ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"471"> point partie du genre humain, mulieres homines non esse. Dans cet ouvrage, Acidalius explique tous les textes qui parlent du salut des femmes, de leur bienêtre temporel. Il s'appuie sur cinquante témoignages tirés de l'Ecriture; finit par demander aux femmes leur ancienne bienveillance pour lui; quod si noluerint, dit - il, percant bestioe in soecula soeculorum. Il en veut à la maniere d'expliquer l'Ecriture des Anabaptistes & des autres hérétiques; mais son badinage est indécent.

Simon Gediccus, après l'avoir réfuté aussi maussadement qu'il soit possible de le faire, après l'avoir chargé d'injures théologiques, lui reproche enfin qu'il est un être bâtard, formé de l'accouplement monstrueux de satan avec l'espece humaine, & lui souhaite la perdition éternelle. (g)

Femme (Page 6:471)

Femme, (Droit nat.) en latin uxor, femelle de l'homme, considérée en tant qu'elle lui est unie par les liens du mariage. Voyez donc Mariage & Mari.

L'Etre suprème ayant jugé qu'il n'étoit pas bon que l'homme fût seul, lui a inspiré le desir de se joindre en société très - étroite avec une compagne, & cette société se forme par un accord volontaire entre les parties. Comme cette société a pour but principal la procréation & la conservation des enfans qui naîtront, elle exige que le pere & la mere consacrent tous leurs soins à nourrir & à bien élever ces gages de leur amour, jusqu'à ce qu'ils soient en état de s'entretenir & de se conduire eux - mêmes.

Mais quoique le mari & la femme ayent au fond les mêmes intérêts dans leur société, il est pourtant essentiel que l'autorité du gouvernement appartienne à l'un ou à l'autre: or le droit positif des nations policées, les lois & les coûtumes de l'Europe donnent cette autorité unanimement & définitivement au mâle, comme à celui qui étant doüé d'une plus grande force d'esprit & de corps, contribue davantage au bien commun, en matiere de choses humaines & sacrées; ensorte que la femme doit nécessairement être subordonnée à son mari & obéir à ses ordres dans toutes les affaires domestiques. C'est - là le sentiment des jurisconsultes anciens & modernes, & la décision formelle des législateurs.

Aussi le code Frédéric qui a paru en 1750, & qui semble avoir tenté d'introduire un droit certain & universel, déclare que le mari est par la nature même le maître de la maison, le chef de la famille; & que dès que la femme y entre de son bon gré, elle est en quelque sorte sous la puissance du mari, d'où découlent diverses prérogatives qui le regardent personnellement. Enfin l'Ecriture - sainte prescrit à la femme de lui être soûmise comme à son maître.

Cependant les raisons qu'on vient d'alléguer pour le pouvoir marital, ne sont pas sans replique, humainement parlant; & le caractere de cet ouvrage nous permet de le dire hardiment.

Il paroît d'abord 1°. qu'il seroit difficile de démontrer que l'autorité du mari vienne de la nature; parce que ce principe est contraire à l'égalité naturelle des hommes; & de cela seul que l'on est propre à commander, il ne s'ensuit pas qu'on en ait actuellement le droit: 2°. l'homme n'a pas toûjours plus de force de corps, de sagesse, d'esprit, & de conduite, que la femme: 3°. le précepte de l'Ecriture étant etabli en forme de peine, indique assez qu'il n'est que de droit positif. On peut donc soûtenir qu'il n'y a point d'autre subordination dans la société conjugale, que celle de la loi civile, & par conséquent rien n'empêche que des conventions particulieres ne puissent changer la loi civile, dès que la loi naturelle & la religion ne déterminent rien au contraire.

Nous ne nions pas que dans une société composée de deux personnes, il ne faille nécessairement que la loi délibérative de l'une ou de l'autre l'em<cb-> porte; & puisque ordinairement les hommes sont plus capables que les femmes de bien gouverner les affaires particulieres, il est très - judicieux d'établir pour regle générale, que la voix de l'homme l'emportera tant que les parties n'auront point fait ensemble d'accord contraire, parce que la loi générale découle de l'institution humaine, & non pas du droit naturel. De cette maniere, une femme qui sait quel est le précepte de la loi civile, & qui a contracté son mariage purement & simplement, s'est par - là soûmise tacitement à cette loi civile.

Mais si quelque femme, persuadée qu'elle a plus de jugement & de conduite, ou sachant qu'elle est d'une fortune ou d'une condition plus relevée que celle de l'homme qui se présente pour son époux, stipule le contraire de ce que porte la loi, & cela du consentement de cet époux, ne doit - elle pas avoir, en vertu de la loi naturelle, le même pouvoir qu'a le mari en vertu de la loi du prince? Le cas d'une reine qui, étant souveraine de son chef, épouse un prince au - dessous de son rang, ou, si l'on veut, un de ses sujets, suffit pour montrer que l'autorité d'une femme sur son mari, en matiere même de choses qui concernent le gouvernement de la famille, n'a rien d'incompatible avec la nature de la société conjugale.

