroissement périodique qu'éprouvent un grand nombre de fleuves, & sur - tout ceux qui ont leurs sources entre les tropiques; ils couvrent les plaines voisines de leurs eaux à une très - grande distance: les autres n'éprouvent que de ces crûes irrégulieres & brusquées qui sont la suite de la fonte des neiges ou des pluies abondantes: les uns sont rapides, d'autres roulent plus tranquillement leurs eaux; & cela paroît, toutes choses égales d'ailleurs, dépendant de la distance de leur source à leur embouchure: ensorte que de deux fleuves qui partent du même point de partage, & qui vont à la mer par différentes routes, celui - là est le plus rapide, dont le cours est le moins étendu. Quelques autres se perdent dans les sables, ou disparoissent dans des soûterreins: enfin je remarque aux embouchures des grands fleuves, quelques îles & quelques amas de sable qui divisent leur canal en plusieurs bras.

Affections générales de la structure intérieure & réguliere du globe. Ce qui me frappe d'abord en creusant dans la terre, c'est que la masse est composée de lits & de couches, dont l'épaisseur, la direction, &c. sont assujetties à des dispositions régulieres & constantes. Quelque part que l'on fouille, on rencontre de ces couches ou des bancs de différentes épaisseurs, depuis une ligne jusqu'à cent piés; & plus on creuse dans l'intérieur du globe, plus les couches sont épaisses. Ces bancs, ces lits recouvrent aussi une très grande étendue de terrein en tout sens; excepté la couche de terre végétale, toutes ces couches sont posées parallelement les unes sur les autres; & chaque banc a une même épaisseur dans toute son étendue.

Les lits de substances terrestres qui sont paralleles à l'horison dans les plaines, s'élevent & se courbent avec les croupes des montagnes qu'elles forment & qu'elles franchissent pour aller s'abaisser ensuite dans le vallon qui se trouve au - delà. Si la pente de la montagne est douce, l'inclinaison des couches est très - grande: si la croupe de la montagne est escarpée, ou bien les couches sont coupées à - plomb & interrompues par des éboulemens, ou bien elles s'abaissent presque sans s'incliner, & gagnent la plaine.

Lorsqu'au sommet d'une montagne les couches sont de niveau, toutes les autres qui composent sa masse sont aussi de niveau; mais les lits du sommet panchent - ils, les autres couches de la montagne suivent la même inclinaison.

Dans certains vallons étroits formés par des montagnes escarpées, les couches que l'on y apperçoit coupées à - plomb & tranchées, se correspondent par rapport à la hauteur, à l'épaisseur, à la disposition, à la matiere qui les composent; comme si la montagne eût été séparée par le milieu.

Dans les masses des montagnes figurées, les lits intérieurs des angles saillans ou rentrans éprouvent la même disposition que les contours extérieurs: ainsi les phénomenes de la surface paroissent liés avec ceux de la configuration intérieure, & nous la découvrent.

La même régularité a lieu par rapport à deux collines qui se suivent parallelement; les mêmes couches s'y continuent de l'une à l'autre en bon ordre, en se courbant sous le vallon. Il est bon d'observer que le niveau n'a lieu pour la hauteur des couches correspondantes, que dans le cas où les deux collines ont une même hauteur; ce qui est assez ordinaire.

Il faut cependant remarquer que cette organisation ne se présente pas par - tout ainsi. Les montagnes les plus élevées, soit dans les continens soit dans les îles, ne sont proprement que des pics ou cones composés de roc vif, de grès, ou de matieres vitrifiables; celles dont les sommets sont plats contiennent des marbres, des pierres à chaux. Les collines dont la masse est de grès, présentent par - tout des pointes irrégulieres qui indiquent des couches peu suivies & un amas de décombres: celles qui sont composées de substances calcaires, de marbres, de pierres à chaux, de marnes, &c. ont une forme plus arrondie & plus réguliere.

D'après les différentes observations dont nous venons d'indiquer les résultats, on peut distinguer huit situations & formes différentes dans les couches terrestres; 1°. de paralleles à l'horison; 2°. de perpendiculaires; 3°. de diversement inclinées; 4°. de courbées en arc concave; 5°. de courbées en arc convexe; 6°. d'ondoyantes; 7°. d'arrondies; 8°. d'angulaires.

