ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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Fidélité (Page 6:687)

Fidélité, (Mythol. Médailles, Littér.) en latin fides, déesse des Romains qui présidoit à la bonne foi dans le commerce de la vie, & à la sûreté dans les promesses. On la prenoit à témoin dans ses engagemens, & le serment qu'on faisoit par elle, étoit de tous les sermens le plus inviolable; elle tenoit en conséquence le premier rang dans la religion, & étoit regardée comme la principale conservatrice de la sûreté publique.

On la représentoit par deux mains qui se joignoient ensemble, ainsi qu'on le voit sur plusieurs médailles, par exemple, dans celle d'Antoine, de Vitellius, de Vespasièn & d'autres, avec ces mots, fides exercituum, & dans celles d'Hostilien, avec ceux ci, fides senatûs. Consultez l'ouvrage numismatique de Bandury. Ailleuts elle est représentée debout, tenant d'une main une patere, & quelquefois de l'autre une corne d'abondance, avec ces paroles, fides publica. Souvent elle paroît avec une ou plusieurs aigles romaines.

On voit encore cette déesse gravée sur les médailles, sous la figure d'une femme couronnée de feuilles d'olivier; d'autres fois elle est assise tenant d'une main une tourterelle, symbole de la fidélité, & de l'autre un signe militaire. Enfin elle est dépeinte avec plusieurs autres attributs sur quantité de médailles, qui ont pour inscription, fides aug. mutua, publica, equit. exercitus, militum, cohortium, legionum, &c. Quelquefois avec ces inscriptions, on trouve deux figures qui joignent la main ensemble, pour désigner l'union de gens qui se conservent la foi les uns aux autres. Dans une médaille de Titus, derriere les deux mains jointes, s'élevent un caducée & deux épics de blé.

Cette divinité n'avoit pour tout habillement qu'un voile blanc, symbolede sa candeur & de sa franchise; te spes & albo rara fides colit velata panno, dit Horace. Ses autels n'étoient point arrosés de sang, & on ne tuoit aucun animal dans ses sacrifices, parce qu'elle détestoit l'ombre même du carnage. Ses prêtres avoient à son exemple la tête & les mains couvertes d'un voile blanc, pour faire connoître qu'ils agissoient avec une extrème sincérité, & dars ce qu'ils méditoient, & dans ce qu'ils exécutoient. Ils lui présentoient toûjours leurs offrandes avec la main droite enveloppée du voile; & c'est par cette raison, suivant quelques - uns, que l'on prête encore serment de cette main.

Numa, selon les historiens de Rome, considérant la fidélité comme la chose du monde la plus sainte & la plus vénérable, fut le premier de tous les hommes qui lui bâtit un temple: & il voulut que les frais de son culte & de ses autels se fissent aux dépens du public, qui y étoit si fort intéressé. Ce temple de Numa étant tombé en ruine, fut réédifié par les soins d'Attilius Collatinus, car c'est ainsi qu'on doit interprêter un passage du II. livre de la nature des dieux. La statue de la fidélité fut placée dans le capitole, tout près de celle de Jupiter, quam in capitôlio, dit Ciceron, vicinam Jovis optimi maximi majores nostri esse voluerunt; ils croyoient qu'elle étoit respectable à Jupiter même, dont elle scelloit les sermens. C'est ce qu'Ennius nous apprend dans ce passage que Ciceron rapporte, & trouve avec raison si beau:

O fides alma, apta pinnis, & jusjurandum Jovis!

« O divine foi, vous méritez d'être placée au plus haut des temples, vous qui proprement n'êtes rien autre chose que le serment de Jupiter ».

