ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"373"> roît ensuite, couvert d'un dais en forme de dôme, qui est entierement d'étoffe de soie violette, avec des houpes de soie blanche aux quatre coins, qui sont brodées & très - proprement entrelacées de cordons. La machine dont nous parlons, & sur laquelle on a posé le cercueil, est portée par soixante - quatre personnes; ceux qui ne sont point en état d'en faire la dépense, se servent d'une machine qui n'exige pas un si grand nombre de porteurs. Le fils ainé à la tete des autres enfans & des petits - fils, suit à pie, couvert d'un sac de chanvre, appuyé sur un báton, le corps tout courbé, & comme accablé sous le poids de sa douleur.

On voit ensuite les parens & les amis tous vêtus de deuil, & un grand nombre de chaises couvertes d'étosse blanche, ou sont les fules, les semmes, & les esclaves du defunt, qui sont retentir l'air de leurs cris.

Quand on est arrivé au lieu de la sépulture, on voit à quelque distance de la tombe des tables rangées dans des salles qu'on a fait clever exprés; & tandis que les céremomes accoûtumées se pratiquent, les domestiques y préparent un repas, qui sert ensuite à régaler toute la compagnie.

Quelquefois après le repas, les parens & les amis se prosternent de nouveau, en frappant la terre du front devant le tombeau. Le fils ainé & les autres enfans répondent à leurs honnétetés par quelques signes exterieurs, mais dans un profond silence. S'il s'agit d'un grand seigneur, il y a plusieurs appartemens à sa sépulture; & après qu'on y a porte le cercueil, un grand nombre de parens y demeurent un & même deux mois, pour y renouveller tous les jours avec les enfans du défunt les marques de leur doulear. (D. J.)

Funérailles (Page 7:373)

Funérailles des sauvages d'Amérique. « Parmi les peuples d'Amérique, dit le P. de Charlevoix, sitôt qu'un malade a rendu les derniers soupirs, tout retentit de gémissemens; & cela dure autant que la famille est en état de fournir à la dépense; car il faut tenir table ouverte pendant tout ce tems - là. Le cadavre paré de sa plus belle robe, le visage peint. ses armes & tout ce qu'il possédoit à côté de lui, est expose à la porte de la cabanne, dans la posture qu'il doit avoir dans le tombeau; & cette posture, en plusieurs endroits, est celle où l'enfant est dans le sein de sa mere. L'usage de quelques nations est que les parens du défunt jeûnent jusqu'à la fin des funérailles; & tout cet intervalle se passe en pleurs, en éjulations, à régaler tous ceux dont on reçoit la visite, à faire l'eloge du mort, & en complimens réciproques. Chez d'autres, on loue des pleureuses, qui s'acquittent parfaitement de leur devoir; elles chantent, elles dansent, elles pleurent sans cesse, & toûjours en cadence: mais ces démonstrations d'une douleur empruntée ne préjudicient point à ce que la nature exige des parens du défunt.

On porte, sans aucune cérémonie le corps au lieu de sa sépulture: mais quand il est dans la fosse, on a soin de le couvrir de maniere que la terre ne le touche point: il y est dans une cellule toute tapissée de peaux; on dresse ensuite un poteau où l'on attache tout ce qui peut marquer l'estime qu'on faisoit du mort, comme son portrait, &c. . . . On y porte tous les matins de nouvelles provilions; & comme les chiens & d'autres betes ne manquent point d'en faire leur profit, on veut bien se persuader que c'est l'ame du defunt qui y est venue prendre sa réfection.

Quand quelqu'un meurt dans le tems de la chasse, on expose son corps sur un échafaut fort elevé, & il y demeure jusqu'au départ de la troupe qui l'emporte avec elle au village. Les corps de ceux qui meurent à la guerre sont brûlés, & leurs cendres rapportées pour être mises dans la sépulture de leurs peres. Ces sepultures, parmi les nations les plus sédentaires, sont des especes de cimetieres pres du village: d'autres enterrent leurs morts dans les bois au pié des arbres, ou les font secher & les gardent dans des caisses jusqu'à la fete des morts.

