ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"621"> maux & des autres corps, qui ne sauroient devenir électriques par la voie du frotement: une des conséquences de ce mouvement, est que la matiere électrique s'élance sensiblement du dedans au - dehors des corps jusqu'à une certaine distance; & les taits prouvent que ces emanations se font en forme d'aigrettes, ou de rayons divergens. Mais le corps ne s'epuise point par cette opération, parce que ce fluide est continuellement remplacé par un autre de même nature qui arrive non - seulement de l'air environnant, mais aussi de tous les corps du voisinage: ensorte que ces deux courans de matiere électrique exercent leurs mouvemens en sens contraire & pendant le même rems: cette circulation continue quelquefois pendant plusieurs heures après que le corps a cesse d'être froté.

M. l'abbé Nollet définit donc l'électricité, l'état d'un corps qui reçoit continuellement de dehors les rayons d'une matiere subtile, tandis qu'il élance au - dehors des rayons divergens d'une semblable matiere. L'auteur appelle effiuente la matiere qui s'elance des corps électrisés, & affluente celle qui vient de l'air & de la plûpart des corps du voisinage.

Ce principe des effluences & affluences simultanées, que M. l'abbé Nollet appuie sur quantité d'expériences, est le principal fondement de son systeme sur l'électricite. Voici comme il l'applique à quelques - uns des principaux phénomenes.

Lorsqu'une feuille de métal, ou tout autre corps leger, se trouve plongée dans la sphere d'activité d'un corps actuellement électrique, on doit la considérer comme agitée par deux puissances directement opposées l'une à l'autre; savoir la matiere effluente qui tend à l'éloigner du corps électrique, & la matiere affluente qui l'entraîne vers ce corps: elle reste quelquefois immobile quand ces deux forces opposées sont en équilibre, mais elle cede ordinairement à la matiere affluente, dont l'activité est presque toujours supérieure. Cette supériorité de la matiere affluente depend principalement de la convergence de ses rayons vers le corps électrisé; au lieu que les rayons effluens qui tendent à l'écarter de ce corps, sont très - divergens. D'ailleurs, plusieurs expériences autorisent à croire que les peres par où s'échappent les rayons effluens, sont en bien plus petit nombre que ceux qui admettent la matiere affluente, ainsi cette derniere matiere par sa force supérieure, doit emporter la feuille d'or vers le corps, electriser & produire le phénomene de l'attraction. Cependant comme ce n'est pas sans obstacle de la part des rayons effluens, que la feuille d'or est emportée vers le corps électrisé, il n'est pas surprenant qu'elle n'aille pas directement au corps électrique, sur - tout si elle a une certaine largeur; c'est aussi ce qui arrive le plus souvent.

La répulsion se fait, parce que la feuille d'or parvenue jusqu'au corps électrique s'électrise par communication, & se forme autour d'elle une atmosphere d'aigrettes, qui augmentant considérablement son volume, la rend plus en prise aux rayons de la matiere effluente, dont l'action l'écarte du corps électrisé, autant de tems que l'électricité subsiste dans l'un & dans l'autre. Mais comme la feuille d'or perd en un instant son atmosphere, dès qu'elle a touché à un corps non électrique, elle suit comme auparavant l'effort de la matiere affluente, & se précipite sur le corps électrisé. Le verre rendu électrique par le frotement, continue de represser une feuille d'or suspendue par un fil de soie, tant que celle - ci conserve l'atmosphere qui lui a été communiquée; il n'en est pas de même d'un bâton de cire d'Espagne, d'un morceau d'ambre, d'un canon de soufre, &c. qu'on présente à cette feuille mise en répulsion, après avoir excité leur vertu par un vigoureux frotement: les pores par où s'échappent les rayons effluens étant plus rares dans ces corps résineux que dans le verre, la matiere affluente agit sur la feuille d'or repoussée avec toute sa force, & l'entraine vers ces corps resineux malgré l'effet de leurs rayons effluens.

Pour communiquer de l'électricité à un corps, par exemple à une barre de fer, il ne s'agit, comme nous avons dit, que de mettre en mouvement par le moyen de quelque corps déja électrisé, le fluide électrique qu'il contient naturellement dans ses pores: or comme un premier choc ne peut agiter sensiblement qu'une certaine quantité de matiere, il est nécessaire de limiter celle que peuvent mouvoir les rayons qui émanent du corps électrisé, c'est ce que l'on fait en isolant cette barre, sur de la soie, de la résine, de la cire, &c. & en séparant par le moyen de ces corps qui n'admettent pas facilement la matiere électrique, la masse du fluide que contient cette barre d'avec cette masse immense qui est répandue dans le globe de la terre.

Ce mouvement imprimé au fluide électrique qui réside naturellement dans chaque corps, & plus abondamment dans ceux qui ne sont pas réputés électriques, doit être très - prompt, & se faire appercevoir en un instant à une très - grande distance, si ce corps qu'on électrise par communication a une longueur suffisante; & comme le fluide électrique trouve moins d'obstacle dans ces sortes de corps que dans l'air, il les parcourt très - promptement sans résistance, & suit dans sa propagation toutes les sinuosités & tous les replis de ces corps électrises.

