ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"445"> qui se mettent dans les baies des croisées ou des portes. Voyez Limon.

Faux - marqué (Page 6:445)

Faux - marqué ou Contre - marqué, s. m. (Maréchall.) termes synonymes: le second est plus usité que le premier.

Le cheval contre - marqué est celui dans la table de la dent duquel on observe une cavité factice ou artificielle, & telle que l'animal paroît marquer: cette friponnerie n'est pas la seule dont les maquignons sont capables. Voyez Maquignon.

Ils commettent celle dont il s'agit, par le moyen d'un burin d'acier, semblable à celui que l'on employe pour travailler l'ivoire: ils creusent legerement les dents mitoyennes, & plus profondément celles des coins. Pour contrefaire ensuite le germe de feve, ils remplissent la cavité de poix résine, ou de poix noire, ou de soufre, ou bien ils y introduisent un grain de froment, après quoi ils enfoncent un fer chaud dans cette cavité, & réiterent l'insertion de la poix, du soufre ou du grain, jusqu'à ce qu'ils ayent parfaitement imité la nature: d'autres y vuident simplement de l'encre très - grasse, mais le piége est alors trop grossier.

L'impression du feu forme toûjours un petit cercle jaunâtre qui environne ces trous. Il est donc question de dérober & de soustraire ce cercle aux yeux des acheteurs. Aussi - tôt qu'il s'en présente, le maquignon glisse le plus adroitement qu'il lui est possible dans la bouche de l'animal une legere quantité de mie de pain très - seche, & pilée avec du sel ou quelqu'autre drogue prise & tirée des apophlegmatisans, & dont la propriété est d'exciter une écume abondante: cette écume couvre & cache le cercle, mais dès qu'on en nettoye la dent avec le doigt, il repareit, & on le découvre bien - tôt; d'ailleurs les traits du burin sont trop sensibles pour n'être pas aisément apperçus.

Le but ou l'objet de cette fraude ne peut être parfaitement dévoilé qu'autant que nous nous livrerons à quelques réflexions sur les marques & sur les signes auxquels on peut reconnoître l'âge du cheval.

La connoissance la plus particuliere & la plus sûre qu'on puisse en avoir, se tire de la dentirion, c'est - à - dire du tems & de l'époque de la pousse des dents, & de la chûte de celles qui doivent tomber pour faire place à d'autres.

La situation des quarante dents dont l'animal est pourvû, est telle qu'il en est dans les parties latérales postérieures en - delà des barres, dans les parties latérales en - deçà des barres, & dans les parties antérieures de la bouche; de - là leur division en trois classes.

La premiere est celle des dents qui, situées dans les parties latérales postérieures en - delà des barres, sont au nombre de vingt - quatre, six à chaque côté de chaque mâchoire: elles ne peuvent servir en aucune façon pour la connoissance & pour la distinction de l'âge, d'autant plus qu'elles ne sont point à la portée de nos regards. On les nomme mâchelieres ou molaires, mâchelieres du mot mâcher, molaires du mot moudre, parce que leur usage est de triturer, de broyer, de rompre les alimens ou le fourrage: opération d'autant plus nécessaire, que sans la mastication il ne peut y avoir de digestion parfaite.

La seconde classe comprend les dents qui, placées dans les parties latérales en deçà des barres, sont au nombre de quatre, une à chaque côté de chaque mâchoire. Les anciens les nommoient écaillons, nous les appellons crocs ou crochets; ce sont en quelque façon les dents canines du cheval. Les jumens en sont communément privées, & n'ont par conséquent que trente - six dents: il en est néanmoins qui en ont quarante, mais leurs crochets sont toûjours très - petits, & elles sont dites brechaines. Beaucoup de personnes les regardent comme admirables pour le service, & comme très - impropres pour le haras; d'autres au contraire les apprécient pour le haras, & les rejettent pour le service. On peut placer ces idées différentes & ces opinions opposées, dans le nombre des erreurs qui, jusqu'à présent, ont infecté la science du cheval.

La troisieme classe renferme enfin les dents qui sont situées antérieurement, & qui sont au nombre de douze, six à chaque mâchoire: leur usage est de tirer le fourrage & de brouter l'herbe, pour ensuite ce fourrage être porté sous les molaires qui, ainsi que je l'ai dit, le broyent & le triturent: aussi ces dents antérieures ont - elles bien moins de force que les autres, & sont - elles bien plus éloignées du centre de mouvement.

L'ordre, la disposition des dents dans l'animal, n'est pas moins merveilleuse que leur arrangement dans l'homme: elles sont placées de maniere que les deux mâchoires peuvent se joindre, mais non pas par - tout en même tems, afin que l'action de tirer & de brouter, & celle de rompre & de triturer, soient variées selon le besoin & la volonté. Lorsque les dents molaires se joignent, les dents antérieures de la mâchoire supérieure avancent en - dehors; elles couvrent, elles outre - passent en partie celles de la mâchoire inférieure qui leur répondent; & quand les extrémités ou les pointes des dents antérieures viennent à se joindre, les molaires demeurent écartées.

