ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS
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roît ensuite, couvert d'un dais en forme de dôme,
qui est entierement d'étoffe de soie violette, avec
des houpes de soie blanche aux quatre coins, qui
sont brodées & très - proprement entrelacées de cordons.
La machine dont nous parlons, & sur laquelle
on a posé le cercueil, est portée par soixante - quatre
personnes; ceux qui ne sont point en état d'en faire
la dépense, se servent d'une machine qui n'exige pas
un si grand nombre de porteurs. Le fils ainé à la tete
des autres enfans & des petits - fils, suit à pie, couvert
d'un sac de chanvre, appuyé sur un báton, le corps
tout courbé, & comme accablé sous le poids de sa
douleur.
On voit ensuite les parens & les amis tous vêtus
de deuil, & un grand nombre de chaises couvertes
d'étosse blanche, ou sont les fules, les semmes, &
les esclaves du defunt, qui sont retentir l'air de leurs
cris.
Quand on est arrivé au lieu de la sépulture, on
voit à quelque distance de la tombe des tables rangées
dans des salles qu'on a fait clever exprés; &
tandis que les céremomes accoûtumées se pratiquent,
les domestiques y préparent un repas, qui sert ensuite
à régaler toute la compagnie.
Quelquefois après le repas, les parens & les amis
se prosternent de nouveau, en frappant la terre du
front devant le tombeau. Le fils ainé & les autres
enfans répondent à leurs honnétetés par quelques signes
exterieurs, mais dans un profond silence. S'il
s'agit d'un grand seigneur, il y a plusieurs appartemens
à sa sépulture; & après qu'on y a porte le cercueil,
un grand nombre de parens y demeurent un
& même deux mois, pour y renouveller tous les
jours avec les enfans du défunt les marques de leur
doulear. (D. J.)
Funérailles
(Page 7:373)
Funérailles des sauvages d'Amérique.
« Parmi
les peuples d'Amérique, dit le P. de Charlevoix,
sitôt qu'un malade a rendu les derniers soupirs, tout
retentit de gémissemens; & cela dure autant que la
famille est en état de fournir à la dépense; car il
faut tenir table ouverte pendant tout ce tems - là.
Le cadavre paré de sa plus belle robe, le visage
peint. ses armes & tout ce qu'il possédoit à côté de
lui, est expose à la porte de la cabanne, dans la
posture qu'il doit avoir dans le tombeau; & cette
posture, en plusieurs endroits, est celle où l'enfant
est dans le sein de sa mere. L'usage de quelques nations
est que les parens du défunt jeûnent jusqu'à la
fin des funérailles; & tout cet intervalle se passe
en pleurs, en éjulations, à régaler tous ceux dont
on reçoit la visite, à faire l'eloge du mort, & en
complimens réciproques. Chez d'autres, on loue des
pleureuses, qui s'acquittent parfaitement de leur
devoir; elles chantent, elles dansent, elles pleurent
sans cesse, & toûjours en cadence: mais ces
démonstrations d'une douleur empruntée ne préjudicient
point à ce que la nature exige des parens
du défunt.
On porte, sans aucune cérémonie le corps au
lieu de sa sépulture: mais quand il est dans la fosse,
on a soin de le couvrir de maniere que la terre ne
le touche point: il y est dans une cellule toute tapissée
de peaux; on dresse ensuite un poteau où l'on attache
tout ce qui peut marquer l'estime qu'on faisoit
du mort, comme son portrait, &c. . . . On
y porte tous les matins de nouvelles provilions;
& comme les chiens & d'autres betes ne manquent
point d'en faire leur profit, on veut bien se persuader
que c'est l'ame du defunt qui y est venue prendre
sa réfection.
Quand quelqu'un meurt dans le tems de la chasse,
on expose son corps sur un échafaut fort elevé, &
il y demeure jusqu'au départ de la troupe qui l'emporte
avec elle au village. Les corps de ceux qui
meurent à la guerre sont brûlés, & leurs cendres
rapportées pour être mises dans la sépulture de
leurs peres. Ces sepultures, parmi les nations les
plus sédentaires, sont des especes de cimetieres
pres du village: d'autres enterrent leurs morts dans
les bois au pié des arbres, ou les font secher & les
gardent dans des caisses jusqu'à la fete des morts.
