ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"176"> Modestus, (in modo constans.) Molestus, (pro mole stans.) Moestus, (in moerore constans.) Honestus, (in honore constans.) Scelestus, (in scelere constans.)

3°. Dans les verbes, la terminaison scere ajoûtée à quelque radical significatif par lui - même, donne les verbes inchoatifs, c'est - à - dire ceux qui marquent le commencement de l'acquisition d'une qualité ou d'un état; cette terminaison paroît avoir été prise du vieux verbe escere, esco, dont on trouve des traces dans le II. livre des lois de Cicéron, dans Lucrece, & ailleurs. Ce verbe, dans son tems, signifioit ce qu'a signifié depuis esse, sum, & a été consacré dans la composition à exprimer le commencement d'être. Selon ce principe, Calesco, je commence à avoir chaud, je m'échauffe, équivaut à calidus esco. Frigesco, je commence à avoir froid, (frigidus esco.) Albesco, (albus esco.) Senesco, (senex esco.) Duresco, (durus esco.) Dormisco, (dormiens esco.) Obsolesco, (obsoletus esco.)

Une observation qui confirme que le vieux mot escere est la racine de la terminaison de cette espece de verbes, c'est que comme ce verbe n'avoit ni prétérit ni supin (voyez l'article Prétérit, où nous en ferons voir la cause), les verbes inchoatifs n'en ont pas d'eux - mêmes: ou ils les empruntent du primitif d'où ils dérivent, comme ingemisco, qui prend ingemui de ingemo; ou ils les forment par analogie avec ceux qui sont empruntés, comme senesco qui fait senui; ou enfin ils s'en passent absolument, comme dormisco.

Cette petite excursion sur le système des formations latines, suffit pour faire entrevoir l'utilité & l'agrément de ce genre d'étude: nous osons avancer que rien n'est plus propre à déployer les facultés de l'esprit; à rendre les idées claires & distinctes; & à étendre les vûes de ceux qui voudroient, si on peut le dire, étudier l'anatomie comparée des langues, & porter leurs regards jusque sur les langues possibles. (E. R. M.)

Formation (Page 7:176)

Formation, en terme de Philosophie; c'est l'action par laquelle une chose est produite: ainsi on dit, la formation du foetus, (voyez Foetus); la formation des pierres, des métaux dans le centre de la terre. Voyez Pierre, Métal, &c.

Formation s'employe aussi, en Géométrie, dans le même sens que le mot génération, pour désigner la maniere dont une courbe, une surface, un corps est engendré. Voyez Engendrer. Ainsi on dit, la formation des sections coniques dans le cone se fait par un plan qui coupe le cone de différentes manieres, &c.

Enfin formation se dit aussi en Algebre; on dit la formation d'une équation, pour désigner la suite des opérations qui conduisent à cette équation: on dit dans le même sens, la formation des puissances de tel ou tel nombre, telle ou telle quantité, &c. voyez Puissance. On dit aussi, former une table de nombres, de quantités qui ont rapport à quelque objet, pour dire, calculer & construire cette table. (O)

FORME (Page 7:176)

FORME, s. f. (Métaphysique.) on définit ordinairement la forme, ce qui est de moins commun & de plus particulier ou de plus aistingué dans un être. Quoique par cette définition, la forme semble pouvoir convenir aux esprits aussi - bien qu'aux corps, néanmoins, dans l'usage ordinaire, la forme, aussi - bien que la matiere, s'attribue aux seuls corps. Je définirois volontiers la forme des corps (laquelle est à la portée de notre esprit, & dont nous pouvons juger), la mesure ou portion de mouvement & d'arrangement, qui nous détermine à donner à certaine partie de la matiere une dénomination particuliere, plûtôt que toute autre dénomination.

Je ne parle pas ici de cette forme qu'on supposeroit consister dans un germe ou un atome particulier; elle surpasseroit la sagacité de nos sens, puisque nous n'avons rien à dire de ce que nous ne pouvons connoître, & que nous ne connoissons rien dont l'idée primitive ne nous soit venue par la voie de l'expérience & des sensations.

Au reste, ce que nous avons dit de la forme ordinaire des corps, suffit pour nous donner distinctement à entendre tout ce que nous comprenons sous le nom de forme purement corporelle. Il ne faut pourtant pas croire que par - là nous puissions discerner toûjours en quoi consiste précisément la forme de chaque corps, c'est à - dire en quel degré de mouvement, d'arrangement, de situation, & de configuration de ses parties les plus petites, consiste la forme de chaque corps; c'est de quoi s'occupe la Physique, & souvent avec assez peu de succès. Cependant l'analogie d'une forme à l'autre, & celle des corps que nous connoissons à ceux que nous ne connoissons pas, nous donne en général quelque idée de la forme des corps. Ainsi il arriveroit à tout homme sensé, qui n'auroit jamais vû de la farine & du pain, d'y trouver d'abord à - peu près la même différence de forme & même de substance, qu'entre du cuivre & de l'or: mais quand nous lui aurons fait connoître que la substance du pain n'est autre chose que de la farine dont les parties se sont rapprochées par la conglutination de l'eau, qui l'a rendue pâte, & ont encore été serrées par la cuisson qui l'a fait devenir pain, il jugera bientôt que l'eau & le feu n'y ont apporté d'autre changement, sinon celui qui s'est fait par les qualités que nous nommons couleur & dureté.