En effet on a vû chez les nations les plus eivilisées, des mariages qui soûmettent le mari à l'empire de la femme; on a vû une princesse, héritiere d'un royaume, conserver elle seule, en se mariant, la puissance souveraine dans l'état. Personne n'ignore les conventiens de mariage qui se firent entre Philippe II. & Marie reine d'Angleterre; celles de Marie reine d'Ecosse, & celles de Ferdinand & d'Isabelle, pour gouverner en commun le royaume de Castille. Le lecteur en peut lire les détails dans M. de Thou, liv. XIII. ann. 1553, 1554. liv. XX. an. 1558. Mariana, hist. d'Espagne, liv. XXIV. ch. v. Guicciardin, liv. VI. pag. 346. Et pour citer quelque chose de plus fort, nous le renvoyons à la curieuse dissertation de Palthénius, de Marito Reginoe, imprimée à Gripswald en 1707, in - 4°.

L'exemple de l'Angleterre & de la Moscovie fait bien voir que les femmes peuvent réussir également, & dans le gouvérnement modéré, & dans le gouvernement despotique; & s'il n'est pas contre la raison & contre la nature qu'elles régissent un empire, il semble qu'il n'est pas plus contradictoire qu'elles soient maîtresses dans une famille.

Lorsque le mariage des Lacédémoniens étoit prêt à se consommer, la femme prenoit l'habit d'un homme; & c'étoit - là le symbole du pouvoir égal qu'elle alloit partager avec son mari. On sait à ce sujet ce que dit Gorgone, femme de Léonidas roi de Sparte, à une femme étrangere qui étoit fort surprise de cette égalité: Ignorez - vous, répondit la reine, que nous mettons des hommes au monde? Autrefois même en Egypte, les contrats de mariage entre particuliers, aussi - bien que ceux du roi & de la reine, donnoient à la femme l'autorité sur le mari. Diodore de Sicile, liv. I. ch. xxvij.

Rien n'empêche au moins (car il ne s'agit pas ici de se prévaloir d'exemples uniques & qui prouvent trop); rien n'empêche, dis - je, que l'autorité d'une femme dans le mariage ne puisse avoir lieu en vertu des conventions, entre des personnes d'une condition égale, à moins que le législateur ne défende toute exception à la loi, malgré le libre consentement des parties.

Le mariage est de sa nature un contrat; & par conséquent dans tout ce qui n'est point défendu par la loi naturelle, les engagemens contractés entre le mari & la femme en déterminent les droits réciproques.

[p. 472]

Enfin, pourquoi l'ancienne maxime, provisio hominis tollit provisionem legis, ne pourroit - elle pas être reçûe dans cette occasion, ainsi qu'on l'autorise dans les doüaires, dans le partage des biens, & en plusieurs autres choses, où la loi ne regne que quand les parties n'ont pas cru devoir stipuler différemment de ce que la loi prescrit? Article de M. le Chevalier de Jaucourt.

Femme (Page 6:472)

Femme, (Morale.) ce nom seul touche l'ame, mais il ne l'éleve pas toûjours; il ne fait naître que des idées agréables, qui deviennent un moment après des sensations inquietes, ou des sentimens tendres; & le philosophe qui croit contempler, n'est bien - tôt qu'un homme qui desire, ou qu'un amant qui rêve.

Une femme se faisoit peindre; ce qui lui manquoit pour être belle, étoit précisément ce qui la rendoit jolie. Elle vouloit qu'on ajoûtât à sa beauté, sans rien ôter à ses graces; elle vouloit tout - à - la - fois, & que le peintre fût infidele, & que le portrait fût ressemblant: voilà ce qu'elles seront toutes pour l'écrivain qui doit parler d'elles.

Cette moitié du genre humain, comparée physiquement à l'autre, lui est supérieure en agrémens, inférieure en force. La rondeur des formes, la finesse des traits, l'éclat du teint, voilà ses attributs distinctifs.

Les femmes ne different pas moins des hommes par le coeur & par l'esprit, que par la taille & par la figure; mais l'éducation a modifié leurs dispositions naturelles en tant de manieres, la dissimulation qui semble être pour elles un devoir d'état, a rendu leur ame si secrete, les exceptions sont en si grand nombre, si confondues avec les généralités, que plus on fait d'observations, moins on trouve de résultats.

Il en est de l'ame des femmes comme de leur beauté; il semble qu'elles ne fassent appercevoir que pour laisser imaginer. Il en est des caracteres en général, comme des couleurs; il y en a de primitives, il y en a de changeantes; il y a des nuances à l'infini, pour passer de l'une à l'autre. Les femmes n'ont guere que des caracteres mixtes, intermédiaires ou variables; soit que l'éducation altere plus leur naturel que le nôtre; soit que la délicatesse de leur organisation fasse de leur ame une glace qui reçoit tous les objets, les rend vivement, & n'en conserve aucun.

