ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"615"> étoient agités d'un mouvement quelconque. Lorsque les deux corps sont en repos, la lumiere s'éteint par degrés; mais si on touche le corps froté avant qu'il ait entierement perdu son électricité, la lumiere se ranime aussi - tôt dans celui qui est vuide d'air.

C'est sans doute à cette facilité qu'a le feu électrique de se manifester dans un espace vuide d'air, qu'on doit rapporter la lumiere qu'on apperçoit au - haut du barometre, en électrisant cette partie du tuyau par le balancement du mercure; celle d'une bouteille mince & bien purgée d'air, qui contient quelques onces de mercure bien sec, & que l'on secoue dans l'obscurité; enfin celle d'une semblable bouteille bien seche & purgée d'air, que l'on frappe simplement à l'extérieur avec le plat de la main.

Mais de toutes ces expériences faites dans le vuide, il n'y en a pas de plus curieuse que celle que fit M. Hauksbée, avec un globe de verre de 6 pouces de diametre, enduit intérieurement vers son équateur d'une large bande de cire à cacheter fondue: ce globe ayant été bien exactement vuidé d'air, & appliqué à la machine de rotation, fit voir le phantôme lumineux de la main avec laquelle on le frotoit, peint très - distinctement dans la partie concave du globe, malgré le défaut de transparence de la bande de cire d'Espagne. Ce phénomene fut vû par les endroits des poles que l'on avoit conservés transparens.

Le feu qui sort des animaux, des métaux, & autres corps électrisés par communication, est beaucoup plus vif, plus impétueux, & mieux rassemblé que celui qui sort immédiatement d'un vase de verre, d'un morceau d'ambre, ou d'un canon de soufre. Par exemple, on tirera d'une barre de fer posée sur des cordons de soie, & électrisée par le moyen d'un tube, une étincelle plus brillante & qui éclatera avec beaucoup plus de bruit que celle que l'on tireroit immédiatement de ce tube; & plus on augmentera le volume & l'étendue de ces corps électrisés par communication, en joignant à cette barre de larges surfaces métalliques isolees comme elle, plus l'étincelle que l'on en tirera en approchant le tube electrisé au même degré, sera vive & pétillera avec force.

En général ce feu est d'autant plus brillant, que l'explosion se fait avec plus d'impétuosité; & l'explosion est d'autant plus grande, qu'il s'échappe une plus grande quantité de matiere électrique, accumulée précédemment sur un corps: c'est pourquoi si à des tuyaux de fer - blanc, d'une très - grande longueur & d'un très - grand diametre, on applique l'électricité d'un ou de plusieurs globes de verre bien frotés, on aura les étincelles les plus vives, qui semblables à de véritables éclairs, s'élanceront d'une très - grande distance avec bruit vers le doigt, & qui occasionneront une vive douleur.

Lorsqu'un corps métallique, ou autre de même nature, a acquis par communication une atmosphere d'une certaine densité, la matiere électrique que l'on continue de lui appliquer, s'en échappe à la fin & répand de la lumiere; quelquefois elle sort en forme d'étincelles, semblables à celles que l'on excite avec le doigt; sur - tout si le conducteur n'a que des angles obtus, & qu'il ne soit pas fort éloigné de quelque corps non électrique: mais plus communément le feu s'échappe par les angles & par les pointes du conducteur, sous la forme d'une aigrette ou pinceau lumineux dont la pointe est un corps électrisé, & les rayons vont en divergeant à mesure qu'ils s'éloignent. Ces rayons sont d'autant plus divergens, que la vertu électrique est plus forte dans le conducteur: leur sortie est accompagnée d'un souffle & d'un murmure qui expriment l'effet avec lequel ils écartent les parties de l'air. Les matieres qu'on plonge dans ces rayons, retiennent une odeur sulphureu<cb-> se, & les roses rouges qu'on y expose pendant quelque tems y pâlissent.

En présentant le doigt, ou tout autre corps non électrique un peu pointu, à l'aigrette qui sort d'un conducteur électrisé, on en voit paroître une autre, mais dans un sens opposé, à l'extrémité de ces corps qui regarde le conducteur. La distance à laquelle cette nouvelle aigrette paroît, varie non - seulement suivant la densité de l'atmosphere du conducteur, mais encore suivant sa forme & celle du corps que l'on présente; plus le conducteur est vaste & moins il a d'angles, plus cette distance est considerable; plus le corps que l'on approche est mince, tranchant, ou pointu, plus cette distance est encore grande. A mesure que l'on approche le doigt du conducteur, ou quelque métal terminé en pointe, les aigrettes deviennent de part & d'autre plus fortes & plus brillantes; elles se condensent bien - tôt quand la distance est peu considérable, & elles forment enfin ce trait de feu si vif, si subit, & si impétueux, qui caractérise si bien les éclairs: la personne qui présente son doigt ressent à chaque étincelle une vive douleur, & l'endroit où se fait l'explosion est marqué par une piquûre, accompagnée d'une echymose, comme seroit l'effet d'une legere brûlure.

