ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"824"> quantité de salive. Il suit de ces faits, que l'écoulement de la salive n'est point un symptome particulierement propre à la perforation du canal salivaire; & que pour tarir cet écoulement lorsqu'il vient de la glande parotide, l'application des remedes dessicatifs ou des cathérétiques, & même la simple compression, sont les moyens capables de conduire à la consolidation parfaite de l'ulcere.

La guérison du canal salivaire ne s'obtient pas si facilement; il faut avoir recours à des moyens plus efficaces. Dans une plaie qui avoit ouvert le canal salivaire supérieur, & qui étoit restée fistuleuse, M. le Roy, chirurgien de Paris, jugeant qu'il employeroit inutilement les dessicatifs les plus puissans & les consomptifs les plus efficaces, imagina qu'il falloit ouvrir une nouvelle route, par laquelle la salive seroit portée dans la bouche comme dans l'état naturel. Il se servit d'un cautere actuel pour percer la joue du fond de l'ulcere dans la bouche, dans le dessein de causer une déperdition de substance, afin que la salive pût passer librement, sans qu'on eût à craindre l'obstruction de ce conduit artificiel avant la consolidation parfaite de l'ulcere extérieur. Et en effet, l'ouverture fistuleuse externe fut guérie en fort peu de tems & sans la moindre difficulté. Dans cette cure, la premiere que nous connoissions en ce genre, la Chirurgie a, pour ainsi dire, créé un nouveau conduit, & l'on a changé la fistule externe en une interne au grand soulagement du malade.