En effet, Numa ne fit rien de plus digne de lui, que de consacrer un temple à la fidélité, afin que tout ce qu on promettoit sans écriture & sans témoins fût aussi stable que ce qui seroit promis & juré avec toutes les formalités des contrats, & le peuple qu'il gou<cb-> vernoit pensa de même que le législateur. Polybe & Plutarque rendent aux Romains ce témoignage glorieux, qu'ils garderent long - tems & inviolablement leur foi, sans caution, témoin ni promesse; au lieu, disent - ils, que dix cautions, vingt promesses & autant de témoins, ne mettoient personnè en sûreté contre l'infidélité des Grecs. Je crains bien que les peuples de nos jours si civilisés, ne ressemblent aux Grecs de Plutarque & de Polybe; hé comment ne leur ressembleroient - ils pas, puisque les Romains mêmes ne tenoient plus aucun compte de la foi sous le regne d'Octave! C'est pourquoi les écrivains du siecle de cet empereur donnoient à cette vertu le nom d'antique, cana fides, pour marquer que les siecles où elle avoit été dans sa force, étoient déjà bien élorgnés; elle existoit avant Jupiter, dit Silius Italicus. Ils l'appelloient encore rare, rara fides, pour faire entendre qu'elle ne se trouvoit presque plus chez les nations policées, & qu'elle n'y a guere paru depuis. Article de M. le Chevalier de Javcourt.

FIDIUS (Page 6:687)

FIDIUS, (Littér. & Mythol.) dieu de la bonne foi ou de la fidélité, par lequel on juroit chez les Romains, en disant me dius Fidius, & en sous - entendant adjuvet: que le dieu Fidius me soit favorable!

J'ai lû avec grand plaisir dans une dissertation de M. l'abbé Massieu (Mém. de l'Acad. des Belles - Lettres, tom. I.), quelques détails instructifs sur le dieu Fidius, dont je vais profiter, parce que personne ne s'est encore donné la peine d'éclaircir bien des choses qui concernent ce dieu. Tout ce qu'on sait de plus sûr, c'est qu'il présidoit à la religion des contrats & des sermens: du reste on ignore sa véritable généalogie, la force de ses différens noms, & même la maniere dont ils doivent être lûs.

Denys d'Halycarnasse semble confondre le dieu Fidius avec Jupiter; car en plusieurs endroits où il est obligé de traduire le dieu Fidius des Romains, il le rend par le ZEU\S2 PI/ST IOS2 des Grecs. Mais il est abandonné sur ce point par tout ce qu'il y a de meilleurs critiques.

La plûpart croyent que ce dieu étoit le même qu'<-> Hercule, & que ces deux mots dius fidius ne signifient autre chose que Jovis filius. Nos anciens, dit Festus, se servoient souvent de la lettre d au lieu de la lettre l, & disoient fidius au lieu de filius: c'étoit aussi le sentiment d'Elius, au rapport de Varron.

Quelques - uns prennent ce dieu pour Janus, d'autres pour Sylvanus, dieu des forêts: ceux qui prétendent avoir le plus approfondi cette matiere, soûtiennent après Lactance, que c'étoit un dieu étranger, & que les Romains l'avoient emprunté des Sabins. Ils lui donnent une naissance miraculeuse, qui dès ce tems même de superstition, parut fort équivoque & fort suspecte.

Les sentimens ne sont pas moins partagés sur les noms de ce dieu que sur son origine. Les trois noms qu'on lui donnoit le plus communément, étoient ceux de Sancus, de Fidius, & de Semi - pater.

C'est encore un nouveau sujet de dispute entre les Savans, que de déterminer la maniere dont on doit lire ces trois noms, car ils ne s'accordent que touchant fidius, & sont très - divisés au sujet de sancus & de semi - pater. En effet, à l'égard du premier nom, les uns tiennent pour sancas, les autres pour sangus, d'autres pour sanctus, & ceux - ci concluent que ce dieu étoit le même qu'Hercule. Quant au dernier nom, les uns lisent semi - pater, & par ce mot n'entendent autre chose que demi - dieu; les autres semicaper, dans la persuasion où ils sont que dius fidius étoit le même que Sylvanus, qui comme toutes les divinités champêtres, avoit des piés de chevre: enfin la plûpart lisent semo - pater, c'est - à - dire dieu mitoyen, dieu qui faisoit son séjour dans l'air, n'étant [p. 688] pas assez éminent pour être dieu du ciel, & l'étant trop pour être simple dieu de la terre.

