ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"613"> soleil ne pénetre jamais plus de 10 piés en - avant dans terre, ils attribuoient à ce feu toutes les fermentations & productions qui sont hors de la portée de l'action de cet astre. Le feu central qu'ils appelloient le soleil de la terre, concouroit dans leur système avec le soleil du ciel, à la formation des végétaux. M. Gassendi a chassé ce feu du poste qu'on lui avoit assigné, en faisant voir qu'on l'avoit placé sans raison dans un lieu où l'air & l'aliment lui manquoient; & que tout ce qu'on pouvoit conclure des feux qui se manifestent par diverses éruptions & autres signes, c'est qu'il y a effectivement des feux soûterreins renfermés dans diverses cavernes, où des matieres grasses, sulphureuses & oléagineuses les entretiennent. L'existence de ces feux est incontestable. 1°. Ils se font sentir dans les bains chauds & dans les fontaines qui brûlent.

2°. Ils se manifestent par une foule de volcans, qui sont répandus dans toutes les parties du monde; on trouve près de cinq cents de ces volcans ou montagnes brûlantes, dans les relations des voyageurs. Voyez Volcans.

3°. Ils sont attestés par le témoignage de ceux qui travaillent aux mines métalliques. Les mineurs assûrent que plus on creuse avant en terre, plus on éprouve une chaleur très - incommode, & qui s'augmente toujoûrs à mesure qu'on descend, sur - tout au - dessous de 480 piés de profondeur. Les fourneaux soûterreins servent à fondre & purifier les métaux dans le sein des minieres, comme dans autant de creusets fabriqués par la terre. Ils distillent aussi dans les parties creuses de l'intérieur de la terre, comme dans autant d'alembics, les matieres minérales, afin d'élever vers la surface de la terre, des vapeurs chaudes & des esprits alumineux, sulphureux, salins, vitrioliques, nitreux, &c. pour communiquer des vertus medicinales aux plantes & aux eaux minérales. Quand l'air manque à ces feux renfermés, ils ouvrent le haut des montagnes, & déchirent les entrailles de la terre, qui en souffre une grande agitation. Voyez Volcan & Tremblement de Terre. Quelquefois quand le foyer est sous la mer, il en agite les eaux avec une violence qui fait remonter les fleuves, & qui cause des inondations. Voy. Inondations. C'est à cette cause qu'on doit attribuer les tremblemens de terre & une partie des inondations qu'on a essuyés dans plusieurs endroits de l'Europe en 1755; année qui sera tristement fameuse dans l'histoire. Voyez Lisbonne, &c. Il paroît par les historiens, que l'année 1531 ou 1530, selon d'autres manieres de compter, fut aussi funeste à l'Europe & à Lisbonne en particulier; que les tremblemens de terre & les inondations y furent considérables. Des seux soûterreins, il y en a qui s'allument par l'effervescence fortuite de quelques mélanges propres à exciter du feu; mais il est probable que d'autres ont été placés de tous tems dans les entrailles de la térte; pourquoi n'y auroit - il pas des réservoirs de feu comme il y a des réservoirs d'eau? Lisez le mémoire sur la théorie de la terre, inséré à la fin des lettres philosophiques sur la formation des sels & des crystaux, &c. par M. Bourguet. Cet auteur prétend, « que le feu consume actuellement la terre; que l'effet de ce feu a insensiblement en augmentant, & qu'il continuera de même jusqu'à ce qu'il cause l'embrasement dont les anciens philosphes ont parlé, &c.» Cet article est tiré des papiers de M. Formey.

Feux follets (Page 6:613)

Feux follets. (Ambulones.) oe sont de petites flammes foibles, qui volent dans l'air à peu de distance de la terre, & qui paroissent aller çà & là à l'aventure. On en trouve ordinairement dans les lieux gras, marécageux, & dans ceux d'où l'on tire les tourbes. On en voit aussi dans les cimetieres, près des gibets & des fumiers; ils paroissent sur - tout en été & au commencement de l'autonne, & il s'en rencontre davantage dans les pays chauds que dans les pays froids. De - là vient qu'ils sont communs en Ethiopie & en Espagne, mais ils sont rares en Allemagne.

