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Il faut convenir au reste que les géometres qui ont attaqué M. Newton sur la résistance des fluides, n'ont guere été plus heureux que lui. Les uns après avoir fondé sur le calcul une théorie assez vague, & avoir même crû que l'expérience leur étoit favorable, semblent ensuite avoir reconnu & l'insuffisance de leurs expériences mêmes, & le peu de solidité de leur théorie, pour lui en substituer une nouvelle aussi peu satisfaisante. Les autres reconnoissant de bonne - foi que leur théorie manquoit par les fondemens, nous ont donné, au lieu de vrais principes, beaucoup de calculs.
Ces considérations m'ont engagé à traiter cette matiere par une méthode entierement nouvelle, & sans rien emprunter de ceux qui m'ont précédé dans le même travail.
La théorie que j'expose dans mon ouvrage, ou plûtôt dont je donne l'essai, a ce me semble l'avantage de n'être appuyée sur aucune supposition arbitraire. Je suppose seulement, ce que personne ne peut me contester, qu'un fluide est un corps composé de particules très - petites, détachées, & capables de se mouvoir librement.
La résistance qu'un corps éprouve lorsqu'il en choque
un autre, n'est à proprement parler que la quantité
de mouvement qu'il perd. Lorsque le mouvement
d'un corps est altéré, on peut regarder ce mouvement
comme composé de celui que le corps aura
dans l'instant suivant, & d'un autre qui est détruit. Il
n'est pas difficile de conclure de - là, que toutes les
lois de la communication du mouvement entre les
corps, se réduisent aux lois de l'équilibre. C'est aussi
à ce principe que j'ai réduit la solution de tous les
problèmes de Dynamique dans le premier ouvrage
que j'ai publié en 1743. J'ai eu fréquemment l'occasion
d'en montrer la fécondité & la simplicité dans les
différens traités que j'ai mis au jour depuis; peut - être
même ne seroit - il pas inutile pour nous éclairer
jusqu'à un certain point sur la métaphysique de la percussion
des corps, & sur les lois auxquelles elle est assujettie.
V.
Cette ignorance n'a cependant pas empêché que l'on n'ait fait de grands progrès dans l'Hydrostatique; car les Philosophes ne pouvant déduire immédiatement & directement de la nature des fluides les lois de leur équilibre, ils les ont au moins réduites à un seul principe d'expérience, l'égalité de pression en tout sins; principe qu'ils ont regardé (faute de mieux) comme la propriété fondamentale des fluides, & celle dont il falloit déduire toutes les autres. En effet condamnés comme nous le sommes, à ignorer les premieres propriétés & la contexture intérieure des corps, la seule ressource qui reste à notre sagacité, c'est de tâcher au moins de saisir dans chaque matiere l'analogie des phénomenes, & de les rappeller tous à un petit nombre de faits primitifs & fondamentaux. La nature est une machine immense, dont les ressorts principaux nous sont cachés: nous ne voyons même cette machine qu'à - travers un voile qui nous dérobe le jeu des parties les plus délicates. Entre les parties les plus frappantes que ce voile nous laisse appercevoir, il en est quelques - unes qu'un même ressort met en mouvement, & ce méchanisme est ce que nous devons principalement chercher à démêler.
Ne pouvant donc nous flater de déduire de la nature
même des fluides, la théorie de leur résistance
& de leur action, bornons - nous à la tirer, s'il est
possible, des lois hydrostatiques, qui sont depuis
long - tems bien constatées. La découverte purement
expérimentale de ces lois supplée en quelque sorte
à celle de la figure & de la disposition des parties des
fluides, & peut - être rend le problème plus simple,
que si pour le resoudre nous étions bornés à cette
derniere connoissance; il ne s'agit plus que de développer
par quel moyen les lois de la résistance des
fluides, peuvent se déduire des lois de l'Hydrostatique. Mais ce détail demande une assez longue suite
de propositions, dont je ne pourrois présenter ici
qu'une esquisse fort imparfaite. Voy.