On observe en quelques endroits, pour ceux qui se sont noyés ou qui sont morts de froid, un cérémonial assez bisarre. Les préliminaires des pleurs, des danses, des chants, & des festins, étant achevés, on porte le corps au lieu de la sépulture; ou, si l'on est trop éloigné de l'endroit où il doit demeurer en dépôt jusqu'à la fête des morts, on y creuse une fosse très - large, & on y allume du feu; de jeunes gens s'approchent ensuite du cadavre, coupent les chairs aux parties qui ont été crayonnées par un maître des cérémonies, & les jettent dans le feu avec les visceres; puis ils placent le cadavre ainsi déchiqueté dans le lieu qui lui est destiné. Durant cette opération, les femmes, & sur - tout les parentes du défunt, tournent sans cesse autour de ceux qui travaillent; les exhortent à bien s'acquitter de leur emploi; & leur mettent des grains de porcelaine dans li bouche, comme on y mettroit des dragées à des enfans pour les engager à quelque chose qu'on souhaiteroit d'eux ».

L'enterrement est suivi de présens qu'on fait à la famille affligée; & cela s'appelle couvrir le mort: on fait ensuite des festins accompagnés de jeux & de combats, où l'on propose des prix; & là, comme dans l'antiquité payenne, une action toute lugubre est terminee par des chants & des cris de victoire.

Le même auteur rapporte que chez les Natchez, une des nations sauvages de la Loüisianne, quand une femme chef, c'est - à - dire noble, ou de la race du soleil, meurt, on étrangle douze petits enfans & quatorze grandes personnes, pour être enterrés avec elles Journ d'un voyag. d'Amériq. (G)

Funérailles (Page 7:373)

Funérailles des Misilimakinaks. Il y a d'autres sauvages de l'Amérique qui n'enterrent point leurs morts, mais qui les brûlent; il y en a même, divisés en ce qu'ils nomment familles, parmi lesquelles est la prérogative attachée à telle famille uniquement, de pouvoir brûler ses morts, tandis que les autres familles sont obligées de les enterrer: c'est ce qu'on voit chez les Misilimakinaks, peuple sauvage de l'Amerique septentrionale de la Nouvelle - France, où la seule famille du grand Lievre joüit du privilége de brûler ses cadavres; dans les deux autres familles qui forment cette nation, quand quelqu'un de ses capitaines est décédé, on prepare un vaste cercueil, où après avoir couché le corps vêtu de ses plus beaux habits, on y renferme avec lui sa couverture, son fusil, sa provision de poudre & de plomb, son arc, ses fleches, sa chaudiere, son plat, son casse - tête, son calumet, sa boîte de vermillon, son miroir, & tous les présens qui lui ont été donnés à sa mort; ils s'imaginent qu'avec ce cortége, il fera plus aisément le voyage dans l'autre monde, & qu'il sera meux reçû des plus grands capitaines de la nation, qui le conduiront avec eux dans un lieu de délices. Pendant que tout cet attiraii s'ajuste dans le cercueil, les parens du mort assitent à cette cérémonie en chantant d'un ton lugubre, & en remuant en cadence un bâton où ils ont attaché plusieurs petites sonnettes. (D. J.)