Ces différentes formes paroissent dépendantes des bases sur les quelles les lits ou assises sont posés. En suivant l'arrangement des couches, on n'a point trouvé que les substances qui les forment soient disposées suivant leur pesanteur spécifique. Les couches de matiere plus pesante se trouvent sur des couches de matieres plus legeres; des rochers massifs portent sur des sables ou sur des glaises.

Sous la mer, dans les détroits, & dans les îles, on retrouve les substances terrestres disposées par couches, ainsi que dans les continens. Dans certains détroits on a découvert que le fond de la mer est de la même nature de terre que les couches qui servent de base aux côtes élevées qui forment leur canal. On apperçoit des deux côtés du détroit les mêmes couches & les mêmes substances comme dans les deux croupes escarpées de deux montagnes qui forment un vallon: dans d'autres détroits, les couches des deux bords du canal s'abaissent insensiblement sous les flots, pour aller rejoindre leurs correspondantes.

On divise ordinairement les matieres qui composent les premieres couches du globe en deux classes générales: la premiere comprend les substances vi<pb-> [p. 623] trifiables; la seconde renferme les substances calcaires. Soit seules, soir par leur mélange, ces matieres composent les terres, les pierres, les metaux, les minéraux de toute espece; il n'est pas de notre objet de les détailler. Nous ne nous attachons à ces diverses substances, qu'autant que nous nous occupons de leurs dispositions relatives par rapport à la structure intérieure du globe.

Les argilles, les sables, les schitz, les charbons de terre, les rocs vifs, les grès étendus, les marnes, les pierres à chaux sont posés par lits & par bancs: mais les tufs, les grès en petites masses, les cailloux, les crystaux, les métaux, les minéraux, les pyrites, les soufres, les stalactites, les incrustations, se trouvent par amas, par filons, par veines irrégulierement disposées, mais cependant assujetties à quelques formes, sur - tout les crystallisations & les sels.

Mais ce qui a singulierement attiré l'attention des observateurs parmi les substances qui composent les couches terrestres, est cette multitude considérable de fossiles en nature ou en pétrifications. On trouve des coquilles de différentes especes, des squelettes de poissons de mer qui sont parfaitement semblables aux coquilles, aux poissons actuellement vivans dans la mer. Ces fossiles par leur poli, leurs couleurs, leur émail naturel, présentent des dépouilles reconnoissasables des animaux. Les coquilles sont entieres; tout y est semblable, soit au dedans soit au - dehors, dans leur cavité, dans leur convexité, dans leur substance; les details de la configuration, les plus petites articulations y sont dessinées: on trouve les coquillages de la même espece par grouppes, de petits & de jeunes attachés aux gros; & tous sont dans leur tas & dans les lits posés sur le plat & horisontalement. Certaines coquilles paroissent avoir eprouvé une espece de calcination plus ou moins grande, & une décomposition qui en altere la forme en grande partie; elles sont imparfaites, mutilées, par fragmens.

Les banes qu'on a trouves en différens endroits, ont une étendue très - considérable; il y en a une masse de plus de cent trente millions de toises cubiques en Tourame; dans la plûpart des carrieres de pierre, cette substance lie les autres & y domine. Quant aux pétrifications qui ne présentent que les empreintes ou en selief ou en creux, d'animaux & de végétaux, elles sont d'une substance pierreuse, métallique, & diversement colorée; les unes présentent une forme parfaite, d'autres sont mutilées, courbées, applaties, alongées.

On trouve enfiu une multitude étonnante de fossiles ou conservés ou altérés ou pétrifiés, dans les couches des montagnes comme sous les plaines; au milieu des continens, comme dans les îles; dans les premiers lits, comme dans les plus profonds; depuis le sommet des Alpes, jusqu'à cent piés sous terre dans le terrein d'Amsterdam; dans toute la chaîne qui traverse l'ancien continent depuis le Portugal jusqu'à la Chine; dans les matieres les plus legeres, comme dans les substances les plus dures & les plus compactes. Ces fossiles y sont incorporés, pétrifiés, & remplis constamment de la substance même qui les environne. On trouve enfin des coquilles legeres & pesantes dans les mêmes matieres; dans un seul endroit, les especes les plus disparates; dans les endroits les plus éloignés, les especes les plus ressemblantes, & dont les analogues, soit végétaux soit animaux, sont ou dans des mers éloignées ou dans des parages voisins, ou ne sont pas encore connus.

