ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"36"> tous les êtres qui ont vie, dont on a pû étudîer la structure (quelque différence qu'il y ait d'ailleurs dans leur organisation), n'annonce - t - elle pas cette universalité d'usages, cette necessité qui s'étend à tout le corps animé? & la propriété dissolvante qui vient d'être attribuée à la production du foie, portée dans toute la masse des humeurs, ne paroît elle pas prouvée par la considération que ce viscere est d'un volume d'autant plus grand dans les animaux, qu'ils ont leurs humeurs plus dilposées à perdre leur fluidité, ainsi qu'on l'observe, sur tout dans les poissons, où elles sont extrèmement visqueuses, glutineuses; que cette humeur manque dans quelques animaux, quant à la partie qui ne coule que dans le tems de la digestion, dans ceux qui ont une vésicule du siel, mais qu'elle se trouve dans tous, quant à la partie dont le flux est continuel & qui ne cesse d'étre portée dans la masse des humeurs? On ne peut donc pas se refuser raisonnablement à cesconsequences. Le foie doit donc être rangé parmi les visceres principaux, parmi ceux dont les usages sont généraux. Le cerveau, les poumons & le soie, sont les seuls qui reglent toute l'économie animale; les autres visceres ont des usages bornés, particuliers: ce seroit ranger le foie parmi ceux - ci, & n'admettre dans le bas - ventre aucun organe principal, de n'attribuer à ce viscere que des fonctions limitées, relatives à la seule digestion, & de ne pas porter plus loin ses vùes à l'égard d'une partie aussi importante. La considération de la maniere dont influent sur toutes les humeurs les vices qui peuvent affecter cette partie, doit achever de convaincre que le récrément qu'elle fournit est d'une utilité & d'une nécessité generale: effectivement la secrétion de la bile vient - elle à être diminuée, ou sa qualite dissolvante vient - elle à être altérée, affoiblie; il s'ensuit des obstructions, des engorgemens dans les autres organes secretoires, des embarras dans toute la circulation dans le cours des humeurs; & si au contraire la bile vient à être séparée, à être portée dans la masse des humeurs, à y refluer en trop grande quantité, il en résulte trop de fluidité, de division dans tous les fluides qui causent la decomposition des globules du sang, leur dissolution en globules séreux, jaunes; d'ou s'ensuivent les hémorrhagies, la jaunisse; d'où se rorment les hydropisies; d'où tirent leur cause les sueurs hectiques, les diarrhées colliquatives, les diabetes, ou toutes autres évacuations excessives qui ont rapport à celles - là, c'est à - dire qui proviennent du defaut de consistance des fluides, à raison de laquelle ils ne peuvent pas être retenus dans les vaisseaux qui leur sont propres; ils s'échappent par erreur de lieu, par anastomose, &c. & sont versés dans quelques cavités sans issue, ou portés tout - de - suite hors du corps. Voyez Foif (maladies du), Jaunisse, Obstruction, Hémorrhagie, Hydropysie , &c.

13°. Il suit de tout ce qui vient d'être dit pour établir que les effets de la bile portent sur toute la masse des humeurs, & que c'est - là son usage principal, & non pas de servir seulement dans les premieres voies en qualité de suc digestif, que ce dernier usage n'est que comme accessoire à celui pour lequel elle est essentiellement destinée: que dans le tems de la digestion, en tant qu'elle se méle avec les sucs alimentaires, cet usage secondaire n'est que le commencement de son exercice, & concourt à leur élaboration; exercice qui hors le tems de la digestion ne commence que par son mélange avec la lymphe des veines lactées, dont la bile tient les otifices toûjours ouverts en y pénétrant continuellement. Or puisqu'il est convenu que la bile a un flux continuel dans les intestins, qu'elle est continuellement portée dans la masse des humeurs par les voies du chyle; pourquoi les Physiologistes insistent - ils à ne regarder ce récrément que comme un suc digestif, principalement destine à la chylification? N'est - il donc, selon eux, d'aucun usage, quand il n'est pas employé pour celui - là, c'est - à - dire quand il n'y a pas des alimens dans les intestins? Concluons qu'ils ont été tout - au - moins inconséquens à cetégard, s'ils ont entrevû un usage plus genéral de la bile, sans le désigner expressément; ce qui a pû être une cause de bien des erreurs dans la théorie & la pratique médicinale, dans lesquelles les vraies connoissances des qualités de la bile & de ses effets doivent joüer un si grand rôle.

