ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS
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lut gras des Chimistes, qui ne fourniroient à l'air aucune
humidité nouvelle, seroient excellens pour cet
usage: on auroit eu soin de placer sous la cloche une
certaine quantité d'alkali fixe du tartre bien sec, &
dont on connoîtroit le poids. On sait que l'air ayant
moins d'affinité avec l'eau que cet alkali, celui - ci se
charge peu - à - peu de l'humidité qui étoit dans l'air:
si donc, en observant de faire l'expérience dans une
chambre, dont la température soit maintenue égale,
afin que les variations d'expansibilité, provenantes de
la chaleur, ne produisent aucun mécompte; si, à
mesure que l'alkali absorbe une certaine quantité
d'eau, le barometre hausse ou baisse, on en conclura
que l'air en perdant l'eau qui lui étoit unie,
devient plus ou moins expansible; & l'on pourra
toûjours, en pesant l'alkali fixe, connoître par l'augmentation
de son poids le rapport de la quantité
d'eau que l'air a perdue au changement qui sera arrivé
dans son expansibilité: il faudra faire l'expérience
en donnant à l'air différens degrés de chaleur,
pour s'assûrer si le plus ou le moins d'eau augmente ou
diminue l'expansibilité de l'air dans un même rapport,
quelle que soit la chaleur; & d'après ces différens
rapports constamment observés, il sera aisé d'en construire
des tables: l'exécution de ces tables peut seule
donner la connoissance exacte d'un des élémens qui
entre dans la théorie des variations du barometre;
& dès - lors il est évident que ce travail est un préalable
nécessaire à la recherche de cette théorie.
Des usages de l'expansibilité, & de la part qu'elle a
dans la production des plus grands phénomenes de la
nature. 1°. C'est par l'expansibilité que les corps s'élevent
dans la distillation & dans la sublimation; &
c'est l'inégalité des degrés de chaleur, nécessaires
pour l'expansibilité des différens principes des mixtes,
qui rend la distillation un moyen d'analyse chimique.
Voyez Distillation.
2°. C'est l'expansibilité qui fournit à l'art & à la
nature les forces motrices les plus puissantes & les
plus soudaines. Indépendamment des machines où
l'on employe la vapeur de l'eau bouillante (voyez
l'article Eau); l'effort de la poudre à canon (voyez
Poudre à canon), les dangereux effets de la moindre
humidité qui se trouveroit dans les moules où
l'on coule les métaux en fonte, les volcans & les
tremblemens de terre, & tout ce qui, dans l'art & dans
la nature, agit par une explosion soudaine dans toutes
les directions à la fois, est produit par un fluide
devenu tout - à - coup expansible. On avoit autrefois
attribué tous ces effets à l'air comprimé violemment,
puis dilaté par la chaleur: mais nous avons vû plus
haut, que l'air renfermé dans un tube de verre rougi
au feu, n'augmente de volume que dans le rapport
de trois à un; or une augmentation beaucoup
plus considérable, seroit encore insensible en comparaison
de la prodigieuse expansion que l'eau peut
recevoir. L'air que le feu dégage des corps, dans lesquels
il est combiné, pourroit produire des effets un
peu plus considérables; mais la quantité de cet air
est toûjours si petite, comparée à celle de l'eau qui
s'éleve des corps au même degré de chaleur, qu'on
doit dire avec M. Rouelle, que dans les différentes
explosions, attribuées communément à l'air par les
Physiciens, si l'air agit comme un, l'eau agit comme
mille. La promptitude & les prodigieux effets de ces
explosions ne paroîtront point étonnans, si l'on
çonsidere la nature de la force expansive & la maniere
dont elle agit. Tant que cette force n'est employée
qu'à lutter contre les obstacles qui retiennent
les molécules des corps appliquées les unes contre
les autres, elle ne produit d'autre effet sensible,
qu'une dilatation peu considérable; mais dès que
l'obstacle est anéanti, par quelque cause que ce soit,
chaque molécule doit s'élancer avec une force éga<cb->
le à celle qu'avoit l'obstacle pour la retenir, plus le
petit degré de force, dont la force expansive a dû
surpasser celle de l'obstacle: chaque molécule doit
donc recevoir un mouvement local d'autant plus rapide,
qu'il a fallu une plus grande force pour vaincre
l'obstacle; c'est cet unique principe qui détermine
la force de toutes les explosions: ainsi plus la chaleur
nécessaire à la vaporisation est considérable, & plus
l'explosion est terrible; chaque molécule continuera
de se mouvoir dans la même direction avec la même
vîtesse, jusqu'à ce qu'elle soit arrêtée ou détournée par
de nouveaux obstacles; & l'on ne connoît point les
bornes de la vîtesse que les molécules des corps peuvent
recevoir par cette voie au moment de leur expansion.