Les unes & les autres ont, de même que toutes les parties du corps de l'animal, leur germe dans la matrice, & celles qui succedent à d'autres ne sont pas nouvelles; car elles étoient formées, quoiqu'elles ne parussent point. Séparez les mâchoires du foetus du cheval, vous y trouverez les molaires, les crochets, & les antérieures encore molles, distinguées par un interstice osseux, & dans chacune un follicule muqueux & tenace, d'où la dent sortira. Séparez encore ce rang de dents, vous en trouverez sous les antérieures un second, composé de celles qui sont destinées à remplacer celles qui doivent tomber; je dis sous celui des antérieures, car les crochets & les molaires ne changent point. Les dents sont donc molles dans leur origine; elles ne paroissent que comme une vessie membraneuse encore tendre & garnie à l'extérieur d'une humeur muqueuse: cette vessie abonde en vaisseaux sanguins & nerveux; elle se durcit dans la suite par le desséchement de la matrice plâtreuse qui y aborde sans cesse, c'est ce qui fait le corps de la dent. La substance muqueuse, que j'ai dit être à l'extérieur, devient encore plus compacte par sa propre nature, & forme ce que l'on appelle l'émail.

Les dents antérieures du cheval different de celles de l'homme, en ce que cette petite vessie, qui dans nous est close & fermée en - dessus, est au contraire ouverte dans l'animal, ce qui fait que la cavité de la dent qui ne paroît point dans l'homme, parce qu'elle est intérieure, paroît au - dehors dans le cheval. C'est cette même cavité qui s'efface avec l'âge, dans laquelle on apperçoit, tant que l'animal est jeune, une espece de tache noire que l'on nomme germe de feve, & que les maquignons veulent imiter en contre - marquant l'animal.

L'origine de ce germe de féve ne peut être ignorée: la cavité de la dent est remplie par l'extremité des vaisseaux qui lui appartiennent; or dès que l'air aura pénétré dans cette cavité, il desséchera la superficie de ces mêmes extrémités; il la réduira, il la noircira, & delà cette sorte de tache connue sous le nom de germe de feve.

Prenons à présent un poulain dès sa naissance: il n'a point de dents. Quelques jours après qu'il est né, il en perce quatre sur le devant de la mâchoire, [p. 446] deux dessus & deux dessous; peu de tems ensuite, il en pousse quatre autres situées à chaque côté des premieres qui lui sont venues, deux dessus & deux dessous; enfin à trois ou quatre mois, il lui en pousse quatre autres situées à chaque côté des huit premieres, deux dessus & deux dessous; de façon qu'alors on apperçoit douze dents de lait à la partie intérieure de la bouche du cheval.

On les distingue des dents du cheval fait, en ce que celles - ci sont larges, plates, & rayées sur - tout depuis leur sortie des alvéoles, c'est - à - dire depuis le cou de la dent jusqu'à la table, tandis que les autres sont petites, courtes, & blanches. M. de Soleysel, & presque tous les auteurs, leur ont suppolé une marque plus sensible & plus distincte: ils ont prétendu qu'elles n'ont point de cavité: ce fait est absolument faux; elles en ont une comme celles du cheval, & cette erreur seroit très - capable d'égarer ceux qui chercheront à apprendre la connoissance de l'âge d'après leur système, puisqu'il s'ensuivroit qu'en considerant la bouche d'un poulain, toutes les dents étant creuses, ils s'imagineroient que l'animal auroit cinq ans, tandis qu'il n'en auroit pas trois.

Ces douze dents de lait subsistent sans aucun changement, jusqu'à ce que le poulain ait atteint l'âge de deux ans & demi ou trois ans. Pendant cet espace de tems, on ne peut donc distinguer par la dentition le poulain d'un an, d'avec celui qui en aura deux.

On ne sauroit trop se récrier sur la négligence que l'on a apporté jusqu'à présent, même à l'égard des choses qui pouvoient nous conduire aux connoissances les plus triviales & les plus simples. Celles de dents ne demandoient que des yeux, des observations de fait, & non une étude pénible, abstraite & sérieuse. On s'est cependant contenté d'une inspection legere, d'un examen peu refléchi; ensorte que l'on voit très - communément des écuyers qui s'honorent du titre de connoisseurs, ne se rapporter en aucune façon les uns & les autres sur l'âge de l'animal, & qu'il nous est totalement impossible de discerner avec certitude & avec précision, un poulain d'une année, dont la constitution sera sorte & bonne, d'avec un poulain de deux années, dont la constitution seroit foible & délicate.

