ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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Le frêne de la grande espece. C'est celle qui croît communément en France, & à laquelle on peut le mieux appliquer ce qui vient d'être dit en géneral.

Le frêne de la grande espece, à feuilles panachées de jaune. C'est une variété qui n'a de mérite que pour les curieux en ce genre: il est vrai qu'elle est d'une belle apparence. On peut la multiplier par la greffe sur l'espece commune.

Le frêne à feuilles rondes. Cette espece croît en Italie, mais elle est encore très - peu connue en France. On croit que c'est sur cet arbre que l'on recueille la manne qui nous vient de Calabre.

Le frêne nain, ou le frêne de Montpellier. Les feuilles de cet arbre sont plus courtes & plus étroites que dans toutes les autres especes de fréne: il se garnit de beaucoup de rameaux, & prend très - peu de hauteur.

Le fréne à fleurs. Cet arbre est originaire d'Italie; il croît plus lentement que notre frêne commun, & s'éleve beaucoup moins; sa feuille est aussi plus petite à tous égards, son bois plus menu, & l'arbre se garnit d'un plus grand nombre de rameaux. Il donne au mois de Mai des grappes de fleurs aussi grosses que les bouquets du lilas, & qui, quoique d'un blanc un peu jaunâtre, sont d'une assez belle apparence; elles rendent même une odeur qui de - loin n'est point desagréable: ses graines, qui sont plus larges que celles de l'espece commune, levent dès la premiere année, quand on a eu soin de les semer de bonne heure en automne. Cet arbre est de tous les différens frênes celui que l'on doit le plus employer dans les jardins d'agrément, tant par rapport à ses fleurs, que parce qu'on peut lui former une jolie tête, & qu'il s'accommode de tous les terreins; & il a de plus l'avantage de n'être pas sujet à être endommagé par les mouches cantharides, à - moins qu'il ne se trouve mêlé avec d'autres especes de frêne.

Le frêne à feuilles de noyer. Cet arbre a le bois plus gros & les feuilles plus grandes que toutes les autres especes de son genre; elles sont d'un verd assez tendre; elles ont au premier aspect quelque ressemblance avec celles du noyer; mais elles ont une odeut forte & desagréable, quand on les presse entre les doigts.

Le frêne de la Nouvelle - Angleterre. C'est un joli arbre, qui ne s'éleve guere qu'à vingt - cinq piés: son écorce, quand il est dans sa force, est remplie de gersures d'une couleur jaunâtre, qui la font ressembler a celle de l'orme. Sa feuille n'est composée que de trois ou quatre paires de petites feuilles qui sont plus éloignées entre elles, & qui sont terminées par une pointe plus alongée que dans les autres eipeces de frêne. Cet arbre & le précédent veulen: absolument un terrein bas & humide; ils ne font aucun progrès dans les lieux secs & élevés, quoiqu'il y ait de la profondeur & un bon sol. Il y a plusieurs plants de cet arbre dans la pepiniere de la province de Bourgogne, établie à Montbard, qui n'ont point encore produit de graine, quoiqu'ils soient âgés de quinze ans, & qu'ils ayent environ vingt piés de hauteur.

Le frêne blanc d'Amérique. C'est une nouvelle espece, qui est venue de graines envoyées d'Angleterre, & qui provenoient d'Amérique. La couleur de son écorce est d'un gris cendré; & sa feuille a beaucoup de ressemblance avec celle du précédent, si ce n'est qu'elle est blanche & lanugineuse en dessous, & qu'elle est unie sur ces bords sans aucune dentelure; caractere particulier, qui distingue essentiellement cet arbre de toutes les autres especes de frênes que l'on vient de rapporter ici.

Toutes ces différentes sortes de frênes sont si robustes, qu'ils ne sont jamais endommagés par le froid des plus grands hyvers de ce climat: comme la plûpart ne produisent point encore de graine en France, on ne peut guere les multiplier que par la greffe, qui réussit très - bien sur le frêne commun. (c)

Frêne (Page 7:297)

Frêne, (Pharmac. Mat. medic.) son écorce, ses fcuilles, & ses graines contiennent un sel alumineux, tartareux, de saveur austere, acre & amere: le sel qu'on tire de son écorce est un alkali fixe, actif & corrosis. Le sel tartareux, acre & amer que les graines contiennent, est plus huileux & plus actif que celui de son écorce. M. Tournefort trouve que le sel essentiel du frêne est presque semblable à l'oxisal diaphorétique d'Ange - Sala, uni avec beaucoup de terre & de soufre. La décoction ou l'infusion de son ccorce, noircit la solution de vitriol, de même que la noix de galle.

On ordonne rarement ou jamais les feuilles de frêne: l'écorce de cet arbre a les propriétés de la noix de galle; elle est atténuante, sudorifique, & dessicative; le sel tiré des cendres de cette écorce excite puissamment les urines, mais c'est une propriété qui lui est commune avec les autres sels alkalis.