L'idée d'appliquer cette réflexion à l'éruption
de la lumiere & à sa prodigieuse rapidité, se
présente naturellement. Mais j'avoue que j'aurois
peine à m'y livrer, sans un examen plus approsondi;
car cette explication, toute séduisante qu'elle
est au premier coup - d'oeil, me paroît combattue par
les plus grandes difficultés. Voyez Inflammation
& Lumiere.
3°. C'est l'expansibilité de l'eau qui, en soûlevant
les molécules de l'huile embrasée, en les divisant,
en multipliant les surfaces, multiplie en même raison
le nombre des points embrasés à la fois, produit
la flamme, & lui donne cet éclat qui la caractérise.
Voyez Flamme.
4°. L'inégale expansibilité produite par l'application
d'une chaleur différente aux différentes parties
d'une masse de fluide expansible, rompt par - là même
l'équilibre de pesanteur entre les colonnes de ce
fluide, & y forme différens courans: cette inégalité
de pesanteur entre l'air chaud & l'air froid, est le
fondement de tous les moyens employés pour diriger
les mouvemens de l'air à l'aide du feu (voyez
Fourneau & Vfntilateur à feu): elle est aussi
la principale cause des vents. Voyez Vent.
5°. Cette inégalité de pesanteur est plus considérable
encore, lorsqu'un fluide, au moment qu'il devient
expansible, se trouve mêlé avec un fluide dans
l'état de liquidité: de - là l'ébullition des liquides par
les vapeurs, qui se forment dans le fond du vase qui
les contient; de - là l'effervescence qui s'observe presque
toûjours dans les mélanges chimiques au moment
où les principes commencent à agir l'un sur l'autre
pour se combiner, soit que cette effervescence n'ait
d'autre cause que l'air qui se dégage d'un des deux
principes ou de tous les deux, comme il arrive le
plus souvent (voyez Effervescence), soit qu'un
des deux principes soit lui - même en partie réduit en
vapeur dans le mouvement de la combinaison, comme
il arrive, suivant M. Rouelle, à l'esprit de nitre,
dans lequel on a mis dissoudre du fer ou d'autres
matieres métalliques. De - là les mouvemens intestins,
les courans rapides qui s'engendrent dans les
corps actuellement en fermentation, & qui par l'agitation
extrème qu'ils entretiennent dans toute la
masse, sont l'instrument puissant du mélange intime
de toutes ses parties, de l'atténuation de tous les
principes, des décompositions & des recompositions
qu'ils subissent.
6°. Si le liquide avec lequel se trouve mêlé le fluide
devenu expansible, a quelque viscosité, cette
viscosité soûtiendra plus ou moins long - tems l'effort
des vapeurs, suivant qu'elle est elle - même plus
ou moins considérable: la totalité du mélange se
remplira de bulles, dont le corps visqueux formera
les parois, & l'espace qu'elle occupe s'augmentera
jusqu'à ce que la viscofité des parties soit vaincue
par le fluide expansible; c'est cet effét qu'on appelle
gonflement. Voyez Gonflement.