Il est vrai qu'on a eu recours à cet effet aux poils & aux crins, mais & ces objets & ces guides sont peu sûrs. Le poulain d'un an, dit - on, a toûjours le poil comme de la bourre; il est frisé comme celui d'un barbet. Ses crins, soit de l'encolure, soit de la queue, ressemblent à de la filasse, tandis que les crins & le poil du poulain de deux ans, ne different point de ceux du cheval: or comment s'appuyer & s'étayer sur cette remarque, qui ne détermine d'ailleurs rien de fixe & de juste, sur - tout si nous considérons que les crins d'un cheval de cinq, six, sept, huit années, plus ou moins, seront tels qu'on nous les dépeint dans le poulain d'un an, si l'animal travaille continuellement à l'ardeur du Soleil, comme les chevaux de riviere, & s'il est mal soigné, mal nourri, mal pansé, mal peigné?

Il importeroit néanmoins beaucoup de connoître l'âge du poulain depuis sa naissance jusqu'à deux ans & demi, trois ans; la raison du non - usage que l'on en fait dans cet intervalle de tems, ne sauroit autoriser notre ignorance sur ce point. Premierement, on peut vendre un poulain d'une année, qui aura bien profité, pour un poulain de deux ans. Secondement, qu'un maquignon de mauvaise foi arrache à un poulain de cette espece huit dents de lait, les dents de cheval, qui doivent leur succéder, se montreront bientôt, & on prendra ce poulain d'un un & demi, deux ans, pour un poulain de quatre ans. Si l'on avoit attention au contraire à la marque des dents de lait, celles du coin subsistant toûjours, nous sauveroit de l'erreur dans la quelle on veut nous induire, & du piége que notre impéritie occasionne & favorise. On objectera peut - être qu'il n'est pas possible d'y tomber, & d'acheter un poulain d'un an & demi ou deux ans, pour un poulain de quatre années, parce que dès - lors les crochets de dessous devroient avoir poussé; mais il sera facile de répondre, en premier lieu, s'il s'agit d'une jument, qui ordinairement n'a pas de crochets, comment se garantir de la fraude? En second lieu, il est des chevaux qui n'en ont point: il est vrai que le cas est rare. En troisieme lieu, les crochets poussent à trois ans & demi, quatre ans, & la dent de quatre ans peut les devancer. Enfin, ne voit - on pas des marchands de chevaux frapper adroitement la gencive à l'endroit où le crochet doit percer; de maniere qu'à la suite des petits coups qu'ils ont donnés, il survient une dureté qu'ils présentent comme une preuve que le crochet est prêt à sortir. Il faudroit donc nécessairement, pour éviter d'être trompé, suivre les dents de lait comme nous suivons celles du cheval: elles sont creuses, elles ont le germe de féve; & par les remarques que l'on feroit, on se mettroit à l'abri de toute surprise & de tout détour. J'avois prié quelques inspecteurs des haras de se livrer à des observations aussi faciles, je ne sai quel a été le résultat de leurs recherches; on ne sauroit trop les inviter à en faire part au public.

Quoi qu'il en soit, si l'on fait attention au tems de la chûte de ces dents, on verra qu'à l'âge de deux ans & demi, trois ans, celles qui sont situées à la partie antérieure de la bouche, deux dessus & deux dessous, font place à quatre autres que l'on nomme les pinces; ainsi à deux ans & demi, trois ans, le poulain a quatre dents de cheval & huit dents de lait.

A trois ans & demi, quatre ans, les quatre dents de lait placées à chaque côté des pinces, deux dessus & deux dessous, tombent, & font place à quatre autres qui se nomment les mitoyennes, parce qu'elles sont situées entre les pinces & les coins; de façon qu'à trois ans & demi, quatre ans, le poulain a huit dents de cheval & quatre dents de lait.

Enfin à quatre ans & demi, cinq ans, les quatre dents de lait qui lui restoient, deux dessus & deux dessous, à chaque côté des mitoyennes, tombent encore, & font place à quatre autres que l'on appelle les coins; ensorte qu'à quatre ans & demi, cinq ans, l'animal a tout mis, c'est - à - dire les pinces, les mitoyennes, & les coins; & perdant dèslors le nom de poulain, il prend celui de cheval. Du reste, je ne fixe point d'époque certaine & de tems absolument fixe; je ne me fonde que sur un terme indécis d'une année ou d'une demi - année, parce que ce changement n'a pas lieu dans un espace déterminément limité. Il est des chevaux qui mettent les dents plûtôt, d'autres plûtard; les premiers auront eu une nourriture dure, solide & ferme, telle que la paille, le foin, &c. les autres en auront une molle, telle que l'herbe: il est cependant assûré, en général, qu'à deux ans & demi l'animal met les pinces.

Les douze dents antérieures ne sont pas les seuls indices de son âge, les crochets nous l'annoncent aussi; ils ne sont précédés d'aucune dent, & ne succedent par conséquent à aucune autre. Ceux de la mâchoire inférieure percent à trois ans & demi, quatre ans; ceux de la mâchoire supérieure, à quatre ans, quatre ans & demi. Dès qu'ils percent, ils sont aigus, ils sont tranchans; & à mesure qu'ils croissent, on apperçoit deux cannelures dans la partie qui est du côté du dedans de la bouche; cannelure qui s'efface dans la suite, & qui ne subsiste pas toûjours. Il arrive quelquefois cependant que les cro<pb->

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