Ils paroissent suivre ceux qui les évitent, & fuir ceux qui les poursuivent. Voici pourquoi. Le moindre mouvement fait avancer ces petites flammes, de sorte que lorsqu'on vient à leur rencontre, on les chasse devant soi, à l'aide de l'air que l'on pousse en avant, ce qui donne lieu de croire qu'elles fuient ceux qui vont à leur rencontre. Lorsqu'on les a àdos, on laisse comme un vuide derriere soi, de sorte que l'air qui se trouve derriere ce vuide, venant à s'y jetter dans l'instant & à le remplir, emporte en même tems ces petites flammes, qui paroissent suivre l'homme qui marche devant elles.

Lorsqu'on les saisit, on trouve que ce n'est autre chose qu'une matiere lumineuse, visqueuse & glaireuse, comme le frai de grenoüilles. Cette matiere n'est ni brûlante ni chaude. Il paroît que c'est une matiere comme le phosphore, laquelle doit son origine aux plantes pourries & aux cadavres, &c. comme elle vient à être ensuite élevée dans l'air par la chaleur du soleil, elle s'y épaissit & s'y condense par le froid qui survient le soir. Le soleil fait ici le même effet que le feu artificiel; & la vapeur de l'eau ne produit dans l'air qu'une legere condensation. Tous les poissons pourris luisent la nuit, comme si c'étoit du feu, & on a aussi observé la même chose en été à l'égard de quelques cadavres. Le peuple de la campagne croit que ces petites flammes sont de malins esprits ou des ames damnées, qui vont roder par - tout, & qui étant mortes excommuniées, conservent toute leur malice. Il y a encore une autre espece de feu follet, appellé en latin ignis lambens. Ce n'est autre chose qu'une petite flamme ou lumiere, que l'on voit quelquefois sur la tête des enfans & sur les cheveux des hommes. On en remarque aussi de semblables sur la criniere des chevaux quand on la peigne. Ces petites flammes n'appartiennent point aux météores aériens, quoique les anciens philosophes les ayent mises dans cette classe. C'est une espece de phosphore produit par la nature du corps, & que l'on pourroit imiter. L'exhalaison onctueuse de la tête s'attache aux cheveux, & s'enflamme aussitôt qu'on les frote ou qu'on les peigne. Les anciens regardoient comme un feu sacré les petites flammes qui paroissoient sur la tête des enfans, & en tiroient d'heureux présages. Voy. ce que Ciceron, Tite - Live, Florus, & Valere - Maxime disent de Servius Tullius encore enfant. Joignez - y le récit de Virgile dans l'Enéïde, livre II. v. 680, &c. Les étincelles qui sortent dans l'obscurité du dos des chats en le frotant à contre - poil, sont de même nature que l'ignis lambens. Article de M. Formey, qui l'a tiré de l'Essai de Physique de M. Musschenbroek, tom. II. p. 855 & suiv.

Il est évident, par ce qui sera dit plus bas au mot Feu électrique. que la matiere des feux follets n'est autre chose que la matiere même de l'électricité.

Feu S. Elme (Page 6:613)

Feu S. Elme. On appelle ainsi de petites flammes que l'on voit sur mer dans les tems d'orage aux pavillons, aux cordages, aux mâts, & à toutes les parties saillantes & supérieures du vaisseau. Ce feu qu'on a aussi nommé castor & pollux, n'est encore autre chose que le feu électrique. Voyez l'article suivant. On peut voir un plus long détail sur le feu S. Elme dans M. Mussch. Essai de Physique, §. 1684 & suivans. On y trouvera ses conjectures sur la cause de ce phénomene, & ce que les anciens en ont raconté. Plutarque, dit - il, rapporte dans la vie de Lysandre, que ces flammes se tenoient aux deux côtés de som [p. 614] vaisseau, & qu'on les vit aussi luire autour du gouvernail. Frésier remarque dans son voyage à la mer du Sud, qu'après une tempête de 23 heures, il parut la nuit une lumiere aux vergues du vaisseau, d'où elle s'élanca comme une fleche jusqu'au milieu du hauban, d'où elle disparut en un clin - d'oeil.