Funérailles (Page 7:373)

Funérailles des Ethiopiens. Lorsque quelqu'un d'eux vient à mourir, on entend de tous côtés des cris épouvantables; tous les voisins s'assemblent dans la maison du défunt, & pleurent avec les parens qui s'y trouvent. On lave le corps mort; après l'avoir enveloppé d'un linceuil de coton, on le met dans un cercueil, au milieu d'une salle éclairée par des flambeaux de cire: on redouble alors les cris & les pleurs au son [p. 374] des tambour de basque; les uns prient Dieu pour l'ame du défunt, les autres disent des vers à sa loüange; d'autres s'arrachent les cheveux; & d'autres se déchirent le visage, pour marquer leur douleur: cette folie touchante & ridicule dure jusqu'à ce que les religieux viennent lever le corps. Après avoir chanté quelques pseaumes, & fait les encensemens, ils se mettent en marche, tenant à la main droite une croix de fer, un livre de prieres à la gauche, & psalmodient en chemin: les parens & amis du défunt suivent, & continuent leurs cris avec des tambours de basque. Ils ont tous la tête rasée, qui est la marque du deuil. Quand on passe devant quelque église, le convoi s'y arrête; on fait quelques prieres, & ensuite on continue sa route jusqu'au lieu de la sépulture. Là on recommence les encensemens; on chante encore pendant quelques tems des pseaumes d'un ton lugubre, & on met le corps en terre. Les assistans retournent à la maison du défunt, où l'on leur fait un festin: on s'y trouve matin & soir pendant trois jours, & on ne mange point ailleurs. Au bout de trois jours, on se sépare jusqu'au huitieme; & de huit en huit jours, on se rassemble pendant un certain espace de tems, pour pleurer le défunt, & manger chez lui.

Au surplus, les gens curieux de parcourir les folies des hommes en fait de funérailles, les trouveront semées dans le grand ouvrage des cérémonies religieuses, & rassemblées dans le petit traité de Muret, pere de l'Oratoire, des cérémonies funebres de toutes les nations. Paris 1675. in - 12. (D. J.)

Funérailles (Page 7:374)

Funérailles des Chrétiens, (Hist. mod. ecclésiast. ) « Les Chrétiens de la primitive Eglise, dit M. l'abbé Fleury, pour mieux témoigner la foi de la résurrection, avoient grand soin des sépultures, & y faisoient grande dépense, à proportion de leur maniere de vivre: ils ne brûloient point les corps, comme les Grecs & les Romains; ils n'approuvoient pas non plus la curiosité superstitieuse des Egyptiens, qui les gardoient embaumés & exposés à la vûe sur des lits dans leurs maisons; mais ils les enterroient selon la coûtume des Juifs. Après les avoir lavés, ils les embaumoient, & y employoient plus de parfums, dit Tertullien, que les Payens à leurs sacrifices; ils les enveloppoient de linges très - fins ou d'étoffes de soie; quelquefois ils les revêtoient d'habits précieux; ils les exposoient pendant trois jours, ayant grand soin de les garder cependant & de veiller auprès en prieres: ensuite ils les portoient au tombeau, accompagnant le corps avec quantité de cierges & de flambeaux, chantant des pseaumes & des hymnes pour loüer Dieu, & marquer l'espérance de la résurrection. On prioit aussi pour eux; on offroit le sacrifice; & l'on donnoit aux pauvres le festin nommé agapes, & d'autres aumônes. On en renouvelloit la mémoire au bout de l'an; & on continuoit d'année en année, outre la commémoraison qu'on en faisoit tous les jours au saint sacrifice.

L'Eglise avoit ses officiers destinés pour les enterremens, que l'on appelloit en latin fossores, laborantes, copiatoe, c'est - à - dire fossoyeurs ou travailleurs, & qui se trouvent quelquefois comptés entre le clergé. On enterroit souvent avec les corps différentes choses pour honorer les défunts, ou pour en conserver la mémoire; comme les marques de leur dignité, les instrumens de leur martyre, des phioles ou des éponges pleines de leur sang, les actes de leur martyre, leur épitaphe, ou du - moins leur nom, des médailles, des feuilles de laurier ou de quelqu'autre arbre toûjours verd, des croix, l'évangile. On observoit de poser le corps sur le dos, le visage tourné vers l'orient. Les Payens, pour garder les cendres des morts, bâtissoient des sépulcres magnifiques le long des grands chemins, & par - tout ailleurs dans la campagne. Les chrétiens au contraire cachoient les corps, les enterrant simplement ou les rangeant dans des caves, comme étoient auprès de Rome les tombes ou catacombes. Voyez Catacombes.