On observe en quelques endroits, pour ceux qui
se sont noyés ou qui sont morts de froid, un cérémonial
assez bisarre. Les préliminaires des pleurs,
des danses, des chants, & des festins, étant achevés,
on porte le corps au lieu de la sépulture; ou,
si l'on est trop éloigné de l'endroit où il doit demeurer
en dépôt jusqu'à la fête des morts, on y
creuse une fosse très - large, & on y allume du feu;
de jeunes gens s'approchent ensuite du cadavre,
coupent les chairs aux parties qui ont été crayonnées
par un maître des cérémonies, & les jettent
dans le feu avec les visceres; puis ils placent le
cadavre ainsi déchiqueté dans le lieu qui lui est
destiné. Durant cette opération, les femmes, &
sur - tout les parentes du défunt, tournent sans cesse
autour de ceux qui travaillent; les exhortent à
bien s'acquitter de leur emploi; & leur mettent des
grains de porcelaine dans li bouche, comme on y
mettroit des dragées à des enfans pour les engager
à quelque chose qu'on souhaiteroit d'eux ».
L'enterrement est suivi de présens qu'on fait à la
famille affligée; & cela s'appelle couvrir le mort: on
fait ensuite des festins accompagnés de jeux & de
combats, où l'on propose des prix; & là, comme
dans l'antiquité payenne, une action toute lugubre
est terminee par des chants & des cris de victoire.
Le même auteur rapporte que chez les Natchez,
une des nations sauvages de la Loüisianne, quand
une femme chef, c'est - à - dire noble, ou de la race du
soleil, meurt, on étrangle douze petits enfans &
quatorze grandes personnes, pour être enterrés avec
elles Journ d'un voyag. d'Amériq. (G)
Funérailles
(Page 7:373)
Funérailles des Misilimakinaks. Il y a d'autres
sauvages de l'Amérique qui n'enterrent point leurs
morts, mais qui les brûlent; il y en a même, divisés
en ce qu'ils nomment familles, parmi lesquelles est la
prérogative attachée à telle famille uniquement, de
pouvoir brûler ses morts, tandis que les autres familles
sont obligées de les enterrer: c'est ce qu'on voit
chez les Misilimakinaks, peuple sauvage de l'Amerique septentrionale de la Nouvelle - France, où la seule
famille du grand Lievre joüit du privilége de brûler
ses cadavres; dans les deux autres familles qui
forment cette nation, quand quelqu'un de ses capitaines
est décédé, on prepare un vaste cercueil, où
après avoir couché le corps vêtu de ses plus beaux
habits, on y renferme avec lui sa couverture, son fusil,
sa provision de poudre & de plomb, son arc, ses
fleches, sa chaudiere, son plat, son casse - tête, son
calumet, sa boîte de vermillon, son miroir, & tous
les présens qui lui ont été donnés à sa mort; ils s'imaginent
qu'avec ce cortége, il fera plus aisément
le voyage dans l'autre monde, & qu'il sera meux
reçû des plus grands capitaines de la nation, qui le
conduiront avec eux dans un lieu de délices. Pendant
que tout cet attiraii s'ajuste dans le cercueil, les parens
du mort assitent à cette cérémonie en chantant
d'un ton lugubre, & en remuant en cadence un bâton
où ils ont attaché plusieurs petites sonnettes. (D. J.)