La tradition des anciens au sujet de ces petites flammes, est fort fabuleuse. Ils disoient qu'une seule de ces petites flammes étoit un mauvais prognostic, & présageoit de l'orage; au lieu que deux étoient un présage heureux, & un signe que le calme alloit succéder à la tempête. Pline dit en effet, que lorsqu'il vient une petite flamme ou étoile, elle coule le navire à fond, & qu'elle y met le feu lorsqu'elle descend vers la quille du vaisseau.

Cardan rapporte, que lorsqu'on en voit une proche du mât du vaisseau, & qu'elle vient à tomber, elle fond les bassins de cuivre, & ne manque pas de faire périr le vaisseau. Mais si ce que dit cet auteur étoit vrai, on ne verroit presque jamais revenir aucun vaisseau des Indes, puisqu'il ne se fait guere de voyage, sans que les mariniers apperçoivent pendant la tempête ces petites flammes, qui tombent çà & là sur le vaisseau. Voyez Musschenbr. loco citato. Voyez aussi Météore, &c. (O)

Feu électrique (Page 6:614)

Feu électrique, phénomene de l'électricité. Nous appercevons le feu électrique, lorsque la matiere de l'électricité étant suffisamment rassemblée & dirigée d'une maniere convenable, éclate & brille à nos yeux, s'élance comme un éclair, embrase, fond, & consume les corps capables d'être consumés, & produit dans ces corps plusieurs effets du feu ordinaire.

On entend aussi par le feu électrique, ce fluide très délié & très - actif, qui est répandu dans tous les corps, qui les pénetre, & les fait mouvoir suivant de certaines lois d'attraction & de répulsion, & qui opere en un mot tous les phénomenes de l'électricité. On a donné à ce fluide le nom de feu, à cause des propriétés qui lui sont communes avec le feu élémentaire, entr'autres celle de luire à nos yeux au moment qu'il s'élance avec impétuofité pour entrer ou sortir des différens corps, d'allumer les matieres inflammables, &c. Voyez Feu.

Nous devons donc considérer le feu électrique sous deux points de vûe différens: premierement comme phénomene de l'électricité; nous examinerons sa production, sa force, sa propagation, &c. Ensuite nous le considérerons comme cause des effets de l'électricité, & nous rapporterons les sentimens des principaux physiciens, sur sa nature & sur la maniere dont il produit les phénomenes électriques.

Otto Guericke & Boyle ont remarqué qu'en frotant vivement de certains corps électriques, ils répandoient une lumiere plus ou moins vive dans l'obscurité, que quelques - uns, comme les diamans, conservoient pendant un tems assez considérable. On trouve dans le recueil des expériences d'Hauksbée, une suite d'observations très - curieuses sur la lumiere que répandent plusieurs corps frotés contre différentes matieres, tant en plein air que dans le vuide de la machine pneumatique: mais alors les Physiciens regardoient cette lumière plûtôt comme un phosphore, que comme le fluide électrique rendu sensible à nos yeux par l'effet du frotement.

Ce sut à l'occasion de la douleur que ressentit M. Dufay, en tirant par hasard une étincelle de la jambe d'une personne suspendue fur des cordons de soie, qu'il pensa que la matiere électrique étoit un véritable feu, capable de brûler aussi bien que le feu ordinaire; & que la piquûre douloureuse qu'il avoit ressentie, étoit une vraie brûlure. Enfin plusieurs savans d'Allemagne ayant répété les expériences de M. Dufay, & poursuivi ses recherches, M. Ludolf vint à bout d'enflammer l'esprit - de - vin par une étincelle électrique qu'il tira du pommeau d'une épée, & confirma par cette belle expérience, la vérité de ce qu'avoit avancé M. Dufay, sur la ressemblance du feu & de la matiere électrique.