C'est en suivant les mêmes principes, quoique par un procédé un peu différent, que M. Monro, professeur de Chirurgie à Edimbourg, a guéri un ulcere de même nature. Le malade à chaque repas moüilloit entierement une serviette en huit doubles par la salive qui sortoit d'un petit trou qu'il avoit au milieu de la joue, à la suite de l'application d'un caustique. A l'inspection de cette maladie, M. Monro jugea qu'il falloit faire couler la salive dans la bouche par une ouverture artificielle: il pratiqua cette opération en dirigeant la pointe d'une grosse alêne de cordonnier dans l'ouverture du conduit, obliquement vers le dedans de la bouche & en - devant. Il passa un cordon de soie dans cette ouverture, & en lia les deux bouts vers l'angle de la bouche, sans serrer cette anse. Le passage dans lequel le cordon étoit engagé devint calleux; ce qu'on reconnut, dit M. Monro, par la liberté qu'on avoit de mouvoir le seton dans cette ou verture, sans causer de la douleur au malade. Au bout de trois semaines on retira le cordon, & l'ulcere extérieur guérit en très - peu de tems. Voilà quelles ont été jusqu'à présent les ressources connues de la chirurgie moderne contre la fistule du canal excréteur de Stenon. L'obligation où j'ai été de répondre à des consultations sur cette maladie, m'a fait faire des réflexions qui m'ont ramené à une méthode plus simple, plus douce, & beaucoup plus naturelle. L'opération proposée, malgré les succès qu'elle a eu, me paroît fort éloignée de la perfection qu'on doit chercher. L'orifice supérieur de l'ouverture artificielle qu'on pratique, se trouve plus éloignée de la source de la salive, que la fistule qu'on se propose de guérir; l'humeur doit donc avoir plus de facilité à sortir par le trou fistuleux extérieur que par l'ouverture intérieure; & il n'y auroit rien de surprenant, si après cette opération le malade restoit avec un trou fistuleux à la joue, qui permettroit à la salive de se partager également, & de couler en partie sur la joue & en partie dans la bouche. M. Coutavoz, membre de l'académie royale de Chirurgie, m'a communiqué un fait qui prouve la vérité de cette réflexion, & dont j'ai fait usage dans une dissertation sur cette matiere dans le III. yol. des mémoires de l'académie. J'ai traité en l'année 1753, un bourgeois de Paris, qui avoit un ulcere fistuleux au canal de Stenon: il en sortoit une quantité considérable de salive, sur - tout lorsqu'il parloit ou qu'il prenoit ses repas: son tempérament s'altéroit par la perte excessive de cette humeur. Je sondai le canal depuis la fistule jusqu'à la bouche, & je le trouvai parfaitement libre. La salive étoit portée dans ce conduit jusqu'auprès de son orifice dans sa bouche, où elle étoit arrêtée par le coude que le conduit salivaire fait à son extrémité; car en pressant legerement la joue depuis la commissure des levres vers la fistule, j'en faisois sortir une certaine quantité de salive. La résistance de l'embouchure du canal dans la bouche, déterminoit la sortie constante de la salive par l'ouverture de la fistule, qui ne présentoit aucun obstacle. Je me déterminai à rétablir l'usage naturel du conduit en le dilatant avec une meche composée de six brins de soie. Un fil en anse passé, au moyen d'une aiguille d'argent flexible, de l'orisice de la fistule dans la bouche, me servit à tirer cette meche. Cette opération ne causa pas la moindre douleur. Dès le jour même que le seton fut placé, il servit de filtre à la salive, il n'en coula plus sur la joue que quelques gouttes pendant que le malade mangeoit. Les jours suivans je passai legerement la pierre infernale sur les chairs de l'ulcere, parce qu'elles étoient fort molles. Cessant d'être abreuvées, elles devinrent bien - tôt fermes & vermeilles. Le dixieme je supprimai deux brins de la meche à l'occasion d'un peu de tension le long du canal. Le lendemain j'ôtai les autres. La salive continua de passer par la route naturelle, & la consolidation fut parfaite au bout de quelques jours. Le seton avoit augmenté le diametre du canal & redressé son extrémité, & l'on sait que la seule dilatation des orifices des conduits excréteurs, suffit pour procurer un écoulement abondant de l'humeur au passage de laquelle ils servent. La lecture de cette observation à l'académie royale de Chirurgie, a rappellé à M. Morand, qu'il avoit traité il y a quinze ans, un homme, lequel à la suite d'un abcès à la joue, portoit depuis un an une fistule au canal salivaire. M. Morand essaya de sonder le canal depuis la fistule jusque dans la bouche, & l'ayant trouvé libre, il y passa quelques brins de fil déroulés en forme de seton: cette pratique a eu le plus parfait succès. Ce fait confirme la doctrine que j'avois établie.

Les fistules urinaires viennent de l'écoulement de l'urine.

La perforation contre nature des parties qui servent à son séjour ou à son passage; les pierres retenues dans les reins, occasionnent quelquefois des abcès à la région lombaire, dont l'ouverture laisse passer l'urine. L'extraction de la pierre est absolument nécessaire pour pouvoir guérir ces conduits fistuleux. Voyez Néphrotomie. M. Verdier ancien professeur & démonstrateur royal d'Anatomie aux écoles de Chirurgie, rapporte dans un mémoire sur les hernies de la vessie, qu'un chirurgien de campagne avoit ouvert la vessie dans l'aine, croyant ouvrir un abcès. La sortie continuelle de l'urine par la plaie, ne laissa aucun doute sur le vrai caractere de la maladie primitive. Pour guérir une fistule de cette nature, il suffit de déterminer le cours des urines par la voie naturelle, au moyen d'une algalie. L'expérience a montré qu'il étoit utile dans ce cas, de faire coucher le malade du côté opposé à la plaie de l'aine. Voyez le mémoire de M. Verdier, dans le second volume de l'académie royale de Chirurgie. L'usage de la sonde est absolument nécessaire dans les plaies du corps de la vessie, pour empêcher l'épanchement de l'urine dans la capacité du bas - ventre; ce qui seroit une cause de mort. Barthelemi Cabrol, chirurgien de Montpellier & anatomiste royal de la faculté de Medecine, a vû en 1550 à Beaucaire, une fille de [p. 825] dix - huit à vingt ans, qui rendoit ses urines par l'ombilic alongé de quatre travers de doigt, & semblable à la crête d'un coq - d'inde. L'examen des parties inférieures fit reconnoître que cette maladie avoit été occasionnée dès la premiere conformation, par l'impersoration du méat urinaire. L'orifice de l'urethre étoit bouchée par une membrane fort mince: Cabrol l'ayant ouverte, l'urine sortit par la voie naturelle; il fit la ligature de l'excroissance du nombril, & en douze jours la malade fut parfaitement guérie. Nous avons rapporté à la fin de l'article Boutonniere, la cure d'une fistule urinaire, commune à la vessie & à l'urethre.