Funérailles
(Page 7:373)
Funérailles des Ethiopiens. Lorsque quelqu'un
d'eux vient à mourir, on entend de tous côtés des
cris épouvantables; tous les voisins s'assemblent dans
la maison du défunt, & pleurent avec les parens qui
s'y trouvent. On lave le corps mort; après l'avoir enveloppé
d'un linceuil de coton, on le met dans un cercueil,
au milieu d'une salle éclairée par des flambeaux
de cire: on redouble alors les cris & les pleurs au son
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des tambour de basque; les uns prient Dieu pour l'ame
du défunt, les autres disent des vers à sa loüange;
d'autres s'arrachent les cheveux; & d'autres se déchirent
le visage, pour marquer leur douleur: cette folie
touchante & ridicule dure jusqu'à ce que les religieux
viennent lever le corps. Après avoir chanté quelques
pseaumes, & fait les encensemens, ils se mettent en
marche, tenant à la main droite une croix de fer, un
livre de prieres à la gauche, & psalmodient en chemin: les parens & amis du défunt suivent, & continuent
leurs cris avec des tambours de basque. Ils ont
tous la tête rasée, qui est la marque du deuil. Quand
on passe devant quelque église, le convoi s'y arrête;
on fait quelques prieres, & ensuite on continue
sa route jusqu'au lieu de la sépulture. Là on recommence
les encensemens; on chante encore pendant
quelques tems des pseaumes d'un ton lugubre, & on
met le corps en terre. Les assistans retournent à la
maison du défunt, où l'on leur fait un festin: on s'y
trouve matin & soir pendant trois jours, & on ne
mange point ailleurs. Au bout de trois jours, on se
sépare jusqu'au huitieme; & de huit en huit jours,
on se rassemble pendant un certain espace de tems,
pour pleurer le défunt, & manger chez lui.
Au surplus, les gens curieux de parcourir les folies
des hommes en fait de funérailles, les trouveront semées
dans le grand ouvrage des cérémonies religieuses,
& rassemblées dans le petit traité de Muret, pere de
l'Oratoire, des cérémonies funebres de toutes les nations.
Paris 1675. in - 12. (D. J.)
Funérailles
(Page 7:374)
Funérailles des Chrétiens, (Hist. mod. ecclésiast.
)
« Les Chrétiens de la primitive Eglise, dit
M. l'abbé Fleury, pour mieux témoigner la foi de
la résurrection, avoient grand soin des sépultures,
& y faisoient grande dépense, à proportion de leur
maniere de vivre: ils ne brûloient point les corps,
comme les Grecs & les Romains; ils n'approuvoient
pas non plus la curiosité superstitieuse des
Egyptiens, qui les gardoient embaumés & exposés
à la vûe sur des lits dans leurs maisons; mais ils
les enterroient selon la coûtume des Juifs. Après
les avoir lavés, ils les embaumoient, & y employoient
plus de parfums, dit Tertullien, que les
Payens à leurs sacrifices; ils les enveloppoient de
linges très - fins ou d'étoffes de soie; quelquefois ils
les revêtoient d'habits précieux; ils les exposoient
pendant trois jours, ayant grand soin de les garder
cependant & de veiller auprès en prieres: ensuite
ils les portoient au tombeau, accompagnant le
corps avec quantité de cierges & de flambeaux,
chantant des pseaumes & des hymnes pour loüer
Dieu, & marquer l'espérance de la résurrection.
On prioit aussi pour eux; on offroit le sacrifice; &
l'on donnoit aux pauvres le festin nommé agapes,
& d'autres aumônes. On en renouvelloit la mémoire
au bout de l'an; & on continuoit d'année en
année, outre la commémoraison qu'on en faisoit
tous les jours au saint sacrifice.
L'Eglise avoit ses officiers destinés pour les enterremens,
que l'on appelloit en latin fossores, laborantes,
copiatoe, c'est - à - dire fossoyeurs ou travailleurs, & qui se trouvent quelquefois comptés entre
le clergé. On enterroit souvent avec les corps différentes
choses pour honorer les défunts, ou pour en
conserver la mémoire; comme les marques de leur
dignité, les instrumens de leur martyre, des phioles
ou des éponges pleines de leur sang, les actes de leur
martyre, leur épitaphe, ou du - moins leur nom, des
médailles, des feuilles de laurier ou de quelqu'autre
arbre toûjours verd, des croix, l'évangile. On observoit
de poser le corps sur le dos, le visage tourné
vers l'orient. Les Payens, pour garder les cendres
des morts, bâtissoient des sépulcres magnifiques le
long des grands chemins, & par - tout ailleurs dans
la campagne. Les chrétiens au contraire cachoient
les corps, les enterrant simplement ou les rangeant
dans des caves, comme étoient auprès de Rome
les tombes ou catacombes. Voyez Catacombes.
