ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

RECHERCHE Accueil Mises en garde Documentation ATILF ARTFL Courriel

Previous page

"665"> comprimée par quelque moyen que ce soit, & rendue un peu compacte, a souvent été prise pour de la vraie chair fibreuse, comme il arrive sur - tout à l'égard des concrétions qui se forment dans le coeur, dans la matrice, que l'on prend pour des polybes, pour des moles, & qui en ont souvent imposé, même à des medecins éclairés, mais trop peu sur leur garde. 5°. Dans les premiers tems de la génération, les rudimens qui forment l'embryon, tout organisé qu'il est, se présentent sous forme de gelée; ils ne prennent de la consistance que par les suites de l'accroissement; & cependant peu de tems avant l'exclusion naturelle du foetus, les os même ressemblent encore à une substance gélatineuse, sur - tout entre la partic la plus solide & le périoste, comme l'a observé dans son ostéologie, l'auteur déjà cité.

Ces dernieres considérations sur la nature de la fibre, conduisent à traiter de ses propriétés.

Propriétés de la fibre en général. Toute fibre, telle même que nous pouvons l'avoir par une division grossiere (qui est bien éloignée de parvenir à nous donner la fibre élémentaire, la fibre simple), par une division qui ne peut nous fournir rien de plus fin, de plus menu, qu'un fascicule de fibres simples, dont le nombre est aussi petit qu'il est possible, en conservant un volume suffisant, pour tomber sous les sens; toute fibre est transparente, c'est - à - dire qu'elle transmet en tous sens les rayons de lumiere, comme tous les corps homogenes réduits en filets bien subtils ou en lames très - minces. Lorsqu'une fibre est seche, qu'elle est par conséquent dépouillée des parties hétérogenes des fluides dont elle étoit pénétrée, elle a encore cette propriété plus marquée; elle peut produire alors les effets d'un prisme, c'est - à - dire qu'elle peut décomposer un rayon de lumiere, & en exhiber les couleurs primitives, en les séparant; c'est une propriété que l'on peut aussi observer dans un cheveu, dans un poil.

Toutes les fibres du corps humain ont de la flexibilité; cette propriété est sensible dans toutes les parties molles, sans qu'elles soient décomposées; elle n'est pas moins dans les parties les plus dures, lorsqu'elles sont divisées en petites lames, qui sont alors susceptibles d'être pliées, courbées aisément, sans qu'il s'y fasse de solution de continuité. Les parties élémentaires qui forment les fibres ainsi flexibles, ne sont donc pas unics entr'elles par des surfaces si étendues & si pleines, qu'elles se touchent exactement dans tous leurs points; parce qu'il résulteroit d'un tel arrangement des corps aussi solides que leurs élémens même, qui n'auroient ni flexibilité ni divisibilité: les fibres étant susceptibles de l'une & de l'autre de ces propriétés, sont par conséquent composées de parties qui ne se touchent que par des portions de surfaces interrompues; c'est - à - dire, que les élémens des fibres & les fibres elles - mêmes unies pour former les organes, laissent des points, des espaces entr'eux, c'est - à - dire des pores, selon l'étendue desquels il n'y a point de contact; qui sont plus ou moins petits, à proportion de la densité propre à ces organes; & ceux - ci sont conséquemment plus ou moins compressibles, ce qui contribue beaucoup à déterminer les différens degrés de dureté & de mollesse qui les différencie.