La fistule au perinée est un ulcere au canal de l'urethre & à la peau qui le recouvre, qui donne issue à l'urine.

Les plaies faites pour l'extraction de la pierre, restent quelquefois fistuleuses par la mauvaise disposition du malade, qui tombe dans une maigreur extrème: l'embonpoint renaissant, ces fistules se consolident facilement; quelquefois elles viennent de la mauvaise méthode de panser, lorsqu'on se sert indiscretement des bourdonnets, tentes, cannules, & d'autres dilatans. Voyez Bourdonnet. Si la fistule vient de cette cause, elle n'est entretenue que par des chairs calleuses: on la guérira en consommant ces duretés contre nature, par l'usage des trochisques de minium ou de quelque autre escarrotique.

La cause la plus fréquente des fistules au perinée, sont les dépôts gangreneux produits par la rétention des urines, à l'occasion des carnosités de l'urethre. Voyez Carnosité & Rétention d'urine.

Les fistules urinaires ne se font pas seulement au perinee, par la cause que nous venons de citer: la crevasse qui se fait à l'urethre entre l'obstacle & la vessie, laisse passer l'urine qui inonde le tissu cellulaire; elle produit des abcès gangréneux en différens endroits, au perinée, au scrotum, dans les aines, vers les cuisses, & quelquefois vers le haut jusqu'au - dessus de l'ombilic. On est obligé de faire l'ouverture de toutes ces tumeurs qui restent fistuleuses. On voit beaucoup de malades qui ont échappé au danger d'un pareil accident, & dont l'urine bouillonne par toutes ces issues toutes les fois qu'ils pissent. Le point essentiel pour la guérison de toutes ces fistules, est de procurer un cours libre à l'urine par une seule issue; soit en rétablissant le conduit naturel dans ses fonctions, ce qu'on peut obtenir de l'usage méthodique des bougies appropriées au cas, voyez Bougie & Carnosité; soit en faisant une incision au périnée, pour porter une cannule dans la vessie, afin que l'urine sorte directement, & cesse de passer par tous les sinus fistuleux. Voyez Boutonniere.

Le premier parti est le plus doux; il est par conséquent préférable, si la disposition des fistules permet qu'on réussisse par cette voie au moins ne prendrat - on pas pour modele de la conduite qu'on doit tenir en pareil cas, ces observations qui représentent un chirurgien occupé de l'ouverture de chaque sinus; qui exposent comme une belle opération, d'avoir disséqué beaucoup de parties, & d'avoir sacrifié le ligament suspenseur à la recherche de l'ouverture du canal de l'urethre, par laquelle l'urine s'étoit fait jour. Dès que, suivant le principe général qui doit servir de guide dans le traitement de toute fistule formée par la perforation d'un conduit excréteur, on aura procuré dans ce cas - ci une voie unique pour la sortie de l'urine, toutes les fistules qui n'étoient entretenues que par le passage contre nature de cette liqueur, se guériront presque d'elles - mêmes. Les callosités, s'il y en a, ne sont qu'accidentelles & n'empêchent pas la consolidation des sinus. On a même des exemples, que des malades déterminés à porter toute leur vie une cannule au périnée, l'ayant ôtée parce qu'elle les incommodoit en s'asseyant, ont éprouvé que l'urine qui coula d'abord en partie par la fistule, & en partie par la verge, n'a plus passé enfin que par la voie naturelle; parce que la fistule s'est resserrée peu - à - peu d'elle - même, & que le conduit artificiel s'est enfin oblitéré sans aucun secours.