Mais ce qui rend le choix difficile entre tant d'opinions, c'est que chacun des auteurs qui les soûtiennent, a ses autorités; & que dans ce grand nombre de diverses leçons, il n'y en a point qui ne soit fondée sur de vieux manuscrits & sur d'anciennes inscriptions.

Au reste, si nous en croyons des critiques dignes de foi, la ressemblance qui se trouve entre les mots semo & simo, fit tomber S. Justin le martyr dans une grande erreur; ce pere grec, mal instruit de ce qui regardoit la langue & les usages des Romains, s'imagina sur quelques inscriptions de semo - sancus, qu'il s'agissoit de ces sortes de monumens de Simon le magicien: de sorte que dans cette idée il chargea les Romains de n'avoir point de honte d'admettre parmi leurs dieux un imposteur avéré; & cette méprise de Justin martyr passa dans les écrits de plusieurs autres peres de l'église, dit M. l'abbé Massieu.

Si jamais un dieu mérita des temples, c'est le dieu Fidius; aussi en avoit - il plusieurs à Rome: l'un dans la treizieme région de la ville; un autre qui étoit appellé oedes dii Fidii sponsoris, temple du dieu Fidius sponsor, c'est - à - dire garant des promesses; & un troisieme situé sur le mont Quirinal, où l'on célebroit la fête de ce dieu le 5 Juin de chaque année. Ovide dit au sujet de ce dernier temple, qu'il étoit l'ouvrage des anciens Sabins, Fast. liv. VI. v. 217. Denys d'Haly carnasse assûre au contraire positivement que Tarquin le Superbe l'avoit bâti, & qu'environ quarante ans après la mort de ce roi, Spurius Posthumius étant consul, en fit la dédicace.

Mais sans examiner qui a raison du poëte ou de l'historien, & sans chercher à les concilier, il est toûjours certain que quel que fût le dieu Fidius, ou Jupiter vengeur des faux sermens, ou Hercule son fils, ou tout autre, & de quelque maniere qu'on l'appellât, ce dieu présidoit à la sainteté des engagemens. On lui donnoit par cette raison pour compagnie, l'honneur & la vérité. Un ancien marbre qui existe encore à Rome, en fait foi; il représente d'un côté sous une espece de pavillon, un homme vêtu à la romaine, près duquel est écrit honor, & de l'autre côté une femme couronnée de laurier, avec cette inscription, veritas; ces deux figures se touchent dans la main; au milieu d'elles est représenté un jeune garçon d'une figure charmante, & au - dessus on lit dius fidius. Voilà une idée bien noble & bien juste! ne seroit - elle gravée que sur le marbre?

Après ce détail, on sera maître de consulter ou de ne pas consulter Festus & Scaliger sur Denys d'Halycarnasse; Vossius de idolol. lib. I. cap. xij. lib. VIII. cap. xiij. Struvius antiq. Rom. synt. cap. j. les Dictionnaires de Pitiscus & de Martinius, &c. Au reste la fidélité étoit une divinité différente du dieu Fidius; ou pour mieux dire, les Romains avoient un dieu & une déesse qui présidoient à la bonne foi, à la sûreté des engagemens & des promesses. Voyez donc Fidélité. Article de M. le Chevalier de Jaucourt.

FIDUCIAIRE (Page 6:688)

FIDUCIAIRE, s. m. (Jurisprud.) se dit d'un héritier ou légataire, qui est chargé par le défunt de rendre à quelqu'un la succession ou le legs, en tout ou partie. Voyez Fiducie, Fidéicommis, Héritier fiduciaire, Substitution . (A)

FIDUCIE (Page 6:688)

FIDUCIE, s. f. (Jurispr.) fiducia seu pactum fiducioe, étoit chez les Romains une vente simulée faite à l'acheteur, sous la condition de retrocéder la chose au vendeur au bout d'un certain tems.

Ce terme fiducia, qui est fort commun dans les anciens livres, ne se trouve point dans tout le corps de droit, du moins pour signifier un gage.

