ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"653"> posées; savoir les composées proprement dites, les recomposées, decomposita; & les sur - composées, supra - decomposita. On a donné le nom de foliole, foliolum, à chacune des petites feuilles qui composent la grande. Les feuilles composées proprement dites, sont celles qui se trouvent plusieurs ensemble sur un même pédicule simple ou branchu; les recomposées sont celles dont le pédicule commun se divise & se subdivise avant de former le pédicule particulier à chaque foliole. Dans les feuilles sur - composées, le pédicule commun se divise plus de deux fois avant d'arriver aux folioles. Il y a quatorze genres de feuilles composées.

Les feuilles déterminées sont celles que l'on distingue des autres par leur direction, leur position sur la plante, leur insertion, & leur situation respective, sans avoir égard à leur forme ni à leur structure. Ces feuilles déterminées sont divisés en 34 genres; ce qui fait en tout 126 genres de feuilles, dont on peut faire un beaucoup plus grand nombre d'especes, en employant leurs caracteres pour la description des plantes. Voyez floroe parisiensis prodrom. par M. Dalibard. Paris, 1749. (I)

Observations sur la distribution, les usages, l'utilité, la multiplication, la direction, le retournement des feuilles, leur inspection au microscope, l'art de les disséquer, & d'en prendre l'empreinte. Les Botanistes se sont déjà beaucoup exercés à chercher dans les feuilles, des caracteres propres à distinguer les plantes, à les ranger en classes & en genres; & si cette ingénieuse idée ne réussit pas, du moins peut - elle fournir des vûes & des avantages assez importans. Les mêmes Botanistes ont tâché de ramener toutes les distributions différentes des feuilles à des classes fixes. M. Bonnet, si distingué par ses connoissances en l'Histoire naturelle, a établi cinq ordres principaux de cette distribution dans son bel ouvrage sur les feuilles, publié à Leyde en 1754, in - 4°. avec figures; & quoiqu'on puisse sans doute découvrir de nouveaux genres de distribution, sa méthode ne mérite pas moins nos éloges.

Le premier ordre, que ce curieux observateur appelle alterne, & qu'il faut regarder comme le plus simple, est celui dans lequel les feuilles sont distribuées le long des branches, sur deux lignes paralleles à ces mêmes branches, & diamétralement opposées l'une à l'autre; ensorte qu'une feu.lle placée sur la ligne droite, est suivie immédiatement d'une autre située sur la ligne gauche: celle - ci l'est d'une 3e placée sur la ligne droite, & ainsi alternativement.

Le second ordre, que l'on peut nommer à paires croisées, est composé de feuilles distribuées par paires vis - à - vis l'une de l'autre, de façon que celles d'une paire croisent à angles droits celles de la paire qui suit.

Le troisieme ordre, que les Botanistes connoissent sous le nom de feuilles verticillées, est celui dans lequel les feuilles sont distribuées autour des tiges ou des branches, à - peu - près comme les rayons d'une roue le sont autour du moyeu. Cet ordre peut être sous - divisé par le nombre des feuilles, suivant qu'elles sont distribuées de trois en trois, de quatre en quatre, &c.

Le quatrieme ordre peut se nommer en quinconce, & est composé de feuilles distribuées de cinq en cinq.

Le cinquieme ordre, qui est le plus composé, peut se nommer à spirales redoublées; il est formé de feuilles arrangées sur plusieurs spirales paralleles. Le nombre de ces spirales, & celui des feuilles dont chaque tour est composé, peuvent donner naissance à des sous - divisions; traçons sur un bâton trois ou cinq spirales paralleles; sur chaque tour de ces spirales piquons à une distance à - peu - près égale les unes des autres, sept ou onze épingles, & nous aurons une idée très - nette de cet arrangement. Le pin & le sapin sont de ce cinquieme ordre qui est extremement rare.

On ne peut voir ces divers ordres de distributions de feuilles, sans se livrer aux sentimens d'admiration pour les lois éternelles, qui ont merveilleusement approprié les moyens à la fin.

On est pénétré des mêmes sentimens, quand on considere la régularité avec laquelle les feuilles sont couchées & pliees avant que de sortir du bouton, & la prévoyance de la Nature pour les mettre à l'abri de tout accident. La position réguliere des feuilles est telle, qu'elle embrasse la sixieme partie d'un cercle, comme dans le syringa, ou la huitieme comme dans la mauve, & généralement la douzieme comme dans le houx.