La graine de frêne est appellée dans les boutiques ornitnoglossum, ou lingua avis, parce qu'elle a en quelque maniere la figure d'une langue d'oiseau: c'est une graine extrèmement acre; elle donne dans la distillation une huile empyreumatique, que l'on rectifie autant qu'il est possible, pour lui ôter son odeur de feu. Le petit peuple d'Angleterre confit cette graine, ou plûtôt le fruit du frêne avant sa maturité, dans de la saumure de sel & de vinaigre, & il en use dans les fausses. Cette graine entre dans la mauvaise composition galénique nommée électuaire diasatyrion de Nicolas Myrepse. (D. J.)

FRENESIE, FRENETIQUE (Page 7:297)

FRENESIE, FRENETIQUE, voyez Phrénésie, Phrénétique.

FREQUENTATIF (Page 7:297)

FREQUENTATIF, adj. terme de Grammaire, c'est la dénomination que l'on donne aux verbes dérivés, dans lesquels l'idée primitive est modisiée par une idée accessoire de répétition; tels sont dans la langue latine les verbes clamitare, dormitare, dérivés de clamare, dormire. Clamare n'exprime que l'idée de l'action de crier; au lieu que clamitare, outre cette idée primitive, renferme encore l'idée modificative de répetition, de sorte qu'il équivaut à clamare soepè; criailler est le mot françois qui y correspond: de même dormere ne présente à l'esprit que l'idée de dormir; & dormitare ajoûte à cette idée primitive celle d'une répétition fréquente, de maniere qu'il signifie dormire frequenter, dormir à différentes reprises; c'est l'état d'un homme dont le sommeil n'est ni suivi ni continu, mais coupé & interrompu.

Le supin doit être regardé dans la langue latine; comme le générateur unique & immédiat, ou la racine prochaine des verbes fréquentatifs: l'on voit en effet que leur formation est analogue à la terminaison du supin, & qu'ils en conservent la consonne figurative: ainsi de saltum, supin de salio, vient saltare; de versum, supin de verto, vient versare; & d'amplexum, supin d'amplector, vient amplexari. D'ailleurs les verbes primitifs, auxquels l'usage a refusé un supin, sont également privés de l'espece de dérivation dont nous parlons, quoique l'action qu'ils expriment soit susceptible en elle même de l'espece de modification qui caractérise les verbes fréquentatifs.

Il faut cependant avoüer que le détail présente quelques difficultés qui ont induit en erreur d'habiles grammairiens: mais on va bien - tôt reconnoître que ce sont ou de simples écarts qui ont paru préférables à la cacophonie, ou des irrégularités qui ne sont qu'apparentes, parce que la racine génératrice n'est plus d'usage.

Ainsi dans la dérivation des fréquentatifs, dont les primitifs sont de la premiere conjugaison, l'usage qui tâche toûjours d'accorder le plaisir de l'oreille avec [p. 298] la satisfaction de l'esprit, a autorisé le changement de la voyelle a du supin générateur terminé en atum, afin d'éviter le concours desagréable de deux a consécutifs: au lieu donc de dire clamatare, rogatare, selon l'analogie des supins clamatum, rogatum, on dit clamitare, rogitare: mais il n'en est pas moins évident que le supin est la racine génératrice de cette formation.

Dans la seconde conjugaison, on trbuve hoerere, dont le supin hoesum semble devoir donner pour fréquentatif hoesare; & cependant c'est hoesitare: c'est que lesupin hoesum n'est effectivement rien autre chose que hoesitare, insensiblement altéré par la syncope; & ce supin hoesitum est analogue aux supins territum, latitum, des verbes terrere, latere de la même conjugaison, d'où viennent territare, latitare, selon la regle générale. Au reste, il n'est pas rare de trouver des verbes avec deux supins usités, l'un conforme aux lois de l'analogie, & l'autre défiguré par la syncope.

C'est par la syncope qu'il faut encore expliquer la génération des fréquentatifs des verbes qui ont la seconde personne du présent absolu de l'indicatif en gis, comme ago, agis; lego, legis; fugio, fugis. Priscien prétend que cette seconde personne est la racine génératrice des fréquentatifs agitare, legitare, fugitare: mais c'est abandonner gratuitement l'analogie de cette espece de formation, puisque rien n'empêche de recourir encore ici au supin. Pourquoi ago & lego n'auroient - ils pas eu autrefois les supins agitum & legitum, comme fugio a encore aujourd'hui fugitum, d'où fugitare est dérivé? Ces supins ont dû assez naturellement se syncoper. Les Latins ne donnoient à la lettre g que le son foible de k, comme nous le prononçons dans guerre: ainsi ils prononçoient agitum, legitum, comme notre mot guitarre se prononce parmi nous: ajoûtez que la voyelle i étant breve dans la syllabe gi de ces supins, les Latins la prononçoient avec tant de rapidité qu'elle échappoit dans la prononciation, & étoit en quelque sorte muette; de maniere qu'il ne restoit qu'agtum, legtum, où la foible g se change nécessairement dans la forte c, à cause du t qui suit, & qui est une consonne forte; l'organe ne peut se prêter à produire de suite deux articulations, l'une foible & l'autre forte, quoique l'orthographe semble quelquefois présenter le contraire.