On a des exemples de fistules de l'abdomen à la région du foie, par l'ouverture de la vésicule du fiel adhérente au péritoine. Ces fistules ne sont curables que par le rétablissement du cours de la bile, par le canal qui la dépose dans l'intestin duodenum. Si les pierres formées dans la vésicule du fiel empêchent la bile de couler, on peut en faire l'extraction. Voy. sur cette opération, le mémoire de M. Petit, sur les tumeurs de la vésicule du fiel, dans le premier volume de l'académie royale de Chirurgie.

Le second genre de fistules que j'ai établi par rapport à leurs causes, comprend celles qui sont formées ou entretenues par la présence d'un corps étranger: telles sont les balles de mousquet & les morceaux d'habits qu'elles poussent devant elles; enfin tous les corps venus du dehors, ou bien une esquille, une portion d'os carié, de membrane, ou d'aponévrose, qui doivent se détacher. V. Corps étranger, Carie, Exfoliation . Toutes ces choses en séjournant contre l'ordre naturel dans le fond d'une plaie ou d'un ulcere, entretiennent des chairs molles & fongueuses; elles fournissent une humidité sanieuse, qui empéche la consolidation extérieure & qui forme la fistule. Si l'ulcere fistuleux vient à se cicatriser extérieurement, ce n'est que pour un tems, la matiere forme des dépôts par son accumulation, & l'ouverture de ces sortes d'abcès conduit souvent le chirurgien au foyer de la tumeur, où il découvre la cause de la durée de la maladie. On ne guérira jamais les fistules produites par la présence d'un corps étranger quelconque, qu'en faisant l'extraction de ce corps; il ne peut pas y avoir d'autre indication. Pour la remplir il faut faire les incisions convenables, ou des contre - ouvertures, dont on ne peut déterminer généralement la direction & l'étendue par aucun précepte. On sent que ces incisions sont soûmises à autant de différences, qu'il y a d'especes de fistules sous ce genre, & qu'elles exigent beaucoup d'habileté de la part du chirurgien; un jugement sain qui lui fasse discerner la voie la plus convenable, & une grande présence des connoissances anatomiques, pour pénétrer dans le fond de ces fistules à - travers des parties délicates qu'il faut ménager. C'est dans ces cas que l'habitude ne peut conduire la main; les hommes qui n'ont pour tout mérite que de savoir marcher dans les routes qui leur ont été srayées, sont ici d'une foible ressource; la routine qu'ils honorent du nom d'expérience, ne peut que les rendre hardis, & conséquemment fort dangereux dans les conjonctures délicates, où le jugement & le savoir doivent guider la main.

Sous le troisieme genre de fistules, sont comprises celles qui sont produites par des chairs fongueuses, dures, & calleuses, que le séjour du pus a rendu telles, comme dans les fistules à l'anus; ou que la négligence, le mauvais traitement, l'usage des bourdonnets entassés les uns sur les autres, ont fait naître dans l'ulcere: en général ces sortes de fistules se guérissent par l'extirpation des callosités, ou avec l'instrument tranchant, ou par l'application des remedes caustiques.

La fistule à l'anus est un ulcere dont l'entrée est étroite, situé près de la marge du fondement, avec issue d'un pus fétide, & presque toûjours accompagné de callosités. Cette fistule est toûjours la suite d'un abcès plus ou moins considérable dans le tissu graisseux qui avoisine l'intestin rectum.

Les causes de l'abcès qui produit la fistule, sont

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