Le soin que la nature a pris de la conservation des feuilles, n'est pas moins digne d'attention; en effet, autant que leur figure le permet, elles sont toûjours défendues par les autres parties du bouton, ou se servent de défense respective. Lorsqu'elles sont en trop petit nombre & trop minces pour former ensemble un corps élevé en surface convexe, alors elles se déployent ou se roulent en tant de manieres, qu'il a fallu inventer des mots pour pouvoir les exprimer. A ces différens rouleaux, établis pour la défense des feuilles, nous pouvons ajoûter celle que procure l'interposition de diverses membranes fines qui servent au même but. Le docteur Grew en compte jusqu'à six, qu'il désigne par les noms de feuilles, de surfeuilles, d'entre - feuilles, de tiges des feuilles, de chaperons, & de petits manteaux ou voiles qui les couvrent. Voy. l'anat. des plantes de ce curieux physicien, liv. I. tab. 41, 42. Voyez aussi Malpighi de gemmis; nous ne pouvons pas entrer dans ces détails.

Les feuilles si bien distribuées, si variées dans leurs formes, si régulierement couchées & pliées, si savamment défendues contre les accidens, n'ont pas été données aux plantes uniquement pour les orner; elles ont des usages plus importans, & qui répondent mieux aux grandes idées que nous avons de l'ordre général.

Entre ces usages, celui d'élever le fluide nourricier, est un des principaux & des mieux constatés par les belles expériences de M. Hales; mais la préparation de ce fluide, l'introduction de l'air dans le corps de la plante, & la succession des particules aqueuses répandues dans l'atmosphere, ont d'autres fonctions, qui demandent encore d'être approfondies.

On distingue deux surfaces dans les feuilles des plantes; la surface supérieure, ou celle qui regarde le ciel, & la surface inférieure, ou celle qui regarde la terre; ces deux surfaces different sensiblement l'une de l'autre dans presque toutes les plantes terrestres. La surface supérieure est ordinairement lisse & lustrée, ses nervûres ne sont pas saillantes; la surface inférieure est pleine de petites aspérités, ou garnie de poils courts, ses nervûres ont du relief, & sa couleur toujours plus pâle que celle de la surface supérieure n'a que peu ou point de lustre. Ces différences assez frappantes ont sans doute une fin. L'expérience démontre que la rosée s'éleve de la terre; la surface des feuilles auroit - elle été principalement destinée à pomper cette vapeur, & à la transmettre dans l'intérieur de la plante? La pointe des feuilles relativement à la terre, & le tissu de leur surface inférieure, semblent l'indiquer.

Il y a une étroite communication entre toutes les parties de la feuille; les vaisseaux en s'abouchant les uns avec les autres, se communiquent réciproquement les sucs qu'ils reçoivent des pores absor<pb-> [p. 654] bans les plus voisins; une médiocre attention suffit, pour découvrir à l'oeil cette communication; elle forme sur les deux côtés de la feuille, une espece de réseau qu'on ne se lasse point d'admirer, lorsqu'il est devenu plus sensible par une longue macération, ou que de petits insectes ont consumé la substance délicate qui en remplissoit les moelles; mais cette correspondance réciproque jusqu'où s'étend - elle? Les feuilles se transmettent - elles mutuellement les sucs qu'elles ont pompés?

Il est bien prouvé que les plantes tirent leur humidité par leurs feuilles; il ne l'est pas moins, qu'il y a une étroite communication entre ces feuilles, & que cette communication s'étend à tout le corps de la plante. Ainsi on peut dire que les végétaux sont plantés dans l'air, a peu près comme ils le sont dans la terre. Les feuilles sont aux branches, ce que le chevelu est aux racines. L'air est un terrain fertile, où les feuilles puisent abondamment des nourritures de toute espece. La nature a donné beaucoup de surface à ces racines aëriennes, afin de les mettre en état de rassembler plus de vapeurs & d'exhalaisons: les poils dont elle les a pourvûes, arrêtent ces sucs; de petits tuyaux, toujours ouverts, les reçoivent, & les transmettent à l'intérieur. On peut même douter si les poils ne sont pas eux - mêmes des especes de suçoirs.

Dans les feuilles des herbes, les deux surfaces ont une disposition à - peu - près égale à pomper l'humidité; au lieu que dans les feuilles des arbres, la surface inférieure est ordinairement plus propre à cette fonction que la surface supérieure: la raison de ces différences vient vraissemblablement de la nature du tissu.

Les bulles qui s'élevent en si grand nombre sur les feuilles qu'on tient plongées dans l'eau, prouvent que l'air adhere fortement à ces parties de la plante; on peut en inférer que les feuilles ne servent pas seulement à pomper l'humidité, mais qu'elles sont encore destinées à introduire dans le corps des végétaux beaucoup d'air frais & élastique.

Les expériences de M. Hales démontrent que les feuilles sont le principal agent de l'ascension de la séve, & de sa transpiration hors de la plante. Mais la surface supérieure étant la plus exposée à l'action du soleil & de l'air (causes premieres de ces deux effets), on pourroit inférer que cette surface est celle qui doit avoir ici le plus d'influence: elle est d'ailleurs très - propre par son extrème poli, à faciliter le départ du suc; il ne se trouve ordinairement ni poils, ni aspérités qui puissent le retenir & l'empêcher de céder à l'impression de l'air qui tend à le détacher. Ainsi le principal usage de la surface supérieure des feuilles consiste peut - être à servir de défense ou d'abri à la surface inférieure, à fournir un filtre plus fin, qui ne laisse passer que les matieres les plus subtiles.