Toute fibre, dans quelque partie du corps humain que ce soit, est doüée plus ou moins d'une force élastique: c'est ce qui est prouvé, par ce que l'on voit constamment arriver dans les parties molles coupées, dont chaque portion se retire sur elle - même, se raccourcit sensiblement vers la partie fixe: en quelque sens que soient coupées des chairs, des membranes, des vaisseaux, des fibres de toutes ces fortes d'organes, la même retraction des portions séparées se fait toûjours, & elles restent dans cet état jusqu'à ce qu'on les rapproche de force l'une de l'autre; ce qui ne se fait qu'avec beaucoup de peine dans les muscles, les tendons. Ce raccourcissement n'a pas lieu d'une maniere sensible dans les nerfs; mais s'ils sont susceptibles de vibratilité, ils doivent avoir de l'élasticité: cette force contractile ne se montre pas non plus dans les fibres osseuses coupées; cependant le son qui résulte des os lorsqu'on les frappe, dénote assez que la substance osseuse est élastique; mais il n'y a guere lieu à ce qu'elle s'exerce dans le corps humain, parce qu'il ne s'y sait naturellement aucun effort suffisant pour mettre les os dans un état d'élongation: cependant les os des enfans rénstent plus à être cassés, rompus, que ceux des vieillards: c'est parce qu'il y a plus de flexibilité dans ceux - là que dans ceux - ci. Mais alors même les os sont absolument moins élastiques, quoiqu'ils soient en disposition de paroître tels moins difficilement: l'élasticité, dans toutes les parties du corps humain comparées entr'elles à cet égard, paroît être en raison inverse de leur flexibilité: car les substances nerveuses qui sont les plus flexibles, semblent, comme on a dit ci - devant, n'être point du tout élastiques: mais par opposition, quelle n'est pas l'élasticité des os, à en juger (proportion gardée de leur plus ou moins grande dureté) par l'élasticité de l'yvoire? on ne peut cependant en tirer aucune conséquence pour le corps vivant; ainsi l'élasticité de ses fibres ne regarde presque que les parties molles, attendu que ces seules parties sont véritablement susceptibles d'être alongées, pliées, fléchies: cette force, en vertu de laquelle les fibres de ces parties tendent à se raccourcir, leur est tellement inhérente, que non - seulement pendant la vie, de quelque maniere qu'elles soient tirées, elles font effort pour se raccourcir, en se contractant en effet dès qu'elles cessent d'être tendues & qu'elles sont livrées à elles - mêmes par solution de continuité ou autrement; mais encore après la mort, elles ne sont pas privées de cette force élastique, comme on peut en juger par les peaux des animaux & par les cordes que l'on fait de leurs boyaux & de différentes autres de leurs parties, qui conservent toutes beaucoup d'élasticité.

Mais cette propriété suppose dans la fibre une autre propriété, qui, bien qu'elle consiste dans un effet opposé, en est cependant une disposition nécessaire; c'est la faculté de pouvoir être alongée, c'est la distractilité: car puisque l'élasticité consiste dans la faculté qu'a un corps qui a souffert un changement dans la situation intrinseque de ses parties intégrantes sans solution de continuité, de les remettre dans leur premier état (par une force qui lui est propre); dès que la cause de ce changement cesse, il faut absolument que ce corps soit susceptible de ce premier effet dans ses parties; qu'elles soient mises dans une sorte d'éloignement, les unes par rapport aux autres; en un mot, que le contact cesse entr'elles (sans qu'elles se séparent les unes des autres, au point de faire solution de continuité pour le tout qu'elles composent) avant de leur faire recouvrer leur précédente situation respective, & de les ramener à leur premier état: c'est donc, ce me semble, fort à propos que l'on distingue deux effets bien différens, qui s'operent toutes les fois que la faculté élastique est réduite en acte dans les corps qui en sont susceptibles, d'autant plus que ces deux effets dépendent l'un & l'autre d'une puissance réellement aussi active pour l'un que pour l'autre: l'une sert autant à retenir les parties qui tendent à être écartées les unes des autres, & entierement desunies, que l'autre sert à les rapprocher & rétablir entr'elles le contact d'union, au point où il étoit; l'élasticité tend à raccourcir les fibres plus alongées que ne le comporte leur tendance naturelle; cet effet s'opere de la même maniere [p. 666] qu'un piston rentre avec force dans une pompe dont il a été tiré en partie; c'est - à - dire, sans sortir du tuyau, sans cesser d'aspirer. La distractilité permet l'alongement des fibres, en faisant néanmoins continuellement effort pour retenir leurs parties dans la sphere de cohésion; en empêchant qu'elles n'en sortent; en conservant ainsi la continuité, ou au moins la contiguité entr'elles: ce qui prouve, pour l'observer en passant, que la force de cohésion dans les corps élastiques, ne consiste pas dans le contact immédiat, puisqu'il peut être diminué très - considérablement, sans que cette force perde son activité: d'où on peut tirer la conséquence, que c'est cette force unique qui opere pour la même fin dans la distractilité, dans l'élasticité & dans le repos des corps, c'est - à - dire qu'elle agit toûjours dans ces différens cas, pour conserver l'assemblage des parties qui forment les aggrégats.

