ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"826"> internes ou externes. L'inflammation qu'occasionne l'obstruction des hémorrhoïdes, est la cause interne la plus ordinaire: ainsi tout ce qui peut produire des hémorrhoïdes, doit être mis au nombre des causes cloignées de la fistule à l'anus. Voyez Hémorrhoïdes. Les causes externes sont les coups, les chûtes, les contusions de cette partie. Les personnes qui montent souvent à cheval y sont fort sujettes. L'excès des plaisirs vénériens, & enfin tout ce qui peut retarder & gêner le cours de la circulation du sang dans cette partie, y occasionne des inflammations, lesquelles se terminent facilement par suppuration, parce qu'il n'y a pas dans le tissu cellulaire de cette partie assez de ressorts pour resister à l'engorgement des humeurs: au contraire, les mouvemens du diaphragme & des muscles du bas - ventre, si nécessaires pour les principales fonctions naturelles, sont opposés au retour des fluides; & c'est la cause principale de la dilatation si fréquente des veines hémorrhoïdales. Les fis tules à l'anus viennent quelquefois des os ou corps étrangers qu'on a avalés, & qui se sont arrêtés au fondement.

La différence des fistules à l'anus se tire de leur ancienneté, de leur étendue, de leur complication, & de leurs issues: de leur ancienneté, en ce que les unes sont vieilles, & les autres récentes: de leur étendue, en ce que leur trajet est plus ou moins profond: de leur complication, en ce qu'elles peuvent ne former qu'un seul sinus, ou bien qu'elles sont accompagnées de clapiers, de plusieurs sinus, de beaucoup de callosités, d'abcès, & même de carie des es, de pourriture de l'intestin, &c. Les fistules different par leurs issues; & à raison de cette différence, elles sont completes ou incompletes. La fistule complete a une ouverture dans l'intestin, & une autre extérieurement. Les fistules incompletes ou borgnes, sont internes ou externes: celles - ci n'ont qu'une issue à la marge de l'anus, & ne pénetrent point dans l'intestin rectum: celles là n'ont point d'ouverture extérieure, & la matiere purulente coule par l'orifice fistuleux, ouvert dans l'extrémité du rectum.

Les signes diagnost ques de ces fistules sont faciles à appercevoir. A l'examen de la partie, on connoît par où le pus s'écoule, & l'on voit s'il y a un orifice extérieur. On ne peut juger de la profondeur des fistules qu'en les sondant, si elles sont externes; encore le contour des sinus fistuleux peut - il empêcher le stilet de pénétrer dans toute la longueur du trajet. La hauteur des fistules internes dans le rectum, se connoît en introduisant dans l'anus une tente de charpie couverte de quelque onguent, & assez longue: on verra dans quelle étendue elle sera tachée de la matiere qui découle du trou fistuleux.

Le prognostic se tire de la cause de la maladie, de ses différences, & de la bonne ou mauvaise disposition du sujet.

La cure exige d'abord un traitement préparatoire, relatif à cette disposition. La maladie locale présente des indications différentes, suivant les diverses circonstances. Un simple sinus qui n'est pas fort ancien, qui n'attaque pas le rectum, n'a besoin que d'être ouvert. Dès qu'on aura changé la disposition de l'ulcere, que son entrée aura été rendue large, & qu'on aura détergé le fond par les remedes convenables, il se fera une cicatrice solide. Si la fistule est complete, il faudra fendre tout ce qui est compris entre les deux orifices, & faire une scarification dans le fond, pour faire une plaie récente d'un sinus ancien: mais s'il y a des duretés & des clapiers, la cure ne peut être radicale qu'en emportant tout ce qu'il y a de calleux, soit par l'instrument tranchant, soit par les caustiques. On réussit par l'une & l'autre méthode. On donne en général la préférence à l'instrument tranchant, parce qu'on fait en une ou deux minutes ce qu'on n'obtiendroit que par l'application réitérée des caustiques, qui tourmentent cruellement le malade pendant plusieurs heures à chaque fois. Un praticien éclairé peut trouver des raisons de préférence pour le choix de l'une ou de l'autre méthode.

