ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"286"> se trouvoit gênée, négligerent quelquefois d'avoir égard aux expectatives que le pape accordoit sur eux.

Alors les papes, qui commençoient à étendre leur pouvoir, changerent les prieres en commandemens; & aux lettres monitoriales qu'ils donnoient d'abord seulement, ils en ajoûterent de préceptoriales, & enfin y en joignirent même d'exécutoriales, portant attribution de jurisdiction à un commissaire pour contraindre l'ordinaire à exécuter la grace accordée par le pape, ou pour conférer, au refus de l'ordinaire; & pour le contraindre on alloit jusqu'à l'excommunication: cela se pratiquoit dès le xij. siecle. Etienne, évêque de Tournai, fut nommé par le pape, exécuteur des mandats ou expectatives adressés au chapitre de S. Agnan, & il déclara nulles les provisions qui avoient été accordées par ce chapitre au préjudice des lettres apostoliques.

Les expectatives s'accordoient si facilement à tous venans, que Grégoire IX. fut obligé en 1229 d'y insérer cette clause, si non scripsimus pro alio. Il régla aussi que chaque pape ne pourroit donner qu'une seule expectative dans chaque église. Ses successeurs établirent ensuite l'usage de révoquer au commencement de leur pontificat, les expectatives accordées par leurs prédécesseurs, afin d'être plus en état de faire grace à ceux qu'ils voudroient favoriser.

L'usage des expectatives & des reserves ne s'étendit pas d'abord sur les bénéfices électifs, mais seulement sur ceux qui étoient à la collation de l'ordinaire; mais peu - à - peu les papes s'approprierent de diverses façons la collation de presque tous les bénéfices.

La facilité avec laquelle les papes accordoient ces expectatives, fut cause que la plus grande partie des diocèses devint deserte, parce que presque tous les clercs se retiroient à Rome pour y obtenir des bénéfices.

La pragmatique sanction ou ordonnance qui fut publiée par S. Louis en 1268, abolit indirectement les expectatives & mandats apostoliques, en ordonnant de conserver le droit des collateurs & des patrons. Quelques - uns ont voulu révoquer en doute l'authenticité de cette piece, sous prétexte qu'elle n'a commencé à être citée que dans le xvj. siecle; mais elle paroît certaine, & en effet elle a été comprise au nombre des ordonnanees de S. Louis dans le recueil des ordonnances de la troisieme race, qui s'imprime au louvre par ordre du Roi.

Quelque tems après saint Louis, on se plaignit en France des expectatives & des mandats; le célebre Durant, évêque de Mende, les mit au nombre des choses qu'il y avoit lieu de réformer dans le concile général: cependant celui qui fut assemblé à Vienne en 1311, n'eut aucun égard à cette remontrance, & les papes continuerent de disposer des bénéfices, comme ils faisoient auparavant.

L'autorité des fausses decrétales, qui s'accrut beaucoup sous Clément V. & Boniface VIII. contribua encore à multiplier les graces expectatives.

Mais dans le tems que les mandats & les reserves étoient ainsi en usage, les papes en accordoient ordinairement à ceux qui étudioient dans les universités. Boniface VIII. conféra souvent des bénéfices aux gens de Lettres, ou leur accorda des expectatives pour en obtenir.

L'université de Paris envoya elle - même en 1343 au pour Clément VI. la liste de ceux de ses membres auxquels elle souhaitoit que le pape accordât de ces graces.

Pendant le tenesme qui partagea l'Eglise depuis la mort de Grégoire XI. les François s'étant soustraits à l'autorité des papes, de l'une & de l'autre obédience, firent plusieurs réglemens contre les reserves, les expectatives & les mandats apostoliques. Il y a entr'autres des lettres de Charles VI. données à Paris le 7 Mai 1399, qui portent qu'en conséquence de la soustraction de la France à l'obédience de Benoît XIII. on pourvoiroit par élection aux bénéfices électifs; & que les ordinaires conféreroient ceux qui étoient de leur collation, sans avoir égard aux graces expectatives données par Clément VII. & par Benoît XIII. & par leurs prédécesseurs.

Mais ces réglemens ne furent exécutés que pendant cette séparation, qui ne fut pas de longue durée; & l'expectative des gradués étoit si favorablement reçùe en France, que l'assemblée des prélats françois, tenue en 1408, s'étant soustraite à l'obédience des deux papes, ordonna en même tems que l'on conféreroit des bénéfices à ceux qui étoient compris dans la liste de l'université.

Le concile tenu à Basle en 1438, révoqua toutes les graces expectatives, laissant seulement au pape la faculté d'accorder une fois en sa vie un mandat pour un seul bénéfice, dans les églises où il y a plus de dix prébendes, & deux mandats, dans les églises où il y a cinquante prébendes ou plus. Il ordonne aussi de donner la troisieme partie des bénéfices à des gradués, docteurs, licentiés ou bacheliers dans quelque faculté. C'est là l'origine du droit des gradués; qu'on appelle aussi expectative des gradués, parce qu'en vertu de leurs grades ils requierent d'avance le premier bénéfice qui viendra à vaquer. Voyez Gradué.