Qui peut définir les femmes? Tourà la vérité parle en elles, mais un langage équivoque. Celle qui paroît la plus indifférente, est quelquefois la plus sensible; la plus indiscrete passe souvent pour la plus fausse: toûjours prévenus, l'amour ou le dépit dicte les jugemens que nous en portons; & l'esprit le plus libre, celui qui les a le mieux étudiées, en croyant resoudre des problèmes, ne fait qu'en proposer de nouveaux. Il y a trois choses, disoit un bel esprit, que j'ai toûjours beaucoup aimées sans jamais y rien comprendre, la peinture, la musique, & les femmes.

S'il est vrai que de la foiblesse naît la timidité, de la timidité la finesse, & de la finesse la fausseté, il faut conclure que la vérité est une vertu bien estimable dans les femmes.

Si cette même délicatesse d'organes qui rend l'imagination des femmes plus vive, rend leur esprit moins capable d'attention, on peut dire qu'elles apperçoivent plus vîte, peuvent voir aussi bien, regardent moins long - tems.

Que j'admire les femmes vertueuses, si elles sont aussi fermes dans la vertu, que les femmes vicieuses me paroissent intrépides dans le vice!

La jeunesse des femmes est plus courte & plus brillante que celle des hommes; leur vieillesse est plus fâcheuse & plus longue.

Les femmes sont vindicatives. La vengeance qui est l'acte d'une puissance momentanée, est une preu<cb-> ve de foiblesse. Les plus foibles & les plus timides doivent être cruelles: c'est la loi générale de la nature, qui dans tous les êtres senûbles proportionne le ressentiment au danger.

Comment seroient - elles discretes? elles sont curieuses; & comment ne seroient elles pas curieuses? on leur fait mystere de tout: elles ne sont appellées ni au conseil, ni à l'exécution.

Il y a moins d'union entre les femmes qu'entre les hommes, parce qu'elles n'ont qu'un objet.

Distingués par des inégalités, les deux sexes ont des avantages presque égaux. La nature a mis d'un côté la force & la majesté, le courage & la raison; de l'autre, les graces & la beauté, la finesse & le sentiment. Ces avantages ne sont pas toûjours incompatibles; ce sont quelquefois des attributs différens qui se servent de contré poids, ce sont quelquefois les mêmes qualités, mais dans un degré différent. Ce qui est agrément ou vertu dans un sexe, est defaut ou difformité dans l'autre. Les différences de la nature devoient en mettre dans l'éducation; c'est la main du statuaire qui pouvoit donner tant de prix à un morceau d'argile.

Pour les hommes qui partagent entre eux les emplois de la vie civile, l'état auquel ils sont destinés décide l'éducation & la différencie. Pour les femmes, l'éducation est d'autant plus mauvaise qu'elle est plus générale, & d'autant plus négligée qu'elle est plus utile. On doit être surpris que des ames si incultes puissent produire tant de vertus, & qu'il n'y germe pas plus de vices.

Des femmes qui ont renoncé au monde avant que de le connoître, sont chargées de donner des principes à celles qui doivent y vivre. C'est de - là que souvent une fille est menée devant un autel, pour s'imposer par serment des devoirs qu'elle ne connoît point, & s'unir pour toûjours à un homme qu'elle n'a jamais vû. Plus souvent elle est rappellée dans sa famille, pour y recevoir une seconde éducation qui renverse toutes les idées de la premiere, & qui portant plus sur les manieres que sur les moeurs, échange continuellement des diamans mal - taillés ou mal assortis, contre des pierres de composition.

C'est alors, c'est après avoir passé les trois quarts du jour devant un miroir & devant un clavecin, que Chloé entre avec sa mere dans le labyrinthe du monde: là son esprit errant s'égare dans mille détours, dont on ne peut sortir qu'avec le fil de l'expérience: là toûjours droite & filentieuse, sans aucune connoissance de ce qui est digne d'estime ou de mépris, elle ne sait que penser, elle craint de sentir, elle n'ose ni voir ni entendre; ou plûtôt observant tout avec autant de curiosité que d'ignorance, voit souvent plus qu'il n'y en a, entend plus qu'on ne dit, rougit indécemment, soûrit à contre - sens, & sûre d'être également reprise de ce qu'elle a paru savoir & de ce qu'elle ignore, attend avec impatience dans la contrainte & dans l'ennui, qu'un changement de nom la mene à l'indépendance & au plaisir.

On ne l'entretient que de sa beauté, qui est un moyen simple & naturel de plaire, quand on n'en est point occupé; & de la parare, qui est un système de moyens artificiels pour augmenter l'effet du premier, ou pour en tenir lieu, & qui le plus souvent ne fait ni l'un ni l'autre. L'éloge du caractere ou de l'esprit d'une femme est presque toûjours une preuve de laideur; il semble que le sentiment & la raison ne soient que le supplément de la beauté. Après avoir formé Chloé pour l'amour, on a soin de lui en défendre l'usage.

La nature semble avoir conféré aux hommes le droit de gouverner. Les femmes ont eu recours à l'art pour s'affranchir. Les deux sexes ont abusé réciproquement de leurs avantages, de la force & de la

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