Après que le malade aura été préparé par les remedes généraux, & par des remedes particuliers si son état en exige, il faut avoir la précaution de le purger la veille de l'opération, de lui ôter tout aliment solide, & de lui faire prendre un lavement deux heures avant l'opération, afin de nettoyer l'intestin des matieres fécales que le malade pourroit lâcher au nez du chirurgien dans le tems de l'opération, ce qui seroit capable de l'empêcher de la finir avec la tranquillité nécessaire: ou bien ces matieres pourroient donner au malade des envies d'aller à la selle quelque tems après l'opération, ce qui obligeroit de lever l'appareil, & de laver ensuite la plaie; inconvéniens qu'il est bon de prévenir.

Pour faire l'opération, on fait mettre le malade sur le bord de son lit, qu'on a eu le soin de faire garnir d'un drap plié en plusieurs doubles, dans la situation où l'on le mettroit pour recevoir un lavement, de façon que la fesse du côté malade soit appuyée sur le lit. Un aide chirurgien à genoux sur le lit, pose un genou contre le malade dans l'angle que celui - ci forme par son corps & ses cuisses, pour qu'il ne puisse s'éloigner de l'opérateur: cet aide soûleve la fesse saine. On doit avoir d'autres aides pour contenir les jambes & les épaules du malade. Tout étant ainsi dispolé, & l'appareil convenable pour le pansement préalablement préparé, le chirurgien met un genou à terre, & procede à l'opération.

Si la fistule est complete, il introduit dans le fondement le doigt index gauche, graissé d'huile ou de beurre; il tient avec la main droite une stilet d'argent flexible, ou l'aiguille ou sonde plate destinée à cet usage, voyez Aiguille; il pousse doucement cet instrument, jusqu'à ce que sa pointe rencontre le doigt qui est dans l'intestin, ou qu'on y met seulement après avoir introduit le stilet dans le trajet de la fistule; l'extrémité de ce doigt replie le stilet, & sert à l'amener au - dehors: on forme ainsi une anse qui embrasse la fistule, & la portion du boyau qui lui répond. Voyez Planche XXVII. fig. 1.

Dans la fistule incomplete externe, on recommande de porter l'extrémité du stilet au - dessus des callosités, & en forçant un peu de percer l'intestin pour former l'anse: c'est dans cette occasion qu'il faut se servir par préférence de l'aiguille pointue, le stilet boutonné seroit moins convenable.

Si la fistule est borgne & interne, il faut faire avec la lancette une ouverture extérieure sur un petit point mollet, qui montre le sac du sinus: quand cet endroit n'est pas sensible, on met dans l'anus, pendant douze ou quinze heures, ou plus long - tems, si cela étoit nécessaire, une tente, laquelle en bouchant l'ouverture de la fistule, empêche le pus de s'écouler; il s'en amasse assez pour former à l'extérieur une tumeur qui indique le lieu où il faut faire l'incision.