14°. Le cours de la bile, en tant qu'elle passe du foie par les premieres voies dans les secondes, & se méle à toute la masse des humeurs, n'est pas la seule route qu'elle tienne. Il est très - vraissemblable que comme une portion du chyle pénetre dans les veines mesaraiques, pour se mêler avec le sang de la veineporte (ce qui n'est guere contesté), sans doute pour en corriger la rancescence dominante; de même il passe avec le chyle une portion de bile, qui retourne ainsi dans le foie avec les qualités qu'elle y a acquises, & qu'elle n'a eu completement qu'à la sortie de ce viscere, c'est - à - dire lors de son excretion: ensorte que cette portion du récrément hépatique va opérer immédiatement sur le sang veineux & concrescible de la veine - porte, ses effets disselvans qui paroissent y être plus nécessaires que dans aucune autre partie du corps. Cette assertion semble pouvoir être mise hors de doute par l'observation de Vanhelmont (Sextu. digest.), & de plusieurs autres, qui ont trouvé que le sang des veines mésentériques est d'une qualité différente de celui des autres veines, qu'il n'est pas aussi susceptible de se coaguler, & qu'il est d'un rouge moins foncé; ce qu'il faut moins attribuer au mélange du chyle, qu'à celui de la bile, qui par sa qualite pénétrante est plus propre à produire cet effet que le suc des alimens, qui par lui - même seroit au contraire disposé à diminuer la flui lite des humeurs aux quelles il se mele. Il suit donc de cette seconde destination de la bile, que l'on peut concevoir une espece dé circulation d'une partie de ce récrément, qui etant sortie du foie pour être versée dans le canal intestinal, retourne au foie, étant aborbée, reprise par les veines du mesentere, & renouvelle continuellement ce cours pour l'usage qui vient d'être assigné; usage d'une aussi grande conséquence pour conserver la fluidite des humeurs dans les ramifications de la veine porte, que le mélange de la même bile à la masse des humeurs en général, est nécessaire pour les disposer à couler librement dans tous les vaisseaux du corps. Voyez sur cette propriété absorbante des veines mésentériques, les articles Veine & Mésentérique.

15°. Il reste encore à observer sur l'usage du récrément fourni par le foie, que son efficacité ne se borne pas à entretenir les qualités nécessaires dans les fluides animaux; qu'elle opere aussi sur les solides, non - seulement dans les premieres voies, en excitant, a nsi qu'il a été dit ci devant, le mouvement, l'action du canal intestinal, mais encore dans tout le systeme des vaisseaux sanguins & autres. Les humeurs imprégnées de la bile, portée dans les secondes voies avec le chyle qui en renouvelle la masse, sont pour ainsi dire armées d'une qualite stimulante dont l'esset, par leur seule application aux parois des vaisseaux, est d'en exciter l'irritabilité, d'en ranimer continuellement l'action systaltique; ce qui concourt à entretenir l'agitation, & consecuemment la fluidité des humeurs, ensorte que la bile sert de deux manieres à cette fin, en tant que meêlée avec elles, sa qualité physique dissolvante opere immédiatement, & que par le moyen de la propriété stimulante, elle fait agir les puissances méchaniques [p. 37] qui sont les principaux instrumens que la nature employe pour conserver cette fluidité. Le plus ou le moins d'activité dans la bile, considérée sous ce dernier rapport, doit donc influer plus ou moins sur le jeu des solides en général; sur l'exercice de toutes les fonctions, & particulierement de celles qui dépendent davantage de la disposition qu'ont les organes à l'irritabilité: cette activité doit donc décider beaucoup dans tous les animaux, pour former leur caractere, leur penchant dominant; mais dans l'homme sur - tout, quant au physique des inclinations, des passions, puisqu'elle le rend susceptible d'impressions plus ou moins vives par - tout ce qui l'affecte, soit au - dehors, soit au - dedans de la machine, & par - tout ce qui lui procure des perceptions, soit par la voie des sens, soit par celle de l'imagination. La bile contribue donc essentiellement à etablir la différence des tempéramens; ce qui est conforme à l'idée qu'en avoient les anciens. Voyez Temféramfnt, Passion. Ensorte que la bile doit être regardée comme une cause universelle, c'est - à - dire qui s'étend à tout dans toute l'économie animale. C'est donc avec bien de la raison, que les Medecins la regardent aussi comme une des causes générales de lésions dans cette même économie, par les vices que peut contracter cette production du foie, soit par ceux du sang qui fournit la matiere de la secrétion de ce viscere, soit par ceux des organes qui préparent & qui operent cette secrétion. Voyez ci - après Foie (Maladies du). (d)

Foie (Page 7:37)

Foie (Maladies du). La connoissance de la structure de ce viscere, des différens vaisseaux qui sont distribués dans sa substance, de la singularité du cours du sang qu'il reçoit, des différens viseeres qui préparent, founissent ce sang; de ses differentes qualités; de la fonction principale à laquelle il est destiné, par consequent de la secrétion qui s'y fait, & de la nature de l'humeur qui résulte de cette secrétion; cette connoissance, dis - je, bien établie, doit suffire pour inférer que le soie est non - seulement susceptible de toutes les lésions dont peuvent être affectés tous les autres organes du corps, mais qu'il est pius disposé qu'aucun autre à contracter les différens vices qui constituent ces lesions.