Chaque particule de matiere électrique est comme une petite portion du feu élementaire, enveloppée de quelque matiere grasse, saline ou sulphureuse, qui la contient & qui s'oppose à son expansion: lors donc que la matiere effluente qui s'élance d'un corps électrisé, rencontre l'affluente qui se présente pour entrer; si la vîtesse respective de ces deux courans est assez grande, le choc brise les enveloppes de ces particules, & le feu qu'elles renferment devenu libre, éclate, brille, & anime du même mouvement les parties semblables qui sont contiguës, comme pourroit un grain de poudre à canon enflammé en embraser une infinité d'autres placés de suite. Or comme la matiere effluente s'élance en forme d'aigrettes, ces rayons lumineux conservent la même forme: il résulte de ce choc subit un bruit ou siflement qu'on entend quand les aigrettes sortent, & qui est d'autant plus sensible que le corps est plus fortement électrisé.

L'étincelle qu'on apperçoit lorsqu'on approche le doigt ou quelque morceau de métal du corps électrisé, vient de ce que les rayons effluens de celui - ci acquierent par la proximité du doigt une plus grande force. 1°. Parce qu'ils coulent alors avec plus de vîtesse; 2°. parce que la divergence naturelle de ces rayons diminue, & qu'ils se condensent; ce n'est plus alors une matiere effluente, rare & dispersée, qui frappe avec plus d'efforts une autre matiere venant de l'air: c'est un fluide condensé & accéléré qui en rencontre un autre presqu'aussi animé que lui; ainsi le choc doit être plus violent, le bruit plus fort, l'embrasement plus considérable, enfin l'étincelle doit paroître.

L'étincelle qui naît du choc de ces deux matieres effluentes & affluentes, peut devenir assez forte pour causer l'inflammation d'une liqueur spiritueuse, surtout si on l'y a disposée en la faisant un peu tiédir, & si cette liqueur est contenue dans le creux de la main, dans un vase de métal, ou dans tout autre corps que la matiere électrique puisse pénétrer avec facilité; car la matiere affluente qui viendra de la cueillere ou de la main, pénétrera facilement la liqueur, donnera lieu à un choc plus violent & à une étincelle plus brûlante, [p. 622]

A l'égard de l'expérience de Leyde, M. l'abbé Nollet observe que la bouteille remplie d'eau, est très susceptible d'électricité par communication; que l'électricité que l'eau reçoit, se transmet au verre, qu'elle le pénetre & se répand sur sa surface extérieure; que dans cette expérience, la bouteille ne laisse pas que de continuer long - tems dans son état d'électricité, soit qu'elle soit posée sur une table ou sur d'autres corps non électriques. Maintenant la violence avec laquelle l'étincelle éclate & frappe dans l'expérience de Leyde, dépend de ce que le choc est double & qu'il se fait en même tems en deux endroits différens. Le premier se fait à l'extrémité du doigt que l'on présente au conducteur entre la matiere effluente de ce conducteur, & la matiere affluente qui sort du doigt; il s'en fait un autre à la main gauche qui tient la bouteille, entre le fluide qui sort du verre électrisé par communication, & celui qui arrive de cette même main vers la bouteille. Or comme par l'effet de ce double choc, la matiere affluente rétrograde avec force de chaque côté, elle produit aux deux poignets & dans l'intérieur du corps une commotion subite & très - violente, plus sensible dans les bras & dans la poitrine qui se trouvent placés dans sa direction.

M. l'abbé Nollet applique de même son principe des effluences & affluences simultanées, pour expliquer les autres phénomenes de l'électricité; mais nous renvoyons à ses ouvrages, où l'on trouvera toutes les preuves qu'il a réunies pour établir la vérité de ce principe.

M. Franklin pense que la matiere électrique est un véritable feu qui traverse & pénetre la matiere commune avec tant de liberté, qu'elle n'éprouve aucune résistance sensible; il prouve cette pénétration intérieure des corps par l'expérience de Leyde, dans laquelle on sent une commotion intérieure, qui ne devroit pas arriver si la matiere électrique ne faisoit que glisser le long des surfaces. Ce feu & le feu commun ne sort peut - être que des modifications du même élément, quoiqu'ils paroissent avoir des propriétés différentes: ces deux matieres fluides, si on veut les distinguer, existent souvent ensemble dans les mêmes corps, en remplissent les pores, s'y meuvent avec une entiere liberté sans aucune confusion dans leurs effets.