7°. Si tandis qu'un corps expansible tend à occuper
un plus grand espace, le liquide dont il est envi<pb->
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ronné, acquiert une consistence de plus en plus
grande, & parvient enfin à opposer par cette consistance,
un obstacle insurmontable à l'expansion du
corps en vapeur; le point d'équilibre entre la résistance
d'un côté & la force expansive de l'autre, déterminera
& fixera la capacité & la figure des parois,
formera des ballons, des vases, des tuyaux, des ramifications
ou dures ou flexibles, toûjours relativement
aux différentes altérations de l'expansibilité
d'un côté, de la consistance de l'autre; ensorte que
ces vaisseaux & ces ramifications s'étendront & se
compliqueront à mesure que le corps expansible s'étendra
du côté où il ne trouve point encore d'obstacle,
en formant une espece de jet ou de courant, &
que le liquide, en se durcissant à - l'entour, environnera
ce courant d'un canal solide: il n'importe à
quelle cause on doive attribuer ce changement de
consistance, ou cette dureté survenue dans le liquide,
dont le corps expansible est environné, soit au
seul refroidissement (voyez Verrerie), soit à la crystallisation
de certaines parties du liquide (voyez Végétation chimique), soit à la coagulation, ou
à ces trois causes réunies, ou peut - être à quelqu'autre
cause inconnue. Voyez Génération & Molécules organiques.
8°. Il résulte de tout cet article, que presque tous
les phénomenes de la physique sublunaire sont produits
par la combinaison de deux forces contraires;
la force qui tend à rapprocher les parties des corps
ou l'attraction, & la chaleur qui tend à les écarter,
de même que la physique céleste est toute fondée sur
la combinaison de la pesanteur & de la force projectile: j'employe cette comparaison d'après M. Needham, qui a le premier conçu l'idée d'expliquer les
mysteres de la génération par la combinaison des
deux forces attractive & répulsive (voyez les observations miercscopiques de M. Needham, sur la composition
& la décomposition des substances animales &
végétales). Ces deux forces se balançant mutuellement,
se mesurent exactement l'une l'autre dans le
point d'équilibre, & il suffiroit peut - être de pouvoir
rapporter une des deux à une mesure commane & à
une échelle comparable, pour pouvoir soû nettre au
calcul la physique sublunaire, comme Newton y a
soûmis la physique céleste. L'expansibilité de l'air nous
en donne le moyen, puisque par elle nous pouvons
mesurer la chaleur depuis le plus grand froid jusqu'au plus grand chaud connu, en comparer tous
les degrés à des quantités connues, c'est - à - dire à des
poids, & par conséquent découvrir la véritable proportion
entre un degré de chaleur & un autre degré.
Il est vrai que ce calcul est moins simple qu'il ne paroît
au premier coup - d'oeil. Ce n'est point ici le lieu
d'entrer dans ce détail. Voyez Température &
Thermometre. J'observerai seulement, en finissant,
que plusieurs physiciens ont nié la possibilité
de trouver exactement cette proportion, quoique M.
Amontons ait depuis long - tems mesuré la chaleur par
les différens poids que soûtient le ressort de l'air. Cela prouve que bien des vérités sont plus près de
nous, que nous n'osons le croire. Il y en a dont on
dispute, & qui sont déjà démontrées; d'autres qui
n'attendent pour l'être qu'un simple raisonnement.
Peut - être que l'art de rapprocher les observations
les unes des autres, & d'appliquer le calcul aux phénomenes,
a plus manqué encore aux progrès de la
Physique, que les observations mêmes.
EXPANSION
(Page 6:285)
EXPANSION, s. f. en Physique, est l'action par
laquelle un corps est étendu & dilaté, soit par quelque
cause extérieure, comme celles de la raréfaction;
soit par une cause interne, comme l'élasticité.
Voy.
Dilatation, Raréfaction, Elasticité
Les corps s'étendent par la chaleur, c'est pourquoi
leurs pesanteurs spécifiques sont différentes,
suivant les différentes saisons de l'année. Voyez
Pesanteur spécifique, Eau
, &c. Voyez aussi Pyrometre & Extension. Voyez ci - dessus Expansibilité. Chambers.