Lorsque l'anse est passée dans la fistule, on prend avec les doigts de la main gauche les deux extrémités du stilet; en les tirant à soi on tend les parties, & avec un bistouri droit qu'on tient de l'autre main, on emporte les parties que le stilet a pénétrées; ensorte qu'après l'extirpation les callosités se trouvent embrochées. Trois ou quatre coups de bistouri donnés à - propos, suffisent ordinairement pour cette opération. Si l'orifice extérieur de la fistule étoit si éloigné du fondement, qu'en faisant l'opération comme on vient de le décrire, il fallût faire une trop grande déperdition de substance, on pourroit passer une sonde cannelée dans le conduit fistuleux; on l'ouvri<pb-> [p. 827] roit ensuite avec un bistouri. C'est la méthode que nous avons dit convenir pour les cas les plus simples, & dans lesquels on s'est servi avec succès du syringotome. Voyez Syringotome. Mais dans les fistules fort étendues & compliquées, il ne suffiroit pas d'avoir fendu le sinus antérieurement, c'est - à - dire du côté extérieur, il faudroit inciser la partie postérieure dans toute l'étendue, ayant le soin de tâter avec l'extrémité du doigt index de la main gauche, les parties avant de les scarifier, pour ne pas couper des vaisseaux ou autres parties qu'il seroit à propos de ménager. Les callosités qu'on n'a fait que fendre par cette incision, doivent être emportées des deux côtés avec le bistouri ou les ciseaux; on scarifie celles que la prudence ne permet pas d'extirper, ou on les attaque dans le cours du traitement, avec des remedes caustiques.

Le pansement de la plaie consiste à mettre de la charpie brute & mollette dans toute l'étendue de la plaie: on introduit ensuite une tente grosse & longue comme le petit doigt, dans le rectum: le tout sera recouvert de trois ou quatre compresses longuettes, étroites, & graduées, soûtenues de bandages en T, dont la branche transversale large de quatre travers de doigt, fait un circulaire autour du corps au - dessus des hanches, & sert de ceinture; & la branche perpendiculaire est fendue depuis son extrémité jusqu'à huit travers de doigt de la ceinture. Le plein porte sur les compresses, & les deux chefs passent un de chaque côté des parties naturelles, pour n'en pas gêner l'action, & vont s'attacher antérieurement à la ceinture.

Si dans l'opération on avoit ouvert un vaisseau qui fournît assez de sang pour donner quelque crainte sur la quantité que le malade pourroit en perdre, il faudroit prendre des précautions dans l'application de l'appareil; car on a vû le sang se porter dans l'intestin, pendant qu'on ne soupçonnoit point l'hémorrhagie, parce que l'appareil n'en étoit point pénétré. On peut se mettre en garde contre cet accident, par l'application de l'agaric, & par une compression faite avec méthode. Il faut d'abord reconnoître la situation précise du vaisseau qui fournit le sang, en appuyant le doigt alternativement dans différens points de l'incision, jusqu'à ce qu'on ait comprimé la source de l'hémorrhagie. Il est prudent de tenir le doigt assez long - tems sur l'orifice du vaisseau, pour donner le tems au caillot de se former: au lieu d'agaric on peut mettre avec succès sur cet endroir une petite compresse, trempée dans l'essence de Rabel; on la soûtient pendant quelques minutes; on la couvre ensuite de charpie brute, & l'on applique le reste de l'appareil comme je viens de le dire.

On ne leve l'appareil qu'au bout de quarante - huit heures, si rien n'oblige à le lever plûtôt; encore ne doit - on pas détacher la charpie du fond, sur - tout s'il y a eu hémorrhagie: c'est à la suppuration à décoller cette charpie. Dans la suite, les pansemens doivent être fort simples: on se sert d'abord des remedes digestifs, puis des détersifs, & on termine la cure avec des dessicatifs, suivant les regles générales de l'art pour la cure des ulceres. Voyez Ulceres. On diminue la tente de jour en jour, selon le progrès de la plaie vers la consolidation; & sur les derniers tems, on panse avec une meche de charpie ou un plumaceau, qu'on introduit à plat dans le rectum. Une attention qui est essentielle lorsqu'on porte la tente dans l'intestin, est de l'introduire le long de la partie saine du fondement, du côté opposé à l'incision: par ce moyen on ne fatigue pas l'angle de l'incision du boyau, on évite de la douleur qu'on feroit souffrir inutilement au malade; & sans cette précaution il y auroit du risque de faire, en poussant la tente, une fausse route dans les graisses à côté de l'in<cb-> testin. Quelques personnes ont proposé de rejetter l'usage de la tente dans le rectum; mais l'expérience a montré qu'il s'en étoit suivi un retrécissement de l'anus, fort incommode aux malades qui sont obligés de faire ensuite beaucoup d'efforts pour rendre les matieres par une ouverture trop étroite.