C'est avec un pareil trait de lumiere, que l'on enflamme de l'esprit - de - vin un peu tiede, en le présentant, dans une cuillere de métal, à quelque angle émoussé du conducteur électrisé: on a allumé par le même moyen de la poudre à canon, & d'autres matieres combustibles.

Mais le feu électrique dont nous avons parlé jusqu'à présent, n'est qu'une bluette en comparaison de celui qu'on peut exciter, en faisant l'expérience de Leyde: on a substitué à la bouteille dont on se servoit pour cette expérience, un large carreau de verre étamé des deux côtés, à la reserve d'une bande large d'environ deux pouces, qu'on a conservé tout - autour sans étain. On place ce carreau sur un guéridon de métal, ensorte que la lame d'étain inférieur ait une communication libre avec la terre; on fait communiquer, par le moyen d'une chaîne, la lame supérieure avec le conducteur qui reçoit l'electricité du glode: tout étant dans cet état, & le giobe vigoureusement froté, le carreau s'électrise, comme la bouteille dans l'expérience de Leyde; & si avec un gros fil - defer courbé, émoussé par les bouts, & emmanché à l'extrémité d'une canne de verre, on ouvre une communication entre les deux surfaces étamées, il en sort un éclair terrible dont les yeux ne sauroient soûtenir l'éclat, & dont le bruit se fait entendre de sort loin. Cette étincelle perce une main entiere de papier que l'on pose sur la lame d'étain supérieure, & dont on approche le fil - de - fer courbé; elle fond une feuille d'or serrée entre deux plaques de verre, & arrangée de maniere que l'étincelle de l'explosion passe au - travers, en faisant le circuit qui communique d'une lame à l'autre: la fusion est si complete, que le métal se trouve incorporé au verre à tel point, qu'il élude l'action des plus puissans menstrues.

Cette étincelle ressemble si fort par ses effets aux éclairs & aux tonnerres, que plusieurs physiciens n'ont pas fait difficulté d'assurer qu'un éclat de tonnerre n'étoit autre chose qu'une très - violente étincelle électrique. Nous examinerons plus particulierement cette analogie aux articles Météores & Tonnerre. Nous ne pouvons cependant pas nous dispenser d'avancer ici, que les nuages orageux qui passent assez près de la terre, électrisent si fort nos barres de fer isolées sur des gâteaux de cire, qu'elles rendent des étincelles beaucoup plus fortes que celles que nous pouvons produire par nos machines: que c'est cette matiere électrique des nuages qui occasionne le feu S. Elme, les trombes de mer. & quan<pb-> [p. 616] tité d'autres phénomenes, dont les causes étoient ignorées avant qu'on eût connoissance de l'électricité des nuages. Voyez Electricité.

Feu électrique, Fluide électrique (Page 6:616)

Feu électrique, Fluide électrique, ou Matiere électrique; on entend sous ces différentes dénominations, ce fluide très - subtil, très - mobile, qui se trouve répandu dans tous les corps, qui pénetre avec la plus grande facilité la plûpart des milieux; enfin qui cause immédiatement tous les phénomenes de l'électricité, comme l'attraction & la répulsion des corps legers, l'explosion de l'étincelle, les émanations lumineuses, &c.

Les Physiciens sont partagés sur la nature du fluide électrique: les uns considérant ses propriétés singulieres & différentes de celles de tous les autres fluides connus, le distinguent absolument des autres, & en font une espece particuliere; ainsi que les propriétés de l'aimant, qui paroissent bornées à cette pierre & aux corps aimantés, ont fait donner le nom de magnétique au fluide subtil qui les produit: d'autres trouvent dans le feu électrique beaucoup des propriétés du feu élémentaire, dont la présence échauffe, agite, & raréfie les corps, qui les pénetre tous par sa grande subtilité, dans lesquels il éprouve cependant différens degrés de résistance; qui se fixe & se concentre dans quelques - uns, d'où il ne cesse de lancer pendant quelque tems des émanations lumineuses: d'autres enfin veulent que le feu électrique soit l'éther des anciens; cet agent universel, que les philosophes grecs regardoient comme l'instrument de toutes les opérations de la nature, & dont le mouvement variable à l'infini leur paroissoit agiter tout le reste de la matiere. Ces derniers commencent donc par établir l'existence d'un fluide subtil & répandu partout, qui reçoit le mouvement immédiatement des mains de Dieu, & le communique à tous les corps solides & fluides, suivant des lois que sa Sagesse infinie a établies pour entretenir l'ordre dans l'Univers; & ils rapportent à la diversité de ces lois, la variété des opérations de la nature. Ainsi les effets de gravité, de ressort, de dureté, de chaleur, de magnétisme, & d'électricité, leur paroissent produits par les mouvemens de cet éther, dirigés par le Créateur suivant de certaines lois, qui suffisent pour différencier tous ces effets d'une même cause. Voyez Ether, &c.