L'origine de ce pacte vint de ce qu'on fut long - tems à Rome, sans connoître l'asage des hypotheques; de sorte que pour pouvoir engager les immeubles aussi bien que les meubles, on inventa cette maniere de vente simulée appellée fiducia, par laquelle celui qui avoit besoin d'argent, vendoit & livroit, par l'ancienne cérémonie de la mancipation, son héritage à celui qui lui prétoit de l'argent, à condition néanmoins que celui - ci seroit tenu de lui vendre & livrer l'héritage avec la même cérémonie, lorsqu'il lui rendroit ses deniers. Fiducia contrahitur, dit Boëce sur les topiques de Cicéron, cum res alicui mancipatur, ea lege ut eam mancipanti remancipes est quoe remancipatio fiduciaria, cum restituendi fides interponitur.

Le créancier ou acheteur fiduciaire, avoit coûtume de prendre pour lui les fruits de l'héritage.

Ces ventes fiduciaires étoient si communes anciennement chez les Romains, que parmi le petit nombre de formules qu'ils avoient pour les actions, il y en avoit une exprès pour ce pacte, appellée judicium fiducioe, dont la formule étoit, inter bonos bene agies, & sine fraudatione, dit Cicéron, au troisieme de ses offices. Ce jugement étoit, dit - il, magnoe existimationis, imo étiam famosum. Voyez Orat. pro Ros. com. & pro coecinnâ.

Mais depuis que les engagemens & même les simples hypotheques conventionnelles des immeubles furent autorisées, on n'eut plus besoin de ces ventes simulées, ni de ces formalités de mancipations & de rémancipations, dans lesquelles il y avoit toûjours du hasard à courir, au cas que l'acheteur fiduciaire fût de mauvaise foi.

Les peres qui vouloient mettre leurs enfans hors de leur puissance, les vendoient aussi autrefois, titulo fiducioe, à quelqu'un de leurs amis, qui à l'instant leur donnoit la liberté; ce qui s'appelloit émancipation. Mais Justinien, par une de ses constitutions qui étoit redigée en grec & qui est perdue, ordonna que toutes les émancipations seroient censées faites contractâ fiduciâ. Il en est fait mention dans la loi derniere, au code de emancipat. liber. Voyez Cujas, sur le §. 8. des instit. lib. III. tit. iij. & Loyseau, des offic. liv. II. ch. iij. n. 31. & suiv. (A)

FIDUCIELLE (Page 6:688)

* FIDUCIELLE, (Ligne) Horlog. c'est le point d'un limbe divisé par degrés, par lequel passe une ligne perpendiculaire à l'horison. Ainsi le point fiduciel dans une oscillation de pendule, est le plus bas de sa descente.

FIEF (Page 6:688)

FIEF, s. m. (Droit politiq. Hist. littér.) Un fief étoit, dans son origine, un certain district de terrein possédé par un leude, avec des prérogatives inhérentes à ce don, ou à cette possession qui étoit amovible. Mais du tems de Charlemagne & de Lothaire I. il y avoit déjà quelques - uns de ces sortes de biens qui passoient aux héritiers, & se partageoient entre eux: ensuite les fiefs devinrent héréditaires; & pour lors leur hérédité jointe à l'établissement général des arriere - fiefs, éteignirent le gouvernement politique, & formerent le gouvernement féodal.

Je n'ai pas dessein de traiter ici de nos fiefs modernes; je me propose d'envisager cette matiere sous une face plus générale, plus noble, & j'ose ajoûter, plus digne de nos regards. Quel spectacle singulier que celui de l'établissement des fiefs! « Un chêne antique s'éleve, l'oeil en voit de loin les feuillages; il approche, il en voit la tige, mais il n'en apperçoit point les racines, il faut percer la terre pour les fouiller ». C'est la comparaison d'un des beaux génies de notre siecle (Esprit des Lois, tome III.), qui après avoir découvert les racines de ce chêne antique, l'a représenté dans son vrai point de vûe.

L'origine des fiefs vient de l'invasion des peuples du Nord en occident & en orient. Personne n'ignore l'évenement qui est une fois arrivé dans le monde, & qui n'arrivera peut - être jamais; je veux parler de l'irruption des nations septentrionales, connues sous le

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