Je placerai ici quelques réflexions sur le traitement des abcès considérables qui se forment à la marge de l'anus, soit que la fistule les ait produits, ou qu'ils la précedent. On doit les ouvrir comme de simples abcès. Quelques praticiens sont dans l'usage d'emporter une portion du rectum, après avoir évacué le pus; à quoi l'on n'est autorisé que dans le cas de pourriture à l'intestin. D'autres qui pensent plus sensément sur les avantages de la conservation des parties, se contentent de fendre l'intestin, & ils croyent que cela est nécessaire pour procurer sa réunion avec les parties voisines. Cependant l'expérience montre qu'on pourroit guérir radicalement quelques malades par la seule ouverture de l'abcès, quoiqu'il y eût fislule à l'intestin. Que risque - t on à chercher la guérison par cette voie? C'est une tentative dont les malades doivent nous savoir gré, puisqu'elle a pour objet de leur épargner de la douleur, & d'abréger considérablement la cure. Mais si à la suite de ce traitement il restoit un sinus fistuleux, ce qui arrive dans le plus grand nombre de cas, il faudroit en faire l'ouverture: & ce seroit une seconde opération; mais on ne risque pas alors de faire une plus grande déperdition de substance qu'il n'est nécessaire: ce qu'il n'est pas possible d'éviter lorsqu'on incise l'intestin immédiatement après l'ouverture de l'abcès. En effet l'intestin étant plus ou moins à découvert selon l'étendue & la profondeur du foyer de l'abcès, étendue qui est relative à la quantité de la matiere contenue dans la tumeur, l'orifice de la fisiule peut être fort près de la marge de l'anus, quoique la dénudation de l'intestin s'étende fort haut. Dans ce cas en fendant l'intestin depuis le fond de l'abcès, on y fait inutilement une grande incision; & une grande incision faite sans utilité, peut être regardée comme nuisible. De plus on pourroit dans les grandes dilacérations, emporter une assez grande portion de l'intestin, & laisser précisément celle où seroit le point fistuleux; ce qui par la suite donneroit lieu à ce qu'on appelle mal - à - propos la réproduction de la maladie, puisqu'elle n'auroit pas été détruite. Combien n'y a - t - il pas de personnes qui disent qu'elles ont été manquées de l'opération de la fistule? L'expression est bonne, puisqu'elles ont souffert une opération douloureuse sans aucun fruit. Si au contraire on se contentoit de faire simplement l'ouverture de l'abcès, l'incision de la fistule deviendroit, après le récollement des dilacérations faites par la formation du pus, une opération de petite conséquence en elle - même, & en la comparant à la grandeur de celle dans laquelle l'intestin seroit incisé dans toute l'étendue du foyer de l'abcès. Il y a encore quelques autres raisons de préférence pour cette méthode, telles que d'éviter des hémorrhagies qui ont souvent lieu dans les incisions profondes; & dans ce cas, la nécessité d'un tamponnement retient des matieres purulentes dans quelques vuides ou clapiers qui peuvent échapper à la diligence de l'opérateur, la résorption s'en fait; de - là des fievres colliquatives, des cours de ventre, & autres accidens qui mettent la vie du malade en danger. M. Foubert se propose d'exposer cette doctrine dans le troisieme volume des mémoires de l'académie royale de Chirurgie. J'en ai donné le précis, parce que je suis persuadé par ma propre expérience, de l'utilité des préceptes dont je viens de faire mention. (Y)

Fistule (Page 6:827)

Fistule. (Manége, Maréchall.) En adoptant la définition que les auteurs qui ont écrit sur la medecine du corps humain, nous donnent du terme de fis<pb->

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