ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"645"> ses des pots à feu, & un autre plus petit pour percer les marons & saucissons.

Des vrilles de différentes grosseurs pour percer les fusées de table & autres.

Un compas & un pié de roi pour mesurer le diametre & la longueur des fusées.

Un gros piton à vis que l'on place dans un poteau de bois pour étrangler les cartouches.

Un rabot pour diminuer la grosseur des baguettes des fusées volantes lorsqu'elles sont trop pesantes.

Du fil de fer & des pinces plates, pour attacher les baguettes aux fusées de table.

Une petite marmite de fer blanc pour faire chauffer la colle - forte au bain - marie.

Une enclume de fonte, & deux gros marteaux de la même nature, pour faire le sable de fer.

Un assortiment de cordes & ficelles de différentes grosseurs, pour étrangler & lier les fusées.

Un assortiment de carton & de papier de différentes qualités.

Une planchette pour tracer les cartouches cubiques des marons.

Un chevalet pour tenir les fusées volantes.

Un étau de serrurier, un marteau, une rape - à - bois, & quelques limes.

Ces outils n'ont point d'usage particulier dans l'artifice; mais ils servent dans beaucoup d'occasions, & il seroit difficile de s'en passer.

Les différentes especes de feu d'artifice peuvent se distribuer,

1°. En feux qui s'élevent ou qui sont portés dans l'air; tels que les fusées de plusieurs sortes, les serpenteaux, les pluies de feu, les marons, les saucissons, les étoiles, &c. Voyez ces articles.

2°. En feux qui brûlent sur terre, tels que les lances à feu, les jets de feu, les soleils, les girandoles, &c. Voyez ces articles

3°. En feux préparés pour l'eau, tels que les genouillers, les trompes, les jattes, &c. V. ces articles.

Les effets de ces derniers articles qui brûlent sur l'eau & dans l'eau, paroissent si contraires à la nature du feu, qu'il n'est pas étonnant que des charlatans, pour rendre la chose plus merveilleuse & en tirer plus de lucre, ayent fait croire qu'il y entroit des drogues fort cheres, comme le vif - argent, l'ambre jaune, le camphre, les huiles de soufre, de salpetre, le petrole, l'huile de térebenthine, l'antimoine, la sciûre d'ivoire & de bois, & d'autres ingrédiens, qui produisent pour la plûpart un mauvais effet, qui est de donner beaucoup de fumée.

Toutes les fusées d'air & de terre brûlent dans l'eau, il ne s'agit que de les mettre en état de surnager.

Art. XI. De la maniere de communiquer le feu d'un artifice mobile à un artifice fixc. Le secret de cette communication de feu a été apporté de Bologne en France, en 1743, par les sieurs Ruggieri, actuellement artificiers du Roi & de la ville. On admira dans les spectales pyriques qu'ils donnerent sur le théatre de la comédie italienne, l'art avec lequel ils faisoient communiquer le feu successivement & à tems, d'un soleil tournant à un soleil fixe, & de suite à plusieurs autres pieces mobiles & fixes, placées sur un même axe de fer.

L'auteur de ce mémoire ayant trouvé ce secret, il s'est fait un plaisir de le rendre public dans son traité d'artifice, imprimé à Berne en 1750. Il consiste dans une chose fort simple, c'est d'approcher deux étoupilles l'une de l'autre, assez près, sans cependant qu'elles se touchent, pour que l'une ne puisse brûler sans donner feu à l'autre: voici la maniere dont il faut opérer.

On suppose un soleil fixe, placé entre deux soleils tournans sur un axe de fer; le premier est fixé dessus par une cheville qui traverse son moyeu & l'axe; les deux autres sont retenus par des écrous vissés sur l'axe, au moyen desquels on leur donne pour tourner autant & si peu de jeu que l'on veut.

L'espace entre le premier soleil tournant & le soleil fixe, est de six pouces quatre lignes. On le remplit par deux cylindres de chacun trois pouces de longueur & de deux pouces de diametre, aussi enfilés sur l'axe; ils sont collés de colle forte, l'un sur le moyeu du soleil fixe, & l'autre sur le moyeu du soleil tournant.

Entre ces deux cylindres, doit être enfilé sur l'axe un bouton de quatre lignes d'épaisseur, sur un pouce de diametre: il sert à les tenir dans un écartement de quatre lignes l'un de l'autre; & pour ne pas multiplier les pieces, on prend ordinairement ce bouton sur l'un des cylindres dont il fait partie, ou bien on l'y ajoûte en le collant dessus.