On sait aujourd'hui que tous les corps susceptibles d'électricité, c'est - à - dire presque tous les corps de la nature, font appercevoir le feu électrique d'une maniere plus ou moins sensible, dès qu'on les électrise à un certain degré. Dans les corps naturellement électriques, on ne manque guere de produire ce feu en les frotant un peu vivement, après les avoir bien dépouillés de toute leur humidité: la lumiere qu'ils répandent est plus ou moins vive, suivant la nature de ces corps; celle du diamant, des pierres précieuses, du verre, &c. est plus blanche, plus vive, & a bien plus d'éclat que celle qui sort de l'ambre, du soufre, de la cire d'Espagne, des matieres résineuses, ou de la soie. Les uns & les autres brillent encore davantage, lorsqu'ils sont frotés avec des substances peu électriques, comme du papier doré, la main, un morceau d'étoffe de laine, que lorsqu'on employe une étoffe de soie, la peau d'un animal garnie de poil, ou même du cuir: mais quelles que soient les matieres que l'on employe pour froter les corps électriques, ils ne rendent presque point de lumiere, si les corps avec lesquels on les frote n'ont quelque communication avec la terre, soit immédiatement, soit par une suite de corps non électriques. Par exemple, si une personne étant sur le plancher frote vivement un tube de verre, elle en verra bien - tôt sortir des éclats de lumiere: mais si cette personne fait la même opération étant montée sur un pain de résine, avec quelque vivacité qu'elle frote le tube, la lumiere s'affoiblit, s'éteint, & ne reparoît que lorsque la personne se remet sur le plancher, ou lorsqu'on approche d'elle quelque corps non électrique qui communique avec la terre.

Cette lumiere est plus abondante & a encore plus d'éclat, lorsque les frotemens se font dans le vuide, ou sur quelque vaisseau dont on a épuisé l'air intérieur par la machine pneumatique; on peut dire en général, que le feu électrique se manifeste bien plus aisément dans un espace vuide, ou presque vuide, que dans celui qui est rempli d'air: en voici les preuves.

Lorsqu'on frote contre un couffin un globe plein d'air, l'un & l'autre renfermés sous le récipient de la machine pneumatique; ce globe, après qu'on a épuisé l'air intermédiaire, répand continuellement & tant que dure le frotement, une lumiere très - vive & très - abondante: cette lumiere s'affoiblit à mesure qu'on laisse rentrer l'air, quoique l'on continue de froter le globe avec la même force. Il en est de même d'un globe vuide d'air que l'on frote dans l'air libre; le plus leger frotement excite dans son intérieur beaucoup de lumiere, dont l'éclat diminue graduellement à mesure que l'on introduit de l'air dans le globe. C'est une observation assez générale, que la lumiere que l'on excite dans un vaisseau épuisé d'air, paroît toûjours plus dans son intérieur, & y prend sa direction de tous les points de la surface: elle ne s'attache pas aux doigts, lorsqu'on les approche à une petite distance, comme dans le cas ordinaire; elle s'anime seulement & devient plus vive à l'approche du doigt, même quelque tems après qu'on a cessé de froter. Cependant tous les traits de lumiere tendent toûjours vers l'intérieur du globe.

Le feu électrique se répand avec tant de facilité autravers d'un espace vuide d'air, qu'on l'excite sur le champ dans un récipient, ou dans tout autre vaisseau bien vuidé, par la simple approche du tube ou de tout autre corps électrisé; & on a observé que cette lumiere étoit encore plus vive, lorsque les vaisseaux vuides d'air tournoient sur leur axe, ou

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