Il faut remarquer qu'il y a plus de coquilles & de pétrifications dans les matieres calcaires, dans les marnes, dans les pierres à chaux, &c. que dans les matieres vitrisiables: on en trouve de dispersees dans les sables. On n'a point encore vû de coquilles dans les grès & le roc vif en petites masses: enfin on n'a pû découvrir de coquilles au Pérou dans les montagnes des Cordelieres.

La disposition de toutes ces couches dont nous venons d'examiner les formes & la substance, sert à recueillir & à distribuer régulierement les eaux de pluie, à les contenir en differens endroits, à les verser par les sources, qui ne sont proprement que l'interruption & l'extrémité d'un aqueduc naturel formé par deux lits de matieres propres à voiturer l'eau: car les eaux tombant sur ces couches, se filtrent par les issues & par les fiéquentes interruptions qu'elles éprouvent sur - tout dans leurs courbures, elles se chargent souvent des molécules de substances ou terrestres ou métalliques qu'elles peuvent dissoudre, & acquierent par cette opération les différentes qualités que nous avons remarquées ci - devant. Les couches de glaise & d'arene qui regnent dans une grande étendue du globe, contiennent les eaux; la pente des couches leur procure un écoulement; & suivant la profondeur de ces couches, les eaux séjournent ou près de la surface de la terre ou à de grandes profondeurs. Un lac ne sera précisément que la réunion des eaux qui coulent entre les couches qui viennent se terminer à son bassin, & le former par leur courbure.

Phénomenes qui indiquent un travail posiérieur au premier, & qui tendent a changer la face du globe. Les couches du globe même les plus solides, sont interrompues par des fentes de différente largeur, depuis un demi - pouce jusqu'à plusieurs toises; elles sont perpendiculaires à l'horison dans les matieres calcaires, obliques & irrégulierement posées dans les carrieres de grès & de roc vif: on les trouve assez éloignées les unes des autres, & plus étroites dans les sabstances molles & dans les lits plus profonds: plus fréquentes & plus larges dans les matieres compactes, comme dans les marbres ou les autres pierres dures & dans les premieres couches; souvent elles descendent jusqu'à la base depuis le sommet des masses; d'autres fois elles pénetrent jusqu'aux lits insérieurs. Les unes vont en diminuant de largeur; d'autres ont une même largeur dans toute leur étendue.

C'est dans ces fentes que se trouvent les métaux, les minéraux, les crystaux, les soufres, les sucs épaissis; elles sont intérieurement garnies dans les grès & les matieres vitrisiables, de crystaux, de cailloux, & de minéraux de toute espece: dans les carrieres de marbre ou de pierres à chaux, elles sont remplies de spath, de gypse, de gravier, & d'un sable terreux. Dans les argilles, dans les craies, dans les marnes, on trouve ces fentes ou vuides ou remplies de matiere déposée par les eaux de pluie.

On peut ajoûter à ces fentes d'autres dégradations considérables qu'offrent les rochers & les longues chaîues de montagnes: telles sont ces coupures enormes, ces larges ouvertures produites par des éboulemens ou par des affaissemens qui remplissent les plaines de débris énormes de montagnes dont les bases manquent; & ces débris offrent des grès irrégulierement semés à la surface des terres éboulées, ou bien de longues couches de terre bouleversées sans ordre. C'est de cette sorte que se présentent aux yeux des observateurs les portes qu'on trouve dans les chaînes de montagnes & dans les ouvertures de certains détroits; comme les Thermopyles, les portes du Caucase, des Cordelieres, le détroit de Gibraltar entre les monts Calpé & Abyla, la porte de l'Hellespont, les detroits de Calais, de Palerme, &c.

Lorsque ces affaissemens n'ont agi que sur les couches intérieures, ou que les eaux seules ayant miné profondément les terres, ont entrainé de l'intérieur des montagnes les sables & les autres matieres de peu de consistence, & n'ont laissé que les voûtes formées

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