Au reste le feu électrique est universellement répandu par - tout; on le trouve dans l'air & dans tous les corps qui nous environnent: ainsi nos machines électriques ne le produisent point, mais elles le dirigent, le rassemblent, le condensent & le raréfient à notre volonté dans les différens corps. M. Franklin croit que ce fluide remplit à - peu - près les pores des corps ordinaires, & que quand au moyen de nos machines, on leur en ajoûte une quantité, cette quantité ajoûtée n'entre pas dans leur intérieur, mais forme autour d'eux une atmosphere plus ou moins dense, suivant la quantité que l'on a ajoûtée. Il suppose que les particules de matiere électrique se repoussent mutuellement, au contraire des particules de matiere commune, qui tendent toutes à s'attirer: & c'est à cette qualité répulsive qu'il attribue la divergence des rayons électriques, l'écartement de deux fils électrisés, la divergence des rayons des aigrettes lumineuses, l'évaporation accélerée des liqueurs électrisées, & plusieurs autres effets. Ces mêmes particules se repoussent entr'elles, sont très - bien attirées par la matiere commune avec une force plus ou moins grande, suivant les différentes sortes de matiere: car le verre, la cire, l'ambre & les autres corps appellés électriques, l'attirent & la retiennent plus fortement que les autres, & en contiennent aussi une plus grande quantité. C'est pourquoi admettant la subtilité des parricules de la matiere électrique, leur répulsion mutuelle & l'attraction réciproque entr'elles & les parties de la matiere commune, il résulte que quand une quantité de matiere électrique est appliquée à une certaine quantité de matiere commune qui n'en contient pas déjà, le fluide electrique se répand aussi - tôt également & uniformément dans toute l'étendue de cette quantité de matiere: mais dans la matiere commune il y a ordinairement autant de matiere électrique qu'elle en peut contenir; si l'on en ajoûte davantage, le surplus se distribue encore également & unitormément dans toute l'étendue de sa surface, & forme une atmosphere. L'attraction entre le fluide électrique & la matiere commune est réciproque; c'est pourquoi les corps dans lesquels le fluide électrique est condensé, attirent les petits corps legers qui se trouvent dans leur sphere d'activité; c'est en vertu de cette propriété que le fluide électrique passe du corps électrisé dans celui qui ne l'est pas, & lui fait exercer tous les effets des corps électriques; que l'électricité communiquée à une barre de fer isolée, se dissipe en un instant des qu'on approche de cette barre un corps non électrique, tel que le bout du doigt.

M. Franklin explique l'expérience de Leyde d'une maniere différente de celle de tous les autres physiciens: il observe d'abord que le verre est absolument impenétrable au fluide électrique; car il ne conçoit pas comment on pourroit charger la bouteille si le fluide électrique passoit au - travers du verre, & s'il pouvoit s'échapper par la main de celui qui tient la bouteille: en effet la bouteille ne se charge pas si elle a la moindre félure ou le moindre petit trou dans sa surface. Il prétend que dans cette merveilleuse expérience le fluide n'entre du conducteur dans la bouteille, qu'autant qu'il en sort de celui qui existe naturellement sur sa surface extérieure: que cette matiere n'est pas condensée dans l'eau ou dans le corps non électrique qui est dans la bouteille, mais uniquement sur la surface intérieure du verre: que l'explosion violente qui se fait lorsque tenant la bouteille d'une main, on touche de l'autre au fil d'archal, n'est que le remplacement du fluide épuisé & chassé de la surface extérieure par le fluide accumulé sur la surface intérieure de la bouteille; ce qu'il prouve parce qu'un homme posé sur un gâteau de cire & qui fait l'expérience de Leyde, n'est ni plus ni moins électrisé après l'expérience, qu'il l'étoit auparavant.

Cependant comme la surface extérieure d'une bouteille chargée qui est privée selon lui, de sa quantité de fluide électrique ordinaire, attire, repousse & communique de l'électricité aux autres corps, aussi bien que le fil - d'archal qui est électrisé par le fluide condensé & introduit dans la bouteille, il est obligé de distinguer deux sortes d'électricité.

Il appelle positive, celle de l'intérieur de la bouteille; & négative, celle de sa surface intérieure: or tous les corps électrisés positivement se repoussent entr'eux, comme font aussi tous ceux qui le sont négativement: les uns & les autres attirent les corps legers à - peu - près avec la même force; mais toutes choses égales, les corps électrisés positivement, attirent ceux qui le sont négativement avec une plus grande force que les uns & les autres n'attirent ceux qui ne sont point du tout électrisés. Nous donnerons aux articles Météores & Tonnerre un extrait du sentiment de M. Franklin, sur la formation des orages, dont il rapporte l'origine aux effets du feu électrique. Ces deux articles sur le feu électrique sont de M. le Monnier, de C Académie royale des Sciences, & Médecin ordinaire de S. M. à S. Germain en - Laye, auteur de l'article Electricité. Voyez ce dernier mot: voy. aussi Coup foudroyant, Conducteur , &c.

Feu (Page 6:622)

Feu en Chirurgie, signifie la même chose que cautere actuel. Voyez Cautere. L'application du feu

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