En effet comme il n'est aucune maladie qui ne deive sa cause à l'action trop forte ou trop foible des solides, à l'excès ou au défaut de mouvement des humeurs, à leur fluidite trop augmentée ou trop diminuée; il est aisé de conclure de tout ce qui a été expose ci - devant concernant le foie, que tous ces différens vices peuvent avoir lieu plus facilement dans ce viscere, que dans tout autre; ce qu'il seroit d'ailleurs trop long de prouver en détail: ainsi il suffira de la faire ici par des généralités qui donneront occasion d'indiquer les articles, dans lesquels il est suppleé à la briéveté de celui - ci.

1°. Les vaisseaux qui entrent dans la composition du foie étant la plûpart veineux, destinés cependant à faire les fonctions d'artere sans avoir des tuniques d'une force proportionnée, doivent, tout étant égal, avoir plus de disposition à pécher par le défaut de force elastique & systaltique; & à plus sorte raison, si l'on a égard à ce que les fluides contenus dans ces vaisseaux sont plus éloignés que dans aucune autre partie du corps, de la puissance impulsive, conservent très - peu du mouvement qu'ils en ont reçu, & le perdent de plus en plus par l'effet des résistances qu'ils éprouvent à être portes une seconde sois dans des vaisseaux de ferme artérielle, sans être aides par l'action immédiate d'aucun musele; action qui est d'un si gran l secours ailleurs pour entretenir la fluidité & le cours du sang dans les veines: de ce défaut peuvent suivre des engergemens, des dilatations forcées, des ruptures de vaisseaux; d'où peu<cb-> vent sésulter des effusions de sang dans les pores biliaires, & de - là dans les intestins, d'où se forme ce qu'on appelle flux hépatique.

2°. Les vaisseaux artériels qui sont distribués en petit nombre dans la substance du foie, participent à proportion aux mêmes vices que les vaisseaux veineux, à cause de la mollesse de ce viscere qui ne leur fournit pas de point d'appui propre à s'opposer à leur engorgement, qui peut être suivi des mêmes effets que dans tous autres vaisseaux de ce genre.

3°. L'on peut néanmoins concevoir qu'une partie des vaisseaux du foie est susceptible de pécher par trop d'action, & sont les vaisseaux colatoires de la bile, qui étant très - irritables, peuvent recevoir aisement de fores impressions de la moindre acrimonie contractée par ce récrément; ou de la trop grande irritation des parties voisines du foie, telles que l'estomac, les boyaux, causée par l'action trop violente de quelque médicament vomitif, purgatif: ou de l'éréthisme général, effet de la colere ou de toute autre passion violente, qui ébranle fortement le genre nerveux, &c. ce qui donne souvent lieu à des constrictions spatmodiques, convulsives, qui expriment trop fortement, trop promptement ce fluide, lequel étant versé dans le canal intestinal, continue à porter des impressions irritantes qui causent des douleurs d'entrailles, des diarrhées, des tenesmes, des dyssenteries; & ensuite étant porté dans le sang, augmente son alkalescence naturelle, stimule tous les vaisseaux. les fait agir avec plus de force; d'où suit une augmentation de mouvement & de chaleur qui constitue le genre de fievre qu'on appelle ardente, bilieuse (Voyez les articles de ces différentes maladies); ces irritations donnent lieu à des étranglemens qui arrêtent le cours de la bile, la détournent de la voie qui la porte dans les intestins, la font refluer dans les racines de la veine - cave, &c. d'où suivent les mêmes effets qui seront attribués aux vices de la bile, considérée comme péchant par trop de consistance.

4°. Ces différens vices dans les solides doivent contribuer d'autant plus facilement à en procurer aux fluides, que ceux - ci sont plus disposés à en contracter; en effet la quantité du sang de la plûpart des vaisseaux du foie (c'est - à - dire de toute la distribution de la veine - porte) lui étant commune avec celle du sang de toutes les veines du corps moins fluides, moins propres à couler dans les vaisseaux capillaires que le sang des arteres, destine cependant à être porté dans les divisions d'un vrai systeme artériel; ce sang doit avoir bien plus de difficulté à pénétrer dans ses vaisseaux: plus de tendance à s'y arrêter, à y former des embarras, des engorgemens, à s'y cotrompre, qu'il n'y a lieu à de pareils effets dans les autres parties du corps.

5°. Le vrai sang arteriel du foie doit aussi avoir plus de disposition (tout étant égal) à s'épaissir, à être filtré difficilement dans les passages étroits des arteres, dans les veines correspondantes, qu'il n'arrive dans les autres extrémités artérielles, à cause de la mollesse du viscere: d'où peuvent s'établir de vraies causes d'inflammation & de ses suites. Voyez Hépatique.

6°. La bile elle - même, à cause de la lenteur de son cours dans l'état naturel où elle n'a point d'acrimonie qui excite l'action des vaisseaux qui lui sont propres, doit être susceptible de perdre aisément sa fluidite nécessaire, par la disposition qu'ont ses parties inntes homogenes à se réunir entr'elles, à se séparer par conséquent des hétérogenes; à former des concretions de différentes natures, huileuses, salines, terreuses, conformément à ses différens principes & à celui d'entr'eux qui est dominant (voyez Bile): d'où ent des obstructions, des matieres

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