Nous jugerons de même qu'avec un changement pareil, dans un degré plus ou moins considérable, & avec plus ou moins de tems, ce qui est aujourd'hui du plomb ou du cuivre pourroit bien devenir tout autre métal, & peut - être de l'or. Article tiré des papiers de M. Formey.

Les philosophes scholastiques distinguent la figure de la forme, en ce que la premiere est la disposition des parties extérieures du corps; & la seconde, celle des parties intérieures: c'est ce qui donne lieu à cette scène si plaisante du mariage forcé, où Pancrace, docteur péripatéticien, soûtient qu'on doit dire la figure d'un chapeau, & non la forme, & croit que l'état est renversé par l'usage contraire.

Forme substantielle (Page 7:176)

Forme substantielle, (Métaphysique.) terme barbare de l'ancienne philosophie scholastique, dont on s'est principalement servi pour désigner de prétendus êtres matériels qui n'étoient pourtant pas matiere. Nous ne nous chargeons pas d'expliquer ce que cela signifie: nous dirons seulement, que la question si épineuse de l'ame des bêtes a donné occasion à cette opinion absurde. Voici, selon toutes les apparences, par quels degrés les Scholastiques y ont été conduits, c'est - à - dire par quelle suite de raisonnemens ils sont parvenus à déraisonner.

Si les bêtes sentent, pensent, & même raisonnent, comme l'expérience paroît le prouver, elles ont donc en elles un principe distingué de la matiere: car ce seroit renverser les preuves de la spiritualité de l'ame, que de croire que Dieu puisse accorder à une substance étendue le sentiment & la pensée. Or si l'ame des bêtes n'est point matiere, pourquoi s'éteintelle à la destruction de leur corps? Pourquoi l'Etre suprème ayant mis dans les animaux un principe de sentiment semblable à celui qu'il a mis dans l'homme, n'a - t - il pas accordé à ce principe l'immortalite qu'il a donnée à notre ame? La philosophie de l'éco<pb-> [p. 177] le n'a pû trouver à cette difficulté d'autre réponse, sinon que l'ame des betes étoit matérielle sans être matiere; au lieu que l'ame de l'homme étoit spirituelle: comme si une absurdité pouvoit servir à résoudre une objection; & comme si nous pouvions concevoir un être spirituel sous une autre idée que sous l'idée négative d'un étre qui n'est point matiere.

Les philosophes modernes, plus raisonnables, conviennent de la spiritualité de l'ame des bêtes, & se bornent à dire qu'elle n'est pas immortelle, parce que Dicu l'a voulu ainsi.

Mais l'experience nous prouve que les bêtes souffrent; que leur condition sur ce point est à - peu - pres pareille à la nôtre, & souvent pire. Or pourquoi Dieu, cet être si bon & si juste, a - t - il condamné à tant de peines des êtres qui ne l'ont point offensé, & qu'il ne peut même dédommager de ces peines dans une vie future? Croire que les bêtes sentent, & par contéquent qu'elles souffrent, n'est - ce pas enlever à la religion le grand argument que saint Augustin tire des souffrances de l'homme pour prouver le péché originel? Sous un Dieu juste, dit ce pere, toute créature qui souffie doit avoir péché.

Descaries, le plus hardi, mais le plus conséquent des Philosophes, n'a trouvé qu'une réponse à cette objection terrible: ç'a été de refuser absolument tout sentiment aux animaux; de soûtenir qu'ils ne souffrent point; & que destinés par le créateur aux besoins & au service de l'homme, ils agissent en apparence comme des êtres sentans, quoiqu'ils ne soient reellement que des automates. Toute autre réponse, de quelques subtilités qu'on l'enveloppe, ne peut, selon lui, mettre à couvert la justice divine. Cette metaphysique est spécieuse sans doute. Mais le parti de regarder les bêts comme de pures machines, est si révoltant pour la raison, qu'on l'a abandonné, nonobstant les conséquences apparentes du système contraire. En effet comment peut - on espérer de persuader à des hommes raisonnables, que les animaux dont ils sont environnés, & qui, à quelques legeres différences pres, leur paroissent des êtres semblables à eux, ne sont que des machines organisées? Ce seroit s'exposer à nier les verites les plus claires. L'instinc qui nous assûre de l'existence des corps, n'est pas plus fort que celui qui nous porte à attribuer le sentiment aux animaux.

Quel parti faut - il donc prendre sut la question de l'ame des bêtes? Croire, d'après le sens commun, que les bêtes souffrent; croire en même tems, d'après la religion, que notre ame est spirituelle & immorte'le, que Dieu est toujours sage & toûjours juste; & savoir ignorer le reste.