La pragmatique sanction faite à Bourges dans la même année, abolit entierement les graces expectatives, & rétablit les élections.

Mais par le concordat passé entre Léon X. & François I. on renouvella le réglement qui avoit été fait au concile de Basle, par rapport aux expectatives & mandats apostoliques.

Depuis, le concile de Trente a condamné en général toutes sortes de mandats apostoliques & de lettres expectatives, même celles qui avoient été accordées aux cardinaux.

Il ne reste plus en France de graces expectatives que par rapport aux gradués, aux indultaires, aux brevetaires de joyeux avenement, de serment de fidélité, & de premiere entrée: il faut néanmoins excepter l'église d'Elna, autrement de Perpignan, dans laquelle le pape donne à des chanoines encore vivans des coadjuteurs, sub expectatione futura prabenda; mais cette église est du clergé d'Espagne, & ne se conduit pas selon les maximes du royaume.

La disposition du concile de Trente, qui abolit nommément les expectatives accordées aux cardinaux, jointe à l'abrogation génerale, a fait douter si le concile ne comprenoit pas les souverains aussi bien que les cardinaux; mais les papes & la congrégation du concile ont déclaré le contraire en faveur des empereurs d'Allemagne, en leur conservant le droit de présenter à un bénéfice de chaque collateur de leur dépendance, qui est ce que l'on appelle droit de premiere priere.

Cet usage a passé d'Allemagne en France dans le xvj. siecle, & Henri III. par des lettres patentes du 9 Mars 1577, vérifiées au grand - conseil, mit les brevets de joyeux avenement au nombre des droits royaux. Voyez Joyeux Avenement.

Les brevets de joyeux avenement sont des especes de mandats par lesquels le roi nouvellement parvenu à la couronne, ordonne à l'évêque ou au chapitre qui confere les prébendes de l'église cathédrale, de conféret la premiere dignité ou la premiere prébende de la cathédrale qui vaquera, à un clerc capable qui est nommé par le brevet du roi.

L'indult des officiers du parlement de Paris est aussi une espece de mandat, par lequel le roi, en vertu du pouvoir qu'il a reçû du saint siége, nomme un clerc, officier ordinaire du parlement de Paris, ou un autre clerc capable, sur la présentation de l'offi<pb-> [p. 287] cier du parlement à un collateur du royaume, ou à un patron ecclésiastique, pour qu'il dispose en sa faveur du premier bénéfice qui vaquera à sa collation ou à sa présentation.

L'usage des mandats accordés par le pape aux officiers du parlement de Paris sur la recommandation des officiers de cette compagnie, commença dès la fin du xiij. siecle: on voit un rôle de ces nominations dès l'an 1305. Benoît XII. Boniface IX. Jean XXIII. & Martin V. donnerent aux rois de France des expectatives pour les officiers du parlement: ce droit se regle présentement suivant les bulles de Paul III. & de Clément IX. Voyez Indult.

Les brevetaires de serment de fidélité, dont le droit a été établi par une déclaration du dernier Avril 1599, vérifiée au grand - conseil, sont encore des expectans; le brevet de serment de fidélité étant de même une espece de mandat ou grace expectative, par lequel le roi ordonne au nouvel évêque, apres qu'il lui a prêté serment de fidélité, de conterer la premiere prébende de l'église cathédrale à sa collation, qui vaquera par mort, au clerc capable d'en être pourvû, qui est nommé par le brevet. Voyez Serment de Fidélité.

Enfin nos rois sont en possession immémoriale de conférer par forme d'expectative une prébende, après leur premiere entrée dans les églises dont ils sont chanoines. Le parlement confirme ce droit, comme étant fondé sur des traités particuliers ou sur des usages fort anciens.

Quelques évêques joüissent d'un droit semblable à leur avenement à l'épiscopat, notamment l'évêque de Poitiers.

Sur les graces expectatives on peut voir Rebuffe, prax. benef part. I. de expectativo; Franc. Marc, tome I. quest. 1100. & 1186; Chopin, de sacr. lib. I. tit. iij. n. 18. les traités faits par Joa. Staphileus, Ludovic. Gomesius, & Joan. Nic. Gimonteus. Voyez aussi les mem. du Clergé, premiere édit. tome II. part. II. tit. xj. les lors eccles. de d'Hericourt, part. I. chap. viij. & suiv. le recueil de jurispr. can. au mot Expert. (A)

EXPECTORANT (Page 6:287)

EXPECTORANT, adj. (Med. Thérap.) on désigne par cette épithete les remedes ou médicamens propres à faciliter, procurer, rétablir l'expectoration ordinaire, ou la toux, qui est l'expectoration violente. Voyez Expectoration, Toux.