Quand je parle ici des bornes que la théorie doit se prescrire, je ne l'envisage qu'avec les secours actuels qu'elle peut se procurer, non avec ceux dont elle pourra s'aider dans la suite, & qui sont encore à trouver: car en quelque matiere que ce soit, on ne doit pas trop se hâter d'élever entre la nature & l'esprit humain un mur de séparation. Pour avoir appris à nous méfier de notre industrie, il ne faut pas nous en méfier avec excès. Dans l'impuissance fréquente que nous éprouvons de surmonter tant d'obstacles qui se présentent à nous, nous serions sans doute trop heureux, si nous pouvions au moins juger du premier coup - d'oeil jusqu'où nos efforts peuvent atteindre. Mais telle est tout à - la - fois le force & la foiblesse de notre esprit, qu'il est souvent aussi dangereux de prononcer sur ce qu'il ne peut pas que sur ce qu'il peut. Combien de découvertes modernes dont les anciens n'avoient pas même l'idée? Combien de découvertes perdues, que nous contesterions peut - être trop legerement? & combien d'autres que nous jugerions impossibles, sont reservées pour notre postérité?
Voilà les vûes qui m'ont guidé, & l'objet que je me suis proposé dans mon ouvrage qui a pour titre: Essai d'une nouvelle théorie de la résistance des fluides. Pour rendre mes principes encore plus dignes de l'attention des Physiciens & des Géometres, j'ai crû devoir indiquer en peu de mots, comment ils peuvent s'appliquer à différentes questions, qui ont un rapport plus ou moins immédiat à la matiere que je traite; telles que le mouvement d'un fluide qui coule soit dans un vase, soit dans un canal quelconque; les oscillations d'un corps qui flote sur un fluide, & d'autres problèmes de cette espece.
J'aurois desiré pouvoir comparer ma théorie de la résistance des fluides, aux expériences que plusieurs physiciens célebres ont faites pour la déterminer: mais après avoir examiné ces expériences, je les ai trouvées si peu d'accord entr'elles, qu'il n'y a ce me semble encore aucun fait suffisamment constaté sur ce point. Il n'en faut pas davantage pour montrer combien ces expériences sont délicates; aussi quelques personnes très - versées dans cet art, ayant entrepris depuis peu de les recommencer, ont presque abandonné ce projet par les difficultés de l'exécution. La multitude des forces, soit actives, soit passives, est ici compliquée à un tel degré, qu'il paroît presque impossible de déterminer séparément l'effet de chacune; de distinguer, par exemple, celui qui vient de la force d'inertie d'avec celui qui résulte de la tenacité, & ceux - ci d'avec l'effet que peut produire la pesanteur & le frotement des particules: d'ailleurs quand on auroit démêié dans un seul cas les effets de chacune de ces forces, & la loi qu'elles suivent, seroit - on bien fondé à conclure, que dans un cas où les particules agiroient tout autrement, tant par leur nombre que par leur direction, leur disposition & leur vîtesse, la loi des effets ne seroit pas toute différente? Cette matiere pourroit bien être du nombre de celles où les expériences faites en petit n'ont presque aucune analogie avec les expériences faites en grand, & les contredisent même quelquefois, où chaque cas particulier demande presqu'une expérience isolée, & où par conséquent les résultats généraux sont toûjours très - fautifs & très - imparfaits.
Enfin la difficulté fréquente d'appliquer le calcul
FLUIDITÉ (Page 6:890)
FLUIDITÉ, s. f. en Physique, est cette propriété,
cette affection des corps, qui les fait appeller ou qui
les rend fluides. Voyez
Fluidité est directement opposée à solidité. Voyez
Fluidité est distinguée d'humidité, en ce que l'idée
de la premiere propriété est absolue, au lieu que
l'idée de la derniere est relative, & renferme l'idée
d'adhérence à notre corps, c'est - à - dire de quelque
chose qui excite ou peut exciter en nous la sensation
de moiteur, qui n'existe que dans nos sens.
Ainsi les métaux fondus, l'air, la matiere éthérée,
sont des corps fluides, mais non humides; car leurs
parties sont seches, & n'impriment aucun sentiment
de moiteur. Il est bon de remarquer que liquide &
humide ne sont pas absolument la même chose; le
mercure, par exemple, est liquide sans être humide.
Voyez
Enfin liquide & fluide ne sont pas non plus absolument synonymes; l'air est un fluide sans être un liquide. &c. Voyez la fin de cet article.
Les Gassendistes & les anciens philosophes corpusculaires
ne supposent que trois conditions essen<pb->
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