Sur la surface plane de chaque cylindre un peu au - dessus du bouton, doit être creusée une rainure circulaire de deux lignes & demie de largeur, & d'autant de profondeur, dans lesquelles on colle une étoupille avec de l'amorce; c'est par ces étoupilles que se doit faire la communication du feu, celle d'un cylindre ne pouvant brûler qu'elle ne donne feu à celle de l'autre vis - à - vis, n'y ayant que quatre lignes de distance entr'elles. Le feu est apporté à l'une par une étoupille, qui partant de l'extrémité du dernier des jets du soleil tournant, vient rendre à l'étoupille de ladite rainure circulaire, y étant conduite dans une rainure creusée sur le rayon qui porte le jet d'où elle part, sur le noyeu & sur le cylindre, d'où s'étant communiqué par son extension à l'étoupille de la rainure circulaire opposée, il est conduit de - là à la gorge de l'un des jets du soleil fixe, par une étoupille couchée dans une rainure faite sur son cylindre & sur son moyeu, jusqu'au pié du jet d'où elle va se rendre à sa gorge. Ces étoupilles doivent être bien couvertes avec du papier collé dessus, excepté celles qui sont placées dans les rainures circulaires; on les garantit des étincelles de feu avec un tuyau de carton ou de laiton bien mince, dans lequel on place les deux cylindres: ce tuyau doit les couvrir presqu'en entier; & pour qu'il ne gêne pas leur mouvement, on lui donne de diametre deux lignes de plus qu'aux cylindres.

La longueur que l'on donne aux cylindres, a deux objets: le premier est d'éloigner les étoupilles circulaires des bords du tuyau qui les couvre, par où les étincelles pourroient s'introduire: le second est de tenir les soleils fixes & tournans dans un écartement assez grand pour que le feu ne puisse se communiquer de l'un à l'autre; ce qui arriveroit s'ils étoient plus proches, quoique les communications soient bien couvertes.

L'espace entre le soleil fixe & le second soleil tournant, étant garni d'une pareille communication entre deux cylindres, le feu se portera à ce second soleil par une étoupille qui tirera son feu du pié de l'un des jets du soleil fixe, on y percera un trou pour y faire communiquer l'étoupille, & à laquelle il donnera feu en finissant.

De ce second soleil tournant, le feu peut de même être conduit à un second fixe, & ainsi successivement à plusieurs pieces.

Cette piece d'artifice qu'on nomme machine pyrique, se termine ordinairement par une étoile; elle est formée par six barres de trois à quatre piés de longueur, on les visse sur un moyeu pareil à celui d'un soleil fixe, il y a deux jets attachés au bout de chacune sur une traverse qui croise la barre, leurs gorges se croisent, & l'ouverture de l'angle qu'on leur donne est mesurée pour former une étoile; une étoupille couchée dans une rainure sur chacune des [p. 646] barres, qui communique d'un bout à la gorge des jets, & de l'autre à une étoupille circulaire qui entoure le moyeu au pié des barres, leur communique à tous le feu en même tems.

En place des jets qui forment l'étoile, on peut garnir les barres de six soleils tournans; ils doivent être composés, quoique plus petits, comme ceux décrits ci - dessus, savoir, d'une communication de feu entre deux cylindres, séparés par un bouton, & couverts d'un tuyau de laiton; le tout ne doit avoir au plus que quatre pouces de longueur: l'axe sur lequel ils doivent tourner, est une cheville de fer qui traverse la roue & les deux cylindres. Elle est vissée par le bout, & assez longue pour traverser la barre sur laquelle on veut la placer; on l'arrête avec un écrou derriere la barre qui est percée pour y donner passage, il reçoit le feu par l'étoupille couchée sur la barre à laquelle on joint celle du cylindre qui est appliqué dessus.

C'est avec de pareils soleils que l'on éclaire les décorations en découpures & les berceaux en treillages; on les fait ordinairement à trois jets qui prennent feu successivement.

Art. XII. D'une pâte dont les Chinois se servent pour représenter en feu des figures d'animaux & des devises. Nous devons encore au pere d'Incarville, cette maniere de former des figures. Elle consiste en une pâte faite de soufre en poudre impalpable & de colle de farine, dont on couvre des figures d'ozier, de carton ou de bois; ces figures doivent être premierement enduites d'argille ou terre grasse, pour les empêcher de brûler; après que la couche de pâte de soufre est posée, & pendant qu'elle est encore humide, on la poudre de poussier qui s'y attache; lorsqu'elle est bien seche, on colle des étoupilles sur ses principales parties, pour que le feu se porte par - tout en même tems, & on la couvre en entier de papier collé: les Chinois peignent ces figures de la couleur des animaux qu'elles représentent; leur durée en feu est proportionnée à l'épaisseur de la couche de pâte qui les couvre.

Lorsque les figures sont petites, on peut les mouler ou les modeler massives; comme cette pâte ne coule point en brûlant, elles conservent leurs formes jusqu'à ce qu'elles soient entierement consumées.

On peut aussi en faire usage pour former des devises & autres desseins.

Les Chinois s'en servent encore pour représenter des raisins; ils leur donnent la couleur pourprée en substituant à la colle de farine de la chair de jujubes; ils les font cuire, & en séparent la peau & le noyau. Cet article est tiré du Manuel de l'artificier de M. Perrinet d'Orv al, ouvrage excellent, qui nous fournira de plus tous les autres articles que nous avons cités plus haut.