Les expectorans peuvent être regardés par conséquent comme des purgatifs de la poitrine, qui servent à préparer les humeurs, dont l'excrétion doit se faire dans les voies de l'air pulmonaire; qui rendent ces humeurs (attachées aux parois de ces cavités, ou répandues dans les cellules, dans les ramifications des bronches) susceptibles d'être évacuées, jettées hors des poumons par le moyen de l'expectoration; qui excitent, qui mettent en jeu les organes propres à cette fonction.

Pour que les matieres excrémentitielles ou morbifiques, qui doivent être évacuées par les vaisseaux aériens, soient susceptibles de sortir aisément des conduits excrétoires, ou des cavités cellulaires bronchiques dans lesquelles on les conçoit extravasées, elles doivent avoir une consistence convenable: lorsqu'elles sont trop épaisses, trop visqueuses, elles sortent difficilement des canaux, qu'elles engorgent avant leur excrétion; ou, lorsqu'elles en sont forties, qu'elles sont répandues dans les cellules & dans les ramifications des bronches, qu'elles sont adhérentes aux parois de ces vaisseaux aériens de la trachée artere même, elles résistent à être enlevées par l'impulsion de l'air dans les efforts de l'expectoration, & même de la toux: il est donc nécessaire d'employer des moyens qui donnent à ces humeurs la fluidité qui leur manque, en les délayant, en les atténuant au point de rendre leur excrétion ou leur expulsion faciles.

On peut remplir ces indications par des médicamens appropriés, employés sous différentes formes, comme celles de bouillons, d'aposemes, de tisannes, de juleps: mais comme aucun des remedes ainsi composés, n'est susceptible d'être porté immédiatement dans les vaisseaux aériens des poumons, & qu'ils ne produisent leurs effets qu'en agissant comme tous les altérans, c'est - à - dire entant qu'ils sont portés dans la masse des humeurs, & qu'ils en changent les qualités; on ne peut pas regarder ces remedes comme expectorans proprement dits; on ne doit donner exactement ce nom qu'à ceux, qui, étant retenus dans la bouche, dans le gosier, tels que les loochs, les tablettes, peuvent par leurs exhalaisons fournir à l'air (qui passe par ces cavités avant d'entrer dans les poumons) des particules dont il se charge, & qu'il porte immédiatement dans les cavités de ce viscere, où elles agissent par leurs différentes qualités sur les parois de ces cavités, ou sur les matieres qui y sont extravasées: les vapeurs humides, émollientes, résolutives ou irritantes, portées dans les poumons, avec l'air inspiré, agissent à - peu - près de la même maniere pour favoriser l'expectoration.

Les autres remedes que l'on employe comme expectorans, en les faisant parvenir aux poumons par les voies du chyle, ne doivent être regardés comme purgatifs de ce viscere, que comme la décoction de tabac, la teinture de coloquinte (qui purgent quoique seulement appliqués extérieurement), sont placées parmi les purgatifs des intestins: on ne peut rendre raison de l'opération des remedes qui ne servent à l'expectoration, qu'après avoir été mêlés auparavant dans la masse des humeurs, qu'en leur supposant une propriété spécifique, une analogie qui les rend plus susceptibles de développer leur action dans les glandes ou les cavités bronchiques, que dans les autres parties du corps (voyez Médicament); à moins que l'on ne dise que les humeurs, qui doivent faire la matiere de l'expectoration, ne font que participer aux changemens que les remedes, dont il s'agit, ont opéré dans toute la masse des fluides: mais la plûpart des remedes employés comme expectorans, produisent des effets trop prompts, pour que l'on puisse les attribuer ainsi à une opération générale.

On ne doit pas confondre, ainsi qu'on le fait souvent, les remedes béchiques avec les expectorans, attendu que ceux - là sont particulierement destinés à calmer l'irritation, qui cause la toux, lorsqu'elle est trop violente; qu'elle n'est pas nécessaire pour favoriser l'évacuation des matieres excrémentitielles ou morbifiques des poumons; & qu'elle ne consiste qu'en efforts inutiles & très - fatiguans, occasionnés par cette irritation excessive. Les béchiques qui sont indiqués dans ce cas, ne sont pas employés pour procurer l'expectoration, mais au contraire pour corriger le vice qui excite mal - à - propos le jeu de cette fonction, puisqu'il l'excite sans l'effet pour lequel elle doit être exercée. Les béchiques, en général, agissent en incrassant, en émoussant les humeurs trop atténuées, & dont l'acrimonie piquante irrite la tunique nerveuse qui tapisse les voies de l'air dans les poumons; au lieu que les expectorans produisent leurs effets en incisant, en divisant les mucosités pulmonaires, en irritant les vaisseaux qui en font l'excrétion, les organes qui en operent l'expulsion: ils sont même quelquefois employés à cette derniere fin, de maniere à agir seulement aux environs de la glotte, dont la sensibilité met en jeu tous les instrumens de l'expectoration laborieuse, c'est - à - dire de la toux; dans ce cas on peut comparer les expectorans aux suppositoires: Hippocrate connoissoit l'usage de cette espece de remedes propres à procurer l'évacuation des matieres morbifiques contenues dans les poumons. Dans le cas d'abcès de ce viscere, il conseil<pb->

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