RECHERCHE | Accueil | Mises en garde | Documentation | ATILF | ARTFL | Courriel |
FROMENT (Page 7:334)
FROMENT, s. m. triticum, (Hist. nat. Bot.) genre
de plante à fleurs sans pétales, disposés par petits
paquets arrangés en forme d'épi. Chaque fleur est
composée de plusieurs étamines qui sortent d'un calice
écailleux, qui est le plus souvent garni de barbes.
Le pistil devient dans la suite une semence oblongue,
convexe d'un côté & sillonnée de l'autre: ces
semences sont farineuses & enveloppées dans la bale
qui a servi de calice à la fleur. Les petits paquets
de fleurs sont attachés à un axe dentelé, & forment
l'épi. Tournefort, instit. rei herb. Voyez
Froment (Page 7:334)
Destiné particulierement à la nourriture de l'homme,
son excellence le rend la matiere d'un commerce
nécessaire qui ajoûte encore à son prix. Voyez
M. de Buffon pense que le froment, tel que nous l'avons, n'est point une production purement naturelle; que l'existence de ce grain précieux n'est dûe qu'à la culture & à une longue suite de soins. En effet, on ne trouve point dans la nature de froment sauvage; mais il n'y a encore là - dessus que des expériences trop incertaines, pour que cette opinion probable soit au rang des vérités reconnues.
Le grain de froment semé en terre, germe & pousse plusieurs tiges hautes de quatre à cinq piés, dioites, entrecoupées de trois ou quatre noeuds, & accompagnées de quelques feuilles longues & étroites qui enveloppent la tige jusqu'à six pouces de l'épi.
Les épis placés au sommet de la tige sont écailleux, & forment un tissu d'enveloppes dont chacune renferme un grain: ce grain est oblong, arrondi d'un côté, sillonné de l'autre, & de couleur jaune.
On distingue plusieurs especes de froment; la différence en est legere: quant à la forme du grain, elle se fait remarquer principalement dans les epis. L'espece la plus commune & la meilleure est celle dont l'épi est blanchâtre, sans barbe, & seulement écailleux. Celle qui est connue sous le nom de blé bariu, n'est cependant pas non plus sans mérite: on l'appelle ainsi, parce qu'effectivement l'épi est couvert & surmonté de barbes, comme sont les épis de seigle; le grain en est ordinairement plus gros, la paille plus dure & plus colorée: on dit qu'il est moins sujet à verser; mais la farine en est moins blanche que n'est celle du blé sans barbe. Le blé de Smyrne, ou blé de miracle, produit plusieurs épis assemblés en bouquet au haut de la tige. Il a quelques avantages, & encore plus d'inconvéniens.
On seme tous ces grains en automne; ils levent, & doivent couvrir la terre pendant l'hyver: on les appelle blés d'hyver, pour les distinguer d'une autre espece de froment qu'on seme au printems, & qui est connue sous le nom de blé de Mars; il est communément barbu; mais on en voit aussi qui est sans barbe.
Ce blé, trop délicat pour soûtenir de fortes gelées, mûrit dans les années favorables, en même tems que celui qui a passé l'hyver. En général, il produit beaucoup moins de paille, & un peu moins de grain; il manque souvent: cependant c'est une ressource à ne pas négliger dans les terres argilleuses, & dans celles que les pluies d'hyvet battent aisement.
Quelle que soit l'espece du froment, la culture en est la même; & c'est à cette culture que nous devons principalement nous arrêter.