Expansion
(Page 6:285)
Expansion, (Anat.) signifie prolongement, continuation; c'est ainsi que l'on dit expansion membraneust,
ligamenteuse, musculeuse: cette derniere répond
précisément au platysma myoïdès des Grecs.
C'est une idée très - physiologique de considérer toutes
les fibres du corps animal comme des expansions
d'autres fibres; ainsi les fibres du cerveau ne sont
que des développemens & des expansions des vaisseaux
sanguins qui y aboutissent. Les nerfs sont des
expansions des fibres du cerveau, & les fibres de tous
les vaisseaux sont à leur tour des expansions des dernieres
ramifications des nerfs. (g)
EXPECTANT
(Page 6:285)
EXPECTANT, adj. pris subst. (Jurisp.) est celui
qui attend l'accomplissement d'une grace qui lui est
dûe ou promise, tel que celui qui a l'agrément de la
premiere charge vacante, ou celui qui a une expectative
sur le premier bénéfice qui vaquera. Il y a
quelquefois plusieurs expectans sur un même collateur,
l'un en vertu de ses grades, un autre en vertu
d'un indult, un autre pour le serment de fidélité.
Voy.
Expectative, Gradué, Indult
, &c. (A)
EXPECTATIVE
(Page 6:285)
EXPECTATIVE, s. f. (Jurisp.) en matiere bénéficiale,
ou grace expectative, est l'espérance ou droit
qu'un ecclésiastique a au premier bénéfice vacant,
du nombre de ceax qui sont sujets à son expectative.
On ne connut point les expectatives tant que l'on
observa l'ancienne discipline de l'Eglise, de n'ordonner
aucun clerc sans titre: chaque clerc étant attaché
à son église par le titre de son ordination, &
ne pouvant sans cause légitime être tranféré d'une
église à unc autre, aucun d'entr'eux n'étoit dans le
cas de demander l'expectative d'un bénéfice vacant.
Il y eut en Orient dès le v. siecle quelques ordinations
vagues & absolues, c'est - à - dire faites sans
titre, ce qui fut défendu au concile de Chalcédoine,
& cette discipline fut conservée dans toute l'Eglise
jusqu'à la fin du xj. siecle; mais on s'en relâcha beaucoup
dans le xij. en ordonnant des clercs sans titre,
& ce fut la premiere cause qui donna lieu aux graces
expectatives & aux reserves; deux manieres de pourvoir
d'avance aux bénéfices qui viendroient à vaquer
dans la suite.
Adrien IV. qui tenoit le saint siége vers le milieu
du xij. siecle, passe pour le premier qui ait demandé
que l'on conférât des prébendes aux personnes qu'il
désignoit. Il y a une lettre de ce pape qui prie l'évêque
de Paris, en vertu du respect qu'il doit au successeur
du chef des apôtres, de conférer au chancelier
de France la premiere dignité ou la premiere prébende
qui vaqueroit dans l'église de Paris. Les successeurs
d'Adrien IV. regarderent ce droit comme
attaché à leur dignité, & ils en parlent dans les decrétales
comme d'un droit qui ne pouvoit leur être
contesté.
Les expectatives qui étoient alors usitées, étoient
donc une assûrance que le pape donnoit à un clerc,
d'obtenir un bénéfice lorsqu'il seroit vacant; par
exemple, la premiere prébende qui vaqueroit dans
une telle église catbédrale ou collégiale. Cette forme
de conférer les bénéfices vaeans ne fut introduite
que par degrés.
D'abord l'expectative n'étoit qu'une simple recommandation
que le pape faisoit aux prélats en faveur
des clercs qui avoient été à Rome, ou qui avoient
rendu quelque service à l'Eglise. Ces recommandations
furent appellées mandata de providendo, mandats
apostoliques, expectatives, ou graces expectatives.
Les prélats déférant ordinairement à ces sortes de
prieres, par respect pour le saint siége, elles devinrent
si fréquentes que les évêques, dont la collation
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