Il suit donc de ce qui vient d'être dit concernant la distractilité, qu'elle doit avoir lieu dans la fibre, pour que celle - ci puisse exercer son élasticité: ce qui arrive toûjours, soit que la cause qui tend la fibre la tire selon sa longueur, soit que la fibre de droite qu'elle est entre deux points fixés, soit forcée à se courber, ou que de courbe qu'elle est, elle le devienne davantage; soit qu'étant courbe sans avoir d'attache fixe, elle soit forcée à prendre une courbure plus étendue, quoique de la même modification (car ce sont - là les combinaisons générales selon lesquelles la fibre peut être alongée, tirée, forcée en différens sens): mais puisque la fibre entiere se laisse ainsi distendre, & qu'il s'ensuit que les particules élémentaires dont elle est formée, se séparent alors les unes des autres selon sa longueur, sans que pour cela il y ait dissociation complette, attendu qu'il n'y a point de solution de continuité apparente; comment cela peut - il se faire? est - ce, selon l'idée de Bellini, parce que les élémens des fibres sont disposés de maniere que le milieu de leurs surfaces répond au joint de deux autres contiguës, selon ce que l'on observe dans la construction des murs de brique ou de pierre de taille, ce qui fait dépendre la propriété dont il s'agit, non des élémens de chaque fibre entr'eux, mais de la totalité des fibres entr'elles, en tant qu'elles concourent à former un organe quelconque? est - ce par la raison, que les fibres ont des parties rameuses, qui s'entrelacent & se lient ensemble, selon l'idée de quelques autres physiologistes? est - ce par la force d'attraction newtonienne, qui conserve la continuité, quoique le contact immédiat soit diminué jusqu'à un certain point? Cette derniere opinion paroît la plus probable; mais de quelque maniere que la chose se fasse, c'est tout un; peu importe: cette recherche appartient absolument à la Physique générale, ainsi que ce qui regarde l'élasticité, la distractilité; ce n'est donc pas ici le lieu d'examiner quelle peut être la cause de ces phénomenes: d'ailleurs, il vaudroit mieux les admettre eux - mêmes, comme des causes dont il n'est intéressant de savoir que les lois constantes, que de se rendre le joüet de l'imagination, en travaillant à donner des explications qui auroient le sort de toutes celles qui ont paru jusqu'à présent; dont on peut dire qu'elles se sont détruites les unes les autres, au point de s'être presque fait oublier. Voyez Attraction, Cohésion, Elasticité , &c.

Ce sur quoi il importe le plus d'insister, est l'effet des deux propriétés dont il vient d'être question, bien avérées dans toutes les fibres animales; d'où il résulte que tant qu'elles sont entieres, de quelque maniere qu'elles soient disposées dans le corps vivant, elles sont absolument dans un état de distension; par conséquent elles ne sont jamais laissées à elles - mêmes; elles sont toujours dans un état vio<cb-> lent; elles font continuellement effort pour se raccourcir selon toute l'étendue de leur puissance élastique, & elles ne parviennent jamais entierement à l'état qu'elles affectent, même dans le plus grand relâchement que puissent produire les causes morbifiques.