On sait qu'avant de confier le blé à la terre, on la laisse reposer pendant une année, qui s'employe en préparations; elles ont trois objets, d'ameublir la [p. 335]
On remplit le premier objet par les labours; le
second, par les fumiers, les terres, &c. le troisieme,
en faisant brouter par les troupeaux les herbes qui y
renaissent continueilement. Voyez
On donne aux terres depuis trois jusqu'à cinq labours,
selon leur qualité, & quelquefois selon le hasard
du tems. Lorsqu'on n'en veut donner que trois,
on ne fait le premier qu'après les semailles de Mars;
mais si vous en exceptez les glaises, que souvent on
ne peut labourer que trois fois, à cause de la difficulté
de saisir le moment convenable, il est toûjours
beaucoup plus avantageux de donner quatre labours
aux terres pendant l'année de jachere. Dans ce cas,
le premier labour se doit faire après les semailles des
bles, c'est - à - dire pendant le mois de Novembre; &
on laisse la terre en grosses mottes, exposée à l'action
des gelées qui servent beaucoup à la façonner: lorsqu'au printems elle est devenue saine, on donne le
second labour; & il est essentiel que ce soit par un
tems sec, sur - tout dans les terres un peu fortes. Il est
tres - utile de herser la terre quelques jours après ce
labour & les suivans; elle en est mieux divisée; &
les herbes qui auroient repris racine sont arrachées
de nouveau: mais il ne faut herser que par un beau
tems, & lorsque la terre est saine. Le troisieme labour
devient necessaire vers le commencement de
Juillet; & à la fin d'Août, on commence à donner
celui qui doit être le dernier, & qu'on appelle proprement
labour à ble. Il est essentiel que ce labour
soit fait au - moins quinze jours avant de semer le froment, lorsqu'on doit le couvrir avec la herse. La
nielle est plus à craindre, quand on seme sur un labour
frais. Pendant cette année de jachere, on choisit
un intervalle entre deux labours, pour engraisser
la terre. Le degré de putréfaction du fumier qu'on
veut y répandre, & la facilité des charrois, reglent
ce tems; la nature & les besoins de la terre doivent
décider de la qualité & de la quantité du fumier.
Voyez
On promene aussi pendant tout le printems & la plus grande partie de l'eté, les troupeaux sur les jacheres; elles leur sont tres - utiles, parce que les prairies étant occupées par le toin, il ne reste que tres peu de paturages proprement dits; & les troupeaux, beaucoup mieux que les labours, detruisent l'herbe qui renant continuellement. On seme le froment depuis la fin de Septembre jusqu'au commencement de Novembre. En géneral, on peut assûrer qu'il est avantageux de le semer de bonne heure. Il est bon que la plante acquerre une certaine force avant l'hyver; qu'elle ait le tems de s'etaler, de se faire de la racine & de la pampe. Si dans une année où l'hyver sera trop doux, ce peut être un inconvénient d'avoir seme trop tôt, l'expérience apprend qu'il y en aura dix ou l'on se repentira d'avoir semé trop tard. Il faut sur - tout se presser dans les pays où il y a beaucoup de gibier, lievres, perdrix, &c.
La quantité de lievres fait au blé un tort dont on ne peut se garantir par aucune précaution; celle de semer de bonne heure & de fumer un peu plus, est suffisante pour preserver du mal que peut faire une grande abondance de perdrix. Pour semer d'une maniere avantageuse, il faut que la terre ne soit pas trop humide; il est à souhaiter qu elle soit fraiche: mais il vaut mieux semer dans la poudre, que de trop attendre. La semence doit être choisie avec soin: il taut que ce soit du plus beau blé de l'annee; & les bons laboureurs vont l'acheter à quelque distance, parce que le bié, comme beaucoup d'autres plantes, degenere si on le laisse dans la même terre: on lessive cetie semence dans une cau de chaux; quelques
Dans les environs de Paris, on seme ordinairement un septier de ble, pesant deux cents cinquante livres, dans un arpent à vingt piés par perche: mais il est certain qu'un tiers de moins est suffisant dans une terre bien préparée par les labours & par l'engrais: on pourroit même avec succès en mettre encore moins.
Le froment semé un peu clair, est moins sujet à verser; la paille en est plus forte; les épis sont plus longs & plus gros; & la recolte en grain n'en est que plus abondante.