C'est par une tuite de cette même ignorance, que nous n'expliquerons jamais comment les animaux, avec des organes pareils aux nôtres, avec des sensations semblables, & souvent plus vives, restent bor nés à ces mêmes sensations, sans en tirer, comme nous, une foule d'idees abstraites & reflechies, les notions metaphysiques, les langues, les lois, les Sciences, & les Arts. Nous ignorerons du - moins jusqu'où la reflexion peut porter les animaux, & pourquoi elle ne peut les porter au - delà. Nous ignorerons aussi toujours, & par les mêmes raisons, en quoi consiste l'inégalite des esprits; si cette inegalite est dans les ames, ou depend uniquement de la disposition du corps, de l'éaucation, des circonstances, de la societé; comment ces différentes causes peuvent influer si différemment sur des ames qui seroient toutes egales d'ailieurs; ou comment des substances ples peuvent être inégales par leur nature. Nous ignorerons si l'ame pense ou sent toûjours; si la pensée est la substance de l'ame, ou non; si elle peur subsister sans penser ou sentir; en quel tems l'ame commence à être unie au corps, & mille autres choses semblables. Les idées innées sont une chimere que l'expérience reprouve: mais la maniere dont nous acquérons des sensations & des idées réfléchies, quoique prouvée par la même expérience, n'est pas moins incompréhensible. Toute la Philosophie, sur une infinité de matieres, se borne à la devise de Montagne. L'intelligence supreme a mis au - devant de notre vûe un voile que nous voudrions arracher en vain: c'est un triste sort pour notre curiosité & notre amour - propre; mais c'est le sort de l'humanité.

Au reste, la définition que nous avons donnée du mot forme substantielle, ne doit pas s'appliquer à l'usage qui est fait de ce même mot dans le premier canon du concile général de Vienne, qui décide contre le cordelier Pierre Jean d'Olive, que quiconque osera soûtenir que l'ame raisonnable n'est pas essentiellement la forme substantielle du corps humain, doit étre tenu pour héretique. Ce decret, qu'on auroit peut - être dû énoncer plus clairement, ne prouve pas, comme quelques incrédules l'ont prétendu, que du tems du concile de Vienne, on admettoit la matérialité de l'ame, ou du - moins qu'on n'avoit pas d'idée distincte de sa spiritualité: car l'Eglise ne peut ni se tromper, ni par conséquent varier sur cette matiere importante. Voyez Ame. Voyez aussi l'abregé de l'Histoire ecelesiastique, Paris 1751, sous l'année 1312. (O)

Forme (Page 7:177)

Forme, en Théologie, est une partie essentielle des sacremens.

La forme, selon les Théologiens, est tout ce qui sigmsie plus clairement ou plus distinctement la grace, ou ce qui determine la matiere à l'être sacramentel, suivant cette parole de S. Augustin (tract. 80. in Joan. n°. 3.): accedit verbum ad elementum, & fit socramentum.

En genéral la forme est une parole ou une priere qui exprime la grace & l'effet du sacrement; & on l'appelle ainsi, parce qu'elle détermine la signification plus obscure de ce qui sert de matiere.

Ce mot de forme aussi - bien que celui de matiere, étoit inconnu aux peres & aux anciens théologiens, qui disoient que les sacremens consistoient en choses ou en élémens, & en paroles: rebus seu elementis, & verbis. Vers le milieu du treizieme siecle, Guillaume d'Auxerre, théologien scholastique, imagina les mots de matiere & de forme, suivant le gout de la philosophie peripatéticienne, fort à la mode en ces tems là, & suivant la quelle on dnoit que la forme déterminoit la matiere à constituer tel ou tel être, plûtôt que tel ou tel autre être. Les modernes adopterent ces expressions, & l'Eglise elle - même s'en est servi. Le pape Eugene IV. dans son decret donné à Florence après le départ des Grecs, reunit l'ancienne & la nouvelle maniere de s'exprimer sur ce point: Omnia sacramenta, dit - il, tribus persiciuntur; videlicet rebus tanquam materia, verbis tanquam formâ, & per sonâ ministri conferentis sacramentum.

L'essence & la validité de tout sacrement demande donc qu'il y ait une forme particuliere & propre, relative à sa nature & à la grace qu'il signifie & qu'il confere.

Les Théologiens sont partagés pour savoir si Jesus - Christ a déterminé seulement en général ou en particulier les formes des sacremens. Chacun de ces lentimens a ses défenteurs; mais le premer paroit d'autant plus probable, qu'il suppose que J. C. a laissé à son Eglise la liberté & le pouvoir de determiner les formes des sacremens; & qu'à l'exception de la forme du baptême & de celle de l'eucharistie, on ne trouve point exprimées dans l'Ecriture les formes des autres sacremens, telles qu'elles sont usitees dans l'eglise greque & latine.

La maniere dont la forme est concûe, se réduit en général à deux especes: elle peut être conçue, ou en termes indicatifs, ou en maniere de priere;

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