Feu Grégeois (Page 6:646)

Feu Grégeois, (Hist. du moyen âge.) espece de feu d'artifice qui étoit composé de naphte, de poix, de résine, de bitume, & autres corps inflammables.

Feu grégeois signifie feu grec, parce qu'anciennement nous nommions les Grecs Grégeois; que ce furent eux qui s'en servirent les premiers, vers l'an 660, au rapport de Nicétas, Théophane, Cédrenus & autres; & qu'enfin ils furent en possession pendant trois siecles, de brûler par le secret de ce feu, les flottes de leurs ennemis.

L'inventeur du feu grégeois, suivant les historiens du tems, fut un ingénieur d'Héliopolis en Syrie, nommé Callinicus qui l'employa pour la premiere fois dans le combat naval que Constantin Pogonat livra contre les Sarrasins, proche de Cizique sur l'Hellespont. Son effet fut si terrible, ajoûtent les mêmes écrivains, qu'il brûla toute la flotte composée d'une trentaine de mille hommes.

Il est vrai que quelques modernes, & Scaliger entr'autres, donnent une date plus ancienne à cette decouverte, & l'attribuent à Marcus Gracchus: mar, les passages des auteurs grecs & latins qu'on cite pour favoriser cette opinion, n'en prouvent point la vérité.

Ce qu'on sait plus positivement, c'est que les successeurs de Constantin se servirent du feu grégeois en différentes occasions, presqu'avec autant de succès que lui; & ce qu'il y a de remarquable, c'est qu'ils eurent le bonheur de garder pour eux seuls le secret de cette composition, jusque vers milieu du x. siecle, tems auquel il paroît qu'aucun autre peuple ne le savoit encore.

Aussi le feu grégeois fut mis au rang des secrets de l'état par Constantin Porphyrogenete; en conséquence dans son ouvrage dédié à Romain son fils, sur l'administration de l'empire, il l'avertit que lorsque les Barbares lui demanderont du feu grégeois, il doit répondre qu'il ne lui est pas permis de leur en donner, parce qu'un ange qui l'apporta à l'empereur Constantin, défendit de le communiquer aux autres nations, & que ceux qui avoient osé le faire, avoient été dévorés par le feu du ciel, dès qu'ils étoient entrés dans l'église.

Cependant malgré les précautions de Constantin Porphyrogenete, la composition du feu grégeois vint à être connue ou découverte par les ennemis. Le P. Daniel, dans son histoire du siege de Damiette en 1249, sous S. Louis, rapporte que les Turcs en firent alors un terrible usage. Ils le lançoient, dit - il, avec un espece de mortier, & quelquefois avec une sorte d'arbalête singuliere, qui étoit tendue fortement par le moyen d'une machine, supérieure en force à celle des bras & des mains. Celui qu'on tiroit avec un espece de mortier, paroissoit quelquefois en l'air de la grosseur d'un tonneau, jettant une longue queue, & faisant un bruit semblable à celui du tonnerre. Mais voici les propres paroles de Joinville, qui étoit présent. « Les Turcs emmenerent un engin, qu'ils appelloient la perriere, un terrible engin à mal - faire, & les misdrent vis - à - vis des chats chateils, que messire Gaultier de Curel & moi, guettions de nuit; par lequel engin ils nous jetterent le feu grégeois à planté, qui étoit la plus terrible chose que onques jamais je veisse.» Au reste M. du Cange a fait une ample note sur cet endroit, dans laquelle il explique la composition & l'usage de ce feu; j'y renvoye le lecteur pour abréger.

On croit communément que le feu grégeois brûloit dans l'eau, & même avec plus de violence que dehors, opinion qui est hors de toute vraissemblance. Il est vrai qu'Albert d'Aix (liv. VII. ch. v.), a écrit qu'on ne pouvoit point éteindre ce feu avec de l'eau; mais en accordant même qu'il ne s'est pas trompé, ses paroles ne veulent point dire que le feu grégeois brûlât dans l'eau.

Encore moins faut - il penser que ce feu fût inextinguible; puisque selon Matthieu Paris en l'an 1219, on pouvoit l'éteindre avec du vinaigre & du sable. Les François y parvinrent plusieurs fois en l'étouffant avec adresse, & en empêchant la communication de l'air extérieur, par des peaux humides d'animaux nouvellement écorchés, qu'on jettoit dessus. Aussi lit - on dans la même histoire de Joinville, « Et incontinent fut éteint le feu grégeois par cinq hommes que avions propres à ce faire.»

Enfin l'invention du feu grégeois s'est perdue an moyen de la poudre à canon qui lui a succédé, & qui fait, par le secours de l'artillerie, bien d'autres ravages que ceux que produisoit le feu grégeois par le soufle dans des tuyaux de cuivre, par des arbalêtes - à - tour, ou autres machines à ressort. Reposons - nousen sur les hommes policés; ils ne manqueront jamais

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