Lorsque la terre n'est ni seche ni froide, le blé leve au bout de quinze jours: après cela, si un reste de chaleur favorise encore la végétation, ses racines s'étendent dans l'intérieur de la terre; plusieurs tiges se préparent, & la pampe s'étale. Pendant l'hyver, la plante reste ordinairement dans un état d'inaction; & elle prend souvent une couleur un peu jaune, lorsque la terre devient trop humide. Au printems, le premier air doux la fait reverdir; la tige se forme & commence à monter: c'est alors qu'il faut nettoyer le blé des mauvaises herbes qui tendent à l'étouffer, & qui se multiplient malgré les précautions prises pendant l'année de jachere: il en est qu'il faut arracher avec la main, parce qu'elles ont des racines très - profondes; telles sont une herbe connue assez généralement sous le nom de nelle, une autre appellée amaroute en beaucoup d'endroits, & celle nommée queu: de renard.
Il en est d'autres, comme sont les chardons, qu'on détruit avec un instrument appellé sarcloir. Toutes ces plantes malfaisantes croissent beaucoup plus vite que le blé; elles l'étouffent; & si on les laisse monter, leurs semences infectent la terre au point que la destruction ne peut plus en être faite que par un travail de plusieurs années. Il faut donc une très grande attention à sarcler le blé: mais il faut que cette opération se fasse avant que la tige soit à une certaine hauteur: sans cela, elle seroit rompue; & on détruiroit la plante, au lieu de la favoriser.
Le ble fleurit vers la fin de Juin; chaque épi n'est
en fleurs que pendant un ou deux jours: alors les
pluies froides sont à craindre; elles font avorter une
partie des grains; un mois se passe entre la floraison
& la maturité. C'est pendant cet intervalle, qu'on
redoute avec raison les brouillards, qui lorsqu'ils
sont suivis du soleil, causent la maladie appellée
rouille. Quelle que soit la maniere dont les brouillards
agissent, leur effet malheureux n'est que trop
certain, les bles qui en ont été frappés ne grossissent
plus; les grains sont retraits, legers, & presque vuides: l'experience n'a point appris les moyens de prévenir
cet accident; & il paroît être de nature à tromper
toutes les précautions que nous pourrions prendre.
La rouille n'est à craindie que dans des années
humides & tardives. Cette maladie, quoique très fâcheuse,
l'est beaucoup moins que celle qu'on doit
appeller nielle, & qui fait quelquefois de grands ravages: mais l'humanité doit tout récemment aux
soins & à la sagacite de M. Tillet la découverte des
causes de cette maladie, & de plusieurs remedes qui
la préviendront ou même l'anéantiront dans la suite.
Voyez
Lorsque le froment approche de la maturité, la tige jaunit à l'endroit nommé le collet, c'est - à - dire à l'extrémité de la tige qui approche de l'epi.
Lorsqu'il en est à ce point, rien ne retarde plus les progres qui lui restent à faire: les pluies même sem<pb-> [p. 336]
La nouvelle méthode pour la culture des terres, &
sur tout pour celle du froment, a fait assez de bruit
pour être examinée ici. Si vous voulez vous en instruire,
lisez la fin de l'article
Les labours fréquens divisent, atténuent les molécules de la terre: mais cet avantage forcé n'est pas à comparer à celui qui résulte de la fermentation intérieure & sourde de ces mêmes parties, qui s'opere naturellement dans le repos, & qui est encore excitée par le fumier qu'on y ajoûte. On sait, qu'indépendamment des labours, on a besoin d'aider la terre par des engrais, en proportion de la quantité de récoltes qu'on lui demande. Il peut arriver qu'une très bonne terre brisée par des labours continuels, produise pendant quelque tems avec une abondance extraordinaire; mais ce seront ces efforts mêmes qui détruiront sa fécondité dans son principe; le repos long qui deviendra nécessaire, anéantira les avantages qu'on s'étoit promis. Indépendamment de ces principes généraux, on peut assûrer qu'il y a eu une erreur de calcul très - considérable, dans la comparaison qui a été faite entre cette culture nouvelle & l'ancienne.