Les anciens cimetieres ou lieux où l'on déposoit
leurs corps, sont quelquefois appellés conciles des
martyrs, parce que leurs corps y étoient assemblés;
ou arenes, à cause du terrein sablonneux. En Afrique, on nommoit aussi les cimetieres des aires.
On a toûjours eu grande dévotion à se faire enterrer
auprès des martyrs; & c'est ce qui a enfin attiré
tant de sépultures dans les églises, quoique l'on
ait gardé long - tems la coûtume de n'enterrer que
hors des villes. La vénération des reliques & la
créance distincte de la résurrection, ont effacé parmi
les Chrétiens l'horreur que les anciens, même
les lsraélites, avoient des corps morts & des sepultures ».
Moeurs des chrétiens, art. 31.
Cette coûtume d'enterrer les morts, & de les porter
au lieu de leur sépulture en chantant des pseaumes,
a toûjours été observée parmi les Chrétiens;
les cérémonies seulement ont varié suivant les tems
& les usages. M. Lancelot, dans un mémoire sur
une ancienne tapisserie, qui représente les faits &
gestes de Guillaume le Conquérant, observe que
dans un morceau de cette tapisserie sont figurees
les cérémonies des funérailles d'Edoüard le confesseur,
qui ont beaucoup d'affinité avec celles qui se
pratiquent encore aujourd'hui en pareil cas:
« On y
voit Edoüard mort & étendu sur une espece de drap
mortuaire parsemé de larmes, dans lequel deux
hommes, l'un placé à la tête l'autre aux piés, arrangent
le corps. A côté est un autre homme debout,
tenant deux doigts de la main droite élevés;
cette attitude & son habillement, qui paroît ressembler
à une chasuble, désignent un prêtre qui lui donne
les dernieres bénédictions. . . . . On y voit
aussi une église. . . . . & un homme par lequel
on a voulu désigner les sonneurs de cloches. . . . .
La bierre est portée par huit hommes; elle est d'une
figure presque quarrée, traversée de plusieurs bandes,
& chargée de petites croix & autres ornemens: de ces huit hommes quatre sont en - devant,
& les quatre autres derriere; ils la portent sur leurs
épaules par le moyen de longs bâtons excédans la
bierre, 2 à chaque bâton: c'étoit alors la maniere
de porter les morts.....cetusage s'est même conservé
jusqu'à nos jours; & les hanovars ou porteurs
de sel, qui avoient le privilége de porter les corps
ou les essigies de nos rois, porterent encore le corps
ou l'effigie d'Henri IV. de la même maniere sur leurs
épaules en 1610. Dans cette même tapisserie, aux
deux côtés de la bierre, paroissent deux autres hommes,
qui ont une sonnette en chaque main. L'usage
d'avoir des porteurs de sonnettes dans les pompes
funebres, & qui subsiste encore en la personne des
jurés - crieurs, lorsqu'ils vont faire leurs semonces,
est tres - ancien. Suidas, & un ancien scholiaste de
Théocrite, en parlent; on les appelloit alors codonophori; ils ont été depuis connus sous le nom de
pulsatores & exequiates, & leurs sonnettes, campanoe manuales pro mortuis, ou campana bajuloe.......
à la suite du cercueil, on voit un grouppe de personnes
qui semblent toutes fondre en pleurs & en gémissemens ».
Mémoires de l'académie, tome VIII.
La description des funérailles de ce roi, conformes
à la simplicité de ces tems - là, montrent que les
usages & les cérémonies en étoient toutes semblables
à celles qui se pratiquent aujourd'hui dans
les funérailles des particuliers: car on sait que parmi
les catholiques, des qu'un homme est mort, les juréscrieurs,
pour les personnes qui ont le moyen de les
employer, préparent les tentures, drap mortuaire,
croix, chandeliers, luminaire, & autres choses né<pb->
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