Il est vrai qu'il n'est pas facile de comprendre au premier abord, comment les mouvemens de l'éther peuvent être assez variés dans un même corps, par exemple dans une barre d'acier, pour produire à la fois & sans le moindre trouble, les effets de gravité, de ressort, de magnétisme, & d'électricité. Car pour nous borner seulement aux effets de chaleur & d'électricité, il est incontestable qu'ils existent souvent ensemble dans les mêmes corps, & qu'ils y sont susceptibles d'accroissement & de diminution indépendamment l'un de l'autre.

On sait, par exemple, qu'une barre de fer peut être échauffée jusqu'au blanc dans une de ses parties, ou refroidie par le plus grand froid, agitée, dilatée, ou condensée aux plus grands degrés auxquels nous puissions parvenir, sans que tous ces différens effets apportent de changement sensible à son état d'électricité; & réciproquement un corps rempli de matiere électrique, attire & repousse de très - loin les corps legers, contracte une atmosphere très - sensible, étincelle même de toute part, sans qu'il en paroisse plus échauffé, ni le moindrement augmenté de volume. Or on peut demander comment l'éther appliqué en si grande abondance à des corps très - échauffés ou très - électrisés, ne produit - il pas quelque chaleur, quelque dilatation sensible dans ceux - ci, ou quelques effets d'attraction & de répulsion dans ceuxla? comment le milieu de cette barre, entouré ou pénétré de l'éther igné, n'arrête - t - il pas, n'absorbe - t - il pas, ne dissipe, ne raréfie - t - il pas l'éther électrique que l'on a communiqué à la barre? enfin comment la matiere électrique, loin de se confondre avec l'atmosphere du fer embrasé, la pénetre - t - elle, s'étendelle, se conserve - t - elle dans une densité uniforme, aussi bien sur la partie la plus échauffée de la barre, que sur celles qui sont demeurées froides?

Il faut avoüer que ces différens mouvemens d'un même fluide qui s'exécutent à - la - fois dans un corps, ne se présentent pas bien clairement à l'esprit; cependant ce systeme est encore le plus simple: car si on faisoit dépendre ces mêmes effets de chaleur & d'électricité, de deux différens fluides qui exerçassent en même tems & sans confusion chacun leurs mouvemens particuliers, il est clair que cette explication ne seroit pas plus heureuse, & deviendroit sujette à des difficultés d'autant plus grandes, qu'on auroit à rendre raison d'un plus grand nombre d'effets, comme dans l'exemple d'une barre d'acier, dans laquelle on considéreroit les effets de pesanteur, de ressort, de dureté, d'électricité, de magnétisme, de chaleur, &c.

On peut citer en faveur de ceux qui n'admettent que l'éther pour cause de la plûpart des phénomenes, des exemples de plusieurs effets différens qui sont produits par des movemens variés d'un même fluide. Par exemple, le vent & le son sont deux effets très différens, qui dépendent certainement de deux mouvemens bien distincts excités dans l'air; & l'on est très - assûré que ces deux sortes de mouvemens peuvent exister ensemble ou séparément dans ce fluide, sans que la violence de l'un puisse jamais nuire à l'uniformité de l'autre.

Le feu différemment modifié dans un même corps, produit les effets de chaleur, de dilatation, de coruscation. La lumiere du soleil réfléchie par un miroir concave, échauffe des particules de sable exposées au foyer, & les dissipe par une répulsion semblable à celle qu'elles éprouveroient, si elles étoient placées sur l'extrémité d'une barre de fer électrisée. Or, pour nous rapprocher de notre objet, le fluide électrique produit, quand nous voulons, des effets d'attraction, des étincelles & du magnétisme. En effet, l'explosion d'une violente étincelle électrique altere quelquefois la boussole ou aimante de petites aiguilles, suivant la direction que l'on donne à cette etincelle: or il y a long - tems que l'on a observé qu'un éclat de tonnerre (qui n'est qu'une grosse étincelle électrique) est capable d'aimanter toute sorte d'outils de fer & d'acier enfermés dans des caisses; de donner aux clous d'un vaisseau assez de vertu magnétique pour faire varier d'assez loin les boussoles; en un mot, de changer en véritables aimans les croix de fer des anciens clochers, qui ont été plusieurs fois exposés aux vives impressions de ce terrible fluide. Voyez Magnétique, où nous détaillerons plus amplement ces effets.

Ces exemples, & plusieurs autres qu'il seroit facile de rapporter, prouvent qu'il n'est pas impossible qu'un fluide dont les parties sont agitées par différentes sortes demouvemens, ne puisse produire des effets qui nous paroissent si peu tenir ensemble, que noussommes portés à les attribuer à des causes absolument différentes; que si nous découvrions les lois suivant lesquelles le Créateur a réglé ces sortes de mouvemens, nous serions en état d'expliquer beaucoup de phénomenes qui nous paroissent incompréhensibles. C'est à la recherche que d'habiles physiciens ont faite de ces lois, que nous devons les explications les plus satisfaisantes que nous ayons des phénomenes de l'électricité; & l'on peut dire que si ces explications ne sont pas entierement conformes à la nature, ou nous paroissent insuffisantes pour expliquer certains phénomenes, elles n'ont pas moins servi à étendre

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