Dans le détail de la dépense, ce qu'il en coûte pour sarcler devroit être doublé plus de six fois. On n'a pas vû de jardins, si l'on ne sait pas avec quelle assiduité il faut arracher les mauvaises herbes, que la culture rend vigoureuses & dominantes: la même chose arrive dans la nouvelle culture du froment; chaque labour amene la nécessité de sarcler de nouveau: ce n'est point une opération facile & prompte, comme celle qui se fait dans les blés ordinaires. Il faut arracher avec la main des herbes fortes, dont les racines s'étendent au loin dans une terre ameublie. Si leur tige se casse, on n'a rien fait. La répétition fréquente d'une opération aussi longue devient rebutante par les soins & les frais qu'elle exige. Il y a eu une autre erreur dans la comparaison des produits: on fait le parallele de ce que rend une terre cultivée à l'ordinaire, avec ce que donne la même quantité, suivant la nouvelle méthode. On établit la comparaison sur quelques arpens dont on a pris le plus grand soin, selon la nouvelle méthode. Pour que le parallele fût juste, il faudroit qu'on supposât l'ancienne pratiquée avec autant d'exactitude qu'elle pourroit l'être. Je connois des terres de qualité moyenne, qui ne sont bien cultivées que depuis deux ans, & dont chaque arpent a produit dix septiers de blé. Si
Lorsque le froment a été serré bien sec, on peut le garder assez long - tems en gerbes dans la grange. Cependant l'usage de le battre sur le champ est établi dans plusieurs pays. Cette opération se fait de différentes manieres, dont aucune ne paroît avoir sur l'autre un avantage bien marqué. Le grain étant sorti de l'épi, on le vanne pour le séparer encore de la paille legere des enveloppes qui s'est détachée avec lui. Après cela on le passe par le crible pour le nettoyer mieux, & on le porte dans le grenier. Pendant les premiers six mois on fait bien de le remuer tous les quinze jours. Après cela il suffit de le faire tous les mois; & la premiere année étant passée, on peut encore éloigner cette opération de quelques semaines Le froment se conserve de cette maniere pendant six ans au moins. M. Duhamel a éprouvé qu'on pouvoit porter cette conservation beaucoup plus loin, avec un grenier d'une construction particuliere. On y desseche d'abord le grain par le moyen d'un étuve, & l'on entretient ensuite ce premier dessechement à l'aide d'un ventilateur. M. Duhamel, sans rien oser assurer, présume avec de fortes raisons que cette maniere de traiter le blé doit le préserver d'une espece d'insectes très dangereux, qu'on appelle charençons, & contre lesquels on n'a trouvé jusqu'à - présent aucun remede sûr. Voyez le traité de M. Duhamel sur la conservation des grains.
L'importance dont est le froment pour la vie des hommes, en a soûmis d'une maniere particuliere la conservation & le commerce à la vigilance publique. La crainte de disettes a fait faire beaucoup de réglemens précaires, & fait naître plus d'une fois l'idée des magasins publics. Mais avec une connoissance mieux approsondie des hommes & des choses, on a vû que de tels magasins seroient nécessairement mal régis, & exposeroient à un monopole odieux une denrée aussi nécessaire. Voyez l'essai sur la police des grains par M. Herbert.
Il est étonnant qu'en France on ait pris pendant si
long - tems de fausses mesures sur un objet dont tant
d'autres dépendent. Il n'y a pas deux ans que le commerce
du blé étoit défendu d'une province à l'autre.
Souvent une partie des citoyens soûmis au même
maître mouroit de faim, pendant que la province
voisine étoit incommodée d'une abondance ruineuse
pour les cultivateurs. Cet abus ne pouvoit pas
échapper à la sagesse du gouvernement, & il a cessé.
Mais on ne peut pas penser aux avantages infinis
qui résulteroient de l'exportation libre du blé dans
un royaume aussi fertile, sans être affligé que cet encouragement
soit encore refusé à l'agriculture. Voy.
The Project for American and French Research on the Treasury of the French Language (ARTFL) is a cooperative enterprise of Analyse et Traitement Informatique de la Langue Française (ATILF) of the Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS), the Division of the Humanities, the Division of the Social Sciences, and Electronic Text Services (ETS) of the University of Chicago.