Dès que les feuilles servent à la fois à élever le suc nourricier & à en augmenter la masse, nous avons un moyen très - simple d'augmenter ou de diminuer la force d'une branche dans un arbre fruitier: nous l'augmenterons en laissant à cette branche toutes ses feuilles; nous le diminuerons par le procédé contraire. Nous comprendrons par le même moyen, que le vrai tems d'effeuiller n'est pas celui où le fruit est dans son plein accroissement; il a besoin alors de toutes ses racines: les feuilles qui l'environnent immédiatement, sont ses racines.

Si l'on dépouille une plante de toutes ses feuilles à mesure qu'elles paroissent, cette plante périra. L'herbe commune de nos prairies & celle de nos paturages, semble d'abord une exception à cette regle générale; mais il faut considérer, que quoique nos bestiaux, mangent les feuilles à mesure qu'elles crois<cb-> sent, néanmoins ils n'emportent qu'une très - petite partie de la feuille qui s'éleve pour lors en tige. D'ailleurs il y a une succession constante de nouvelles feuilles, qui poussent à la place des vieilles, & comme elles sont enfoncées en terre, & très courtes, elles suppléent à celles qui ont été dévorées. De plus, il est certain que l'on fait tort au sainfoin, aux luzernes, aux trefles, quand on les fait paître de trop près par les bestiaux. Quoique la racine vivace du sainfoin, le fasse pousser plusieurs années, la récolte de cette denrée, qui est un objet de conséquence, est souvent détruite de bonne heure, lorsqu'on souffre que le bétail s'en nourrisse à discrétion. On ne peut donc approuver la pratique des fermiers, qui mettent leurs troupeaux sur leurs blés quand ils les trouvent trop forts.

Personne n'ignore que plusieurs especes de plantes ont pour leur conservation des feuilles printannieres, & des feuilles automnales. Ces dernieres rendent un service infini à quelques arbres, par exemple, au mûrier, & lui sauvent la vie quand toutes les feuilles printannieres ont été mangées par les vers à soie.

Il est des feuilles dont les principales fonctions sont moins de pomper l'humidité, & d'aider à l'évaporation des humeurs superflues, que de préparer le suc nourricier, & de fournir peut - être de leur propre substance, une nourriture convenable à la petite tige qu'elles renferment; la pomme du chou en est un exemple extrèmement remarquable: concluons que les feuilles, de quelque façon qu'on les considere, fournissent aux plantes de tels avantages, que leur vie dépend de leurs feuilles, de maniere ou d'autre. Ainsi l'étroite communication qui est entre les parties d'un arbre, & sur - tout entre les feuilles & les branches, doit rendre très - attentif à l'état des feuilles; & s'il leur survient quelquefois des maladies qu'elles communiquent aux branches, on en préviendra l'effet en retranchant les feuilles altérées ou mal - saines.

On ne peut douter de la vérité des expériences d'Agricola sur la multiplication des plantes par leurs feuilles; M. Bonnet a répété ces expériences avec un succès égal, sur - tout dans les plantes herbacées. Voyez son excellent ouvrage cité ci - dessus.

La direction des feuilles est un autre objet qui mérite notre considération. M. Linnaeus parle de la direction des feuilles comme d'un caractere, mais elle n'est qu'un pur accident. On a beaucoup admiré le retournement de la radicule dans les graines semées à contre - sens; on n'a pas moins admiré le mouvement des racines qui suit ceux d'une éponge imbibée d'eau. Les feuilles si semblables aux racines dans une de leurs principales fonctions, leur ressembleroient - elles encore par la singuliere propriété de se retourner, ou de changer de direction? M. Bonnet s'est assûré de la vérité de cette conjecture par diverses expériences très - curieuses. Toutes choses égales, les jeunes feuilles se retournent plus promptement que les vieilles, celles des herbes, que celles des arbres; & ce retournement est plus prompt dans un tems chaud & serain, que dans un tems froid & pluvieux.

Les feuilles qui ont subi plusieurs inversions, paroissent s'amincir; leur surface inférieure se desseche, & semble s'écailler. Le Soleil par son action sur la surface supérieure des feuilles, change souvent leur direction, & les détermine à se tourner de son côté; il rend encore la surface supérieure des feuilles concave en maniere d'entonnoir ou de gouttiere, dont la profondeur varie suivant l'espece ou le degré de chaleur; la rosée produit un effet contraire.

Quoique le retournement des feuilles s'exécute sur

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