Les anciens cimetieres ou lieux où l'on déposoit leurs corps, sont quelquefois appellés conciles des martyrs, parce que leurs corps y étoient assemblés; ou arenes, à cause du terrein sablonneux. En Afrique, on nommoit aussi les cimetieres des aires.

On a toûjours eu grande dévotion à se faire enterrer auprès des martyrs; & c'est ce qui a enfin attiré tant de sépultures dans les églises, quoique l'on ait gardé long - tems la coûtume de n'enterrer que hors des villes. La vénération des reliques & la créance distincte de la résurrection, ont effacé parmi les Chrétiens l'horreur que les anciens, même les lsraélites, avoient des corps morts & des sepultures ». Moeurs des chrétiens, art. 31.

Cette coûtume d'enterrer les morts, & de les porter au lieu de leur sépulture en chantant des pseaumes, a toûjours été observée parmi les Chrétiens; les cérémonies seulement ont varié suivant les tems & les usages. M. Lancelot, dans un mémoire sur une ancienne tapisserie, qui représente les faits & gestes de Guillaume le Conquérant, observe que dans un morceau de cette tapisserie sont figurees les cérémonies des funérailles d'Edoüard le confesseur, qui ont beaucoup d'affinité avec celles qui se pratiquent encore aujourd'hui en pareil cas: « On y voit Edoüard mort & étendu sur une espece de drap mortuaire parsemé de larmes, dans lequel deux hommes, l'un placé à la tête l'autre aux piés, arrangent le corps. A côté est un autre homme debout, tenant deux doigts de la main droite élevés; cette attitude & son habillement, qui paroît ressembler à une chasuble, désignent un prêtre qui lui donne les dernieres bénédictions. . . . . On y voit aussi une église. . . . . & un homme par lequel on a voulu désigner les sonneurs de cloches. . . . . La bierre est portée par huit hommes; elle est d'une figure presque quarrée, traversée de plusieurs bandes, & chargée de petites croix & autres ornemens: de ces huit hommes quatre sont en - devant, & les quatre autres derriere; ils la portent sur leurs épaules par le moyen de longs bâtons excédans la bierre, 2 à chaque bâton: c'étoit alors la maniere de porter les morts.....cetusage s'est même conservé jusqu'à nos jours; & les hanovars ou porteurs de sel, qui avoient le privilége de porter les corps ou les essigies de nos rois, porterent encore le corps ou l'effigie d'Henri IV. de la même maniere sur leurs épaules en 1610. Dans cette même tapisserie, aux deux côtés de la bierre, paroissent deux autres hommes, qui ont une sonnette en chaque main. L'usage d'avoir des porteurs de sonnettes dans les pompes funebres, & qui subsiste encore en la personne des jurés - crieurs, lorsqu'ils vont faire leurs semonces, est tres - ancien. Suidas, & un ancien scholiaste de Théocrite, en parlent; on les appelloit alors codonophori; ils ont été depuis connus sous le nom de pulsatores & exequiates, & leurs sonnettes, campanoe manuales pro mortuis, ou campana bajuloe....... à la suite du cercueil, on voit un grouppe de personnes qui semblent toutes fondre en pleurs & en gémissemens ». Mémoires de l'académie, tome VIII.

La description des funérailles de ce roi, conformes à la simplicité de ces tems - là, montrent que les usages & les cérémonies en étoient toutes semblables à celles qui se pratiquent aujourd'hui dans les funérailles des particuliers: car on sait que parmi les catholiques, des qu'un homme est mort, les juréscrieurs, pour les personnes qui ont le moyen de les employer, préparent les tentures, drap mortuaire, croix, chandeliers, luminaire, & autres choses né<pb->

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