C'est par ce méchanisme que sorbeo a aujour d'hui pour supin sorptum, qui n'est qu'une syncope de l'ancien supin sorbitu, qui a effectivement existé, puisqu'il a produit sorbitio; & c'est par une raison toute contraire que les verbes de la quatrieme conjugaison n'ont point de supin syncopé, & forment régulierement leurs frèquentatifs; parce que l'i du supin étant long, rien n'a pû en autoriser la suppression.

Il faut prendre garde cependant de donner deux frequentatifs à plusieurs verbes de la troisieme conjugaison, qui, d'après ce que nous venons d'exposer, paroîtroient en avoir deux; tels que canere, facere, jacere, qui ont cantare & cantitare, factare & factitare, jactare & jactitare. Les premiers, qui peut - être n'étoient effectivement que fréquentatifs dans leur origine, sont devenus depuis des verbes augmentatifs, pour exprimer l'idée accessoire d'étendue ou de plénitude que l'on veut quelquefois donner à l'action; & les autres en ont été tirés conformément à l'analogie que nous indiquons ici, pour les remplacer dans le service de fréquentatifs.

Il est donc constant, nonobstant toutes les irrégularités apparentes, que tous les verbes fréquentatifs sont formés du supin du verbe primitif; & cette conséquence doit servir à réfuter encore Priscien, & après lui la méthode de P. R. qui prétendent que les yerbes vellico & fodico sont fréquentatifs; outre que cette terminaison n'a aucun rapport au supin des primitifs vello & fodio, la signification de ces dérivés comporte une idée de diminution qui ne peut convenir aux fréquentatifs; & d'ailleurs les mêmes grammairiens regardent comme de vrais diminutifs, les verbes albico, candico, nigrico, frondico, qui ont une terminaison si analogue avec ces deux - là: par quelle singularité ne seroient - ils pas placés dans la même classe, ayant tous la même terminaison & le même sens accessoire?

Il est vrai cependant que l'idée primitive qu'un ver be dérivé renferme dans sa signification, y est quelquefois modifiée par plus d'une idée accessoire; ainsi sorbillare, avaler peu - à - peu & à différentes reprises, a tout - à - la - fois un sens diminutif & un sens fréquentatif. Donnera t - on pour cela plusieurs dénominations différentes à ces verbes? non sans doute; il n'en faut qu'une, mais il faut la choisir; & le fondement de ce choix ne peut être que la terminaison, parce qu'elle sert comme de signal pour rassembler dans une même classe des mots assujettis à une même marche, & qu'elle indique d'ailleurs le principal point de vûe qui a donné naissance au verbe dont il est question; car voilà la maniere de procéder dans toutes les langues; quand on y crée un mot, on lui donne scrupuleusement la livrée de l'espece à laquelle il appartient par sa signification; il n'y feroit pas fortune s'il avoit à - la - fois contre lui la nouveauté & l'anomalie: si l'on trouve donc ensuite des mots qui dérogent à l'analogie, c'est l'effet d'une altération insensible & postérieure.

Jugeons après cela si Turnebe, & Vossius après lui, ont eu raison de placer dormitare dans la classe des desidératifs, parce qu'il présente quelquefois ce sens, & spécialement dans l'exemple de Plaute, cité par Turnebe, dormitare te aiebas. Il faudroit donc aussi l'appeller diminutif, parce qu'il signifie quelquefois dormire leviter, comme dans le mot d'Horace, quandoque bonus dormitat Homerus; & augmentatif, puisque Ciceron l'a employé dans le sens de dormire altè. La vérité est que dormitare est originairement & en vertu de l'analogie, un verbe fréquentatif: & que les autres sens qu'on y a attachés depuis, découlent de ce sens primordial, ou viennent du pur caprice de l'usage. Une derniere preuve que les Latins n'avoient pas prétendu regarder dormitare comme desidératif, c'est qu'ils avoient leur dormiturire destiné à exprimer ce sens accessoire.

Nous remarquerons 1°. que tous les fréquentatifs latins sont terminés en are, & sont de la premiere conjugaison.

2°. Qu'ils suivent invariablement la nature de leurs primitifs, étant comme eux absolus ou relatifs; l'absolu dormitare vient de l'absolu dormire; le relatif agitare vient du relatif agere.

Voyons maintenant si nous avons des fréquentatifs dans notre langue. Robert Etienne dans sa petite grammaire françoise imprimée en 1569, prétend que nous n'en avons point quant à la signification; & soit que l'autorité de ce célebre & savant typographe en ait imposé aux autres grammairiens françois, ou qu'ils n'ayent pas assez examiné la chose, ou qu'ils l'ayent jugée peu digne de leur attention, ils ont tous gardé le silence sur cet objet.

Quoi qu'il en soit, il y a effectivement en françois jusqu'à trois sortes de fréquentatifs, distingués les uns des autres, & par la différence de leurs terminaisons, & par celle de leur origine: les uns sont naturels à cette langue, d'autres y ont été faits à l'imitation de l'analogie latine, & les autres enfin y sont étrangers, & seulement assujettis à la terminaison françoise. Il faut cependant avoüer que la plûpart de ceux des deux premieres especes ne s'employent guere que dans le style familier.

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