C'est cette tendance, cet effort continuel des fibres, qui sont les principaux moyens par lesquels la vie se maintient: car étant toûjours distendues, elles sont dans une disposition continuelle à agir pour se raccourcir, dès que la force qui les alonge vient à diminuer; elles résistent à être intérieurement distendues, tant que leur force de ressort est supérieure ou même égale à celle qui tend à les alonger davantage. Il y a plusieurs raisons d'empêehement à ce que les fibres ne puissent pas se raccourcir autant que leur élasticité le comporteroit: les raisons particulieres à chaque aggrégé de fibres, sont tirées de leurs différentes positions méchaniques: ainsi p. e. dans celles qui sont antagonistes les unes des autres réciproquement, quoiqu'elles paroissent dans certains cas, comme le relâchement des muscles, n'être plus dans un état violent; cependant si on vient à couper un des aggrégés antagonistes, il se fait toûjours un raccourcissement dans chacune des portions séparées; elles s'écartent l'une de l'autre, se retirent vers leur point fixe; & l'antagoniste, qui reste entier, se contracte tout autant à proportion que celui qui a été coupé se retire: ce qui prouve bien que toutes ces fibres de part & d'autre, n'étoient pas sans tension; qu'elles faisoient encore effort pour se raccourcir davantage; & par conséquent, qu'elles ne cessoient pas d'être en action, quoique sans effet sensible.

Quant à l'obstacle général au relâchement entier des fibres, la cause en est facile à trouver; c'est la masse des fluides contenus dans les vaisseaux, qui tient les fibres dont ils sont composés, dans un état de distension continuelle, plus ou moins forte cependant, selon que le volume des fluides augmente ou diminue: dans le premier cas, les fibres sont tendues ultérieurement en quelque sens qu'elles soient posées: dans le second cas, elles se détendent de même en tous sens; mais ce relâchement n'est jamais parfait, tant qu'il reste des fluides dans les parties contenartes; il n'est que respectif; il n'est qu'un état de moindre distension; les fibres sont toûjours distendues en tous sens; dans le premier cas, c'est la distractilité des fibres qui est exercée, & l'élasticité dans le second; changemens qui ne cessent de se succéder tant que dure la vie, ensorte qu'elle semble dépendre d'un perpétuel inéquilibre.

Mais cet inéquilibre ne peut être connu que par rapport aux solides comparés aux fluides, & réciproquement; car pour ce qui est des solides entr'eux & des fluides entr'eux respectivement, on peut au contraire se les représenter comme dans un perpétuel équilibre de forces, d'action, de réaction proportionnées, au moins dans l'état de santé, qui est la vie la plus parfaite; équilibre dont les maladies ne sont que des lésions. Voyez Equilibre, (Econom. anim.) il se trouve sous ce mot bien des choses, qui ont rapport aux fibres en général; voyez aussi Circulation du Sang, Santé

Une autre propriété des fibres, qui dérive bien naturellement de la force élastique, c'est la vibratilité; ce seroit ici le lieu d'en traiter aussi; mais elle appartient de trop près au méchanisme de l'oüie, pour en séparer ce qu'il y a à dire de cette propriété consectaire. Voyez Son, Ouie, Oreille

Quant à l'irritabilité observée particulierement par M. Haller, dans quelques - unes des parties du corps humain, il suffit qu'elle ne soit pas une propriété commune à toutes les fibres, pour qu'il ne doive

Next page


The Project for American and French Research on the Treasury of the French Language (ARTFL) is a cooperative enterprise of Analyse et Traitement Informatique de la Langue Française (ATILF) of the Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS), the Division of the Humanities, the Division of the Social Sciences, and Electronic Text Services (ETS) of the University of Chicago.

PhiloLogic Software, Copyright © 2001 The University of Chicago.